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saint paul

Le Sentier du Charbonnier depuis La Tirounère (St-Paul-de-Fenouillet)

Publié le par gibirando

Afin de rendre hommage à l'immense compositeur américain Burt Bacharach décédé en février dernier (sans oublié le parolier Hal David), j'ai agréménté ce diaporama de six de ses chansons. Elles ont pour titres et interprétes : "Raindrops Keep Fallin' On My Head"/B. J. Thomas, "This Guy's In Love With You"/Herb Alpert & The Tijuana Brass, "Arthur's Theme (Best That You Can Do)"/Christopher Cross, "What The World Needs Now Is Love"/Jackie DeShannon, "Alfie"/Vanessa Williams, "A House Is Not a Home"/Luther Vandross (version incomplète). 

Le Sentier du Charbonnier depuis La Tirounère (St-Paul-de-Fenouillet)

Le Sentier du Charbonnier depuis La Tirounère (St-Paul-de-Fenouillet)

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C’est en 2020 et au cours d’une balade que j’avais intitulée « Le Circuit de la Tirounère depuis St-Paul-de-Fenouillet » que j’avais découvert le départ de ce « Sentier du Charbonnier » et par là-même cette randonnée. Alors bien évidemment, je m’étais empressé d’aller voir sur le Net ce que l’on disait d’elle. Là, de prime abord, 2 éléments me rendirent quelque peu circonspect et je m’interrogeais quant à l’opportunité de la réaliser un jour. Le 1er élément était que de nombreuses personnes qui l’avaient faite l’avaient jugée difficile. De ce fait, à 71 ans, j’étais assez songeur même si la distance de 9 à 12 km ; selon les différentes versions ; ne m’inquiétait pas trop. En observant la carte IGN et la vue  aérienne correspondant au tracé, , ce que je craignais c’était toutes ces formations calcaires très découpées qu’il y avait à l’ouest des Gorges de Galamus. Si celles situées à l’est ne m’étaient pas inconnues, les ayant déjà approchées à diverses reprises lors de randonnées (*), celles-ci entaillées par la Coume de Tiols et son ruisseau restaient à découvrir.  Un petit tronçon muni d’une corde servant de garde-fou était souvent évoqué ajoutant un supplément de crainte car j’avais conscience que mes pieds n’avaient plus l’assurance de leurs 20 ans.  Le 2eme élément concernait la randonnée elle-même et le titre de « Sentier du charbonnier » qui lui avait été octroyé dont personne ne disait jamais rien. C’était d’autant plus troublant que même la Communauté des communes Agly-Fenouillèdes qui avait produit une fiche-rando N°26 restait totalement muette à ce sujet, évoquant brièvement "des sommets des Marches d'Espagne" et les Hautes-Corbières ? « Pourquoi du charbonnier ? » (**), cette question semblait n’intéresser personne ? De ce fait, ma crainte était qu’on ait créé un circuit de randonnée sans grand intérêt, seulement pour attirer les touristes et qu’un fonctionnaire en manque d’idées lui ait donné un nom totalement futile. Or « marcher idiot » et seulement pour l’aspect sportif n’était plus depuis longtemps le ressort de mes différentes sorties. Il me fallait bien d’autres arguments. Au regard de ces travers, je me suis mis en quête de chercher ce que l’on disait de ce sentier dans les nombreux topo-guides que je détenais dans ma bibliothèque. Et là ô surprise, aucun ne l’évoquait parmi les 60 ouvrages que je possédais. Pourtant ils étaient nombreux à évoquer ce secteur du pays Fenouillèdes et le Sentier Cathare, mais ce « Sentier du Charbonnier » était totalement oublié. Pourquoi ? C’était un frein de plus assez inattendu surtout quand on sait que de nombreux ouvrages reprennent assez souvent les mêmes randonnées. Pourquoi celle-ci était totalement absente ? Je ne trouvais pas de réponse ! Finalement, il m’a fallu 3 années supplémentaires pour qu’une gentille amie sur Facebook, prénommée Marie-Noëlle,  arrive à me convaincre que cette balade pouvait être intéressante. En décrivant succinctement la beauté des décors et en amoindrissant les difficultés, j’étais désormais convaincu que je pouvais la faire. En tous cas, malgré mes 74 ans, je  me sentais prêt. Il est vrai qu’une jolie nouvelle que je venais de lire évoquant un peu les lieux et  s’intitulant « Le sauvage en personne » de l’ethnologue et anthropologue Daniel Fabre avait fini de me convaincre.  De surcroît, la botanique, la Nature et l’Histoire y tenaient une place persuasive.  J’avais donc décidé d’attendre le printemps afin d’avoir entre les mains tous les atouts que la Nature des Corbières pourrait m’offrir. Météo France annonçant un anticyclone, le jour « J » est fixé au 17 avril,  et bien sûr en solitaire car quoi qu’il en soit, le terrain aux reliefs calcaires accidentés et la distance ne sont pas compatibles avec les tendons trop souvent douloureux des hanches de Dany. Il est 9h quand je laisse ma voiture sur la route à proximité de La Tirounère. Je démarre avec une "foi de charbonnier". Je connais désormais parfaitement les lieux. D’emblée, et avant même quelques pas vers la ligne de départ, des fleurs freinent mes bonnes intentions. A la Tirounère, je suis surpris de voir qu’une nouvelle passerelle a été installée permettant le passage sans problème de l’Agly. Voilà déjà longtemps que le projet était dans les cartons depuis que la précédente avait été emportée par une crue en 2014. Je m’y arrête quelques instants et constate que les poissons sont bien plus nombreux qu’en 2020 où je m’étais baigné lors de ce fameux  « Circuit de la Tirounère ». Sans passerelle, j’étais facilement passé à gué avec de l’eau aux genoux. Après quelques photos, je  me décide à démarrer me promettant d’y revenir au retour.  D’emblée, la pente raide de l’étroit sentier met mon palpitant à l’épreuve. Par bonheur, les fleurs printanières sont nombreuses et les photographier est une excellente raison de reprendre mon souffle. Mon cœur s’assagit au même rythme que le parcours qui peu à peu devient beaucoup moins incliné même si la calcaire reste constamment omniprésent. Alors que je grimpe vers La Balme, pensant être tout seul, un gilet pendu à une branche ne manque pas de me surprendre. Finalement, ce n’est que 100m plus loin, et un peu plus haut, qu’un homme accompagné d’un chien se présente devant moi. Il redescend et je monte. Après le bonjour d’usage, je lui demande « le gilet accroché à la branche est à vous ? ». Il me répond « oui », rajoutant qu’il trouve qu’il fait excessivement chaud. J’acquiesce. Sur le ton de la plaisanterie, je lui dis, « vous avez de la chance, il me plaisait bien et j’ai failli vous le piquer ! ». Il rigole de ma blague.  