• Phobie or not phobie ?


     

    Phobie or not phobie ? Mais que font nos académiciens ?

    Cet été, le mot « phobie » a été plusieurs fois à la Une de l’actualité médiatique. Il y a eu en août et ce mois-ci encore, et dans les stades de foot, plusieurs manifestations « homophobes » orchestrées par quelques « Q.I d’huîtres »  dont je l’avoue, je comprends mal deux choses de la part des responsables du football français : 1 - Qu’elles aient pu engendrer une polémique stérile entre le Président de la Ligue de football et la ministre des Sports qui en étaient à se chamailler pour savoir si les matches devaient ou pas être arrêtés. 2 : Si je dis « stérile », c’est parce qu’il suffirait d’aller voir un peu ce que les anglais ont fait très efficacement pour combattre le hooliganisme et ainsi le problème de ces quelques abrutis vociférant des insanités ou brandissant des banderoles « homophobes » (ou racistes parfois) serait quasiment voire complètement circonscrit une fois pour toutes.

    Le deuxième cas m’a beaucoup plus interpellé. C’est celui du philosophe Henri Peña-Ruiz qui lors de l’université d’été de la France Insoumise a dit qu’on avait le droit d’être « islamophobe », suscitant ainsi une vive polémique dans les rangs du parti mais un peu partout aussi. Cette polémique m’a interpellé au point que j’ai dû lire au moins une bonne douzaine d’articles de grands journaux et magazines sur Internet pour tenter de comprendre pourquoi ? Peut-être suis-je idiot, mais je l’avoue, après avoir lu tous ces articles,  je n’avais toujours pas compris pourquoi cette simple phrase avait fait couler autant d’encre et suscité autant de réactions que je trouvais très souvent exagérées ? Bien que connaissant l’aspect très tabou de ce  sujet, j’en étais malgré tout à me dire « après tout dans un pays qui se prétend aussi laïque que le nôtre, pourquoi un droit aussi « basique » que celui-ci serait-il interdit ? » Et surtout, je me disais « depuis le 11 septembre 2001 et tout ce que nous avons vécu depuis au nom de l’islam, pourquoi n’aurait-on pas le droit d’avoir une crainte vis-à-vis de cette religion ? »  Alors, j’ai voulu creuser le sujet car bien évidemment je ne suis ni philosophe, ni journaliste ; sans doute pas aussi érudit ? ; mais peut-être plus « pragmatique » en ma qualité de citoyen lambda.

    En fait, tout réside dans la définition que l’on donne au mot « islamophobie ».

    Je ne sais pas quel est le niveau d’instructions nécessaire mais je suppose que beaucoup de personnes donnent au mot « phobie », du grec « phobos », la même signification que la mienne, c’est-à-dire  « la peur », « la crainte » ou « l’appréhension ». Les psychiatres, qui ont sans douté été à l’origine de l’utilisation de ce mot, y rajoutent les adjectifs « irraisonnée », « irrationnelle » « paranoïaque », mais ces mots font partie intégrante de leur métier et je ne partage pas toujours le fait qu’on les y accole presque systématiquement dans la définition. Ainsi, si on ne sait pas nager, on peut très bien, et avec raison, avoir peur  de l’eau, c’est-à-dire être « aquaphobe » sans pour autant que celle-ci soit paranoïaque ou irrationnelle. Il est vrai que si le nombre de mots avec le suffixe « phobie » est aussi important qu’il peut y avoir de peurs, force est d’avouer que ceux que je connais personnellement, je peux presque les compter sur les doigts d’une seule de mes mains. Je suis quasiment certain qu’il en est de même pour la plupart d’entre vous ? Parmi eux par exemple, je sais que la « claustrophobie » est la peur d’être enfermé dans un espace clos ou confiné, l’« arachnophobie » est la peur des araignées, la « cancérophobie » » est la peur d’être malade d’un cancer et je pourrais ainsi en citer que trois ou quatre autres de plus seulement dont j’ai la quasi-certitude d’une bonne définition. Pour moi, comme pour beaucoup de personnes, enfin je pense, il allait de soi que « l’islamophobie » était la peur ou la crainte de l’islam. Que nenni puisque selon la plupart des dictionnaires, dont le Larousse, l’islamophobie est « une hostilité envers l’islam » et « les musulmans » plus généralement. Or, on voit bien dans cette définition que si le mot « peur » a disparu, en réalité celle-ci est toujours sous-jacente mais elle a carrément changé de camp. Ce n’est plus vous qui avez peur de l’araignée mais l’araignée qui a peur de vous ! Vous n’avez plus peur de l’eau mais vous y êtes carrément « hostile ». Au point de ne jamais vous laver ou boire de ce liquide ? Je ne sais pas car je ne suis pas psychiatre ! Idem pour bien d’autres « phobies ». Avec cette définition, ce sont désormais les musulmans qui ont peur, et comme il n'y a pas de mot pour définir celui qui a peur de l'islam, on pourrait presque imaginer qu'il n'y a aucune raison à cela ! Ainsi, en panne totale de mot pour décrire cette peur, celui qui a vraiment peur n’a plus que l’hostilité ou la haine « à se mettre sous la dent ».

    Il allait de soi que j’avais tout faux !  En l’absence de mot, et donc étant complètement démuni, je ne partageais absolument pas, ni cette définition, ni cette façon de voir les choses. Pour moi l’athée, pour moi le baptisé incroyant, quelles raisons aurais-je d’être plus hostile ou plus haineux envers un musulman qu’envers un catholique pratiquant, un protestant, un bouddhiste, un juif ou un orthodoxe ? Aucune, car si je ne sais pas ce qu’est avoir la foi, je pense être suffisamment tolérant pour accepter que des personnes pensent différemment de moi, et surtout qu’ils aient la conviction que notre destin est guidé par une force supérieure qu’elles nomment « Dieu ». Pour moi, peu importe ce dieu, puisque ce dieu n’existe pas !  Comment pourrais-je être hostile envers une croyance et à des êtres fervents de celle-ci dont je pense qu’elle n’a pas de raison d’être ? Et ce d’autant s’ils vivent cette croyance dans la paix, la sérénité et dans un espace privé tranquille qui leur est propre ?

    Ce constat, une fois établi dans ma tête, et toujours avec pragmatisme, restait à savoir si j’avais des raisons valables d’avoir peur de l’islam ou des musulmans, c’est-à-dire le « droit d’être islamophobe », mais avec ma propre définition ? Celle d’une peur raisonnée ?

    Toutes ces questions tombaient d’autant mieux que j’avais encore quelques expériences toutes fraîches dans ma tête :

    La plus marquante s’était produite le dimanche 26 mai exactement, jour des élections européennes.

    Ce matin-là, Dany et moi avons prévu d’aller voter en fin de matinée. J’ai donc un peu de temps devant moi et pars faire mon loto foot dominical au tabac-presse. Avant de partir, Dany me dit « profites-en pour acheter des bananes ! ». Après mon loto, je file donc au supermarché tout proche, Leader Price pour leur faire un peu de pub, pour acheter les « fameuses » bananes réclamées par mon épouse. Alors que je suis occupé à comparer les prix et la qualité de bananes bio à celles qui ne le sont pas, j’entends parler arabe une première fois, puis une seconde fois et enfin une troisième fois, mais avec des voix et des tonalités bien différentes m’indiquant que les personnes qui parlent le sont aussi. Je lève la tête, et là, autour du rayon fruits et légumes, il y a 3 couples, d’âges bien différents, parlant l’arabe. Outre ce parler, les 3 couples ont en commun le fait que les trois femmes sont voilées et ont une longue robe (en tissu très épais pour les deux plus âgées) qui les couvrent du ras du cou jusqu’aux chaussures. Les hommes, eux, n’ont rien de particulier sur le plan vestimentaire mais les deux plus jeunes portent une copieuse barbe noire alors que le plus vieux a simplement une moustache grisonnante. Enfin, rien de très particulier les concernant et ce d’autant que la barbe est à la mode.  Il y a un couple d’une trentaine d’années, un autre ayant bien dépassé la cinquantaine et les derniers sont probablement des septuagénaires. Ils ne semblent pas se connaître et en tous cas, ni ils ne s’adressent la parole,  ni ne se regardent. Bien que très indécis, car si les bananes non bio sont très vertes mais moins chères, celles bio sont toutes petites et bien trop mûres et trop molles à mon goût. Je finis par prendre les premières en me disant qu’elles mûriront et file à la caisse. Il y a peu de monde dans le magasin, et pour être franc, il n’y a en réalité que les trois couples en question et moi, enfin selon la vision que j’ai de l’intérieur du magasin depuis la caisse. Je règle l’addition et à l’instant où je m’éloigne de la caisse, l’homme et la femme d’âge moyen arrivent à leur tour et je constate qu’ils parlent tous les deux parfaitement le français avec la caissière. Je sors du magasin avec dans ma tête bon nombre d’interrogations du style « je trouve qu’il y a de plus en plus de musulmans et de femmes voilées ? », « pourquoi parlent-ils l’arabe alors qu’ils ont fait le choix de vivre en France ? », « pourquoi les femmes s’obstinent-elles à se revêtir de la tête aux pieds, alors qu’il fait déjà très beau et très chaud et qu’une tenue plus légère leur serait obligatoirement plus confortable ? » « Cette façon d’être et d’agir n’est-elle pas la preuve d’une difficulté ou du refus de s’intégrer dans la société française ? »  Finalement, en enfourchant mon vélo pour rentrer chez moi, je me dis « arrêtes de penser à tout ça car tu es entrain de devenir « islamophobe », sachant qu’à l’instant où je me dis ça, le mot « phobe » n’a qu’une seule résonance, « la peur d’une islamisation trop importante de la France avec tout ce que cela engendre car force est de reconnaître que nos idées sont très souvent bien différentes et notamment le regard que nous avons de la femme». D’un autre côté, je sais aussi que la peur est très souvent la compagne de l’ignorance ou de l’incompréhension, voire des deux. Ici, c’est le cas car c’est une religion que je connais mal mais je crois savoir aussi qu’elle est très complexe. Preuves en sont les conflits permanents entre les sunnites et les chiites par exemple. Alors qu’ils sont censés défendre le même mot « islam », je n'ai jamais vraiment compris quelles étaient les bonnes raisons qui les séparaient.  Quand j’arrive chez moi avec mes bananes et sans doute parce que nous devons aller voter un peu plus tard, j’ai déjà oublié tout ça !

    Il faut dire qu’outre cette troublante coïncidence avec la vision de ces trois couples parlant l’arabe en un seul endroit très réduit, j’ai, en seulement quelques jours ou quelques semaines, été « confronté » à plusieurs femmes voilées et plus globalement à l’islam.

    Ainsi, la veille même des élections européennes, c’est-à-dire le samedi, j’ai appris en lisant un article qu’un parti ayant pour nom « Union des démocrates musulmans français » avait été retenu par le ministère de l’Intérieur pour se présenter au scrutin, constituant ainsi la 34eme liste. Au-delà de cet agrément étatique que je n’approuve pas ; et par le fait même que j’estime que la laïcité est un rempart pour notre démocratie, considérant que la religion et la politique ne doivent en aucun cas interférer ; de la même manière, je n’accepterais pas un parti chrétien, protestant, bouddhiste, orthodoxe ou juif se présentant à des élections françaises. Au-delà de cette réserve, ce qui m’a le plus troublé, ce sont les affirmations d’une femme musulmane appartenant à ce parti qui indiquait au journaliste qui l’interrogeait qu’elle ne trouvait pas de réponses à ses problèmes dans aucun des 33 autres partis. Alors bien sûr, et le journaliste ne lui ayant pas posé la question, je me demandais « mais quelles réponses attendait-elle au juste ? » « Que toutes les femmes françaises portent le voile comme elle le portait elle-même ? » « Que plus aucun français ne mange du porc ? »  « Que tous les français adoptent l’islam comme religion ? ». Non, franchement je ne comprenais pas ce qu’elle attendait alors qu’un choix immense d’autres partis avec des motivations et des programmes bien différents lui était offert ! « Cette réponse, n’était-ce pas plutôt un refus catégorique de nos principes sociétaux et républicains ? ». J’en étais quasiment convaincu.

    Quelques semaines auparavant et suite à un examen que je devais passer à l’hôpital, je me suis retrouvé avec deux très jeunes femmes voilées dans un ascenseur. Elles avaient une vingtaine d'années. A vrai dire, quand je suis entré dans l’ascenseur, j’étais tout seul et la porte était déjà entrain de se refermer quand elles sont arrivées. A cet instant, par élégance ou courtoisie, appelons cela comme on veut, je me suis précipité entre les deux portes pour qu’elles puissent entrer avant la fermeture totale et pour qu’elles n’aient pas à attendre un autre ascenseur. Là, ayant été cogné violemment par une des deux portes, et alors que je reculais déjà vers le fond de l’ascenseur en me tenant l’épaule pour les laisser entrer, les deux jeunes femmes se sont mises à parler l’arabe puis aussitôt à éclater de rire en me regardant. D’emblée, j’ai mis ça sur le compte de leur jeunesse mais comme elles continuaient de parler en arabe et à m’observer sans jamais baisser les yeux sauf pour se jeter des regards d’acquiescements partagés, j’ai très vite changé d’avis.  Pour parler franc, pendant toute la durée de ce petit voyage qui nous amenait du rez-de-chaussée vers le 4eme étage,  j’avais le vague sentiment qu’elles se foutaient de ma gueule, qu’elles étaient arrogantes et surtout j’étais plutôt choqué de ne pas avoir entendu le moindre merci. Non, je n’entendais que des éclats de rire et des paroles dont je ne comprenais rien. De ce fait, je me sentais un peu humilié et je l’avoue j’étais passablement énervé. Par bonheur, le 4eme étage arriva très vite et nous prîmes des chemins opposés.  J’aurais pu en rester là mais après m’être enregistré à l’accueil du service en question, je suis entré dans la salle d’attente. Là, il y avait une autre femme voilée qui avait sans doute la cinquantaine. Or mis son voile, elle était habillée normalement, c’est-à-dire comme une « européenne », si je peux me permettre cette formule. Elle parlait arabe dans son téléphone mobile sans aucune discrétion. La plupart des autres personnes ; trois ou quatre seulement, je ne me rappelle plus exactement ; avaient également le nez plongé dans leur smartphone et ne semblaient pas y prêter cas, trop absorbées qu’elles semblaient être. Toutefois, une autre femme voilée, toute vêtue de noir de la tête aux pieds entra, et là, les regards se firent plus suspicieux et ce d’autant plus que les deux femmes entamèrent un dialogue encore en arabe sans plus de pondération. On m’appela pour l’examen et pour moi, la scène se termina ainsi.

    Quelques jours plus tard, et alors que nous avions amené notre petite-fille jouer dans un parc pour enfants, là encore nous fûmes en quelques minutes entourés de femmes pour la plupart toutes voilées. La plupart parlaient l’arabe entre-elles mais quelques-unes, mais pas toutes, utilisaient le français pour s’adresser aux enfants. Si je ne trouvais rien de trop étonnant à cela car le quartier en bordure de la rivière est bien connu pour héberger cette communauté, il y avait parmi tous les enfants, deux ou trois très jeunes fillettes qui étaient entièrement voilées elles aussi. Cet aspect-là des choses me choquait et il me choquait d’autant plus que ce n’était pas toutes les petites filles qui étaient habillées ainsi. Je me disais que fatalement cette différence, pour ne pas dire discrimination, aurait sans doute des effets néfastes dès lors qu’elles seraient plus grandes. Enfin, ça c’était mon avis purement personnel.

    Comme on le voit et en peu de temps avant cette polémique sur le droit ou pas d’être « islamophobe », voilà les quelques expériences, plus quelques autres encore plus banales que j’avais vécues.  Rien de bien méchant bien sûr, mais simplement cette petite crainte d’assister à un fort développement, pour ne pas dire banalisation, de cette religion sans pour autant y trouver cet effort d’intégration nécessaire faisant de toutes ces personnes que j’avais croisées de « futurs et véritables français » comme nous l’avions connu jadis avec les Espagnols, les Polonais, les Italiens, les Russes, les Arméniens et que sais-je encore. Oui, je l’avoue et même s’il ne faut sans doute pas mettre tous les « musulmans dans le même panier », je préférerais que tous ces gens acceptent plus clairement notre façon d’être, nos traditions, nos lois et nos coutumes. Oui voilà ce que j’aimerais. Voilà quel est en général mon état d’esprit à propos de l’islam et des musulmans. Peut-on appeler ça de l’hostilité ?  Le mot me paraît trop violent. Deux éléments médiatiques récents m’avaient néanmoins heurtés à propos de l’islam et des musulmans de France. Le premier concernait le président américain Bill Clinton, lequel l’an dernier avait affirmé à nos médias que « 10% de votre population sont des musulmans nés dans d’autres pays » ajoutant, « vous allez devoir faire face à ce genre de problèmes  pour un bon moment »  (il évoquait le terrorisme dont la France était victime).  La plupart des médias, toujours enclin à une pensée unique avaient rejeté en bloc ses dires. Pourtant, n’avait-il pas été suffisamment bien placé pour affirmer ce qu’il disait ou était-il un bonimenteur ? Si on répondait oui à cette dernière question, quel était son intérêt à de telles affirmations ? Personnellement, j’avais tendance à le croire. Le deuxième élément était un article que j’avais lu sur Médiapart à propos d’une enquête américaine effectuée en Europe et donc en France sur ce sujet si « tabou ». Outre le fait que la  France était déjà le pays à compter le plus grand nombre de musulmans, je trouvais les projections prévisionnelles de cet institut absolument effarantes puisqu’il indiquait que la population musulmane française (et européenne) aurait sans doute plus que doublée voire plus d'ici 2050 et ce, selon différents scénarios plutôt très optimistes. Je me disais que ne connaissant pas les chiffres actuels car les statistiques françaises n’existant pas, ces prévisions allaient dans le sens de ce que certains appellent « le grand remplacement ».  En tous cas, entre ce que j’avais entendu, lu et vu, nombreux étaient les signes allant dans ce sens.

     

    Voilà où j’en étais, et plutôt qu’être parfois bêtement islamophobe, un matin je me suis dit « va plus loin » « tentes de comprendre, approfondis le sujet ». Je me suis d’abord plongé dans tous les dictionnaires que j’avais dans ma bibliothèque. Dans un dictionnaire Larousse de l’année 2005, le mot « islamophobie » n’y était pas ! J’avais bien un Littré et un très vieux Larousse de 1980 que j’avais récupéré chez ma mère bien avant son décès mais j’hésitais à les compulser. Finalement et par acquit de conscience, j’ai vérifié et les mots « islamophobie » ou « islamophobe » n’y étaient pas non plus. Il ne me restait plus qu’à allumer mon ordinateur. J’ai lu quelques articles à propos de la polémique en question mais je les trouvais peu clairs et surtout pas suffisamment « terre à terre ». Alors sur Google recherche, ayant tapé le mot « islamophobie », j’avoue que je suis allé de surprise en surprise. Ainsi en compulsant le dictionnaire Larousse en ligne la définition du mot était claire et nette : « Hostilité envers l’islam et les musulmans ». Il n’était plus question d’une peur de l’islam comme j’avais pu l’imaginer mais plutôt de l’inverse, c’est-à-dire d’une peur des musulmans envers ceux qui n’aiment pas ou n’apprécient pas cette religion.  Là pour moi, l’incroyant que je suis, et comme déjà indiqué auparavant,  je ne pouvais pas être d’accord. Avec le goût de la curiosité qui m’anime en permanence, et ce d’autant quand il est question d’étymologie, j’ai essayé de creuser le sujet au maximum. Il y avait bien le site « La Toupie » qui reprenait l’ensemble des définitions, rappelait ce qu’était une phobie et qui surtout indiquait ce que devrait être la seule et vraie définition à savoir « construit à partir de islam, religion des musulmans, et phobie, venant du grec ancien phobos, peur, effroi », je n’arrivais pas à me satisfaire de ce que je trouvais. Ainsi pour la plupart des autres dictionnaires en ligne le mot « islamophobie » n’existait pas. Idem pour le CNRTL, c’est-à-dire le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales. Idem dans les encyclopédies y compris la plus célèbre « Universalis ». Plus grave, le mot n’existait pas non plus dans le dictionnaire de l’Académie française, 9eme et dernière édition. Pourquoi ce silence autour de ce mot désormais si souvent employé dont Wikipédia m’apprenait pourtant qu’il avait été utilisé pour la première fois en France en 1910 ? Que font nos vieux « immortels » avant de mourir vraiment ? Ne pourraient-ils pas inventer un nouveau mot donnant une vraie raison d’être à tous ceux qui sont vraiment hostiles à l’islam et aux musulmans, laissant à tous les autres et au suffixe « phobie » son unique, réelle et originelle signification latine de « peur » ou de « crainte » ?

    Si j’avais trouvé quelques articles plutôt intéressants sur l’Histoire du mot « islamophobie » et son origine (Wikipédia, FranceInfoTV, AgoraVox), force était de constater que cette absence totale de clarté dans les dictionnaires ouvrait bien des portes à de nombreuses supputations voire délires. Pour moi, cette polémique autour du « droit d’être islamophobe » d’Henri Peña-Ruiz faisait partie de ces délires. Mais ça n’était pas le seul. Ainsi, il y avait un site Internet qui affirmait que la société du dictionnaire Larousse ; appartenant au Groupe Lagardère, groupe dont les actionnaires majoritaires sont des Qataris ; aurait été fortement influencée par ces derniers pour modifier la définition transformant le mot « peur » en « hostilité ».

    Si cette supputation pouvait paraître plausible, elle ne tenait guère à une analyse plus poussée. En effet, il faut observer que le mot « islamophobie » n’est pas le seul à bénéficier du mot « hostilité » dans sa définition. Dans le Larousse, il en est de même pour « homophobie », « xénophobie », « francophobie » et « germanophobie » par exemple. Etrangement, le mot « anglophobie » n’est qu’une simple « aversion vis-à-vis des anglais ou de ce qui est anglais ». Sur Internet, on peut trouver jusqu’à 360 mots se terminant par « phobie », de très nombreux n’étant pas dans les dictionnaires les plus connus. Globalement, on peut néanmoins noter sur le Larousse.fr que quand l’Homme est concerné, la phobie est une hostilité ou une aversion alors qu’elle est seulement une peur ou une crainte irraisonnée quand il est question d’autres choses, animaux, plantes, objets ou situations.

    Alors dans la mesure où je considérais que mon « islamophobie » personnelle n’était ni une hostilité, ni une aversion, était-elle pour autant une peur,  et si oui, le terme « irraisonnée » se justifiait-il comme la définition du mot « phobie » l’affirmait en permanence ? A bien y réfléchir et m’intéressant à l’actualité et à la politique, il me paraissait assez simple d’énumérer de nombreuses raisons pouvant intervenir dans cette peur de l’islam de la part de nombreux français dont j’étais :

     

    Oui, voilà quelques-unes des raisons, lesquelles à juste titre peuvent nous faire craindre l’islam. Mais j’aurais pu en citer bien d’autres comme le nombre de détenus musulmans en prisons, les problèmes que l’on connaît dans certaines zones de non-droit de plus en plus nombreuses et donc de plus en plus difficilement maîtrisables en terme de sécurité. Des événements gravissimes tels que ceux qui se sont produits récemment en France quand l’équipe d’Algérie de football a gagné la Coupe d’Afrique des Nations. Et puis bien sûr, tout ce que l’on voit comme les femmes voilées de plus en plus nombreuses, les mosquées de plus en plus nombreuses que l’on construit ou bien parfois et comme je l’avais lu, des églises catholiques qui sont transformées en mosquées. Oui, les raisons ne manquent pas et bien sûr, il y aura toujours des gens pour dire que ce n’est pas vrai, que je stigmatise, que j’amalgame.

    Mais les premiers à amalgamer, n’est-ce pas les musulmans eux-mêmes dans leurs conflits permanents entre pays, entre sunnites et chiites, entre pratiquants bien différents dans leur radicalité ? Tout ça est difficilement compréhensible pour la plupart des français dont je suis. Porter des signes religieux très visibles n’est-ce pas une manière de stigmatiser ceux qui n’en portent pas ?

    Oui, comme on le voit et le montre la réalité, il y a bien des raisons d’avoir une peur raisonnée voire seulement une simple crainte ou un agacement de l’islam, et bien sûr tous ceux qui ne veulent pas voir cette réalité en face parleront de stigmatisation et d’amalgames. On peut effectivement le dire et parfois avoir raison de le dire, sauf que là aussi, il est peut être bon de rappeler la vraie définition de ces mots. Stigmatiser, c’est dénoncer, critiquer publiquement quelqu'un ou un acte que l'on juge moralement condamnable ou répréhensible.  Amalgame, c’est un mélange d'éléments hétérogènes.  Ce petit inventaire à la Prévert des raisons que j'ai citées ci-dessus est-ce vraiment tout cela ? Je ne le pense pas même si je suis prêt à reconnaître que comme tout le monde, j’ai une forte tendance à amalgamer les musulmans, les arabes, les maghrébins et que sais-je encore. Alors, et si à juste titre, je ne mettrais jamais tous les musulmans ni aucun homme de couleur dans un « seul et unique panier », car je considère que ce n’est pas la couleur de la peau qui compte mais ce qu’il y a derrière et/ou dedans, le mot « islamophobie », c’est-à-dire une certaine appréhension de l’islam peut s’expliquer. Cette appréhension est un minimum mais la peur ou l'aversion peut la remplacer dans le cas d’un vécu plus perturbateur comme chez des personnes qui ont vécu et réchappé à un attentat par exemple. Cette religion, je n’ai pas la prétention de bien la connaître mais j’estime avoir le droit d’en avoir sinon la peur au moins une crainte au regard de tous ces éléments et ce,  qu’ils soient indépendant les uns des autres ou alors mis bout à bout.  Je reste persuadé que mon « islamophobie », un grand nombre d’autres citoyens la partage et ce, que leur ascendance française soit plus ou moins ancienne, de souche comme certains diront, soit à tort, soit avec raison. Oui, je ne pense pas être le seul dans ce cas ? Si le mot « phobie » peut indifféremment s’exercer des 2 côtés du miroir, pour moi, pour d’autres comme pour certains musulmans ; au regard par exemple de l’horrible attentat perpétré en Nouvelle-Zélande contre deux mosquées le 31 mars dernier, mais il y en a eu bien d’autres ! ; Il serait sans doute bon de donner une fois pour toute une seule et bonne définition à certains mots. Je considère qu’islamophobie en fait partie.

    • Dans mon Littré de 1874 mais aux Editions Famot de 1977, le mot « phobie » n’existe pas encore.
    • Dans Le Larousse de ma mère de 1980, le mot « phobie » est « une aversion ou une peur instinctive. Crainte déraisonnable à l’égard d’objets, de situations ou de personnes bien définis, dont le sujet reconnaît le caractère injustifié, mais dont il ne peut se débarrasser. (Ce mot entre comme composant dans les noms de diverses sortes de craintes injustifiées : agoraphobie, claustrophobie, éreutophobie, etc…) ».
    • Dans un petit Larousse de 1993, la « phobie » est une « peur, aversion instinctive et souvent angoissante.
    • Dans le Petit Larousse illustré de 2005 -100eme édition la « phobie » du grec « phobos », effroi est 1- « aversion très vive, peur instinctive ». 2 Psychiatr. Crainte déraisonnable déclenchée par un objet, une personne, une situation, et dont le sujet reconnaît généralement le caractère inadapté. »
    • De nos jours et toujours dans le Larousse mais .fr et donc en ligne la « phobie » est 1- Crainte angoissante et injustifiée d'une situation, d'un objet ou de l'accomplissement d'une action. 2- Aversion très vive pour quelqu'un ou peur instinctive de quelque chose : Avoir la phobie de la foule.

     

    On notera qu’à aucun moment le terme « hostilité » n’est employé même si le terme « aversion » peut être considéré comme tout proche mais moins violent. Notons enfin que des mots similaires que l’on pourrait supposer existants n’existent pas. Il en va par exemple de la cathophobie (ou catophobie), hostilité envers les catholiques, de l’indophobie que l’on trouve dans Wiktionnaire comme une aversion pour l’Inde mais dans aucun autre dico.

     

    Il serait peut-être temps que nos gouvernants s’intéressent au sujet de l’islamophobie et tirent de vraies statistiques à la fois sur les religions mais aussi sur l’immigration car les pays qui l’on fait ont gagné en clarté et dans l’acceptation de l’autre et de celui qui est différent. Si l’immigration est une richesse comme certains le prétendent, à juste raison parfois, elle ne l’est pas toujours malheureusement et là aussi, ils seraient intéressants d’avoir des chiffres, reflets de la réalité de ces destinées. Ils seraient temps aussi de redonner aux mots leurs justes définitions à partir du latin, d’en inventer de nouveaux si besoin et qui mieux que nos académiciens pour faire ce travail ? Allez, il est temps de se réveiller Messieurs les Immortels, la coupole ce n’est pas un dortoir !

     

    Phobie or not phobie ? Telle est la question !


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  • Ce diaporama est agrémenté de quelques musiques extraites d'une compilation "You Tube" intitulée "Night City Jazz"