Je crois comprendre qu’il essaie de trouver des asperges sauvages mais que ce n’est pas génial. Après quelques brefs échanges sur nos activités du jour, il me souhaite bon courage et lui rend la pareille. Quelques mètres plus haut, en voyant les beaux panoramas qui s’entrouvrent, je prends déjà conscience avec satisfaction de la déclivité déjà accomplie. Dans le creux du ravin, au pied d’une falaise, l’ermitage Saint-Paul de Galamus apparait. Au-dessus, ce sont les contreforts du  Pech d’Auroux que j'ai eu l'occasion de gravir à plusieurs reprises. En bas,  là où j’ai laissé la voiture,  la route parallèle au  vallon où coule l’Agly ressemble à un vermicelle. Malgré tout le calcaire environnant, la végétation est dense et de n’importe quel côté où l’on regarde tout est très verdoyant. Je ne connais pas la suite mais suis très heureux d’être déjà là. Quand la bifurcation « Paradet » et « Camps » se présente, je sais déjà que c’est la seconde qu’il faut emprunter. Ici l’élévation supplémentaire accomplie offre une belle  vue vers Saint-Paul-de-Fenouillet et les  plaines alentours. Le sentier redescend un peu puis parvient à cette portion agrémentée d’une corde que j’appréhendais beaucoup mais que Marie-Noëlle avait à juste titre minimisée. Finalement si la corde peut s’avérer utile en terme de sécurité, je constate que je m’en faisais tout un monde sans vraie raison apparente. Il est vrai qu’en vieillissant, je suis désormais sujet au vertige. Certes, la roche est assez pentue à cet endroit-là mais je me souviens en avoir arpentées maintes et maintes fois dès bien plus compliquées que ça et notamment dans les calanques marseillaises au temps de ma jeunesse. Je passe donc assez facilement même si mon attention est de mise car je sais qu’à mon âge je n’ai plus la dextérité et l’assurance de mes jeunes années. Pour avoir plusieurs fois regardé la carte IGN administrative, je sais que la frontière P.O/Aude est juste là. Pourtant rien ne change et ne le laisse imaginer. Moralité : je comprends mieux pourquoi l'administration semble parfois insaisissable.  Peu après,  et par je ne sais quel miracle, si ce n’est la belle présence de jasmins jaunes, de cistes et de coronilles, de nombres papillons s’égayent dans ce secteur. Si la plupart sont assez communs et visibles quelques mois dans l’année car univoltins, les jolies et rares  Proserpines n’ont pas cette chance. Elles sont univoltines, c’est-à-dire qu’elles n’ont droit qu’à une seule génération annuelle.  Des papillons seront visibles jusqu’à la fin mais des Proserpines, je n’en verrais que deux. Le sentier atteint le ruisseau de la Coume de Tiols bien plus vite que je l’avais imaginé. Encombré assez souvent de gros blocs, le ruisseau devient chemin. Par bonheur, quelques tronçons sont parfois plus praticables grâce à de hauts buis faisant office de boucliers. De manière assez surprenante, quelqu’un a installé un livre d’or à même le sentier. J’y laisse une courte bafouille de mon passage. De temps à autre, le sentier sort du ruisseau et permet ainsi d’avoir une meilleure idée des paysages environnants. Les fleurs et les papillons continuent de m’arrêter. Les oiseaux sont bien là aussi,  comme le prouvent leur chant mais les voir est déjà une gageure quant à les photographier c’est carrément une loterie avec peu de chances de gagner tant les frondaisons qui les abritent sont touffues ! Il me faudra attendre de sortir de là, d’avoir un peu de chance, de me mettre quelquefois à guet pour réussir quelques photos d’oiseaux. C’est ainsi que bien trop absorbé à mes photos, je sursaute à l’arrivée soudaine dans mon dos d’un jeune homme en train de courir.  Lancé dans son trail, le temps d’échanger un bonjour, et telle une fauvette furtive,  il a déjà disparu dans ce dédale de roches et de végétation. Dès lors que le vallon se fait plus ample et moins encaissé, le sentier change de sol devenant plus herbeux. Là, je comprends que j’en ai vraiment fini avec le calcaire et le ruisseau. D’ailleurs, les fleurs à photographier changent aussi avec de nouvelles espèces fréquentant les pelouses : pâquerettes, pissenlits, potentilles, hélianthèmes, orchis, anémones, narcisses.  Il y a aussi beaucoup d’arbres à fleurs blanches. De très nombreux poiriers à feuilles d’amandier mais aussi quelques cerisiers de Sainte-Lucie et bien sûr des prunelliers.  A hauteur d’une cabane en tôles ondulées, je me décide à tourner à droite pour partir vers le col d’En Calve. Un large chemin monte vers ce col. Ceci n’est pas une entorse au parcours initial mais un supplément qui selon de nombreux témoignages méritent le détour.  C’est ainsi que j’ai atteint un large col herbeux puis qu’à l’aide de mon GPS et du tracé que j’y avais enregistré, j’ai facilement trouvé le sentier qui sur la droite m’a entraîné vers le lieu-dit « Frigoula ». Le lieu-dit consiste en plusieurs petites collines quelque peu escarpées mais accessibles où des vues grandioses se font jour presque de tous côtés : Massif du Canigou, Pech de Bugarach, Gorges de Galamus, Roc Serret,  Pech d’Auroux, La Quille, Vallon de Tiols, Roc del Nissol,  Forêt du RialsesseCubières et son joli moulin où nous avions fêté les 60 printemps de Dany. Pour être franc, j’aurais pu monter légèrement plus haut mais les altitudes les plus élevées étaient aussi les plus végétalisées. J’ai donc trouvé un bon compromis où j’ai choisi de pique-niquer avec vue vers le Canigou, la Vallée de la Boulzane et Saint-Paul-de-Fenouillet avant de refaire le chemin en sens inverse soit un aller et retour de 4km environ. Là, tout devint plus simple et la chance fut enfin avec moi car je réussis à photographier quelques volatiles plutôt nombreux dans cette portion jusqu’au Pla de Lagal. D’abord plus simple,  parce que le parcours est plus praticable et donc plus facile à cheminer au moins jusqu’à atteindre le Pla de Moulis mais aussi parce que j’en connaissais une belle partie. Là, on retrouve encore beaucoup de calcaire mais les chemins et sentiers sont plus « roulants »  Ce tronçon a  été d’autant plus facile pour moi que je l’avais déjà accompli en 2011 lors d’un mémorable Tour du Fenouillèdes en 5 jours avec mon fils. J’ai marqué un long arrêt à hauteur du calvaire en hommage à l’instituteur Moulins Artene car l’histoire du décès de cet homme que j’avais lue sur Internet m’avait vraiment marqué.  Il paraît qu’il serait mort de froid au cours d’une tempête de neige pour être allé chercher du secours à Saint-Paul de Fenouillet pour venir en aide à  un enfant malade de Camps-sur-Agly. Il est donc mort lors d’un acte d’héroïsme qui plus est pour sauver la vie d’un enfant. Si la fin de cette balade fut moins « géniale » sur le plan météo, le ciel devenant excessivement laiteux, grâce à une Nature encore très présente, elle demeura bien agréable pour moi. Une fois encore, cette randonnée m’a offert ce que j’étais venu chercher : la Nature avec un grand « N » ! Force est de reconnaître que j’avais des idées « noires » à propos de ce « Sentier du Charbonnier » et ma crainte de le réaliser était de revenir « noir » !  Mais finalement, je l’ai terminé « débordant » de couleurs, comme quoi le philosophe Gaston Bachelard avait raison quand il a dit que « le noir est le refuge de la couleur ». La distance parcourue a été de 11,8km. Les montées cumulées de 747m. Quant au dénivelé, il a été de 449m entre le point le plus élevé à 727m non loin du Roc del Nissol et le plus bas à 278m à la Tirounère.  Carte IGN Tuchan – Massif des Corbières top 25.