    Le Circuit des Sources de l'Agly et de la Sals depuis Camps-sur-l'Agly

    Le Circuit des Sources de l'Agly et de la Sals depuis Camps-sur-l'Agly

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    C’est grâce à un ami, qui m’a aimablement fourni un tracé G.P.S enregistrable, que j’ai pu réaliser cette boucle audoise que j’ai personnellement intitulée «  le Circuit des Sources de l’Agly et de la Sals ». Le départ s’effectue du joli village de Camps-sur-l'Agly. Si je connais déjà la source de la Sals pour y être allé randonné en juin 2007, la source de l’Agly, elle, fait partie des sites que j’ai envie de découvrir depuis fort longtemps. Il est vrai que ce fleuve a tant de fois jalonné mes très nombreuses sorties, dans des lieux si beaux et si variés, pour ne pas dire disparates, que ne pas en connaître sa résurgence me parait complètement anormal voire absurde. Absurde, car je sais depuis très longtemps déjà qu’un sentier pédestre en permet la découverte. A la seule évocation de ce nom « Agly », il me revient à l’esprit des randonnées pédestres réalisées aux Gorges de Galamus, à Ansignan et à son aqueduc romain, au lac de barrage de Caramany ou encore en VTT sur la voie verte entre Rivesaltes et Le Barcarés. L’an dernier encore, j’ai longuement erré dans son lit asséché lors d’une balade au « Cimetière des Maures » tout près d’Estagel et du château de Jau. A bien y réfléchir, j’ai descendu son lit à de si multiples reprises; et parfois même remonté ; que seule sa source manque au palmarés du roi de la flânerie que je suis devenu au fil du temps. Ça coule de source, il faut que j’y aille ! Après tout, pour le doux rêveur contemplatif invétéré que je suis, suivre un lit, fusse-t-il d’une rivière, n’est-ce pas le lieu le plus propice pour réaliser ses rêves ? En ce 22 mai 2019, sous les meilleurs auspices, me voilà prêt à remonter jusqu’au bout de ce lit et par la même occasion réaliser mon rêve : découvrir enfin la Source de l’Agly.  Il est 7h30, quand sous un ciel merveilleusement bleu et lumineux, je gare ma voiture sur le petit parking situé à l’entrée de Camps-sur-Agly. Si le village est désert, il n’est pas silencieux. Moi, le photographe ornithologique amateur, je suis accueilli par un merle noir qui s’égosille comme si la fin du monde allait survenir. Serait-il lui aussi influencé par la mysticité du tout proche Pech de Bugarach ? Il est vrai que le célèbre pech n’est pas très loin  et je vais en avoir la preuve très vite. Je remonte la rue principale sous le signe des oiseaux. Outre les merles, il y a bien sûr les sempiternels moineaux, les non moins rares rouges-queues noirs mais j’aperçois également une fauvette mélanocéphale et un grimpereau, passereaux beaucoup plus inhabituels car plus discrets et surtout plus remuants. Voilà déjà 15 minutes que je suis occupé à photographier des oiseaux et bien d’autres sujets et je me dis qu’il serait peut-être temps de me mettre vraiment en route ? Je presse le pas, laisse le petit cimetière sur la gauche, passe devant la Ferme de Camps dont un panonceau indique à bon escient bien d’autres activités que le seul élevage que laissent imaginer un enclos, des étables et quelques meules de foin. Gîtes d’étapes avec tables et chambres d’hôtes, voilà ce que cette ferme blottie dans un décor champêtre et calme est à même d’offrir aux visiteurs et aux randonneurs de passage. « C’est toujours bon à savoir ! » me dis-je ! A la sortie du village, d’autres panonceaux mentionnent les directions de Col du Linas, de La Bastide et de Bugarach. C’est dans l’immédiat la bonne direction et le Pech de Bugarach est très vite là, presque droit devant, comme un monumental et incontournable point de mire. Un coup d’œil à l’intérieur d’une source captée et un large chemin descend au milieu des prés amplement fleuris. Faire un inventaire de toutes les fleurs printanières nécessiterait sans doute un grosse journée, alors je ne photographie que les plus visibles, probablement les plus communes et donc les plus nombreuses : marguerites, orchis, coquelicots, renoncules et sainfoins.  Une passerelle de béton se présente enjambant ici un très modeste ruisseau. Je jette un coup d’œil sur mon bout de carte I.G.N. C’est bien l’Agly comme l’indique les lettres « Fl. » signifiant « fleuve », mot auquel, par erreur, on a trop souvent tendance à attribuer une notion de grandeur et d’abondance. Mais avant d’être grand, ne faut-il pas comme toutes choses de ce monde avoir été petit ?  Le mot fleuve, ce « fluvius » romain signifiant « flot » est pourtant si juste ici et comme ce petit flot limpide finit par grossir pour se jeter à la mer, l’Agly mérite cette dénomination de « fleuve ». Une photo-souvenir puis j’y trempe ma casquette et repars ainsi le crâne bien frais.  Quelques minutes plus tard, j’atteins la route bitumée filant vers La Bastide. J’allume mon G.P.S, car pour me diriger vers la source de l’Agly, je sais déjà qu’il me faut quitter cette route avant le lieu-dit. Bien vu si j’ose dire, car le panonceau indiquant la source est si minuscule, et qui plus est enfoui sous du lierre, que sans tracé G.P.S, je l’aurais probablement loupé. Pour les randonneurs qui viendront derrière moi, j’éclaircis le lierre autour du panonceau. Un sentier entre en forêt et coupe le tout petit ruisseau des Pastressis qui est sans doute le tout premier affluent de l’Agly. De nouvelles fleurs, celles-ci des bois, m’arrêtent. Quelques mètres plus loin, un écureuil roux ; enfin celui-ci est plutôt brun ; détale devant moi et s’élève à la cime d’un arbre. Je réussis malgré tout à le figer sur quelques photos prises en rafales. Peu de temps après, c’est un chevreuil qui détale en aboyant sans que je puisse l’apercevoir. Le bois se termine et laisse la place à un plateau, espèce de maquis de cistes et de bruyères où poussent bien d’autres fleurs plus belles les unes que les autres. Quelques papillons volettent y trouvant un biotope à leur convenance. Le chemin herbeux du maquis débouche puis se poursuit dans une immense prairie entourée de clôtures. Une clôture barre le chemin. La « châtaigne » que je reçois dans le bras gauche à l’instant où je veux la franchir ne laisse planer aucun doute : elle est « terriblement » électrifiée. Grâce à mon tracé G.P.S, je délaisse la clôture, m’en éloigne et trouve un sentier qui descend sur la droite dans un nouveau et sombre sous-bois, d’abord de feuillus puis d’immenses résineux. Le murmure de l’Agly se fait entendre. Finalement le ruisseau est là, en contrebas, sur ma droite. Je le longe à bonne distance me fiant à cette chanson de l’eau pour tenter de trouver sa source. Au bout de quelques minutes, l’étourdi que je suis constate que la musique de l’eau s’est arrêtée. Alors, je descends vers le ruisseau. Quelle n’est pas ma surprise de constater qu’il est complètement asséché ! Je le poursuis, tant bien que mal, en raison des gros blocs rocheux qui en composent son lit et des branchages qui le jonchent. J’ y découvre même un énorme pneu, objet plutôt bizarre ici mais qui n’est pas là par hasard me dis-je. La source n’est certainement pas très loin me dis-je aussi. Les blocs se font à la fois plus volumineux et plus moussus et de ce fait les difficultés augmentent. Il y a bien quelques flaques deci delà mais aucune eau ne s’écoule. Suis-je devant ce phénomène qu’on appelle « perte karstique », terme hydrologique pour désigner l’infiltration soudaine d’un ruisseau dans la roche ou est-ce carrément un assec ? Je me souviens avoir été confronté à ce type d’infiltration à la source du Tech lors d’une randonnée au pic du Costabonne. L’eau de la résurgence du Tech commençait à s’écouler puis disparaissait sous les galets pour réapparaître des dizaines de mètres plus en aval. Je m’interroge quand à poursuivre ce lit asséché ? Un coup d’œil sur mon bout de carte I.G.N me laisse perplexe. J’ai le sentiment que je suis allé trop loin et trop haut et que la source serait un peu plus bas car comment aurais-je pu l’entendre chanter auparavant ? Aurais-je loupé quelque chose ? Je redescends le cours du ruisseau et finalement une première résurgence est là, tout près d’une confluence où le débit d’un autre ruisseau sur ma gauche est beaucoup plus fougueux. Je remonte ce débit et très rapidement j’arrive devant un grand mur rocheux au pied duquel l’eau jaillit vivement d’une petite cavité. Voilà la source de l’Agly ! Enfin celle que j’ai le plus souvent constatée sur des photos vues sur Internet. J’essaie d’entrer dans la petite cavité mais la hauteur de l’eau et sa fraîcheur m’en dissuadent. Il me faudrait une combinaison en néoprène ! L’Agly serait donc composée de deux sources bien distinctes ? A voir ? (*) Quelques photos souvenirs devant la source et je me remets en route en m’élevant sur un sentier très raide mais très court débouchant sur la route D.14, presque à hauteur d’une cabane en pierres sèches. Un coup d’œil sur la configuration des lieux ne me laisse aucun doute : le ruisseau asséché, que j’ai remonté avant de découvrir la petite grotte et sa source, a violemment creusé le calcaire de quelques falaises que j’aperçois au milieu des feuillus. Il y a bien une autre rivière parallèle à la route et quand je regarde mon bout de carte, celle-ci aurait sa source au col du Linas, au pied du pech de Bugarach. Mais où exactement ? Il aurait fallu que je remonte le lit asséché dans sa totalité pour le savoir mais c’est trop tard et puis cela est-il possible ?  Ces différents constats m’ont presque fait oublier qu’il y avait un itinéraire à poursuivre et quand je m’y attelle c’est pour me retrouver bien embarrassé. Ici, pas de balisage et pas de sentier bien évident, malgré un tracé G.P.S qui m’indique de poursuivre en m’élevant droit devant dans la forêt de Mascarou. Problème, il n’ y a pas de passage et seulement des petites murailles de calcaires impossibles à escalader. Mon G.P.S ne serait-il pas suffisamment précis ? C’est fort possible compte tenu de son âge ! Je cherche ici sans trouver de vrai passage jusqu’à me décider à descendre la D.14 sur la droite et de quelques mètres où les accès à la forêt me paraissent plus plausibles. Finalement, et mon G.P.S me confirmant ce « point de repère » (waypoint),  j’opte pour un espèce de petit fossé qui s’élève rudement dans la forêt. Bingo ! C’est la bonne option ! Ce fossé atterrit sur un bon chemin, lequel un peu plus haut débouche sur une large piste forestière. C’est la piste forestière du Ciela de la Pause comme écrit sur la carte. Je l’emprunte à gauche comme me l’indique mon G.P.S. Dès la première intersection, un autre coup d’œil sur mon bout de carte me rassure pleinement quand à la suite du circuit. Je suis sur le bon tracé ! Les pistes, chemins et sentiers étant nombreux dans ce secteur, seules les intersections nécessiteront un peu d’attention et une éventuelle analyse de la carte I.G.N. Tout devient plus simple à partir d’ici et je peux sans trop d’inquiétude me consacrer à la photographie. Fleurs des bois, papillons, oiseaux, je marche vers le col de la Lucio d’un bon pas ne m’arrêtant que lorsqu’un sujet intéressant se présente. Parmi ces sujets, il y a une étrange roche moussu avec des yeux et une bouche ressemblant à s’y méprendre à un gnome ou à un lutin, tel qu’on en voit dans des films ou des dessins animés. Il y a aussi les visions furtives, mais assez réelles et suffisantes pour une photographie, celle d’un chevreuil tout d’abord puis un peu plus loin, ce sera un jeune sanglier. Ces visions-là sont les plus réjouissantes. C’est pour de telles approches de la Nature que je marche aussi ! Ajoutons-y l’image du plutôt rare Torcol fourmilier que je surprends dans son chant nuptial saccadé et rauque et me voilà pleinement ravi d’être là dans ces forêts qui se succèdent au rythme de quelques panneaux O.N.F.  Forêt communale de Camps-sur-Agly, forêt domaniale de l’Eau Salée, route forestière de la Paille ou de la Verrerie, les noms s’affichent, les essences sont souvent les mêmes mais par bonheur les décors varient. Forêts de très beaux feuillus et d’immenses conifères, clairières verdoyantes, fenêtres sur le Massif du Canigou enneigé ou les Pyrénées audoises et ariégeoises, murailles de calcaires où se réchauffent des lézards et où poussent des jolis bouquets fleuris, herbages où les passereaux viennent se rassasier de graminées, voilà les décors dont je ne me lasse pas. Au lieu-dit le Trou de la Relhe (ou Reille), la clairière s’élargit beaucoup plus. Je suis accueilli près d’une métairie au chant entêtant d’un pinson que je parviens à photographier. Il paraît plus enclin à chanter qu’à avoir peur de moi et de ce fait, il ne fait que sauter de branches en branches mais toujours sur le même arbre et toujours en chantant. Cet arbre, c’est son Olympia, son Zénith mais je suis son seul spectateur ! Après l’oiseau, je me mets en quête de chercher ce Trou de la Relhe, lequel si j’en crois mes lectures, serait la plus grande doline du département de l’Aude. La métairie en ruines ne m’apporte aucune aide quand au trou recherché mais un vieux linteau en partie effacé me confirme la proximité du lieu-dit. Avec difficulté, j’y lis : «…. le Trou de la Reille appartenait à Denarnaud le 12 juillet Alexis ». Enfin, c’est ce que je pense y lire ! Ici, la suite de mon itinéraire entrant en forêt, je rebrousse chemin, descend à gauche dans le premier pré ; non loin de l’arbre où le pinson chantait ; et le Trou de la Relhe est là, avec son ouverture barrée par un ruban. Un sentier argileux et donc glissant mais fait d’escaliers en rondins permet d’accéder jusqu’au fond du trou. Rien d’exceptionnel à première vue, or mis une végétation très luxuriante. Mais en prêtant attention, on peut observer que les parois de la doline continuent de s’effondrer et de gros rochers fraîchement tombés tout près du sentier semblent en être les preuves évidentes. On peut remarquer aussi que son importante hygrométrie a permis l’implantation de plantes bien particulières et notamment la Jacinthe des Pyrénées que l’on appelle aussi  la Scille lis-jacinthe. Leurs petites fleurs bleues sont plutôt rares ici mais leurs feuilles tapissent la totalité du fond. On y trouve aussi plusieurs variétés de fougères et bien d’autres plantes aimant l’humidité comme les jolis lamiers jaunes. Les arbres, eux, cherchent le soleil et élèvent tout droit leur canopée dans le petit puits de lumière que l’effondrement a créé. Certains, complètement recouverts de barbes de Jupiter ont soufferts de cet excès d’eau et de lumière et sont voués à mourir par manque de feuilles et de photosynthèse. Je quitte le trou en me demandant qu’elle est la toponymie du nom « Relhe » (**). La suite de l’itinéraire vers la Source de la Sals, très bien balisée et mentionnée, ne pose aucune difficulté. Après la traversée d’un petit bois où je réveille un jeune sanglier, le chemin atteint le haut d’un ample vallon herbeux. Je reconnais le lieu pour y être passé en 2007. Je descends un peu puis m’arrête en surplomb de la source pour pique-niquer. L’arrêt-déjeuner est toujours pour moi l’occasion de vaquer à photographier la nature aux alentours. Oiseaux, papillons et fleurs. Ici, comme c’était le cas ce matin à la sortie de Camps-sur-Agly, les prés sont amplement parsemés de fleurs sauvages, la plupart déjà vues mais quelques autres bien nouvelles. Les papillons sont déjà nombreux pour la saison mais les espèces sont relativement limitées. Les oiseaux paraissent absents mais en jouant de mes appeaux quelques uns viennent avec hésitation jusqu’à moi. Je reste presque une heure à courir la prairie, sandwich dans une main et appareil-photo dans l’autre. Il est temps de filer à la Fontaine Salée puisque c’est ainsi que l’on nomme la source de la Sals. Elle est là, toute proche, avec ses appentis illustratifs et son aire de pique-nique. Il n’y avait rien de tout ça en 2007 et notamment les nombreux panneaux explicatifs permettant désormais d’apprécier la source, l’origine de sa salinité 2 fois plus salée que la mer ; l’exploitation du sel, illicite ou pas, c’est à dire l’Histoire commune du lieu et du sel. Après cette découverte et la rencontre bien sympathique avec deux couples de randonneurs de mon âge assis à une table de pique-nique, je file vers les « Fours Verriers », direction le Pas del Capelan. Après quelques panneaux au fil du parcours mentionnant la flore, la faune, la géologie et le climat de l’endroit, là aussi, le balisage est bien présent et très bon, permettant de se diriger sans problème vers les endroits convoités. Si l’accès aux antiques « Fours Verriers » est fermé en cette saison et entouré d’un haut grillage, en empêchant ainsi toute visite et découverte gracieuse, à l’extérieur, de très nombreux panneaux explicatifs permettent d’en connaître toute l’Histoire. Histoires liées aux sites verriers forestiers et Histoire du verre, je passe une demi-heure à lire la quasi totalité des panneaux. A l’instant où je repars, je me retrouve nez à nez avec les deux couples aperçus à la source de la Sals. Nous discutons encore un peu et je leur fais part de mon désappointement à avoir trouver les « Fours Verriers » fermés.  Je rebrousse chemin, direction le Pas del Capelan où j’atterris sur une large piste forestière. Ici, un panonceau « col du Linas -30 mn » m’indique la direction à suivre. Guère plus loin, au lieu-dit « Las Clausos », sur la carte I.G.N, je quitte la piste au profit d’un raccourci qui descend presque rectiligne vers le Linas, évitant ainsi les sinuosités de la piste. Après quelques mètres seulement, j’en suis à me demander si j’ai bien fait de prendre cet étroit sentier entouré de hauts buis totalement desséchés. Si depuis mon départ de Camps, j’ai très souvent observé avec étonnement et consternation tous ces buis morts sur pieds, je ne m’étais pas vraiment interrogé quand aux raisons et explications d’un tel phénomène. Sans doute parce que la présence de nombreuses autres essences m’ont empêché d’apercevoir l’ampleur du désastre. Ici, au milieu du chemin, et à cause de petites chenilles vertes et jaunes qui « pendouillent » par milliers, voire par millions, au bout de leurs désagréables filaments, je peux enfin mettre un nom sur cette hécatombe écologique : « la Pyrale du buis » ! Ce papillon si meurtrier venu d’ailleurs est déjà ici et les dégâts sont considérables ! Si j’ai un peu entendu parler de la Pyrale du buis, j’ignorais qu’elle sévissait aussi catastrophiquement dans ces lieux si beaux où j’ai pourtant cheminé si souvent. Fini les grandes haies de buis aux petites feuilles si luisantes qui avaient encadré tant de mes belles sorties dans ce secteur de l’Aude. Je peux mettre un nom sur chacune d’entre-elles où le buis y était forcément l’arbre le plus emblématique (***). Les 9/10eme de cette descente vers le hameau du Linas et son col éponyme se résument à slalomer et à battre l’air devant moi avec mon bâton de marche pour esquiver les chenilles et tous leurs filaments. Malgré ça, je ne parviens pas à toutes les éviter loin s’en faut ! A deux ou trois reprises, j’ai le sentiment que le buis rebourgeonne depuis son pied asséché, mais non, en y regardant de plus près, je constate qu’il s’agit de fragon aux feuilles tout aussi luisantes. Quand je prends et serre une tige de buis asséché avec une main pour l’effeuiller complètement, je me retrouve avec une demi-douzaine de chenilles au creux de ma paume. C’est incroyable la quantité de chenilles qu’il peut y avoir sur une seule branche mais pas toujours visibles au premier coup d’oeil ! Le désagrément de cette « calamité végétale » s’arrête dès lors que j’atteins la piste à une centaine de mètres du Linas. Il faut dire que le hameau, au pied du pech de Bugarach, est essentiellement entouré de prés eux-mêmes encadrés de  quelques haies formées par de flamboyants genêts et de blanches aubépines. Si la vue de ces plantes chatoyeusement colorées est agréable, les quelques buis de ces haies sont morts également et ça se voit bien sûr. Juste avant le village, j’attire vers moi deux beaux chevaux qui paissent au loin dans des fougères naissantes. Il y en a un blanc et un bai. Avec la langue et le palais, quelques « tlo, tlo, tlo, » bien puissants suffisent pour les faire venir vers moi. Le blanc d’abord semble moins farouche puis le bai ensuite. S’ils sont là à un mètre de moi, il m’est impossible de les caresser. Je finis par comprendre que la clôture est électrifiée et qu’à juste raison ils s’en méfient comme de la peste. Comme je les comprends depuis la violente « châtaigne »  prise ce matin juste avant la source de l’Agly ! C’est donc à bonne distance que je leur distribue quelques bouts de pain puis de grandes gerbes de graminées qu’ils mangent goulûment. A cet instant, les deux couples de randonneurs laissés aux « Fours Verriers » arrivent derrière moi. Bien évidemment, outre les deux beaux chevaux, la conversation porte sur cette « sordide et inévitable » Pyrale du buis. Alors que nous discutons, une des deux dames s’exclame soudain «  mais vous êtes recouvert de chenilles ! » et la voilà aussitôt qui s’attelle à me « dépyraliser » à l’aide d’un mouchoir en papier. J’en ai apparemment plein le dos, la casquette et j’en ai même une sur une oreille et une autre sur les lunettes. Après cet « échenillement » en bonne et due forme, le Linas est là. Seules deux bergeronnettes m’arrêtent dans la traversée du hameau. Il est vrai qu’il est assez peu commun d’observer une bergeronnette grise et une bergeronnette printanière presque côte à côte. Avec les deux couples, nous continuons un bout de chemin ensemble mais nos itinéraires se séparent juste avant le col du Linas. Eux ont leur voiture au col et moi, j’ai encore un grand bout de chemin à faire jusqu’à Camps. Tout en descendant vers les Pastressis et la Bastide, j’en suis à me demander où peut-être cette « possible » deuxième source de l’Agly ? La carte I.G.N ne m’apporte pas de réelles réponses. Il y a bien sur la carte une mention « réservoir » non loin du col du Linas, et donc au pied du Bugarach, mais est-ce la source ambitionnée ? Rien ne le dit ! D’ailleurs en regardant bien la carte, plusieurs ruisseaux s’écoulent de toutes parts pour se rejoindre dans ce relief karstique fait de petites falaises longeant la D.14 où je me trouvais ce matin ! J’en suis trop loin désormais et j’abandonne très vite toute idée de la trouver, préférant me consacrer à la photographie florale et ornithologique. Les oiseaux sont plutôt nombreux surtout à l’approche des habitations du lieu-dit les Pastressis. Juste avant la Bastide, c’est un renard que je surprends alors que je l’aperçois sous le ventre d’une vache. Il détale mais je réussis à avoir une photo à peu près correcte. Que faisait-il sous la vache ? La tétait-il ? J’en suis à me le demander mais la jeune vachère que je rencontre peu de temps après semble en douter, tout comme le vacher que je rencontre dans le hameau. Ici les gens sont bien sympathiques et j’ai le sentiment que la vie s’écoule si paisiblement mais si isolément que chaque voyageur, aussi éphémère soit-il, est toujours le bienvenu. Enfin, les gens sont très accueillants ! Si je n’y prends pas garde, les conversations ont tendance à s’éterniser.  Pourtant, si je garde à l’esprit qu’il me faut terminer un parcours, je fais en sorte de ne jamais décevoir mes interlocuteurs. Je quitte le hameau de la Bastide et ses agréables habitants en accélérant le pas car mon intention est de visiter Camps-sur-Agly. Le bitume si souvent décrié m’offre cette opportune accélération. C’est chose faite une heure plus tard. Très belle église, longue lecture de l’Histoire de Camps grâce à de ludiques panonceaux, approche dissuasive et donc impossible des ruines du château médiéval, errance dans les charmantes ruelles, vieux lavoir, école communale, mairie, je finis cette longue randonnée les jambes un peu lourdes mais le coeur empli de joies. Seule la Pyrale du buis aura terni cette fin de journée mais j’ose espérer que la science saura apporter des solutions à ce effarant fléau écologique. Cette randonnée a été longue de 18,3 km pour des montées cumulées de 774 m. Le point le plus bas est à 480 m et se trouve sur l’Agly près de la jonction entre la petite route de La Bastide et le P.R descendant de Camp quant au plus haut, il est à 830 m et proche du Trou de la Relhe. N’ayant procédé à aucun enregistrement pendant ma balade, j’ai extrait tous ces chiffres du tracé que m’a aimablement fourni mon ami. Cartes I.G.N 2447 OT Tuchan – Massif des Corbières et 2547 OT Durban-Corbières – Leucate – Plages du Roussillon Top 25.

    (*) La Source de l'Agly : En 1820, le cadastre de Saint-Paul de Fenouillet désigne la résurgence de la Tirounère, située au débouché des Gorges de Galamus, comme étant la source de l'Agly (source sur le site https://fenouilledes.fr/lagly/). En 1934, des spéléologues sous-marins, dont le célèbre Robert de Joly, pensent qu'il s'agit bien là de la sortie de son cours souterrain. Depuis il semble que des investigations aient mis fin cette thèse. Si j'en crois les spécialistes en hydrologie, la vraie source de l'Agly serait située au pied du Pech du Bugarach près du col du Linas. Son tout premier lit serait donc celui asséché que j'ai remonté en premier avant de revenir à la petite cavité située sous la départementale 14. Cette information est précisée par le Syndicat Mixte du Bassin versant de l'Agly (SMBVA), information confirmée sur l'encyclopédie Wikipédia où vous pourrez retrouver les principales caractéristiques du fleuve (longueur, principaux affluents, etc....). L'eau sortant de la cavité située sous la D.14 proviendrait alors d'un ruisseau sous-terrain descendant du lieu-dit Mascarou. Il faut savoir que descendant de ce secteur, l'Agly a déjà un affluent connu qui s'appelle le Ruisseau de la Pause.

    (**) Toponymie du nom "Relhe" ou "Reille": "relhe", tel qu'écrit ici serait un vieux mot de la langue béarnaise signifiant le soc d'une charrue. Il est utile de préciser que dans cette même langue béarnaise le mot "arelhe" est soit la charrue elle-même soit le sillon que cette dernière a creusé. Faut-il donc voir dans ce nom "Relhe" que l'on écrit ici parfois "Reille", tout type de dépression ou d'affaissement à la surface de la terre et que l'on peut retrouver dans les mots "rail", "rayer", "rayon", etc.....? Notons que le mot "reille" aurait pour étymologie le latin "regula" signifiant "règle". 

    (***) Mes autres balades dans ce secteur marqué les buis : Comme indiqué dans mon article, la Pyrale du buis a complètement dévasté tous les buis, arbuste pourtant emblématique qui avait jalonné tant de mes balades dans ce secteur du Pech du Bugarach. J'ai été très triste de constater ce désastre écologique me souvenant de toutes ces merveilleuses balades : 

    La Montagne des Cornes et le lac de Barrenc depuis Rennes-les-Bains

    La Sals, source d'eau salée

    Le Circuit des Templiers (832 m) depuis Bugarach (465 m)

    Le Fauteuil du Diable depuis Rennes-les-Bains

    Le Pech Cardou ( 795 m) depuis Serres ( 271 m)

    Le Pech d'Auroux (940 m) et les Gorges de Galamus

    Le Pech de Bugarach (1.230 m) depuis La Bastide (588 m)

    Le Roc Paradet (900 m) depuis Camps-de-l'Agly

    Le Sentier des Terres Rouges depuis Serres

    Le Chemin du Facteur depuis Caudiès-de-Fenouillèdes.

    Le Château des Maures et le viaduc de l'Escargot depuis Caudiès-de-Fenouillèdes

    La Forêt domaniale des Fanges depuis le col Saint-Louis (Caudiès-de-Fenouillèdes)

     


    1 commentaire
  • Vers une déshumanisation sournoise et silencieuse ?


     

    Allons-nous vers une déshumanisation sournoise et silencieuse de notre société ? Sans vouloir être trop alarmiste, je le crains ?

     

    Il y a quelques jours, j’ai eu l’occasion de regarder deux reportages à la télé. Ils étaient plutôt dissemblables mais pourtant je leur ai trouvé une certaine similitude. Dans les deux cas, il y était question de ruralité mais pour moi, la ressemblance n’était pas là : j’y décelais surtout de la déshumanisation. Le premier reportage se passait dans la lointaine périphérie parisienne, dans une petite commune d’une zone qui jusqu’à présent avait été plutôt rurale. Enfin, c’est ce que je comprenais car le reportage évoquait la nécessité que la commune avait de construire des logements sociaux. Pour parvenir à ses fins, la municipalité n’avait pas d’autres choix que d’exproprier des habitants du cru. Dans le cas présent, le reporter interviewait un agriculteur qui n’avait pas d’autres choix que de quitter son lopin de terre sur lequel il avait œuvré une longue partie de sa vie. Ce monsieur était sans doute proche de la retraite et même s’il prenait cette expropriation avec mansuétude, on sentait bien qu’il « en avait gros sur la patate » mais qu’il ne voulait pas l’avouer au journaliste. Il ne comprenait sans doute pas « pourquoi lui ? » et surtout d’être pris dans cet engrenage d’une administration intransigeante et donc pas très humaine. D’un autre côté, on comprenait que l’indemnité qu’il allait percevoir de son expropriation l’aiderait dans sa vie future de retraité.  Le deuxième reportage, la chaîne en question voulait nous le présenter comme un progrès. Il s’agissait d’une dame qui était souffrante, vivait dans un milieu rural et rencontrait les pires difficultés pour trouver un médecin près de chez elle. En réalité, il n’y en avait plus à des kilomètres à la ronde depuis déjà pas mal de temps. Par chance, la dame pouvait marcher, il y avait encore une pharmacie dans son village (pour combien de temps ?  Le reportage ne le disait pas !) et elle alla y chercher un conseil. Par chance aussi, le pharmacien, au courant bien évidemment de ce problème majeur qu’était le « désert médical » de sa petite commune, était devenu prévoyant. Equipé du matériel adéquat, il proposa à sa cliente une téléconsultation médicale. N’ayant pas d’autres choix, la dame accepta ce contact par écran interposé et sembla ravie de cette consultation avec un généraliste qui était à l’autre bout du fil, c'est-à-dire à l’autre bout d’Internet. Enfin, c’est ce qu’elle affirma au reporter à la fin du sujet,  mais on peut aisément supposer qu’elle aurait préféré une consultation plus classique ! Le généraliste précisa qu’il avait une double activité de consultations classiques et de téléconsultations et que tant qu’il pourrait accomplir les deux, il continuerait ainsi ! Combien de temps ? Il ne le précisa pas !

    Alors, cette téléconsultation médicale a-t-elle été une bonne chose ? Oui, bien sûr, telle que présentée dans le reportage ! Cette dame était seule, n’avait pas de moyen de locomotion et avait un besoin urgent qu’un docteur digne de ce nom lui établisse un diagnostic. Cette téléconsultation régla tout ça ! Enfin, le reportage ne le dit pas mais le laissa imaginer.

    Est-ce un progrès ? Personnellement, je ne le pense pas et je considère au contraire qu’il s’agit d’un pas supplémentaire vers cette déshumanisation de la société que l’on vit maintenant depuis de trop longues années.

     

    A titre de dernier exemple, on sait tous que nos supermarchés sont depuis déjà longtemps équipés de caisses automatiques, les clients scannant eux-mêmes leurs produits et payant à une borne automatique elle aussi. Eh bien, un premier supermarché vient de franchir le pas en ayant uniquement des caisses automatiques….il est vrai seulement le dimanche. Il est à parier que cet essai sera concluant, si concluant qu’il finira par être mis en place tous les jours puis dans tous les supermarchés de France et de Navarre !

     

    Comment dans un pays qui se dit développé et donc civilisé, ayant qui plus est 5 à 6 millions de personnes sans emploi et de trop nombreux emplois précaires,  en est-on arrivé là ? A ne plus avoir à faire qu’à des robots ? A ne plus avoir suffisamment de docteurs généralistes mais également de spécialistes et de vétérinaires dans les zones rurales par exemple ?  Je ne sais pas ! Ici, dans cet article, il est surtout question de médecins mais la liste des professions économiquement « faibles » voire « insuffisantes » pourrait être longue comme un jour sans pain ! Je vous en fais grâce mais ne vous est-il jamais arrivé de ne pas trouver de plombier ou d’électricien rapidement ? Moi si !

     

    Comment en est-on arrivé à ne plus pouvoir couvrir médicalement une gigantesque partie de notre territoire, pourtant si ridicule en terme de superficie, si on la compare à bien d’autres pays ?

     

    Oui, comment en est-on arrivé là, en France, pays d’Europe, et peut-être même du monde, où le taux des prélèvements obligatoires (impôts, taxes et cotisations sociales) est un des plus élevés ? Sinon le plus ?

     

    Serions-nous trop nombreux dans ce si petit pays ? Aurions-nous grossi si vite au point d’être contraint de demander à un agriculteur de délaisser sa terre pour construire des logements dans l’urgence ? Aurions-nous grossi si vite au point d’être dans l’incapacité de mettre en place des services médicaux ou autres de qualité ? J’en suis convaincu et pourtant il me faut tout de même parler de déshumanisation de notre société. Les deux ne me paraissent pas contradictoires même si certains économistes affirment que l’immigration serait une valeur ajoutée pour notre économie, ce que je ne pense pas. En tous cas, pas toute l’immigration et pas celle non choisie !

     

    Ma crainte dans la fuite en avant de cette déshumanisation est qu’elle entraîne avec elle bien d’autres turpitudes beaucoup plus graves.  Moins d’humanisme, c’est une régression inéluctable de l’Homme, c’est ne plus prendre son temps pour tout et notamment celui nécessaire pour apprendre, réfléchir, pour penser, pour être respectueux et attentif de son prochain et digne de soi. C’est par la force des choses perdre des règles de base, des traditions, des repères, de sa liberté, de son identité individuelle et donc forcément des racines qui nous sont communes, collectives et auxquelles inévitablement nous tenons quand nous les voyons être « déracinées » les unes après les autres.

     

    Pourquoi cette déshumanisation ? Internet ? L’hyper technologie et l’intelligence artificielle ? La mondialisation ? Des politiques et des économies trop libérales ? La main mise du monde de la finance sur les affaires de la planète ? Trop de bureaucratie ? Trop d’individualisme ? Trop de cupidité ? Trop d’immigration non souhaitée ?

     

    Sans doute tout ça à la fois et bien d’autres choses encore, avec bien évidemment de nombreuses interconnexions entre toutes ces raisons. A toutes ces raisons est-il possible d’y rattacher des mots plus simples ? « Concurrence », « rivalité », « compétition », « discorde », par exemple ! Oui, je pense que ce sont les bons mots ! Ils s’appliquent aux hommes, aux entreprises, à nos institutions et à tous les pays quels qu’ils soient !

     

    Comme cette déshumanisation ne cesse de s’amplifier et donc de s’aggraver un peu partout sur notre planète, il faut simplement espérer que tous ces mots ne se transformeront pas en des synonymes plus violents comme « tuerie », « conflit » ou « guerre », mots malheureusement déjà trop présents sur notre Terre. Oui, il faut l’espérer car la situation (les situations) qu’on le veuille ou non se dégrade(nt). Ce n’est pas être pessimiste mais réaliste que de le dire !

     

    L’humanisme, richesse parmi les plus précieuses que nous ayons, est menacé de toutes parts. En France, il est un héritage du Siècle des Lumières et ces lumières ont rayonné sur le monde au point d’en éclairer pendant longtemps une immense partie. De nos jours, ces lumières s’estompent et si nous n’y prenons pas garde, le risque est grand qu’elles s’éteignent petit à petit et à tout jamais. Le civisme,  l’éthique, l’éducation et l’enseignement de nos enfants, petits-enfants et futurs descendants seront essentiels pour l’avenir de l’humanité (et donc de la France), mais pas suffisants. Il faudra aussi mettre des garde-fous et se défendre contre les attaques incessantes qui prônent d’aller dans le sens contraire : le capitalisme et la robotisation à outrance, l’ubérisation, le néo-libéralisme, les archaïsmes et les pressions idéologiques, religieuses et communautaristes, l’abêtissement des peuples et l’ignorance. La partie n’est pas gagnée mais il faudra coûte que coûte la jouer !

     

    Si on laisse les choses en l’état, voire se dégrader,  un jour, pas si loin que ça, il n’y aura plus de petits agriculteurs, qui bichonnent leur lopin de terre car ils n’ont que ça pour vivre. Plus de petits agriculteurs, c’est la disparition quasi certaine de bons produits, c’est un pan colossal de notre économie qui se meurt, c’est une perte inéluctable de création de nouvelles richesses, c’est moins de possibilité de faire face à une demande alimentaire de plus en plus importante. Le chien se mort la queue mais sans comprendre qu’un jour il n’aura plus rien à se mordre. Si on laisse les choses en l’état, voire se dégrader,  un jour, on demandera à cette dame souffrante de prendre contact avec un robot. Ce dernier lui délivrera un diagnostic. Comme il n’y aura plus de pharmacie dans son petit village, elle n’aura pas d’autre choix que de commander ses médicaments sur Internet. Elle continuera d’être ravie n’ayant plus d’autres choix que celui-ci mais l’homme aura totalement disparu de ses relations et se sont des ordinateurs qui prendront en charge notre santé, connaissant tout par cœur de nos antécédents médicaux.

     

    Dans le cas de cette dame citée en préambule, imaginons toutefois qu’Internet ait été en panne. Imaginons toutefois qu’elle ait été plus gravement malade et dans l’impossibilité de se rendre à la pharmacie…..Que serait-il advenu ?

     

    Le Samu serait venu la chercher ?  Sans doute ! Par bonheur, il y a encore un peu d’humanité dans certains lieux de notre chère France ! Espérons que personne n’aura l’idée de les supprimer !

     

    Etonnons-nous après ça que les urgences soient débordées et le personnel éreinté car insuffisant là aussi, et en grève depuis quelques temps déjà…..

     

    Oui, la société va dans le sens de la déshumanisation et que font nos gouvernants et élus pour y remédier ?

     

    Pas grand-chose, tiraillés qu’ils sont entre le souci de ne pas déplaire ;  souvent avec l’idée première d’être réélus ; leur pouvoir décisionnaire parfois limité ; au niveau des communes par exemple ; les nombreux groupes de pression qui les influencent, les conflits d’intérêts, les décisions à mettre en œuvre pour certains,  sans se mettre à dos ce qui n’y sont pas intéressés ou n’y ont pas droit. Ce n’est pas simple il faut l’avouer, mais le constater ne sera jamais suffisant !

     

    Oui cette régression galopante de l’humain sera gagnée si chacun d’entre-nous en prend conscience et fait en sorte d’agir sagement et en conséquence dans son quotidien. C’est mon humble avis. Il ne faut pas avoir peur des machines mais des hommes qui les inventent et les font fonctionner. Le célèbre physicien Stephen Hawking  n’était-il pas inquiet de voir certains hommes sacrément perturber par leurs propres innovations ?


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  •  Dans les pas des moines défricheurs 

    Six jours de randonnées dans le Haut-Jura

     

    UN PEU D'HISTOIRE … ET DE GEOGRAPHIE

    Avant chaque voyage, je potasse dans les encyclopédies et sur Internet, l'histoire et la géographie de la région que nous allons visiter.

    C'est ainsi que j'apprends que Saint-Claude, capitale du Haut-Jura a été fondée vers 435 sur un site gallo-romain par deux moines venus de Lyon, Romain et son frère Lupicin qui créent un monastère.

    Situé au confluent de la Bienne et du Tacon, ce lieu, dénommé Condat, prospère et de nombreux moines s'installent dans cette région très forestière.

    Ils déboisent pour se constituer des domaines agricoles et sylvicoles. Ils défrichent et créent de nombreux sentiers pour avoir accès à des terres de montagne jusque là hostiles. On finit par les appeler, fréquemment de manière péjorative : " les moines défricheurs ", car on les oppose souvent sans raison aux " moines bâtisseurs ".

    De leur installation va naître une communauté monastique qui prendra peu à peu le nom d'Abbaye de Sain-Oyend. Autour de cette Abbaye, se développe une cité qui connaît une grande renommée dans toute l'Europe médiévale dès le 5eme siècle.

    Au 12eme siècle, le lieu devint très connu quant on révéla que le corps d'un abbé dénommé Claude, mort depuis 600 ans et fondateur d'une communauté avait été retrouvé intact. Le roi Louis XI, lui-même, s'intéressa au phénomène et les pèlerins affluèrent dans la région pour voir ce " faiseur de miracles ". On donna son nom à l'Abbaye et c'est ainsi que la ville fut peu à peu renommée Saint-Claude.

    Chaque pèlerin apportait ses connaissances et rapidement Saint-Claude et ses alentours devinrent le haut-lieu d'un artisanat très actif.

    Travail du bois et de l'os, orfèvrerie, ces traditions se perpétuent encore aujourd'hui par de nombreux métiers mais surtout par la fabrication de pipes dans les racines du bois des bruyères dont Saint-Claude reste la capitale mondiale, ainsi que la taille des diamants et des pierres précieuses.

    Au 14eme siècle, les habitants du Haut-Jura furent décimés par une effroyable peste noire qui laissa la région pratiquement désertique.

    A partir du 15eme siècle, les règles monastiques se desserrèrent et Saint-Claude perdit de son faste. Malgré ce relâchement, le temps avait fait son œuvre et les moines avaient apporté leur savoir-faire en architecture et dans de multiples métiers, leurs passions et leurs secrets pour la création de bons produits (fromages, charcuteries, vins, etc.…).

    Au fil des siècles suivants, les terres furent dévastés puis colonisaient par de puissants seigneurs mais les moines avaient laissé aux serfs leurs traditions et techniques agricoles.

    On dit même que les moines défricheurs seraient les véritables créateurs des combes telles qu'on peut les voir aujourd'hui et par là même de la transformation du paysage du Massif Jurassien.

    Ils seraient à l'origine de ses pâtures insérées entre deux crêts calcaires. Dès le Moyen-Age, ils s'aperçoivent que les fonds des combes ont des sols riches et profonds qui recueillent les eaux de ruissellement. La plupart du temps, les crêts sont abondamment boisés et ces bois protègent les cultures. Grâce à cette formation particulière, les combes deviennent très propices à l'agriculture.

    Aujourd'hui les combes présentent un autre attrait : les randonnées.

     Comme le dit si bien un dépliant d'information: " les combes sont des paysages très particuliers aux lignes ondulantes et avec de profondes perspectives qui invitent à la randonnée sous toutes ses formes ".

     

    PREAMBULE

    C'est désormais le temps des vacances. Période ô combien désirée, les vacances sont le moment privilégié pour oser plus. Se donner plus de temps pour soi, mieux respecter son corps, ses rêves ; augmenter l'espace de l'écoute pour mieux entendre, voir plus loin et peut-être se rendre plus disponible pour accueillir l'imprévisible.

    Les vacances, quand elles ne sont pas stressées par le " faire ", permettent d'entrer dans plus " d'être ". Avez-vous remarqué, justement durant l'été, comme les jours plus lumineux et plus longs augmentent la part du sensible, comme les soirées donnent plus de goût à la vie, comme les matins nous agrandissent…. (Jacques Salomé-Sociologue).

     "Saveurs des Hautes-Combes", c'est le nom du circuit pédestre que nous avions décidé de faire en cet été 2003. Après les Pyrénées et l'Auvergne, nous avions envie de découvrir le Jura et c'est tout à fait par hasard que j'avais remarqué cette randonnée "gastronomique" sur Internet.

     Avec ces 400 Kms sur deux ou trois semaines, la Grande Traversée du Jura était bien trop longue. Par contre, cette balade dans le Parc Naturel Régional du Haut-Jura présentait l'avantage de se faire sur six jours, sans bagages et arrivée le soir dans des hôtels 2 étoiles. Goûter à la gastronomie locale et aux produits du terroir était aussi une aubaine non négligeable en faveur de cette formule. Nous fûmes rarement déçus.

     La présentation du circuit et les quelques photos reçues de l'agence Haut-Jura Tourisme à Saint-Claude avaient fini de nous convaincre. Les paysages en pente douce d'un vert intense paraissaient reposants et c'est tout à fait ce qu'il nous fallait pour se vider la tête et éliminer le stress d'une longue année de travail.

    L'accueil se faisant le dimanche 29 juillet en fin d'après-midi à l'hôtel Saint-Hubert à Saint-Claude, nous avions décidés de quitter Saint-Estève le samedi 28 juillet au matin et ne nous rendre dans le Jura sans prendre d'autoroutes.A cause de la canicule et de la sécheresse, c'est une France couleur " paille " que nous traversons. Après une halte le samedi soir dans la jolie ville ardéchoise d'Annonay, nous continuons notre voyage le dimanche et entrons dans Saint-Claude vers 14 heures. Il est vraiment trop tôt pour se rendre à l'hôtel. Genève et son célèbre lac ne sont qu'à 53 Kms et nous décidons immédiatement de nous y rendre par le Col de la Faucille.

    Quel contraste avec certains départements que nous venons de traverser, ici tout est vert et nous roulons essentiellement à travers d'épaisses forêts de résineux.

    Découverte de Genève sur la "Grande Roue"

    Après une très brève découverte de Genève où nous profitons du paysage, en nous élevant au dessus de lac grâce à une " Grande Roue ", c'est sous des trombes d'eau que nous rejoignons Saint-Claude. Avec le temps qu'il fait, nous sommes très anxieux quant à la météo du lendemain et des jours à venir.

    Il est 18 heures quant nous arrivons à l'hôtel Saint-Hubert. Nous sommes attendus car la gracieuse et jeune hôtelière nous remet immédiatement le dossier d'accueil composé de deux cartes IGN, des topo-guides pour chacune des journées de marche et de quelques dépliants sur le Jura.

    Après un excellent repas au " Loft ", le restaurant de l'hôtel, fait de crudités, de charcuteries régionales et de lapin rôti, nous rejoignons notre chambre où j'approfondis l'étude de notre première étape.

    Je m'inquiète aussi de la météo des jours suivants, mais je finis par apprendre que les prévisions sont excellentes pour toute la semaine.

    Je m'endors avec l'idée que tout se passera bien et que les moines défricheurs veilleront sur nous tout au long de cette randonnée.

     LE PARCOURS : 6 étapes pour un total de 127 kilomètres

    accés aux étapes en cliquant dessus

    1ere étape : Villard-Saint-Sauveur (alt.500m) -Les Bouchoux (alt.1000m) (16,5 km) 

    2eme étape : Les Bouchoux (alt.1.000m)-Lajoux (alt.1.180m) (23 km) 

    3eme étape : Lajoux (alt.1180m)-La Cure (alt.1150 m) (20km)

    4eme étape : La Cure (alt.1.150m)- Les Cressonnières (alt.1.150m) (20 km)

    5eme étape : Les Cressonnières (alt.1.150m)-Lamoura (alt.1.150m) (25 km)

    6eme étape : Lamoura (alt.1.150m)-Villard Saint-Sauveur (alt.500m) (23 km)

    J'ai essayé d'enjoliver ce récit avec des extraits de magnifiques poémes d'Henri Marandin trouvés sur Internet. Je ne le connais pas personnellement, mais je le remercie par avance à m'autoriser à les insérer dans mon histoire car ils sont le parfaits reflet de toutes nos merveilleuses découvertes jurassiennes. Je les avais trouvé sur le site suivant http://perso.wanadoo.fr/cremerie.clement/Poemes.html lequel samble avoir disparu.

    Dans les pas de moines défricheurs - 1er jour - Préambule 

    Haut-Jura Tourisme, organisateur de ce circuit

    cliquez sur la brochure pour vous rendre à la première étape et sur le moine pour revenir à la page d'accueil du blog.

     


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  • Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

    1ere étape : Villard-Saint-Sauveur (alt.500m) -Les Bouchoux (alt.1000m) (16,5 Km)

    Lundi 28 juillet 2003

    (Extrait de : Saint-Claude, diamant du Jura, poème d'Henri Marandin)

    Sertie dans son écrin aux reflets d'émeraude

    La cité corsetée de falaises pataudes

    Coupées de cascades en vertiges perlés

    Est taillée en diamant aux facettes dorées

    Berceau historique d'artisans astucieux

    Artistes ignorés, discrets et besogneux.

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    8 heures 30, après un riche petit déjeuner, c'est sous un ciel bleu éclatant que nous quittons l'hôtel Saint-Hubert, direction le centre-ville de Saint-Claude. Nous devons faire quelques emplettes pour le repas de midi et nous en profiterons pour saluer Dominique Tournier, l'organisatrice de ce séjour.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

    A l'hôtel Saint-Hubert, juste avant le grand départ

    Nous garons notre voiture sur le parking de la cathédrale (ancienne abbaye) et marchons dans la rue du Marché. Nous avons quelques difficultés à trouver l'agence de voyages Haut-Jura Tourisme. Aussi, pendant que Dany fait les courses, je continue à chercher et finis par trouver l'agence. Après cette sympathique rencontre et la prise de quelques précieux renseignements, je retrouve Dany dans la rue. Elle vient de terminer ses achats.