(*) Mes autres balades dans le secteur : 

 

(**) Les charbonniers en Fenouillèdes et Pyrénées : Comme indiqué dans le récit de ma balade, personne ne dit rien à propos du nom donné à ce sentier. Pourquoi du « charbonnier » ? Cette question restera un  mystère. En tous cas or mis un tout petit casot en tôle ondulée pas suffisamment ancien et un semblant de mur en pierres, je n’ai rien vu au cours de ce parcours qui pourrait ressembler de près ou de loin à une ancienne charbonnière voire à une vieille marmite en métal comme on en trouve encore dans la Nature en Fenouillèdes et plus généralement dans nos belles Pyrénées. Ces charbonnières ou ces marmites servaient à la fabrication du charbon de bois, combustible connu pour diverses utilisations depuis l’Antiquité mais qui connut son heure de gloire à partir du 17eme siècle dès lors que le procédé technologique des forges dites « catalanes » prit son envol industriel dans toutes nos montagnes. Car si ici on évoque les Pyrénées, le procédé a aussi été utilisé dans les autres montagnes françaises. A cette époque, du 17eme au 19eme siècle, la  fabrication du charbon de bois, et par là-même sa consommation ; furent si gigantesques que nombres de nos forêts finirent amplement décimées. Au fil du temps,  les  déboisements étaient tels qu’aucune essence ne résistait à cette frénésie. Pour les charbonniers, tout était bon à brûler, des sapins aux bruyères en passant par les chênes, les hêtres, les buis et même les arbres fruitiers dès lors que la pénurie a commencé à se faire sentir. Même si rien n’est dit à propos des charbonniers, ni à  Saint-Paul-de-Fenouillet ni dans ses proches alentours ; le bourg étant plus connu pour ses croquants, ses objets en buis et ses pièges à loup que l’on fabriquait dans des forges ; il est évident que les collines autour de Galamus n’ont pas échappé à ce déchainement à fabriquer coûte que coûte du charbon du bois. Dans ce secteur, un seul toponyme peut nous laisser penser à d’éventuels « charbonniers », c’est le Pas de la Fumado (la Fumée), en aval du Moulin du Cubières-sur-Cinoble.  Malgré cette carence de noms,  l’on apprend sur certains sites Internet ; Fenouillèdes et Caudiès notamment et donc sans partir trop loin de Saint-Paul ;  que les charbonnières ont bien évidemment existé dans tous ces secteurs. Leurs vestiges sont encore visibles parfois, et à titre personnel,  il m’est arrivé plusieurs fois d’en découvrir au cours d’autres randonnées. Je me souviens par exemple d’une vieille marmite en métal vue non loin du col de Tulla. Il m’est arrivé aussi de tomber sur d’anciennes plateformes de brûlis plutôt nombreuses dans la forêt de Boucheville et dans les autres bois des proches alentours. Entre le 17eme et 20eme siècle, les charbonniers n’ont pas été les seuls à fréquenter nos collines et nos montagnes. Selon les lieux, on pouvait aussi  y voir des mineurs, des forgerons, des bucherons, des chaufourniers dont le travail à fabriquer le chaux était souvent lié à ceux des charbonniers. Tous ce travailleurs étaient assez souvent des migrants.  Les charbonniers étaient nombreux à venir d’Italie et paraît-il de la région de Bergame. Ils étaient saisonniers et nomades, le plus souvent plutôt pauvres, se déplaçant très souvent d’un employeur à un autre changeant de forêt comme il ne changeait pas de veste, le travail étant bien sûr très salissant. Si la veste dite du « charbonnier » continue d’être la mode, les charbonniers ont très longtemps marqué l’imaginaire. Ils étaient des hommes « noirs », se jouant du feu tels des diables et vivants dans leur forêt comme de véritables « sauvages », ce qui n’était pas tout à fait faux. Pourtant,  le savoir-faire était tel que l’on évoque parfois « l’art du charbonnier ». C’est ce qu’on fait Henri Louis Duhamel de Montceau dans un livre de 1761 mais aussi plus récemment Véronique Izard, chercheuse au CNRS dans un article de la Société Botanique de France, article que je vous conseille de lire si vous souhaitez en savoir plus sur l’Histoire des charbonniers des Pyrénées et leur métier. 