    Nous sommes fin prêts et comme indiqué sur le topo, nous reprenons la voiture, direction Villard-Saint-Sauveur qui n'est qu'à quelques kilomètres. C'est le lieu de départ.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

      Villard Saint Sauveur, nous sommes parés pour le départ

    Nous arrivons devant l'hôtel " Le Retour de la Chasse " et garons la voiture sur le grand parking contigu. Nous savons que notre véhicule va rester là pendant six jours, mais nous ne sommes pas très inquiets car le coin est retiré et parait parfaitement calme et tranquille. Il est déjà 10 heures, mais nous préparons tranquillement nos sacs à dos. Nous relisons le début du topo de la première étape, mais Dany et moi avons deux interprétations de la route goudronnée qu'il faut prendre pour démarrer. Heureusement, nous trouvons rapidement la flèche verte et noire ONF sur un arbre qui annonce le départ et la direction.

    Nous continuons de monter, passons comme indiqué devant deux réserves d'eau. Le sentier tourne vers la gauche, or en regardant la carte IGN, nous devrions partir vers la droite et longer le terrain de golf. Décidemment, la randonnée commence mal. Nous redescendons d'une centaine de mètres jusqu'aux réserves d'eau, nous traversons un peu le green et retrouvons le bon chemin fait de nombreux cailloux. Décidemment, l'ombre des moines défricheurs plane avec bienveillance au dessus de nous.

    La montée est progressive mais agréable car essentiellement en sous-bois dans une forêt très sombre de feuillus. Après 400 mètres de dénivelés environ, nous arrivons " À la Côte " où nous profitons d'un point de vue superbe sur la vallée du Flumen, les sommets environnants et le Chapeau de Gendarme. Nous passons près d'une magnifique ferme restaurée et continuons vers le lieu-dit " La Rapine ". Le temps d'une amusante photo chez un sculpteur sur bois et nous rejoignons une petite route en asphalte que nous poursuivons sur deux kilomètres jusqu'au carrefour " Le Crêt Joli ". A cet endroit, les petits panneaux indicateurs sont bien visibles et indiquent parfaitement la direction " Les Platières " qui est à prendre. Nous passons devant plusieurs bâtiments de la colonie de vacances et plus loin, nous quittons enfin le bitume pour un chemin caillouteux.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

    Arrivée au lieu-dit " Sur la côte "

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

     Arrivée au lieu-dit " La Rapine "

    Sur la messagerie du portable, Jérôme nous informe de la prise d'un " énorme trophée " en chasse sous-marine. Nous le rappelons pour le féliciter et l'informons du plaisir que nous prenons à marcher dans ces magnifiques et verdoyants paysages. A cette altitude (1.050 m), nous traversons nos premières combes entourées de grands sapins et de splendides épicéas. Après le lieu-dit et carrefour " En Suza " et en direction du circuit " Les Fournets ", nous stoppons dans un pré-bois de noisetiers pour déjeuner. Nous surplombons et admirons la très verte Vallée du Tacon. A l'ombre de ces petits arbres, nous mangeons l'excellente charcuterie achetée à Saint-Claude. Allongés sur l'herbe, nous observons de très jolis papillons. Les plus gros sont oranges ou bien noirs, d'autres plus petits sont d'un " bleu ciel " presque blanc. Nous avons vraiment le sentiment de faire corps avec la nature et sommes satisfaits car c'est bien cela que nous sommes venus chercher.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

     Première combe rencontrée aux Platières

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

     Pré-bois de noisetiers où nous piqueniquons.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

    Arrivée au carrefour et à la stéle des "Fournets"

    Après le déjeuner, la randonnée se poursuit essentiellement en forêt sur un chemin pratiquement plat. Après le carrefour " Les Thérèses ", à l'altitude de 1.110 mètres, nous arrivons au croisement et à la stèle des " Fournets ".

    Cette stèle a été édifiée en hommage à des résistants locaux fusillés pendant la 2eme guerre mondiale.

    Ces terres du Haut-Jura furent parmi les premières à subir l'occupation allemande et dès l'annonce du Service du Travail Obligatoire (S.T.O), de nombreux habitants " réfractaires " rejoignirent les maquisards de Franche-Comté. Nombreux, sont ceux qui y laissèrent leurs vies plutôt que d'obéir ou de céder à l'occupant.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

    Un sentier où foisonnent les épilobes

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

    Au lieu-dit " La Petite Coinche "

    Après la stèle, la forêt est moins dense et notre marche se poursuit en lisières de prés où foisonnent les épilobes. Ces grandes fleurs violacées en forme d'épis appelées aussi " laurier de Saint-Antoine " ont de multiples vertus culinaires et thérapeutiques.

    Les chemins sont eux parsemés de vulpies plus communément appelées " queues de rat ". Je me souviens que ma mère les faisait sécher puis les donnait aux canaris qui se régalaient des petites graines.

    Ces deux graminées feront partie des plantes les plus coutumières que nous rencontrerons tout au long de nos six jours de marche.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

     En direction de la " Croix des Couloirs " avec en contrebas "Les Bouchoux"

    A la sortie du bois, nous retrouvons le bitume et quelques fermes disséminées au lieu-dit " La Petite Coinche ". En quelques minutes, nous atteignons la route départementale D.25E1. De ce croisement dénommé " Le Crêt ", nous apercevons déjà la "Croix des Couloirs " que nous devons atteindre. Nous n'avons aucun mal à trouver le balisage bleu peint sur des pierres ou sur des piquets qui délimitent des pâturages.

    Le ciel s'est bien couvert de gros nuages qui roulent vers l'est, poussés par une brise rafraîchissante. Il est presque 16 heures et malgré les litres d'eau que nous avons bu, une petite faim nous tiraille l'estomac. Nous arrêtons dans un pré, bien à l'abri de ce petit vent frais, pour une collation faite de café et de biscuits. Là et après six heures de marche, nous rencontrons des promeneurs. Cet homme et cette femme sont les premiers êtres humains que nous croisons depuis notre départ de Villard Saint-Sauveur.

    Nous atteignons " La Croix des Couloirs " dominant le village des Bouchoux, objectif final de cette première journée. Cet endroit semble très prisé car de nombreux promeneurs et randonneurs cheminent sur cette arête rocheuse. Cet engouement parait normal tant le panorama est splendide. Vers l'est, les Monts du Jura et le village de La Pesse. Vers le Sud, le Crêt de Chalam et à l'ouest, la verdoyante vallée du Tacon.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

     Arrivée à la " Croix des Couloirs "

    Malgré un ciel fort menaçant, nous prenons le temps de faire quelques photos car l'arrivée n'est plus très loin. Nous longeons la falaise, au dessus de laquelle de grands oiseaux tournent en croassant.

    Il est 17 heures, nous trouvons rapidement les traces rouges et jaunes du GRP puis amorçons la descente en forêt puis à travers une pâture, direction le hameau Les Bouchoux.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

     A la " Croix des Couloirs " avec tout en bas le village " Les Bouchoux "

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux  

    ---------Gros plan sur l'immense croix--------------Un étrange épouvantail, au loin la croix--------Visite du village "Les Bouchoux"---

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

    Devant la charmante Auberge "La Chaumière"

     Une demi-heure plus tard, nous entrons dans l'adorable village des Bouchoux où le propriétaire de l'auberge " La Chaumière " nous accueille avec gentillesse et bienveillance.

    Après une bonne douche et un repos bien mérité dans notre jolie chambre, nous apprécions pleinement la terrasse ombragée de l'auberge en dégustant une boisson glacée. Nous visitons rapidement le village car c'est tout petit et pratiquement vide l'été.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 1 - Villard-Saint-Sauveur - Les Bouchoux

    Repos mérité et boisson glacée à la terrasse ombragée de l' Auberge "La Chaumière"

    La soirée se poursuit par un délicieux dîner où nous avons le plaisir de déguster une pintade à la crème à base de Savagnin (1) accompagnée de morilles et arrosé d'un Poulsard (2) rouge, mais avec une très belle couleur " rosé pelure d'oignon ". Attablés, nous retrouvons une femme et son fils, des " hollandais ", que nous avions hier soir comme voisins de table au " Loft ". Nous imaginons qu'ils font le même circuit que nous mais n'en sommes pas certains. Ils ne parlent pas français et le dialogue est difficile.

    Sur tous les plans, nous ne pouvons que pleinement nous satisfaire de cette première journée : paysages magnifiques et reposants, très bon accueil, excellente cuisine, vin remarquable. Le nom "Saveurs du Haut-Jura" de ce séjour/randonnée n'est pour l'instant pas usurpé ! 

    C'est dans le calme de ce minuscule village blotti au fond d'une combe du Haut-Jura que nous nous endormons paisiblement.

    (1) Le Savagnin est un cépage avec lequel on élabore un vin du même nom. Ce vin est jaune doré, profond et ambré. Très charpenté en bouche, il est fruité avec une dominance d'amandes ou de noix. Il vieillit très bien.

    (2) Le Poulsard ou Ploussard est un vin d'Arbois dont la couleur varie en fonction de l'ensoleillement, de l'exposition et de la maturation du raisin. Il peut donc aller du rouge grenat au rosé pelure d'oignon. Il est très rafraîchissant et léger avec des odeurs de fruits rouges et un arôme grillé et vanillé du au vieillissement sous bois.

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  • Dans les pas de moines défricheurs - Etape 2 Les Bouchoux - Lajoux

    2eme étape : Les Bouchoux (alt.1.000m) - Lajoux (alt.1.180m) (23km)

    Mardi 29 juillet 2003

    (Extrait de : Panorama jurassien, poème d'Henri Marandin)

    Pays des randonnées au long des hautes combes

    Sur l'arête des crêtes au fin gazon semé

    Dans les clairières muettes comme des tombes

    Parmi les gentianes et les genévriers.

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    Nous avons parfaitement dormis mais sommes tout de même très matinaux car l'étape d'aujourd'hui avec ses 23 kilomètres est très longue. Comme notre intention est beaucoup plus de flâner que de courir, nous souhaitons partir tôt.

    Nous commandons un panier-repas pour le midi. Pour le prix de 8€ par personne, ce casse-croûte composait d'un peu de charcuterie, d'un œuf dur, d'une pomme et d'un peu de pain déjà rassis s'avèrera très décevant. Après le café au lait accompagné de confitures et de pain beurré, nous sommes parés pour repartir.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 2 Les Bouchoux - Lajoux

    Départ des Bouchoux que l'on aperçoit au loin dans la vallée du Tacon

    Nous devons retourner jusqu'aux carrefours " Le Crêt " puis " Les Fournets " traversés hier. Nous empruntons pour cela, la route goudronnée qui monte sur plus de deux kilomètres. A droite se dresse la falaise de la " Croix des Couloirs " parcourue hier et en dessous la large vallée du Tacon. Les grands oiseaux qui semblent être de grands rapaces sont toujours là à planer.

    Arrivés au carrefour " Le Crêt ", le chemin que nous refaisons en sens inverse, devient familier jusqu'à la stèle des Fournets. Là, nous prenons sur la droite un sentier forestier qui se poursuit sur environ un kilomètre.

    Vers 10 heures, avant de sortir de la forêt, nous prenons le temps d'une pause " barres de céréales, fruits secs et boisson énergétique " puis reprenons notre parcours sur une longue route de bitume qui nous doit nous mener au village " Les Moussières ".ou

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    Direction la Petite Coinche et les Fournets------------------------------------Arrivée au village " Les Moussières "

    A hauteur du lieu-dit " Sous la Joux ", une vache gît au bord de la route, la mort est récente car aucune odeur n'émane de cette carcasse. La pauvre bête est couchée sur l'herbe, la langue pend longuement hors de son mufle béant. Comment est-elle morte ? A-t-elle était heurtée et traînée par un véhicule comme semble l'indiquer quelques éraflures sur son poitrail ? Nous ne trouvons pas d'explications car en contrebas à proximité d'un gîte d'étape d'autres vaches identiques paissent tranquillement.

    Vers 11 heures, nous évitons le village " Les Moussières " (nous y reviendrons à la fin de notre séjour pour acheter d'excellents fromages et de très bons vins à la Maison des Fromages du Haut-Jura) et continuons la route en asphalte par les routes départementales D25 puis D292E1 jusqu'au carrefour " Les Rasses ".

    Nous quittons enfin et sans regret le bitume qui commence à avoir raison de la plante de mes pieds déjà bien échauffés par l'étape d'hier.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 2 Les Bouchoux - Lajoux 0Dans les pas de moines défricheurs - Etape 2 Les Bouchoux - Lajoux

    Très joli chalet à la " Combe Bry " ----------------------------------------Au carrefour " Les Rasses "

    Après le maigre repas que nous ingurgitons en lisière de la forêt du Pré-Coquet, c'est une très agréable marche que nous poursuivons dans de petits pré bois de hêtres et de résineux et dans de vertes et sinueuses pâtures.

     Nous arrivons bientôt à hauteur de la Combe de Laisia où un point de vue superbe nous permet de voir au loin jusqu'à Saint-Claude. Cet endroit nous donne un bon aperçu du chemin parcouru et du dénivelé déjà réalisé.

     Nous croisons une famille de vététistes qui se rend aux Moussières. Ils cherchent leur chemin et c'est avec plaisir que nous leur indiquons le sentier à prendre. Pendant ce temps, les " hollandais " nous ont rejoints et nous dépassent. Notre intuition était la bonne : ils font bien le même circuit que nous.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 2 Les Bouchoux - Lajoux

    Après le déjeuner, notre marche se poursuit dans le petit bois du Pré Coquet

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 2 Les Bouchoux - Lajoux

    A la Combe Laisia avec vue sur St Claude

    Nous continuons sur 500 mètres une chaussée goudronnée qui correspond à une portion du Tour du Haut-Jura.

    Comme indiqué sur le topo, nous quittons ensuite cette route par la droite, traversons une très belle combe et par un chemin empierré, montons vers le lieu-dit " La Vie Neuve ".

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    Devant l'immense mairie " Les Molunes " puis sur une prairie qui ressemble à un green de golf

    A cet endroit, nous retrouvons la D292E1 et l'immense Mairie des Molunes. Mais où sont les habitations de cette surprenante commune ? Quelques maisons éparpillées par ci et par là, à des centaines de mètres à la ronde !

     Le parcours suit le GR de pays balisé rouge et jaune sur 150 mètres, puis nous bifurquons à gauche au niveau d'un beau chalet de bois. Là aux Molunes, le sentier se faufile à travers une verte et ondoyante prairie qui ressemble à un terrain de golf.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 2 Les Bouchoux - Lajoux

    A la Combe de l'Aubergette, Dany a pris un peu d'avance, ce qui me permet de prendre cette belle photo sous un ciel tourmenté

    Le temps d'une superbe photographie et nous traversons la Combe de l'Aubergette tout aussi ravissante, sous un beau ciel tourmenté. Je garde l'appareil photos en permanence en bandoulière tant les paysages sont plus beaux les uns que les autres.Nous suivons les combes, passons entre une ruine et la chapelle en bois de Cariche et arrivons bientôt au carrefour balisé " Les Platières ". Là, après la traditionnelle pause-goûter, nous continuons le GR de pays qui poursuit sa route dans une clairière pour descendre progressivement vers la Combe des Alouettes et La Trace.

    Tout en descendant, nous apercevons au loin un village plus important que nous supposons être Lajoux. En voulant vérifier sur la carte, nous constatons que celle-ci est tombée du porte-cartes que Dany portait en bandoulière.

    Paniquée, Dany sait que sans cette carte IGN, la poursuite de notre circuit devient impossible, elle tombe son sac à dos, repart en trombe et me laisse en plan. Je m'assois sur un muret et l'attends tout en réfléchissant.

    Quand avons-nous pu la perdre ? L'avions-nous encore lors du goûter ? Que puis-je faire si elle revient sans la carte ? Je ne vois qu'une solution : appeler l'agence pour se faire remettre un autre exemplaire.

    Vingt minutes se sont écoulées quand Dany arrive toute essoufflée en brandissant fièrement la " miraculeuse " carte. Quelle performance après 7 heures de marche ! En courant, elle a réussi à rattraper des promeneurs que nous avions croisés et qui avaient trouvé la carte sur le chemin ! Une fois de plus, Saint-Romain et Saint-Lupicin, les moines défricheurs veillent sur notre randonnée.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 2 Les Bouchoux - Lajoux ODans les pas de moines défricheurs - Etape 2 Les Bouchoux - Lajoux

     Après le carrefour Les Platières --------------------------------Près de la " Combe des Alouettes "

    Rassurés, nous reprenons notre itinéraire, arrivons de nouveau sur la D.292 et rejoignons Lajoux non sans avoir longuement conversés avec une vieille paysanne fort chaleureuse que nous croisons sur le bord de la route.

    Il est 17 heures quant nous entrons dans l'hôtel " La Haute Montagne " à Lajoux. L'accueil est plus réservé qu'aux Bouchoux mais le cadre est très agréable avec une charmante et lumineuse chambre donnant sur un grand parc.

    Après une stimulante douche, Dany est déjà d'attaque et prête à visiter le village. Moi, j'ai la plante du pied droit bien rouge et les mollets qui me font mal. Je suis moins enclin à faire une longue ballade. Nous sortons de l'hôtel et remontons la D.436 jusqu'à une épicerie où nous trouvons des cartes postales. Notre visite se poursuit jusqu'à une fromagerie où prévoyants pour le pique-nique du lendemain, nous achetons de larges coupes de comté, de bleu de Gex et de gruyère ainsi qu'un gros saucisson.

    Dany veut continuer cette visite jusqu'au layetier (1) qui se trouve beaucoup plus loin sur la route. Je suis bien fatigué et ma crainte, c'est qu'à cette heure aussi tardive, les visites soient terminées.

     Nous retournons à l'hôtel où après l'écriture des cartes postales, il est déjà l'heure du dîner. C'est d'un bon appétit que nous engloutissons l'excellente saucisse de Morteau à la crème qui nous est proposée. Le vin rouge d'Arbois que nous commandons s'accorde parfaitement avec cette cuisine typiquement jurassienne. Après cette longue étape et ce savoureux repas, nous n'avons qu'une hâte : rejoindre notre chambre et nous reposer.

    Il n'est pas encore 21 heures et nous sommes déjà couchés. Le grand parc est calme. Un petit air frais entre par la fenêtre ouverte. De temps à autre on discerne, le faible bruit de quelques voitures qui passent sur la route qui va de Saint-Claude à Genève.

    Dany lit le topo de l'étape du lendemain qui va de Lajoux à la Cure. Pendant ce temps, j'analyse le parcours sur la carte IGN. Encore une vingtaine de kilomètres à parcourir, il est temps d'éteindre la lumière et de dormir.

    (1)Le layetier est un fabricant de meubles miniatures. Cet artisanat a eu son heure de gloire avec le développement de l'horlogerie suisse et jurassienne. Dans ce métier, où il était indispensable de ranger de nombreuses pièces minuscules, ces petits meubles avec une multitude de tiroirs devenaient indispensables et le layetier était donc un artisan essentiel.

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     Un repos bien mérité à notre arrivée à Lajoux------------------------------- Le très bel hôtel de la Haute Montagne à Lajoux

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  • Dans les pas de moines défricheurs - Etape 3 - Lajoux - La Cure

    3eme étape : Lajoux (alt.1180m)-La Cure (alt.1150 m) (20km).

    Mercredi 30 juillet 2003

    (Extrait de : La Maison Clément, poème d'Henri Marandin) 

    Goûte aux pulpes fruitées, aux croûtes bien moelleuses

    Des fromages de France aux pâtes savoureuses

    Délices des gourmets, élixirs de santé

    Déguste-les avec le Pupillin rubis

    Le Jaune de l'Etoile, l'Arbois rosé joli

    La gaîté dans les yeux, dans le cœur la Comté.

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    Nous avons dormi plus qu'à notre habitude. Le petit déjeuner est servi à partir de 8 heures, nous ne sommes pas pressés. Après la toilette, je soigne mon pied gauche endolori. Grâce au spray que j'ai passé hier, aucune cloque n'est apparue, mais la plante du pied est rouge. Ce matin, j'ajoute par-dessus le spray, un large pansement de sparadrap.