Le Sentier du Charbonnier depuis La Tirounère (St-Paul-de-Fenouillet)

Marmite de charbonnier près du col de Tulla.

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Le Sentier Botanique du lac du Rioutard depuis Bagnols-en-Forêt (Var)

Publié le par gibirando

Ce diaporama est agrémenté de 3 musiques interprétées par le duo Tino Michael (harmonica) et Sergej Graf (guitare) qui ont pour titre "Lullaby Of Birdland" (George Shearing)"Moon River" (Henry Mancini) et "Corcovado" (Antônio Carlos Jobim) en version partielle.

Le Sentier Botanique du lac du Rioutard depuis Bagnols-en-Forêt (Var)

Le Sentier Botanique du lac du Rioutard depuis Bagnols-en-Forêt (Var)

Pour agrandir les photos, cliquez dessus. 2 fois pour un plein écran.


 

Après le Chemin des Douaniers de Saint-Aygulf le 29 septembre puis dès le lendemain le Sémaphore du Cap Dramont, en ce 1er octobre 2022, nous voilà partis pour une nouvelle vadrouille varoise, mais cette fois-ci en famille.  L’objectif ? Le Sentier botanique du Lac du Rioutard au départ de Bagnols-en-Forêt. Botanique, lac, forêt, autant vous dire que je ne me vois pas refuser cette balade dont les attraits paraissent d’emblée tournés vers la Nature avec un grand « N ». Il est 14h45 quand nous rangeons nos voitures au début du chemin de Maupas, direction celui de La Rouquaire, routes bitumées situées à la périphérie de Bagnols-en-Forêt. Le sentier à emprunter est là, sur la droite, non loin de l’intersection de ces 2 chemins.  Il descend dans la forêt. La forêt parlons-en un peu ! Dès le départ, elle est omniprésente. Pour avoir jeté un coup d’œil à la carte IGN et pris pas mal d’infos, comment pourrait-il en être autrement alors que les 2 communes qui entourent notre objectif le Lac du Rioutard ont dans leur nom le mot « forêt » ? Saint-Paul-en-Forêt au nord et Bagnols-en-Forêt au sud.  Ancienne forêt royale, il fut un temps, sous le Roi Soleil, où les immenses résineux étaient prélevés pour en faire des mâts pour la marine royale. D’où son nom. Si au départ, le sentier descend au sein de nombreux pins, les feuillus se mêlent rapidement à la lutte pour l’espace et gagnent peu à peu en hégémonie. Si les arbres ne me laissent pas indifférent, depuis le départ je suis plutôt en quête de fleurs et d’une faune visible qui pourraient être immortalisées dans mon appareil-photo.  Autant le reconnaître, je m’attendais à beaucoup mieux. Les fleurs sont en nombre limité quant à la faune, elle paraît se cantonner à quelques oiseaux que l’on entend chanter mais ce n’est ni une symphonie et encore moins un concert assourdissant. Juste quelques chants. Il faudra que j’attende le lac pour enfin en surprendre . Quand le lac arrive, deuxième déception car je ne vois aucun volatile sur l’eau. Certes, les quelquefois où mes balades ont consisté à faire le tour de certains lacs (Génos, Puyvalador, Villeneuve-de-la-Raho), j’ai la plupart du temps était gâté par la Nature mais là c’est le vide le plus complet. Rien ! Enfin quand je dis rien, je ne vois sur le miroir bleuté qu’un pêcheur dans son bateau de pêche. Enfin, bateau est un bien grand mot car c’est plutôt une bouée ! En anglais, que je déteste pratiquer ici, on appelle ça un « float tube », en français « un tube flottant » ou « flotteur ». Alors bien sûr, il y a bien le Sentier botanique avec de très nombreux pupitres donnant des informations détaillées sur des arbres, des arbustes et des plantes presque essentiellement méditerranéennes ou méridionales en tous cas, mais encore faudrait-il avoir le temps de les lire. Or, mon fils Jérôme, seul à connaître l’itinéraire, mène la danse et par la force des choses nous tentons de le suivre sans trop nous laisser distancer. De ce fait ; et même si le sentier est parfaitement balisé ; on survole les informations, lisant le plus souvent les gros titres seulement.  Certes, ce n’est pas un train très rapide et plutôt un rythme de promenade mais quand on veut être aux aguets pour photographier la Nature ça l’est encore beaucoup trop pour moi. Finalement, je réussis quelques photos  fauniques et floristiques de-ci de-là et j’en suis plutôt satisfait. Après le passage sur le petit barrage , c’est au bord d’ une petite grève que la Nature commence son véritable « show » prenant les traits de quelques petites Grenouilles rieuses  et d’un Martin-pêcheur aux superbes couleurs perché dans les roselières. Si la suite et la fin de cette balade ; et ce jusqu’à retrouver nos voitures ; continue de s’effectuer à la même cadence, la Nature, elle, continue de se dévoiler avec la même parcimonie. Encore quelques fleurs, quelques papillons, un rouge-gorge, une libellule toute rouge et deux criquets viendront s’ajouter au sein de la mémoire de mon appareil-photo. Peut-être faudra-t-il revenir au printemps  ?  Au-delà de cette réflexion purement personnelle, cette balade très facile et charmante mérite d’être faite car un lac reste un lac, un joli miroir bleuté, toujours agréable à arpenter, à regarder, à découvrir car « œil du paysage » disait à juste titre Victor Hugo. Le tracé réalisé a été long de 3,9km. Carte IGN 3543 ET Haute-Siagne Top 25.

(*) Le lac du Rioutard en quelques infos et quelques chiffres : Situé sur la commune de Saint-Paul-en-Forêt et alimenté par plusieurs petits ruisseaux,  le Lac du Rioutard est une retenue collinaire qui a été créée en 1974. Le petit barrage de remblais a été érigé en amont du vallon du Rioutard, affluent de la rivière l’Endre dont il peut être amener à  réduire les crues.  La surface du barrage est de 5,8 ha et à son maximum  la capacité est de 280.000 m3 d'eau. La hauteur du barrage est de 14 m. Le lac constitue un réservoir d’eau pour la lutte contre les incendies mais il permet aussi d’assurer et de promouvoir toutes les actions nécessaires à la conservation quantitative et qualitative à l'amélioration et à la meilleure utilisation du patrimoine hydraulique. Il est désormais un merveilleux biotope faunistique et floristique pour de nombreuses espèces méditerranéennes ou de passage. Les amateurs de pêche peuvent y trouver une très belle variété de poissons et notamment des brochets. Un sentier botanique parfaitement balisé a été créé en 2007 par l’association Respire. Il est jalonné par presque une quarantaine de pupitres explicatifs concernant les espèces végétales (arbres, arbustes, plantes, fleurs)  que l’on peut  découvrir au bord du lac. Ce sentier botanique est accessible à pied soit à partir de Saint-Paul-la-Forêt soit à partir de Bagnols-en-Forêt.

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Etape 2 : Narbonne/Portel-des-Corbières 24,9km le 26 septembre 2014

Publié le par gibirando

Pour les raisons déjà invoquées dans mon récit, ce diaporama (comme les 2 autres) est agrémenté de diverses reprises de la chanson "La Mer" (en anglais Beyond The Sea) de Charles Trenet et Léo Chauliac. Elles sont interprétées ici et dans l'ordre suivant par Gypsy Jazz Caravan (instrumental), Tatania Eva-Marie & Avalon Jazz Band (chant)Neville Worthington (guitare), Alfonso Gugliucci (piano jazz), Sacha Distel (chant) et Richard Clayderman (piano).

Etape 2 : Narbonne/Portel-des-Corbières 24,9km le 26 septembre 2014


 

- Narbonne – Portel-des-Corbières

 

- Vendredi 26 septembre 2014, 7h. J’ouvre les yeux. Le jour est tout juste entrain de poindre et par la fenêtre restée entrouverte, le grand néon du Novotel projette une lueur bleutée à l’intérieur de ma chambre. Je me rase puis me précipite sous la douche. Avec satisfaction, je constate que le sol a parfaitement séché et que plus aucune trace de l’inondation d’hier soir n’est perceptible. Seules les serviettes sont encore bien détrempées malgré un essorage intensif et un tentative de séchage nocturne sur le bord de la fenêtre. Je prépare et range soigneusement mon sac, jetant au passage tout ce qui me semble inutile, morceaux de cartes I.G.N et emballages divers notamment. Je récupère le chargeur et la batterie de mon appareil photo que j’ai pris soin de recharger toute la nuit. Je réussis à remplir mes deux camelbacks directement au lavabo de la chambre. Dans une, j’y ai ajouté ma « dope », simple poudre énergisante mais ô combien efficace quand un coup de mou apparaît. Je les fourre dans les poches latérales de mon sac à dos en prenant soin de vérifier que leurs robinets sont correctement fermés. Tout est fin prêt et je laisse mon sac à dos et mon appareil-photo sur le lit. Je sors de la chambre et part directement vers l’accueil où m’attend le petit déjeuner. Un seul homme est déjà entrain de se servir. Ce qu’il y a de bien avec le petit déjeuner du Formule 1, c’est que tout est à volonté, liquides et solides, à une condition toutefois : arriver bien avant qu’il y ait une cohue. C’est le cas et j’en profite au maximum car je sais que tout peut changer très vite. Dix minutes plus tard, c’est effectivement ce qui se passe quand un groupe de touristes et les cyclistes aperçus hier soir se ruent autour des cafetières, des jus de fruits et des panières de pains, de biscottes et de viennoiseries alors que moi j’en suis déjà à terminer bien tranquillement une double ration sur la terrasse. La note étant payée, il ne me reste plus qu’à retourner dans la chambre chercher mes affaires. 8h30, je quitte l’hôtel et reprend exactement l’itinéraire qui m’a vu arriver hier en fin d’après-midi. Le soleil n’est pas encore totalement levé mais la circulation routière est aussi compacte qu’hier. Je redouble de prudence mais la connaissance du parcours me permet de marcher bien plus vite et d’éviter les endroits les plus périlleux. Je rejoins le Chemin communal de l’Arboretum en moins de vingt minutes alors que hier après-midi j’en avais mis le double. Ayant analysé la carte I.G.N, je sais que cette route va m’emmener directement près de l’étang de Bages au lieu-dit le « Vieux Moulin du Rey » où se trouve l’Arboretum. Au début de la route et posé contre un grillage où je l’avais laissé, je retrouve un vieux morceau de bois flotté que j’avais trouvé hier matin au bord de l’étang de l’Ayrolle. Magnifiquement lustré, il m’avait longuement servi de bâton de marche pour terminer cette première étape. Je le récupère. Ici, le chemin est désormais tout en descente et pour démarrer cette étape ça me convient très bien.  Au moment, où je dépasse les dernières maisons de Saint-Paul, j’entends une puissante détonation et une perdrix vient tomber à une dizaine de mètres devant moi au beau milieu de la route. J’aperçois un chasseur qui descend en courant d’une petite colline et qui se précipite pour se saisir de l’oiseau qu’il met immédiatement dans sa gibecière. Je le hèle,  mais sans réaction il tourne les talons et repars sans le moindre regard dans ma direction pourtant toute proche. A-t-il vraiment pris conscience que j’étais là, à quelques mètres de portée de son fusil ? Je poursuis la route bitumée qui finalement se transforme à une large piste terreuse à hauteur du Vieux Moulin du Rey. Ici, au bord de ce chemin, deux amoureux dont on voit bien qu’ils se cachent, s’enlacent en « se dévorant » la bouche . Je les surprends dans leurs étreintes. L’homme étonné de ma présence si soudaine et si proche se retourne et me dévisage d’un méchant regard. La femme, elle, se tourne de l’autre côté pour que je ne vois pas son visage. Si « constat d’adultère » il y a, je n’en ai cure et passe mon chemin le plus naturellement du monde. Toutefois, ce « fait divers » m’a fait oublier que l’Arboretum était là, tout proche. Je m’en aperçois bien trop tard et seulement en arrivant sur la D.105 devant des panonceaux de randonnées qui indiquent « Pesquis » à 1,5 km et « Bages à pied » à 3,6 km. Le « Mouli dal Rey », lui, est déjà dépassé d’une centaine de mètres. Je me dis que ce sera l’occasion de revenir et je file vers les Pesquis,  petit hameau perché sur une butte au beau milieu de la garrigue. En coupant, la D.105, j’emprunte une étroite sente souvent caillouteuse qui s’élève dans le maquis. Sur la carte I.G.N, il y a bien une variante, mais comme elle emprunte la route asphaltée, j’aime autant l’oublier. Malgré, la faible élévation, je prends beaucoup de plaisir à cheminer cette petite colline car les vues sur les marais tout proches et l’étang de Bages sont très belles. Le sentier est jalonné de postes de chasse mais par bonheur, aujourd’hui, aucun chasseur ne les occupe. J’en profite pour marcher bien tranquille et prendre de nombreuses photos. Une crête plus haute que les autres offre des vues sur le vignoble et sur les Roches Grises, quartier sud de Narbonne dont l'extension sur la colline est d'une triste évidence. Les Pesquis et Bages sont souvent en ligne de mire mais les nombreux passereaux qui occupent le maquis et que je tente en vain de photographier me les font le plus souvent oublier. Le sentier débouche sur une petite route bitumée menant assez directement aux Pesquis. Au passage, je note la présence d’un casot convenablement taggué, d’un puits sans doute séculaire puis celle d’une vieille croix métallique aux pointes en forme de fleurs de lys. Aucune mention n’en indique l’origine alors je les fixe simplement dans mon numérique. J’arrive aux Pesquis dont je visite très rapidement la quasi-totalité des ruelles. Le village est bien fleuri et il n'y a que ça qui m’intéresse car pour le reste, le hameau est désert et rien d’autre de concret ne retient vraiment mon attention. Je le quitte bien plus vite qu’il ne faut de temps pour l’écrire. Le sentier continue de monter. Sur la gauche, une jolie construction toute ronde attire mon regard. J’y file car sur le moment, je pense à un abri de berger, du style « orri pyrénéen » mais non, il s’agit sans doute d’un vieux puits car une porte métallique en obture fermement l'accès. Au moment où je repars un petit bruant, vient se poser tout près de moi dans un buisson d’églantiers. Je le photographie mais il me quitte aussi vite qu’il est arrivé. Au même instant, dans le ciel, un épervier survole la colline dont j’atteins le sommet quelques minutes plus tard. Les passereaux y sont nombreux. Avec quelques fleurs bleues que je ne connais pas et qui tapissent le sol à un endroit bien précis, ils seront les seuls à freiner mon ardeur à arriver à Bages. Entre maquis, pinèdes et vignes, le chemin redescend sèchement en direction de l’étang. Ce dernier scintille magnifiquement du côté de Bages, dont le village haut perché se trouve désormais sur ma droite. Lorsque j’y parviens, les panonceaux directionnels m’offrent le choix entre continuer vers Peyriac-de-Mer ou visiter la cité. Estimant que je ne l’ai pas suffisamment visité lors de ma récente venue à la recherche d’un couchage, je fais le choix de réparer cette anomalie. Des flamants roses, eux, sont toujours là et quasiment au même endroit, côté Anse des Galères. De haut en bas, c’est-à-dire de son église Saint-Martin et de sa table d’orientation jusqu’au petit port en passant par ses étroites ruelles, sa maison des Arts et ses pontons, tout Bages y passe en un temps que je veux le plus court possible. Dans ce désir de tout découvrir, sans ne rien oublier,  mais en minimum de temps, j’ai conscience que prendre de nombreuses photos est une réelle mais inévitable contrainte si je veux conserver des souvenirs. Finalement, le temps que je viens de tenter de gagner avec cette découverte au pas de course, j’ai le sentiment de le perdre dans ma quête à retrouver l’itinéraire du Sentier du Golfe Antique (*). Je retrouve le balisage à un carrefour Chemin de Ceinture et village des Pêcheurs puis je sors définitivement de Bages par la rue d’Estarac. Là, sur la route, et malgré de nombreux passereaux qui mettent en éveil mon appareil-photo, je prends conscience que je ne suis pas venu pour me « taper du bitume ». Dès la première occasion qui m’est offerte, je descends vers les étangs, malgré un tracé différent dans mon GPS. Oui, voilà ce que je suis venu chercher et observer ! De jolis sentiers sableux à cheminer, mais surtout des aigrettes, des mouettes rieuses, des hérons par dizaine et des flamants roses par centaine dans leur biotope préféré. Sans doute ai-je dérogé à l’itinéraire du Sentier du Golfe Antique et à certaines règles en venant jusqu’ici ? Mais voilà où je suis bien ! Là, dans cette Nature que j’aime tant et au milieu des oiseaux. Entre mon désir de les approcher au mieux pour les observer et les photographier et celui de respecter leur vie paisible, j’essaie de trouver le meilleur et juste compromis possible. Peu importe si mes photos ne sont pas « top » ! Et quand une guérite d’observation se présente au bout d’une longue lagune face à un attroupement de flamants roses, je n’hésite pas une seconde à ramper sur des dizaines de mètres et au milieu des graminées, des salicornes et des soudes pour les approcher au mieux sans jamais les déranger. Le résultat est au-delà de mes espérances. Ils ne s’envolent pas, se contentant de tourner leurs têtes de tous les côtés car ayant sans doute pris conscience d’une présence bien trop proche. A l'instant où ils replongent leurs têtes dans leur plumage, je comprends que « la fin du match est sifflée » . Je repars en rampant comme je suis venu. Ayant obtenu ce que je voulais, je retrouve sans trop de problème le bon itinéraire peu avant une croix consacrée à Saint Paul. C’est le bien nommé chemin de Saint Paul filant direct vers Peyriac-de-Mer. Ce Paul de Narbonne, ce n'est qu'en rentrant que j'en découvrirai l'Histoire. Ici, au sortir des étangs, tout à brûler et qui plus est très récemment car seule une herbe verte mais encore rase a eu à peine le temps de repousser. Pins, oliviers, maquis, champs en jachères mais aussi tourbières et roselières, c’est un quasi désert, si tristement noirci et contrastant avec la haute et belle végétation verdoyante que je viens de traverser. Une vraie catastrophe !  