    Nous rangeons nos bagages et écoutons distraitement les infos à la télé.

    Il est 8h30 et par la D.436, nous nous éloignons de Lajoux. Nous voulions visiter le " Grenier Fort " (1) mais il est encore trop tôt.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 3 - Lajoux - La Cure

     Nous quittons Lajoux vers le " Circuit de La Vigoureuse "

    (1) Le Grenier Fort est une petite bâtisse renforcée que les paysans construisaient à côté de leur ferme, à l'opposé des vents dominants pour éviter les flammèches en cas d'incendie. Les fermiers y emmagasinaient tous leurs biens essentiels (récoltes de grains, titres de propriétés et documents importants, habits, coffres, matériels agricoles, etc.…). Dans une cave voûtée on conservait au frais, les légumes, les semences et les autres produits de consommation nécessaires pendant les longs mois d'hiver. Ces précautions étaient indispensables car les incendies étaient très fréquents. En effet, le bois était abondamment utilisé à la fois pour les constructions mais aussi pour le chauffage et la cuisson des aliments. Compte tenu de l'isolement des fermes, les paysans ne devaient compter que sur eux-mêmes pour survivre en cas de d'incendie. Aucun secours extérieur n'était à espérer.

    A la sortie du village, nous prenons à droite et arrivons à un carrefour pédestre balisé, nous empruntons une petite route goudronnée indiquant " Circuit de la Vigoureuse ". Tout en montant, nous regardons Lajoux s'éloigner puis disparaître derrière quelques très beaux chalets. Nous suivons maintenant un balisage bleu en direction du " Crêt de la Vigoureuse " et arrivons par un large chemin, peu de temps après à un nouveau carrefour " Chez Gauthon ". Là, quelques vaches peu effarouchées viennent à notre rencontre et semblent nous montrer le chemin en tournant vers notre gauche.

    En effet, près d'une petite ferme, d'autres vaches broutent paisiblement une herbe bien grasse et ce n'est pas sans difficulté que nous trouvons dans ce pré et sur quelques rochers, les traces bleues qui montent vers le sommet du crêt.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 3 - Lajoux - La Cure oDans les pas de moines défricheurs - Etape 3 - Lajoux - La Cure

     Sur le chemin du " Circuit La Vigoureuse --------------------Les vaches nous indiqueraient-elles le chemin ?

     Nous arrivons au " Crêt de la Vigoureuse " qui culmine à 1347 mètres. Grâce à un temps magnifiquement clair, la vue sur les Monts du Jura est extraordinaire. Je m'évertue à faire fonctionner le retardateur de mon appareil photo, pour que Dany et moi-même soyons sur un même cliché, mais sans résultat.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 3 - Lajoux - La Cure

    Arrivée au magnifique sommet du " Crêt de Vigoureuse "

    Nous redescendons à travers bois et retrouvons très facilement le sentier que nous avons quitté pour monter au sommet. Au lieu-dit " La Balise ", nous tournons à gauche comme indiqué sur le topo et arrivons sur une route en bitume où nous retrouvons nos deux " hollandais " qui semblent eux aussi complètement " perdus ". Je jette un coup d'œil sur leur carte IGN et constate que le parcours de la journée n'est pas tout à fait le même que le nôtre, du moins au départ de Lajoux.

    Nous sommes au lieu-dit " La Burdine " au lieu d'être à " La Balise d'Amont ". A la " Balise ", il fallait prendre tout droit au lieu de tourner à gauche.

    Ce n'est pas bien grave, car de toute manière, nous devions rejoindre cette longue piste forestière goudronnée qui est en réalité le GR.9 et qui traverse la Forêt du Massacre (1).

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    François 1er et Charles III de Savoie

    (1) Cette forêt anciennement " de La Frasse " fut nommée " du Massacre " car elle évoque le tragique destin de quelques 600 mercenaires italiens commandés par le condottiere romain Renzo de Céry, lesquels envoyés par François 1er pour secourir la Ville de Genève assiégée, furent anéantis en 1535 par les armées ennemies de Charles III, Duc de Savoie, commandées par le vaillant Baron de La Sarra (La Sarraz).

    Il faut savoir qu'un an auparavant, les armées de François 1er commandées par François de Mombel, seigneur de Véray avaient déjà été défaites et mises en déroute à Gex par ce même baron de la Sarra pratiquement au même endroit et pour le même motif : venir en aide aux Genevois.

    Après cette nouvelle défaite, François 1er avait donc un esprit de revanche exacerbé contre Charles III, d'autant qu'il prétendait depuis fort longtemps à la souveraineté de tous les états de la maison de Savoie, au nom des droits de sa mère Louise de Savoie.

    Pour mieux comprendre ce massacre pour libérer la cité de Genève, il faut resituer cette histoire dans son contexte historique :

    Quelques années avant….

    Le royaume de France est gouverné par François 1er qui est le beau-frère de Charles-Quint, souverain d'un immense empire incluant entre autres l'Espagne, les Pays-Bas, l'Autriche, l'Allemagne et de nombreuses petites régions comme la Franche-Comté par exemple. Cette puissance impériale est vulnérable car en proie à d'importantes factions religieuses.

    Depuis 1526, et malgré leurs liens familiaux, les deux hommes se détestent, se livrent des guerres sans merci pour étendre leurs territoires et leurs pouvoirs respectifs. En 1529, les armées de François 1er s'embourbent en Italie puis décimaient par le choléra finissent par perdre la guerre.

    La " Paix des Dames " est signée le 3 août 1529 à Cambrai et met fin à la guerre. Depuis cet humiliant traité, signé entre Marguerite d'Autriche et sa mère, François 1er attend avec impatience que se terminent les six longues années de paix à laquelle l'avait contraint ce pacte.

    Charles III, Duc de Savoie est aussi le beau-frère et le plus fidèle allié de Charles-Quint au sein de la Ligue d'Italie. Les deux hommes se veulent les défenseurs des catholiques et de l'église romaine. Ils veulent briser les velléités des protestants et des autres courants de pensée (anabaptistes, luthériens, calvinistes, etc.…).

    En 1535….et quelques mois après…..

    A cette époque où règnent de fortes dissensions religieuses et politiques, tous les souverains ont des rêves d'expansion en Europe et même parfois bien au-delà. Les passions religieuses engendrent l'anarchie dans de nombreuses régions d'Europe et notamment dans les cantons suisses.

    Genève qui était considérée comme la capitale de la Haute-Savoie est investie par les Réformés (luthériens) est devient une république indépendante mais en majorité protestante. Le Duc de Savoie qui veut l'annexer depuis plusieurs années, considère cette main mise sur la ville comme un menace.

    Fragile, Genève veut bien de l'aide de la France, mais ne veut pas perdre son indépendance et observe d'un mauvais œil, les répressions faites en France aux protestants.

    La Franche-Comté appartient à l'empire de Charles-Quint et les communications et les accès pour atteindre le Pays de Vaud et la Suisse sont difficiles pour les armées françaises ce qui expliquent les deux défaites du Pays de Gex puis celle de la forêt du Massacre.

    Les années suivantes…..

    Malgré les convictions religieuses, les coalitions se font puis se défont au gré des intérêts personnels de chacun. Ainsi, dès 1536, François 1er s'allie avec Soliman, souverain de l'empire ottoman. Soliman est lui aussi est en conflit depuis de nombreuses années avec Charles-Quint. Avec son aide et celles de plusieurs cantons suisses, François 1er prend sa revanche et réussit à s'emparer de la Savoie et du Piémont. Mais cette alliance avec les Turcs et les protestants choque le monde catholique. En juin 1538, et après de terribles années de conflits, les deux clans n'ont plus d'argent pour financer leurs ambitions expansionnistes. François 1er et Charles-Quint signent une trêve à Aigues-Mortes et laissent derrière eux des millions de morts dans toute l'Europe.

    Quelques années plus tard, les guerres reprendront entre les deux hommes mais la suite est une longue histoire…….

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     En direction de la Combe de la Chèvre ..............................................................et de la forêt du Massacre

    Sur les conseils de plusieurs vététistes et afin d'éviter la piste goudronnée, nous prenons à droite un autre sentier qui serpente au milieu d'une prairie jonchée de gentianes jaunes (1) et file en direction de la Combe de la Chèvre. Ce chemin suit parallèlement le GR.9. Au bout d'une heure de marche dans cette superbe clairière, nous laissons le chalet de la Combe de la Chèvre sur la droite et retrouvons le GR.9 non loin d'un carrefour " Le Goulet Carret ". Là plusieurs directions d'offrent à nous. Sur la droite, un premier chemin se dirige vers le " Crêt Pela ", plus haut sommet du Jura avec ses 1495 mètres, un deuxième part vers le refuge de la Frasse. Comme indiqué sur le topo, nous continuons le GR.9 à gauche en direction du Carrefour du Massacre.

     La piste est en asphalte mais agréable car nous cheminons en permanence au milieu d'une magnifique forêt d'épicéas ou de sapins. Ces épicéas columnaires de la forêt du Massacre sont réputés pour leur qualité qui convient parfaitement à la fabrication des tavaillons (2) et à la boissellerie en général. La croissance très lente de ces arbres donne au bois un grain très fin et offre aux luthiers, les meilleurs bois de résonance pour la fabrication des violons.

    Il est 12 h, quand nous passons devant l'épicéa muté, dont la forme étrange de son tronc ramifié reste une énigme du massif jurassien.

     1) Les gentianes jaunes ou Grandes Gentianes sont de grandes plantes vivaces dont on se sert de la racine pour fabriquer certaines boissons alcoolisées dont la Suze et le Génépi.

     (2) Les tavaillons sont de petites tuiles de bois qui servent à la construction des façades de certains chalets.

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    Notre marche se poursuit sur le long GR 9 de la " Forêt du Massacre "

    Nous décidons d'arrêter là pour un reposant pique-nique sur l'herbe. Nous nous régalons des excellents fromages et du saucisson achetés la veille à Lajoux.

    13h 30, nous avons pris un peu de repos, il est temps de repartir. En bordure du chemin, nous complétons notre dessert en grappillant quelques fraises et framboises sauvages.

    Nous passons devant le Chalet forestier du Massacre et peu de temps après, nous remarquons un grand panneau qui indique que nous arrivons dans une zone naturelle de protection du Grand Tétras dont il ne reste malheureusement qu'une vingtaine d'exemplaires dans cette forêt.

     Nous arrivons au Carrefour du Massacre mais suivons toujours le balisage rouge et blanc du GR.9 en direction des " Tuffes" que nous ne tardons pas à rejoindre. Les petits panneaux indicatifs sont conformes à la description du topo et après la " cabane des Tuffes ", c'est sans aucune difficulté que nous atteignons la table d'orientation du " Belvédère des Dappes ". De ce point de vue, un beau panorama s'offre à nous. Nous dominons la Station classée des Rousses et son lac, les pistes de ski des Jouvencelles, les alpages suisses et le village de La Cure que nous devons rejoindre.

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    Arrivée au carrefour du Massacre ...............................................................puis au lieu-dit "Les Tuffes" 

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    Un magnifique panorama s'offre à nous au belvédère " Les Dappes "

     Nous descendons par une petite sente qui longe les pistes de ski des Jouvencelles, traversons un bois puis rejoignons un large pré qui dévale en direction d'une route en asphalte. Avant de l'atteindre, nous profitons de cet endroit pour prendre notre " cappuccino " quotidien, lorsque soudain nous entendons un grondement. Cela ressemble à un éboulement, mais le temps de nous retourner, deux chevreuils sortent de la forêt, foncent sur nous et font demi tour dès qu'ils nous aperçoivent. Je les vois détaler derrière les arbres où ils disparaissent. Quelques minutes plus tard, le grondement revient, plus sourd et nous avons le privilège de voir les deux chevreuils traverser la piste un peu plus haut à une vingtaine de mètres.

    Après cet étonnant spectacle, nous descendons la piste, coupons la D.29 et par la D.25 (GR.5) entrons à La Cure et nous trouvons très facilement l'hôtel Franco-Suisse.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 3 - Lajoux - La Cure

       Pause goûter près des " Jouvencelles " où nous apercevrons deux chevreuils

     17h 30, nous prenons possession de la chambre de cet étonnant hôtel dont une publicité dit : " Endormez-vous en France et réveillez-vous en Suisse ". En effet, une des chambres autorise un conjoint à dormir en Suisse et l'autre en France sans même faire lit à part.

    Haut-lieu de la résistance pendant la guerre pour d'évidentes raisons stratégiques, l'hôtel a toujours bénéficié de l'attention des chefs d'états. A tel point, qu'il fut légalement baptisé " Principauté d'Arbézie " du nom de ses propriétaires, la famille Arbez. Avec ses 150 m2, elle est la plus " petite principauté du monde ".

     18h30, nous effectuons avec plaisir le rituel journalier : douche, vêtements propres, visite du village et retour à l'hôtel pour un réconfortant répit avant le repas.

     Bien qu'excellent sur le plan culinaire, nous sommes un peu déçus par le dîner fait d'une darne de saumon à la crème. Nous aurions préféré un plat plus typiquement jurassien. Le Côte du Jura blanc qui l'accompagne est lui à la hauteur.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 3 - Lajoux - La Cure

     Hôtel Franco-Suisse renommé " l'Arbézie ", est la plus petite principauté du monde. Nous avons eu le privilège d'y dormir dans un lit que la frontière coupait en deux.Dany en Suisse et moi en France.

     Avant de m'endormir, je repense à ce que disait Paul-Emile Victor, ami de longue date de la famille Arbez et fidèle habitué de cet hôtel :

    ''Je connais beaucoup de pays de rêve. Je vis dans l'un des plus connus : le lagon de Bora-Bora, la plus belle île du monde. Mais avant de m'y installer, j'en ai connu d'autres. Plus durs. Mais un pays de rêve doit-il être doux et caressant ? Il doit être ce que le rêveur, le poète qui est en chacun de nous, en fait. Pour moi, le Groenland, son désert de glace et les Esquimaux avec lesquels j'ai vécu, partageant leur vie est un pays de rêve. Aujourd'hui encore, au cours des dernières années de ma vie, si j'étais libre (on ne l'est jamais vraiment, sauf à vivre la vie d'un clochard ou de " routier "), je voudrais aller vivre une année avec eux, malgré le froid, la tempête, le nuit polaire.

    Pour moi, l'Antarctique, son immensité sauvage et désertique, ses blizzards de fin du monde, ses montagnes vierges, non pas continent différent, mais autre planète ou rien n'est comparable à ce que l'on connaît du reste du monde, est un pays de rêve.

     Mais, il en est un autre qui, pour moi, s'enrichit de tout ce que la jeunesse peut apporter de souvenirs, d'émotions, de richesses. C'est un pays grand comme un minuscule îlot. Entourés de sapins noirs, qui sentent bon en été, les cyclamens, les buis, les rochers calcaires qui se prélassent au soleil, où chantent en hiver les pas dans la neige, les troncs des sapins qui sèchent dans les scieries, où soudain sort de la brume une buse ou un faucon, dont les plumes bruissent en vous frôlant. C'est un pays où les rêves prennent leurs sources, nombreuses, dans la terre et dans les hommes, rudes, les unes comme les autres. Mais chaleureux et affectueux, accueillant comme de vrais amis. Un pays où j'ai appris ce qu'étaient la fidélité et l'amitié. Mais aussi, un pays unique au monde probablement. Situé au creux des deux mains en coupe pour le protéger, pour le cajoler.

    L'un est en Suisse, l'autre est en France. C'est " L'ARBEZIE ".

    Je ne crois pas qu'il existe au monde un autre pays de rêve qui soit partagé en son milieu par une frontière aimable ; un autre pays au monde où, dans son cadre merveilleux, " dans la chambre d'en haut ", quand on est couché dans le grand lit accueillant, à gauche on est en Suisse, à droite on est en France.

     De quoi faire rêver les plus coriaces…. ''

     Préface de Paul-Emile VICTOR-Bora-Bora Mai 1989 pour le livre "L'Arbézie, l'insolite au quotidien " de Maryse Obez-Arbez.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 3 - Lajoux - La Cure Dans les pas de moines défricheurs - Etape 3 - Lajoux - La Cure  

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  • Dans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les Créssonnières

    4eme étape : La Cure (alt.1.150m)- Les Créssonnières (alt.1.150m) (20km).

    Jeudi 31 juillet 2003

     (Extrait de : Panorama jurassien, poème d'Henri Marandin)

     Tel un saphir posé sur coussin d'émeraude

    Un lac dort, assoupi, au tréfonds d'un vallon

    Les roseaux bleuâtres lui font comme une biaude (blouse)

    Les arbres rabougris une haie de santons

    -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

     Aujourd'hui, nous sommes encore moins pressés qu'à l'habitude car nous devons prendre un petit train suisse qui doit nous mener au Col de la Givrine. Hier soir, nous avons relevé les horaires à la gare, et le premier train est à 9h35.

    Après avoir ranger nos sacs, que nous retrouverons ce soir aux Cressonnières à une centaine de mètres d'ici seulement, car la randonnée d'aujourd'hui est une boucle, nous déjeunons copieusement au bar de l'hôtel.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les Créssonnières

    A " La Cure ", petit train suisse en partance pour le Col de la Givrine (Suisse), départ de notre journée de marche.

    Nous sortons de l'hôtel côté suisse, franchissons le poste des douanes et nous dirigeons vers la gare qui se trouve à quelques dizaines de mètres seulement. Sur le quai de la gare, un groupe de jeunes vacanciers attend le train qui doit les mener à Nyon, via Saint-Cergue. Les " hollandais " sont là aussi. Nous entamons une discussion pour apprendre qu'aujourd'hui, plutôt que de faire le parcours proposé, ils préfèrent aller visiter Nyon.

    9h25, le train arrive à l'heure, nous nous installons et dix minutes plus tard, nous sommes déjà au Col de la Givrine. Nous sommes les seuls à descendre. Sur le quai, nous remarquons très facilement le balisage jaune qui monte vers les Alpages suisses par une petite route goudronnée. 100 mètres plus haut, nous quittons cette route pour un bon sentier de gravillons qui se faufilent à travers une très belle forêt en direction de la Combe Grasse.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les CréssonnièresODans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les Créssonnières

    Dany dans le petit train au départ puis arrivée au "Col de la Givrine"

    Comme indiqué, nous suivons de petits panneaux indiquant " Rochefort ". Arrivés au carrefour de la Combe Grasse, nous empruntons sur la gauche une route goudronnée qui monte en direction des " Fruitières de Nyon ".

    Sur la droite de cette route, nous longeons un long muret de pierres sèches. Nous retrouverons ces fameux murets, que les Suisses eux-mêmes appellent " la Grande Muraille de Suisse ", tout au long de la journée.

    Rapidement, nous quittons par la gauche cette route, en direction de Rochefort, passons plus haut une barrière et continuons par la droite par un chemin qui se faufile entre deux chalets. De là, le point de vue sur le Lac Léman s'offre à nous. Malheureusement, le ciel est très bas et de gros cumulus dissimulent une grande partie du panorama. C'est vraiment dommage car par très bonne visibilité, nous devrions voir les Alpes Françaises enneigées.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les CréssonnièresODans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les Créssonnières

    A la " Combe Grasse ", direction " Rochefort " et " Les Fruitières de Nyon"

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les Créssonnières

    Arrivée au lieu-dit " Rochefort "

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les CréssonnièresODans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les Créssonnières

    A " Rochefort ", vue sur le Lac Léman--------------------------A la très belle cabane " CAS La Dôle "

     Nous arrivons au ravissant chalet-refuge du Club Alpin Suisse " CAS La Dôle " où je réussis enfin à faire fonctionner le retardateur de mon appareil photo. Nous profitons des bancs et de la table en bois de la terrasse pour prendre un en-cas fait de quelques pruneaux, d'abricots séchés et de boissons énergétiques.