Je ne peux m’empêcher de penser à toute cette faune que l’on ne voit que de manière impromptue, brusque et épisodique parfois. A cet instant précis, c’est l’exemple des fauvettes qui me vient à l’esprit car j’en ai vu beaucoup depuis mon départ sans pour autant réussir à en photographier une seule ! Oui, que deviennent-elles quand un incendie tel que celui-ci les surprend dans leur milieu ? Par bonheur, le bon chemin de Saint Paul, non pas en bitume mais bétonné, se poursuit vers Peyriac-de-Mer dans une zone marécageuse que l’incendie semble avoir épargnée. Le vent a cessé et c’est l’occasion rêvée pour écouter « la Mer » dans différentes versions pas toujours aussi réussies que l’originale. « La Mer » en version reggae ou ukulélé, ce ne sont pas celles que je préfère ! Je crois savoir qu’elle fait partie des chansons françaises les plus reprises au monde alors on trouve un peu de tout !  Finalement, j’entre dans la commune de Peyriac par les lieux-dits L’Horte et l’Oppidum du Moulin où un panneau d’information m’apprend que les Romains étaient présents, des pièces de monnaie ayant été retrouvées. Puis c’est la Saline, l’étang du Sel Fort et du Doul avec leurs pontons que je connais déjà très bien pour y être venu randonner en 2010 lors d’une balade intitulée « Les Boucles de Peyriac-de-Mer ». Je m’y lance à nouveau avec l’idée d’y photographier quelques oiseaux. Une aigrette, quelques goélands et des foulques sont immortalisés.  Il est presque 13h, or mis les graines juteuses de deux grenades et quelques raisins grapillés, je n’ai pratiquement rien mangé depuis l’hôtel et comme un banc face à l’étang est là bien à propos, j’estime que c’est l’endroit rêvé pour déjeuner. Une petite salade toute prête et un gâteau de riz viennent tout juste apaiser ma faim. Je mange sous le regard d’un goéland planté sur un piquet. Il m’observe avec insistance et finit par s’approcher de moi. Je lui offre quelques pâtes de ma salade qu’il accepte bien volontiers. Quand je repars, il s’envole vers son piquet, sans doute un peu déçu de la modicité de mes offrandes. Le village est désert et seule la placette principale Joseph Aubin Fabre est animée grâce à la présence de restaurants dont les tables en terrasses sont bien occupées. Je m’installe à l’une d’entre-elles et commande un café mais également un jambon-beurre dont je précise la taille et à emporter. Dix minutes plus tard je repars. Je visite la partie du centre-ville que je n’avais pas eu le temps de visiter en 2010.  Je suis vraiment tout seul à arpenter les jolies ruelles. Je sors de Peyriac de la même manière, en solitaire et avec un peu ce sentiment qui me poursuit d’être le seul « bipède » capable de marcher. Il va en être ainsi jusqu’à Portel-des-Corbières où je vais déambuler sur des chemins comme si j’étais le seul être humain sur cette planète. Par bonheur, quelques oiseaux, lézards et papillons bien vivants vont me distraire, accepter ma présence et celle de mon appareil-photo. Si le parcours est très bien balisé, toujours en jaune et rouge, il s’immisce dans des décors suffisamment variés pour ne pas être trop ennuyeux. Quand le chemin le devient, je cherche des prétextes à quelques photos. Cette marche solitaire, et donc forcément sauvageonne, s’estompe un peu quand une habitation ou un domaine viticole se fait jour. Ici, des domaines viticoles, il y en a plusieurs. Sous un soleil de plomb et la poussière des chemins asséchant mon gosier, les châteaux Fabre-Cordon et du Grand Sabo sont de bien jolis noms qui donnent des idées de breuvage. Au regard des magnifiques paysages de vignobles que je traverse, ma tête d’ignorant des choses du vin vagabonde et n’éprouve aucune difficulté à imaginer les merveilleux nectars se cachant derrière ces enseignes apparemment nobiliaires. « Dégustation » il est écrit et si je n’étais pas si raisonnable, j’irais voir de quoi il retourne. Mais non, ça ne serait pas sérieux de déguster, d’apprécier et de ne pas acheter car je ne me vois pas me trimballer ne serait-ce qu’avec un « bipack » ou un « tripack » de bouteilles ! Devant le portail d’une très belle villa, le buste d’un empereur romain vient me rappeler que je marche sur un sentier dit « antique » et à bien y réfléchir c’est pour l’instant le seul objet représentatif de cette période que j’aperçois. Encore est-il de plâtre et pas vraiment sculpté ! Serais-je sur la bien connue « Via Domitia ou Voie domitienne » ou bien encore sur l’Héracléenne dont je sais leur présence commune par ici  ? Rien ne le mentionne mais ce n’est pas impossible au regard de ce que j’ai lu  à leur propos et de leurs trajets qui selon les historiens traversaient la Gaule dite « narbonnaise ». A voir ! En tous cas et peu après le château du Grand Sabo un grand menhir apparaît au bord du chemin. Simple pierre dressée ou vrai menhir ? Rien ne le dit. En tous cas, ce n’est pas une borne milliaire romaine car sa forme n’est pas celle d’une colonne burinée. A vérifier ! L’itinéraire est toujours bien balisé et quand une incertitude se présente, mes bouts de carte et au pire mon tracé GPS viennent à ma rescousse. Je n’hésite pas à les consulter au moindre croisement non balisé ou bien quand plusieurs possibilités se présentent. Finalement, c’est toujours tout droit sur un chemin que l’IGN mentionne comme étant « des Charbonniers ». Je décide de garder mon GPS allumé pour être sûr de prendre le bon chemin et surtout celui le plus court. Non pas que je sois en retard par rapport à mes hôtes mais je ne veux surtout pas l’être. Il n’est que 15h45 quand le panneau signalétique « Portel-des-Corbières » apparaît et malgré ma flânerie je suis content d’arriver. Les premières maisons sont là à quelques centaines de mètres mais j’attends un peu avant d’appeler Monsieur Noguero pour le prévenir de mon arrivée. C’est bien plus tôt que prévu, je ne veux pas le déranger et je vais marcher encore, bonne raison pour me faire une idée du village. Finalement, je m’aperçois que je risque d’errer dans le village fort longtemps si j’attends 17 heures comme prévu initialement. Il est 16h10 et je me décide à l’appeler lui disant que si c’est trop tôt je peux attendre. Il me répond qu’il arrive et effectivement 5 minutes après il est là. Très sympathique et chaleureux, à l’image identique de son épouse que j’avais eu au téléphone. Nous voilà partis vers le quai de la Berre où se trouve le gîte. Gîte est en réalité un mot peu approprié au regard des autres gîtes pour randonneurs où j’ai eu l’occasion de loger. Ici, je qualifierais le lieu d’appartement de très beau standing où tout est clean et d’une belle modernité. J’adore et franchement je me dis que j’ai peut être été incorrect de discuter le tarif d’une nuitée. Mais comment savoir ? Je m’installe, mais à vrai dire avec mon seul sac à dos, l’installation est vite bâclée. Il est tôt et je décide de partir visiter la partie la plus ancienne du village mais aussi d’aller trouver à manger pour ce soir et un peu pour demain. Par un pur hasard et parce que le gite est juste à côté, je commence par m’évader dans la rivière La Berre grandement asséchée à cette période de l’année. J’y trouve un terrain de jeu idéal car seulement occupée par une flore étonnante car foisonnante mais aussi par des bergeronnettes, chardonnerets, serins et autres pinsons qui trouvent ici le gîte et le couvert. Ils viennent s’abreuver dans les quelques poches d’eau subsistantes. Quand aux choucas des tours, ils logent à même les parois rocheuses et les hauts murs qui encadrent la rivière près du pont de Tamaroque. Dans cette vision agréable que j’ai de découvrir les lieux, les plus à plaindre sont les poissons, le plus souvent petits mais parfois très gros, qui vont et viennent comme des âmes en peine, emprisonnés qu’ils sont dans ces flaques d’eau qui n’auront de cesse de se restreindre si de grosses pluies n’interviennent pas très vite.  Après avoir joué plus d’une heure dans les gravières et sur les galets de la Berre, visité un peu la ville et fait quelques courses mes jambes commencent à ressentir les kilomètres d’hier et ceux d’aujourd’hui. L’heure est venue de les laisser se reposer un peu. Je passe la soirée à feuilleter quelques livres et magazines mais surtout  à lire un recueil de poèmes s’intitulant « Une porte dans les Corbières » d’un certain Robert Vila où bien évidemment la cité de Portel tient une place centrale. Un pur régal pour l’amoureux des poésies que je suis (mais livre introuvable sur le Net !). Je ne peux m’empêcher de faire des photos de la quasi-totalité du livre tant j’aurais sans doute l’envie de le relire une fois rentré à la maison. C’est sur ces jolis mots que se termine cette journée de marche dans des décors bien différents d’hier mais surtout très contrastés. Oui, ce Sentier du Golfe Antique a cet intérêt de changer de décors au fil de son cheminement. Savoir si demain il en sera encore ainsi ? C’est l’immense avantage de la randonnée pédestre que de ne pas savoir comment sera le chemin du lendemain ?  Ne pas savoir de quoi demain sera fait n’est pas angoissant quand il s’agit de randonner.