    Au moment de repartir, nous ne retrouvons plus le balisage jaune indiqué sur le topo. Pourtant, comme indiqué, nous montons le petit bois à gauche du chalet, enjambons un muret et arrivons sur un grand pré herbeux. Nous nous séparons, Dany part à gauche et moi à droite. Je me retrouve au milieu d'un grand troupeau de bovins qui, à ma vue, détalent en tous sens. Dany a retrouvé le chemin et les marques jaunes sur un épicéa puis un hêtre. Je l'entends qui m'appelle et redescend en courant le large pâturage. Le sentier devient plus visible et nous apercevons en contrebas une vaste combe que nous devons traverser. Arrivés en bas, nous longeons les piquets d'une clôture balisé en jaune, laissons sur la droite une ferme d'alpage et arrivons sur une route goudronnée au carrefour balisé " Le Haut Mont ".

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les CréssonnièresODans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les Créssonnières

    A la terrasse de la cabane CAS La Dôle, nous prenons un en-cas avec vue sur le Léman

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    Déjeuner sur l'herbe à " Haut-Mont "---------------------------Dany joue à ma sorcière bien-aimée

    Il est 12h 30, nous arrêtons dans un champ près d'un petit muret (1) pour déjeuner. Comme hier, le repas est essentiellement composé de fromages et de saucisson accompagné de quelques morceaux de pains chipés ce matin au petit'déj de l'hôtel.

    Pendant que je range le sac à dos, Dany joue à ma " sorcière bien-aimée ", avec un balai en crin qu'elle vient de trouver. Je prends une photo.

    Après le repas, notre randonnée se poursuit sur le bitume en direction du lieu-dit " La Genolière ", mais nous faisons très attention car nous devons quitter cette route et bifurquer vers la droite par un chemin de cailloux indiqué par une flèche rouge et l'indication " Le Carroz " en rouge et blanc.

    Après plusieurs virages et un passage en tubes interdit aux bovins, nous trouvons les différentes indications mentionnées sur le topo.

     (1) Ces petits murs sont le fruit du labeur des moines d'abord, puis des paysans ensuite. Depuis le 5eme siècle, les hommes ont commencés par défricher et déboiser la montagne. Puis, pour permettre cultures et élevages, ils rassemblaient les pierres qui jonchaient les champs afin de construire ces murets qui d'une part, séparaient les propriétés et d'autre part empêchaient le bétail de s'enfuir.

    Contrairement à la France, la Suisse préserve ces murets grâce à un entretien régulier des communes 

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les Créssonnières

    Magnifique refuge en pierres du Carroz

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les Créssonnières

    Dany devant le splendide chalet du Carroz, point culminant de notre randonnée

    De cet endroit, le sentier monte avec un léger dénivelé, d'abord dans une forêt puis vers un petit crêt.

    Avant le sommet, nous sommes au milieu d'une clairière en train de nous désaltérer lorsque j'entends les clochettes de quelques vaches que je n'arrive pas à apercevoir, cachées qu'elles sont par des arbres. Tentant de les repérer, soudain, j'aperçois un animal roux qui court dans les hautes herbes. Renard ? Lynx ? Il s'immobilise, mais tapie dans le pré, à environ une vingtaine de mètres, j'ai du mal à reconnaître de quel animal il s'agit. J'essaie même de le montrer à Dany, mais elle n'arrive pas à le discerner. Mes cris d'insistance le font détaler, mais j'ai le temps de voir sa taille et une grande queue rousse et touffue en panache, c'était bien un gros renard.

    Après avoir enjambé un muret et traversés une clôture, nous arrivons au magnifique refuge en pierres du " Carroz " avec ses jolis volets rouges. Le panorama donne sur le Lac Léman, mais le ciel est toujours maussade et nous avons beaucoup de difficultés à voir l'horizon. Autour du chalet, le sol est jonché de splendides chardons bleus ciel, que nous n'avions jamais remarqués ailleurs. En regardant, la carte IGN, nous constatons que nous sommes à 1.508 mètres d'altitude. Ce promontoire sera le plus haut point gravi au cours de nos six jours de randonnée.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les CréssonnièresODans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les Créssonnières

    A lieu-dit l'Arzière, près d'une ferme d'alpage où les vaches et les chevaux sont heureux

    Le chemin se poursuit devant le chalet, puis descend dans une combe où près d'une ferme, des poulains gambadent pendant que les vaches s'agitent au son clair de leurs clarines (1). Nous sommes au lieu-dit " l'Arzière ". Nous passons devant ce chalet d'alpage et continuons au milieu de la combe. Sur notre droite, nous longeons de grandes falaises hérissées, puis franchissons un admirable muret dont le travail de construction et de restauration, nous laisse admiratifs.

    Dans cette combe, les gentianes jaunes et les carlines acaules (2) foisonnent et avec de nombreuses autres fleurs, le chemin se faufile au milieu d'un véritable jardin floral.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les Créssonnières

    Dans la " Combe des Coppettes ", le chemin se faufile au milieu d'un jardin floral

    Nous arrivons à la ferme chalet des " Coppettes " où un couple de paysans est au travail. Pour ne pas les déranger, nous prenons sur la gauche vers une route goudronnée, mais rapidement nous perdons les traces jaunes du balisage. Nous escaladons les fils barbelés de la clôture, traversons la combe dans sa largeur et retrouvons une marque jaune sur un grand épicéa en lisière de la forêt.

    Plus loin, le chemin s'élargit, s'enfonce dans le bois où les marques deviennent jaunes et blanches. Nous arrêtons quelques minutes pour une pause puis repartons par un sentier qui part à mon grand étonnement sur la droite. Je regarde la carte et m'aperçoit que cette fois, nous nous sommes complètement égarés. Nous devions rester dans la combe en lisière de la forêt, mais au lieu de cela, nous avons franchi le bois dans toute sa largeur. Cet égarement sera pratiquement la seule grosse erreur de tout notre circuit. Dany est partisane de rebrousser chemin. Moi, à la lecture de la carte, je lui propose de couper à travers champs pour atteindre la D.415 et rejoindre ainsi La Cure. Compte tenu de la distance parcourue, elle se rallie à mon idée car au regard de la carte, la départementale ne devrait pas être très loin. Seul inconvénient, mais je ne lui dis pas, il faudra traverser la frontière comme des contrebandiers. Nous voilà donc partis à l'aventure, à travers bois, prairies et autres landes. Nous finissons par tomber sur un petit chemin herbeux qui s'élargit et finit enfin par déboucher sur une route plus large. Effectivement, nous commençons à remarquer quelques maisons, puis arrivons à la borne frontière 218 et débouchons sur une petite route goudronnée sous le regard perplexe de quelques habitants qui nous voient débouchés du " Diable Vauvert ". Nous sommes en France. Sauf erreur de ma part, nous sommes au lieu-dit " Les Landes Devant " et nous devrions bientôt arrivés sur la D.415.

    (1) Les clarines sont de petites cloches en métal au son doux et mélodieux accrochée au cou des vaches par une planchette en épicéa.

    (2) Les carlines acaules sont des chardons de couleur blanche dont le cœur est comestible comme les artichauts.

    Voilà, nous y sommes, il suffit d'un dernier petit effort car La Cure et Les Cressonnières ne sont plus qu'à quelques kilomètres.

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    Gentiane jaune et Carline acaule

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 4 - La Cure - Les Créssonnières

    Arrivée au lieu-dit Les Cressonnières, plus loin l'Auberge des Piles

    Il est 16 h 30 quand nous passons devant le poste frontière, puis devant l'hôtel Franco-Suisse que nous avons quitté ce matin. Encore quelques centaines de mètres et nous voilà arrivés à la sympathique Auberge des Piles. Or mis, un tourneur sur bois, juste à côté de l'auberge, il n'y a rien d'autre à visiter. Après, la douche, nous rendons visite à cet artisan dont le travail est remarquable avec notamment, de surprenants luminaires complètement en bois. Nous achetons quelques menus souvenirs et rentrons à l'hôtel pour un brin de farniente avant le repas de 20 heures. Comme à notre habitude, nous étudions l'étape du lendemain avec peut-être un peu plus d'attentions qu'à l'accoutumée compte tenu de nos errements d'aujourd'hui.

    20 h, nous descendons dans la grande salle du restaurant de l'auberge où nous retrouvons les " hollandais ". Aujourd'hui, après la visite de Nyon, ils n'ont marché que pour le retour du Col de Givrine aux Cressonnières et cela leur a permis de prendre un peu de repos.

    Le dîner commence par un Macvin (1) offert par le patron, continue par une succulente salade de chèvre chaud, se poursuit par une tendre entrecôte à la crème de Bleu de Gex puis se termine par un café liégeois. Le tout, arrosé d'un excellent Trousseau (2) rouge. Rien à redire, c'est un super repas très requinquant après une journée de bonne fatigue.

    Un ciel d'orage a été très menaçant toute la journée, mais une fois de plus, les moines ont accompli un miracle et aucune goutte de pluie n'est venue perturber notre ballade. Grâce aux sublimes paysages traversés, et malgré ce temps plutôt morose, nous nous souviendrons très longtemps de notre excursion en Suisse. C'est en revoyant ces images défilées devant nos yeux, que nous nous endormons.

    (1) Fabriqué dans le Jura depuis le 14eme siècle, le macvin est un vin de liqueur obtenu à partir du jus de raisin non fermenté auquel on a ajouté un tiers de marc. Vieilli 18 mois en fût de chêne, il est servi frais soit en apéritif soit en digestif. Son bouquet est remarquable, son velours en bouche inimitable est très apprécié des dames.

    (2) Le Trousseau est un remarquable vin rouge du Jura dont les cépages se retrouvent majoritairement au nord d'Arbois. D'un rouge très intense avec des reflets violets qui peuvent virer au tuilé avec l'age, par son goût, chaud, tannique, alcooleux, il est aux antipodes du Poulsard. Il a des arômes de fruits murs, de fruits confits, d'herbe sèche et de vanille. En bouche, il est très long et très charpenté. Conservé plus de dix ans, il peut rivaliser avec les plus grands Bourgogne.

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  • Dans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km)

    5eme étape : Les Créssonnières (alt.1.150m)-Lamoura (alt.1.150m) (25 km)

    Vendredi 1er août 2003

     (Extrait de : Saint-Claude diamant du Jura, poème d'Henri Marandin)

    Le geste de génie dans l'âme de la pierre

    Et le cśur ardent du minutieux lapidaire

    Irradient les rayons des éclats lumineux

    Des perles et des joyaux, des couleurs et des feux

    Qui ornent les couronnes et fascinent les yeux

    Des belles et des princesses, des pauvres et des gueux.

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    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km)

    Départ de l'excellente Auberge des Piles aux Cressonnières

    Avant de partir pour une très longue journée de marche, le petit déjeuner est toujours un moment important qu'il est nécessaire de ne pas négliger. Ce matin, à l'Auberge des Piles nous en profitons pleinement car il y a un buffet avec des biscuits, du pain d'épices, des confitures, des pâtes à tartiner, des jus de fruits et bien d'autres tentations à volonté.

    En raison de notre gourmandise, c'est donc à regret que nous quittons la charmante auberge des Cressonnières (1). Nous partons par le GR.5 puis prenons immédiatement à droite un bon chemin qui descend vers le gîte d'étape de la Grenotte. Sur cette section, le sentier est commun au GR.5 et au GR.9. Aujourd'hui, c'est donc un balisage rouge et blanc que nous suivrons sur une bonne partie du parcours. Une grande portion de notre randonnée suit le tracé emprunté l'hiver par la célèbre course de ski de fond " La Transjurassienne ". En 2003, il y avait plus de 2500 concurrents pour 21 nations représentées. Ça change de notre marche quasi solitaire !

    (1) Les Cressonnières sont des fosses inondées où l'on cultive le cresson. Le nom de ce lieu-dit a certainement pour origine cette méthode de culture du cresson.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km) O.Dans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km)

    A la cascade puis sur le petit pont de bois de la rivière du Bief de la Chaille

    Nous arrivons à un carrefour où les deux GR se séparent et retrouvons une route goudronnée (GR.9) que nous descendons sur une centaine de mètres. Nous passons devant une Auberge de Jeunesse et au carrefour balisé du Bief de la Chaille, nom d'une petite rivière qui court à proximité, nous quittons la route pour un sentier qui descend par la gauche dans une obscure forêt de hêtres et de chênes.

    Le balisage indique une cascade toute proche que nous partons visité. Un bref arrêt pour une belle photo et une pause rafraîchissante et nous repartons en longeant le petit torrent que nous franchissons plus en aval sur un très beau pont de bois. En nous éloignant de ce modeste ruisseau, je me fais la réflexion suivante : Il s'agit du premier cours d'eau que nous rencontrons depuis notre départ de Villard Saint-Sauveur !

    Maintenant, le sentier monte à travers une lumineuse forêt d'arbres variés avec des hêtres, des chênes, des épicéas, des sapins et des bouleaux en direction de Prémanon d'Amont. Dans cette forêt, les oiseaux sont nombreux et notamment les passereaux et les merles qui volettent d'arbres en arbres lorsqu'ils nous repèrent. C'est sous un véritable concert de chants que nous progressons dans ce sous-bois.

    Notre ascension se termine. A la sortie de la forêt, nous atteignons un replat par une route en asphalte puis passons devant le restaurant " Les Trolles "où le GR.9 continue en direction de Prémanon. Sur notre droite, nous dominons la vallée du Bief de la Chaille et une vue magistrale porte au loin jusqu'à la grande forêt du Risoux.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km) ODans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km)  

     Près de Prémanon, le restaurant " Les Trolles " et vue sur la vallée Bief de la Chaille

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km)

    Arrivée à Prémanon

    Nous arrivons dans Prémanon (1), et entrons dans un bar pour prendre un bon café et nous renseigner sur l'épicerie la plus proche.

    Parce qu'elle se trouve juste à côté dans la même galerie marchande, nous partons immédiatement faire quelques courses pour le repas de midi. Il reste encore un peu de fromage et du saucisson, mais ce n'est pas suffisant. Il devient absolument nécessaire de nous ravitailler. Ce sera des bananes et des tomates pour Dany et du chocolat et de la charcuterie pour moi.

    Cet arrêt nous a fait perdre nos repères et en plein centre du village, nous avons du mal à récupérer la bonne direction tant il y a de panneaux indicatifs. Heureusement la carte IGN est là et je constate qu'il faut tourner à droite avant la patinoire et prendre le GR.9 vers le " Mont Fier ". Nous passons devant une colonie de vacances puis un centre hôtelier où je m'arrête un moment pour observer un vieux monsieur en train de dessiner. Il a un très bon coup de crayon et son tableau est très réaliste.

    Anxieuse comme à son habitude, Dany, qui n'a plus vu les traces rouges et blanches du GR depuis un bon moment, en profite pour lui demander où se trouve la Maison du Maquis indiquée sur le topo-guide.

    Personnellement, je ne suis pas inquiet dans la mesure où il n'y a pas d'autres chemins.

    Le GR.9 poursuit sa route à travers la campagne toujours sur du bitume. Je profite d'un arrêt pipi de Dany pour écorner la tablette de chocolat. De cet endroit, nous avons tout loisir d'observer le Mont Fier puis nous passons devant la Maison du Maquis, ainsi appelé car plusieurs résistants y furent exécutés pendant la seconde guerre mondiale.

    (1) Le nom de ce village a pour origine le nom d'un moine (encore un) qui se nommait Manon et qui avait défriché l'endroit, créant ainsi le pré Manon.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km) ODans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km)

    En route vers le " Mont-Fier "-------------------------------------Dans la " Combe du Mont-Fier "

    Non loin de là, devant une maisonnette, nous quittons enfin le goudron et par une petite sente bordée de grands épicéas, nous entrons dans la Combe du Mont Fier. Le dénivelé est progressif et ce tronçon, avec ces gros cailloux et ces profondes ornières, qui se faufilent au milieu des sapins nous rappelle étrangement certains chemins pyrénéens.

    A cet endroit, nous croisons plusieurs groupes de randonneurs qui redescendent. Ils ont du partir tôt ce matin et comme il est déjà 11h30, ils pressent le pas pour être rendus pour le déjeuner.

    De notre côté, nous n'avons pas ce souci et nous grimpons tranquillement. Vers midi, nous atteignons le carrefour qui se dirige vers le Mont Fier dont le sommet est encore à une demi-heure de marche. Une demi-heure ? C'est un laps de temps idéal ! Notre décision est rapidement prise, nous déjeunerons là-haut ! Cette ascension est d'autant plus prometteuse que le topo-guide nous signale que ce mont est très fréquenté par les chamois.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km) ODans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km)

    Du sommet du " Mont Fier ", on aperçoit les paysages parcourus

    Il est exactement midi et demi, quand nous touchons au but et arrivons sur l'étroit belvédère qui domine un majestueux panorama. Sur notre droite, le massif de la Dôle et la forêt du Massacre. En dessous et au loin, nous pouvons observer aux jumelles les paysages franco-suisses traversés ces deux derniers jours. Devant nous, le val de l'Orbe et les monts environnants. Sur notre gauche, le Crêt des Arcets et la Combe Berthod. Nous ne sommes qu'à l'altitude de 1282 m et malgré un beau soleil, un vent violent et frais nous oblige à enfiler nos vestes en goretex. Heureusement, les arbres constituent un bon obstacle et c'est bien à l'abri des rafales que nous pouvons déjeuner.

    Deux randonneurs, accompagnés d'un berger allemand, nous ont rejoints au sommet et pique-niquent à côté de nous. Dany ne peut s'empêcher de donner à manger au molosse qui, avec des yeux de " chien battu " attend sa pitance, attaché à un arbre.

     2h, nous sommes redescendu du Mont Fier. Nous n'avons pas de vu de chamois, mais nous ne regrettons pas cette grimpette car le site à lui tout seul valait le détour. En descendant, nous redoublons d'attention, car nous devons quitter le GR.9, prendre à gauche un balisage vert et la mention VTT 21 jusqu'au carrefour " La Croix de la Teppe " Là, nous devons prendre en direction du carrefour de la " La Neuve ".

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km) ODans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km)

    Arrivée au " Mont Fier ----------------------------------------------Au départ de la très belle Combe Sambine

    Nous trouvons sans trop de difficultés les différents indices et continuons sur un chemin dont le terrain est vraiment variable d'aspect. Parfois lisse et très bon, parfois mauvais car très raviné et recouvert de grosses pierres, parfois parsemé de branchages qui nous gênent dans notre progression.

    Je suis également surpris de constater que le soleil est sur notre droite et parfois même presque dans notre dos, ferions-nous demi-tour ? Je jette un coup d'śil sur la carte et constate qu'effectivement en direction de " La Neuve ", nous partons pour quelques kilomètres en direction de Prémanon.

    Nous arrivons au carrefour de la " Neuve ", tournons à droite et empruntons une route goudronnée puis la GR de pays balisé rouge et jaune. Le soleil est maintenant bien sur notre gauche. Il s'agit d'une portion d'un sentier intitulé " Tour de la Haute-Bienne ", la Bienne étant une rivière qui traverse le Haut-Jura. Un kilomètre et demi plus loin, nous laissons le bitume et continuons tout droit en direction du " Chalet Double ".

    Ce chemin qui serpente au milieu de la large et longue Combe Sambine est vraiment très plaisant car sans aucune difficulté et apaisant par ses paysages. De chaque côté de la clairière, il y a d'épaisses forêts avec sur notre gauche, le Bois de Ban et sur notre droite, le Bois de la Sambine. En plus, il ne présente aucune complication d'orientation, c'est toujours tout droit jusqu'au " Chalet Double " et les panneaux indicatifs sont nombreux et très explicites à chaque carrefour.

    Au lieu dit, le " Le Replat ", nous stoppons sous de grands conifères pour une pause café agrémentée d'une banane et de quelques fruits secs. Malgré le long chemin parcouru, nous sommes encore à une dizaine de kilomètres de Lamoura. Sur ce secteur, nous croisons quelques couples de randonneurs.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km)

    Dans la " Combe Sambine ", au lieu-dit " Le Replat "

    Nous repartons et arrivons au " Chalet Double ". Là, nous bifurquons à gauche et grimpons dans le bois de Tresberruy où le bruit de quelques tronçonneuses se fait entendre. C'est surprenant de constater combien le moindre son inopportun peut être agressif lorsqu'on a marché des heures dans le silence le plus complet.

    Nous montons un large chemin quand tout à coup Dany aperçoit un écureuil. Il est brun foncé sur le dos et clair sur le ventre. Je l'aperçois et court derrière lui, appareil photo en mains. Il sort du sentier et décampe dans la forêt. Je ne le perds pas de vue au risque de me casser la figure dans les souches et les racines. Il monte à un tronc d'arbre, s'arrête à mi-chemin et se met à m'observer. Je suis tellement surpris par cet arrêt si inattendu, que je perds mon calme et cafouille ma prise de vue.

    A proximité du village de vacances de Lamoura, de nombreux gamins jouent dans la forêt à construire des cabanes en branchages. Nous arrivons par le terrain de golf et dominons le splendide village de vacances. Assis sur un banc de rondins, nous faisons une halte et dissertons sur les nombreux loisirs qui doivent exister dans cet endroit fabuleux.

    Dans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km) ODans les pas de moines défricheurs - Etape 5 - Les Créssonnières - Lamoura (25km)

    Un petit écureuil de la forêt de Tresberruy------------------------------Village de vacances de Lamoura

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    Au terrain de golf du village de vacances de Lamoura---------------Vue de la baie vitrée de la chambre d'hôtel " La Spatule "

    Nous évitons le village et prenons à droite par la très belle Combe d'Arbey. Encore deux kilomètres sur le GRP et nous débouchons enfin sur la route qui mène au vieux village de Lamoura. Il est 17h30 quand nous arrivons devant le superbe chalet-hôtel " La Spatule ". Nos sacs sont déjà là qui nous attendent dans le hall. Nous gagnons notre chambre. Très spacieuse, avec une large baie vitrée qui surplombe une vaste et verte prairie.

    Dany ne me laisse pas le temps de souffler. Après un bain vite expédié, nous voilà repartis en direction du centre du village. Shopping dans une boutique de fringues, visite de la Maison du Lapidaire (1) et d'un artisan qui travaille magnifiquement la corne, la galalithe (2) et le corozo (3).

    Il est 19h30, pendant que Dany continue ses pérégrinations, je me relaxe en lisant l'Equipe et en prenant un dernier verre au bistrot du coin. La voilà qui me rejoint, elle a certainement tout vu du village.

    Nous regagnons l'hôtel et nous dirigeons immédiatement dans la vaste salle du restaurant. Le maître d'hôtel nous demande de le suivre et nous installe à une table particulière. Ici, c'est beaucoup plus select que les jours précédents.

    Le souper commence par une salade de crottin chaud sur croûtons, se poursuit par un délicieux poulet aux écrevisses et se termine par une succulente tarte aux myrtilles. Une fois de plus tout a été parfait. Nous sommes rassasiés et pouvons rejoindre notre chambre pour une détente tant escomptée. Télé, lecture et surtout examen de la dernière étape de demain, qui réside en une très longue descente de 22 kilomètres vers Saint-Claude.

     (1)Le lapidaire est un artisan qui taille et polit les diamants et les pierres précieuses et qui en fait commerce. A Lamoura, il s'agit d'un grand professionnel qui a obtenu de nombreuses distinctions et notamment celle de meilleur ouvrier de France.

    (2) La galalithe ou " pierre de lait ", c'est du lait ou de la caséine durcie. Inventée en 1897 par Spitteler et Krishe (Allemagne), c'est l'ancêtre des matières plastiques.

    (3) Le corozo est un ivoire végétal. Le corozo est tiré d'un palmier (phytéléphas macrocarpa) qui pousse en Afrique, en Amérique du Sud ou en Asie et qui produit un fruit dont l'albumen en durcissant crée l'ivoire végétal. Une plante peut produire entre 10 et 20 kg par an alors qu'on continue de tuer des éléphants pour 5 kg seulement. Cette matière a été utilisée dans le Jura au début du XXeme siècle pour fabriquer des boutons et autres petits objets tournés.

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  • Ce diaporama est agrémenté de diverses musiques extraites d'une compilation de l'artiste Ebunny intitulée "Celtic Irish Epic Music". Les morceaux interprétés sont : 1.Fantasy 2.Leprechauns Dance 3.Celtic Knight 4.Pirates Action 5.Old Castle 6.White Knight 7.Dragon Hunters 8.Celtic Morning  9.Winner  

    Le château d'Aguilar (296 m) depuis Tuchan

    Le château d'Aguilar (296 m) depuis Tuchan


     

    Voilà déjà quelque temps que je voulais aller découvrir "le château d’Aguilar" que je ne connaissais pas, et bien évidemment, mon idée première était de m’y rendre au cours d’une balade pédestre. A l’instant même où j’ai pris la décision d’y aller, je me suis mis à chercher si un tracé téléchargeable était disponible sur Internet et j’en ai trouvé un très rapidement sur l’excellent site « VISUGPX ». Sans doute, me suis-je trop précipité en choisissant celui-ci ? A l’instant où j’écris cet article, c'est-à-dire à posteriori, je m’interroge. En effet, dès le démarrage de Tuchan, et en marchant sur la D.611, dite « Route de Narbonne », puis sur une route secondaire m’indiquant l’édifice,  je comprends très vite que mon itinéraire est le même que celui que les touristes empruntent en voiture pour se rendre au château, c’est-à-dire presque essentiellement des voies bitumées. Plusieurs voitures me dépassent sans trop ralentir d’ailleurs et pourtant la route n’est pas si large que ça. Je me vois contraint de faire un ou deux pas dans la garrigue par précaution. Alors je cherche à éviter ce bitume au maximum, et notamment quand cela est possible, en traversant des vignes et parfois même des portions de garrigue. Mais le plus souvent, il faut que je me rende à l’évidence : « c’est un peu trop galère ! ». Herbes folles et buissons bien trop piquants, j’ai beau zigzaguer et tenter d’oublier les nombreuses difficultés en photographiant des fleurs, des oiseaux et de rares papillons ou criquets, le résultat est toujours le même : « le bon et unique itinéraire est toujours bitumé ! »  Alors le tracé que j’ai choisi n’est-il pas un vrai chemin de randonnée ? Ou peut-être n’ai-je pas fait le bon choix ? Un coup d’œil sur mon bout de carte I.G.N, que j’ai dès le départ enfoui au fond de ma poche sans jamais l’avoir trop analysé, me prouve le contraire mais le château est presque déjà là, juste au dessus de ma tête. S’il ne me reste plus qu’à y monter, le balisage, lui,  me rappelle constamment à l’ordre pour me remettre dans le droit chemin. Une trace blanche et rouge peinte sur une vieille borne puis une flèche avec la mention « château » peinte sur l’asphalte sont là pour me rappeler quel est le bon chemin.  Je suis bien sur le GR.367 plus communément appelé « Sentier cathare ». « Sentier cathare ou sentier bâtard ? »   Je me pose la question, tant marcher constamment sur du goudron m’agace au plus haut point. Vouloir en sortir ne regarde que moi et quelques fines égratignures sanguinolentes sur mes avants-bras tendent à me dire que j’ai déjà eu tort. Je persévère. Si cet aspect « asphalte » du chemin m’agace, heureusement, d’autres pôles d’intérêts sont constamment là pour me distraire et essayer de me le faire oublier. Sous un ciel bien tourmenté de bleu, de gris et de blanc, mais toujours merveilleusement beau, ces pôles d’intérêts ont pour nom « château d’Aguilar », « Massif du Canigou », « amandiers fleuris » et à un degré moindre « Montagne de Tauch ». Ces pôles d’intérêts attirent l’œil du randonneur solitaire que je suis et l’objectif de mon appareil-photo comme une aimantation qui se voudrait spontanée. Quand deux de ces sujets sur trois se présentent sur un seul et même plan photographique, c’est la quasi assurance d’une belle photo. Jamais, je n’aurais imaginé un « Canigou » aussi parfaitement visible depuis Tuchan, et surtout aussi beau ! Après tout, les altitudes de 140 à 160 m dans la vallée et de 296 m au château sont relativement modestes. Outre, ces superbes paysages, mon appareil-photo et moi continuons à être aux aguets des oiseaux. Il y a beaucoup de pinsons, quelques chardonnerets et des bruants un peu partout. Les vignes, elles, sont occupées par des bergeronnettes grises, des alouettes et de rares traquets-oreillards reconnaissables à leur plumage noir et blanc. Comme toujours, les buissons les plus touffus sont le repaire des fauvettes. Avant les derniers lacets de la route, une brève portion non asphaltée sur un étroit sentier me remets du baume au cœur. Mais non, ce n’est qu’un bref raccourci et l’itinéraire se poursuit et termine sa course sur le bitume à l’entrée du parking du château.  Toujours est-il qu’en arrivant devant la baraque du château, à l’intérieur de laquelle se trouve une charmante hôtesse d’accueil, je suis passablement énervé. « Il n’y a pas d’autres chemins que la route bitumée pour venir à pied depuis Tuchan jusqu’au château ? » lui demande-je. Elle me répond que « non » et rajoute « la municipalité réfléchit à en créer un ! » puis dans la foulée s’exclame « mais je ne pense pas que ce soit prévu pour cette année ! ». Je lui rétorque très brièvement « un vrai sentier de randonnée digne de ce nom depuis Tuchan serait pourtant pas mal ! » Etant parti sans eau, j’ai trop soif pour continuer à discuter. Elle a une bouteille d’eau à me vendre, fraîche de surcroît, et pour l’heure c’est là l’essentiel. Après m’être acquitté de l’eau, d’un billet de 4 euros pour une visite, je me mets à grimper vers le château avec deux dépliants explicatifs dans une main et la bouteille d’eau dans l’autre. La bouteille a très vite mes faveurs car pour être franc je suis parti faire cette randonnée la fleur au fusil. Oublier d’analyser le tracé I.G.N enregistré dans mon GPS est une chose, oublier d’emporter de l’eau est une faute impardonnable. Ce n’est pas dans mes habitudes. Par contre, l’Histoire du château, elle, a déjà bien retenue toute mon attention. Avant de venir ici, et comme je l’avais fait pour le château de Peyrepertuse, j’ai fait quasiment le tour des sites évoquant Aguilar et son Histoire n’a plus guère de secrets pour moi, or mis peut-être les nombreuses dates que je n’ai pas toutes retenues par cœur. Une fois ma soif étanchée, les dépliants s’avèrent pourtant très intéressants. Ils s’attardent sur l’architecture des différents bâtiments et leurs élévations parfois si distinctes dans le temps. Cela enrichit la visite et c’est évidemment un plus pour comprendre le reste de l’Histoire. Dépliants en mains et appareil-photo autour du cou, je passe presque une heure à cette visite très détaillée. Je prends des photos du château et de ses différents vestiges sous toutes les coutures mais aussi des panoramas qui s’entrouvrent encore bien plus magnifiquement qu’en bas. Chapelle Sainte-Anne, fortifications successives, tours, archères, voûtes, citerne, logis, chaque élément de l’édifice nous rappellent qu’une humanité a été présente ici. Besoin de croire, de se protéger, de se défendre, de s’organiser, de vivre et à des pouvoirs successifs d’asseoir une certaine autorité sur les autres, voilà la vie que l’on peut facilement imaginer. Comme tous les pouvoirs, ceux d’Aguilar ont fini par disparaître et il ne reste que les vestiges de ce château que leurs édificateurs avaient sans doute pensé indestructible. Faut-il pour autant que ceux qui nous gouvernent aujourd’hui tirent des enseignements du passé ? Vaste sujet philosophique ! Une fois arrivé à sa partie la plus haute, je m’arrête pour marquer une longue pause « fruits et biscuits ». Si j’ai oublié l’eau, par bonheur, je n’ai pas oublié tout le reste et l’herbe verte et fraîche qui pousse ici dans la dernière enceinte est une invitation à un arrêt bienvenu tant en ce début mars la chaleur est déjà de mise. Cette pause est d’autant plus bénéfique, que dès avoir quitté le château, c’est une sévère piste ravinée et caillouteuse qui m’attends. Elle s’élève vers la Bergerie de Fajol, que la carte I.G.N me décrit comme des ruines, mais qui, en réalité, s’avère être une superbe propriété privée. Je m’en approche au plus près mais à la seule perception de la magnifique bâtisse, j’enclenche aussitôt une marche arrière. Je me dis que si des gens ont trouvé le courage de venir vivre ici, dans ce coin si beau mais si solitaire et si austère, réparant sans doute à la sueur de leur front ce qui devait être les ruines d’une ancienne bergerie, il faut les laisser tranquilles et respecter leur isolement. La piste qui redescend est la copie conforme de celle que je viens de gravir, c'est-à-dire très caillouteuse. Elle nécessite attention et même prudence dans la mesure où sous les chaussures, les petits cailloux ronds se transforment en autant de billes prêtes à vous faire patiner et rouler à terre. Le lieu ne se prêtant pas à un patinage fût-il artistique, le bâton de marche que je n’ai pas cru bon d’emporter me manque au plus haut point. Le seul mais non négligeable attrait de cette descente « infernale » est d’être un chemin de ronde très éloigné du château mais qui en permet des vues nouvelles mais à chaque instant admirables. Il est donc fortement conseillé de s’arrêter pour contempler le château. Finalement, c’est sans encombres, que j’atteins le bas de cette piste au lieu-dit la Bergerie Neuve, qualificatif que le vieille « borde » en ruines ne mérite plus depuis des lustres et sans doute depuis sa construction. Ici, l’asphalte que j’avais fini par oublier reprend ses droits et ce, jusqu’à la départementale D.39. Si j’ai comblé cette nouvelle marche forcée sur le bitume grâce à la présence de nombreux oiseaux, l’arrivée ici sur la D.39 me laisse quelque peu perplexe. Alors que Tuchan ne se trouve pas très loin sur ma droite, le tracé G.P.S m’indique de traverser la route pour carrément partir à l’opposé, tournant ainsi le dos à la ligne d’arrivée la plus directe et la plus proche. Alors que je suis occupé à analyser ma carte et hésitant à prendre cet itinéraire, itinéraire pourtant confirmé sur mon bout de carte I.G.N, très vite, je crois en comprendre la raison. Sans aucun bas-côtés pour marcher, cette D.39 est très fréquentée par les véhicules. En quelques minutes d’arrêt, j’en vois passer une bonne douzaine. Cela suffit pour la considérer comme trop dangereuse. Je renonce à la suivre, traverse la route et continue le tracé enregistré dans mon G.P.S. Alors que depuis un bon moment, le chemin zigzague au milieu des vignobles et des champs en jachère, m’interrogeant sur la suite, c’est l’instant que choisit mon G.P.S pour ne plus capter aucun satellite. C’est d’autant plus ennuyeux qu’au lieu-dit le Mas, suite à des travaux, un homme m’interdit ce que je considère comme étant le bon passage, passage à gué en l’occurrence sur la rivière de Domneuve, affluent du Petit Verdouble. Il me dit « continuez la piste par là et vous pourrez vous y retrouver plus loin ! ». Alors je n’insiste pas et emprunte la piste en me disant « M’y retrouver ? Me retrouver où ? Il est marrant lui ! ». Par bonheur, de l’autre côté du Mas ; sans doute une ancienne ferme composée de deux très grandes bâtisses ; deux jeunes couples m’indiquent que je pourrais probablement traverser le rivière un peu plus loin. Ils sont là, tranquilles, attablés à une aire de pique-nique et apparemment occupés à boire à ce qui ressemble à un apéro. Un apéro soit très précoce ou peut-être très tardif ; car il n’est que 16 heures. Ayant démarré à 13 heures, voilà déjà 3 heures que je marche et une fois encore la flânerie a guidé mes pas. Le lieu est agréable mais plutôt insolite, avec devant le mas, un immense champ complètement dénudé, planté d’un seul et splendide pin. Je continue la piste. Elle longe la rivière mais à bonne distance. De ce fait, je n’ai pour l’instant aucune possibilité de m’en approcher. Au bout du champ, la piste amorce un virage à droite et la rivière est là toute proche désormais. Le plus souvent barrée par des hautes cannes de Provence et des joncs plus petits mais très denses, chaque trouée dans cette haie touffue est l’occasion d’observer si un passage devient possible. Après trois tentatives négatives car la rivière demeure encore large et profonde, la quatrième est enfin la bonne. Ici, c’est un lit asséché de galets que je traverse sans aucun problème. Peut-être deux lits d’ailleurs, tant l’endroit ressemble à la confluence de deux ruisseaux asséchés. Un coup d’œil sur ma carte I.G.N me conforte dans l’idée que je suis bien à la confluence du Petit Verdouble et de la rivière de Domneuve. Mes tribulations au bord de ces deux ruisseaux, mi-en eaux et mi-asséchés font s’enfuir une quantité incroyable de volatiles, passereaux pour la plupart, mais aussi d’autres un peu plus imposants. C’est le cas d’un rapace et d’une aigrette dont les envols massifs, bruyants et inattendus me font sursauter. Finalement, je comprends mieux l’intérêt qu’il y avait à passer par là même si le chemin est plus long pour rejoindre Tuchan.  Il ne me reste plus qu’à retrouver le tracé de mon G.P.S. Si suivre la petite rivière de Domneuve n’est pas très pratique voire le plus souvent impossible, il faut néanmoins que je la garde comme fil d’Ariane. Mon bout de carte me confirme cette direction et la présence d’un large chemin côtoyant ce ruisseau. Voilà le nouveau petit challenge qui s’offre à moi. Plusieurs zigzags au sein de quelques vignes et finalement je retrouve mon tracé G.P.S assez vite. Dans l’immédiat, il s’agit d’un chemin herbeux longeant la rivière mais la piste observée sur ma carte finit par arriver très rapidement. Tuchan est là, parfois à droite, parfois à gauche, parfois droit devant selon les brèves sinuosités de l’itinéraire. Ma balade tire à sa fin. Un couple que je croise profite de la douceur ambiante de ce beau milieu d’après-midi pour se promener au sein du vignoble. Nous discutons un peu, de tout et de rien. Des banalités certes mais sommes toutes très sympathiques. Perchés au sommet de grands arbres, de petits rassemblements d’étourneaux criards apportent des touches sonores mais pas vraiment musicales. Perturbant le silence, je m’aperçois que ce dernier était souvent si parfait. L’intersection de la D.39 et de la D.611 est là. Ma voiture aussi. J’ai prévu d’aller visiter Tuchan mais la batterie de mon appareil-photo a décidé qu’elle a assez bossé pour aujourd’hui. Elle est vide. Je n’en ai pas de rechange. Décidement partir randonner la fleur au fusil ne me vaut rien. Voilà une leçon à retenir en plus des dates qui ont jalonnées l’Histoire du château d’Aguilar. Cette randonnée, telle qu’expliquée ici, a été longue de 10,7 km, égarements et errements inclus. Les montées cumulées de 326 m et le dénivelé de 180 m sont très modestes. Le point culminant est proche de la Bergerie de Fajol à 316 m et le point le plus bas à 136 m au niveau de la confluence des rivières Petit Verdouble et de Domneuve. Cartes I.G.N 2447 OT Tuchan – Massif des Corbières et 2547 OT Durban-Corbières – Leucate – Plages du Roussillon Top 25.


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