(*) Pourquoi Golfe Antique ? : Dans l’antiquité, les étangs de Bages-Sigean, de l’Ayrolle et de Gruissan étaient reliés entre eux et formaient un golfe en relation avec la mer. Le massif de la Clape était une île au milieu de ce golfe où se déversait l’Aude nommée alors « l’Atax ». Les alluvions de l’ Aude ont comblés ce golfe. L’étang de Bages-Sigean était longé par un grand axe de communication entre l’Espagne et l’Italie axe qui reliait les oppida. Hannibal partant à la conquête de Rome, emprunta cette voie (voie héracléenne) qui fut modernisée par les romains et rebaptisée « Via Domitia ». Dans ce golfe, Narbonne (en réalité Narbo Martius) était un port au commerce maritime très important. (Source Site du Comité Départemental de la Randonnée Pédestre de l’Aude / CDRP11). Rajoutons que de nombreuses preuves de cette activité maritime ont été retrouvées à divers endroits autour de l’étang actuel de Bages-Sigean (La Nautique, Mandirac, Sainte-Lucie, île Saint-Martin, Peyriac-de-Mer, etc...). Le seul aspect « antique » est d’ailleurs encore plus ancien que la présence des Romains puisqu’il est acquis que d’autres peuples les ont précédés autour du golfe comme les Elysiques mais également les Ligures et les Volques Tectosages à un degré moindre.

 

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Le Circuit de la Tirounère depuis Saint-Paul-de-Fenouillet

Publié le par gibirando

 

 Ce diaporama est agrémenté de 6 musiques d'Ennio Morricone extraites de la compilation "Love Stories". Elles ont pour titre : "Giovanna & Féderico", "Forse Basta", "Presentimento secondo", "Un Amico (from Revolver)", "Tema Di Ada" et "Canone Inverso Primo".

Le Circuit de la Tirounère depuis Saint-Paul-de-Fenouillet

Le Circuit de la Tirounère depuis Saint-Paul-de-Fenouillet 

Pour agrandir les photos, cliquez dessus. 2 fois pour un plein écran.


 

En été, quand la canicule règne mais que l’envie de randonner est toujours là, il y a deux manières d’aller à la recherche de la fraîcheur. Il y a celle consistant à monter en altitude ou bien celle résidant à trouver un point d’eau. C’est cette deuxième solution que j’avais choisie en allant vers le lieu-dit La Tirounère (*) à partir de Saint-Paul-de Fenouillet. La Tirounère est une résurgence d’eau souterraine située au fond de la rivière Agly à la sortie des Gorges de Galamus. Dans son livre « Les eaux souterraines des Pyrénées-Catalanes », le très éminent hydrologiste Henri Salvayre la décrit ainsi : « La résurgence de la Tirounère l'une des plus importantes « sources » après Font Estramar, jaillit dans le lit de l’Agly, sur sa rive droite en amont de St - Paul - de – Fenouillet ».  Haut-lieu de la spéléologie subaquatique, elle a été explorée par le célèbre spéléologue Robert de Joly en 1934 et depuis elle constitue un lieu très prisé pour tous les fanas de cette discipline. Depuis sa découverte, elle a été captée et fournit ainsi en eau potable une partie de la commune de Saint-Paul. Ses eaux se mélangeant à celle de l’Agly, vous avez déjà compris que mon but n’était pas d’aller faire de la spéléologie ;  j’en serais bien incapable ;  mais plus simplement une jolie balade et puis surtout d’en profiter très largement pour me rafraîchir. Pour cela, il ne faut pas avoir peur de braver quelques interdictions. En effet, il faut savoir que La  Tirounère a été pendant quelques années un passage obligé sur les sentiers de Grandes de Randonnées que sont le Tour des Fenouillèdes, le GR.36 et le Sentier Cathare. Une passerelle métallique enjambant la rivière Agly en permettait le passage sans être dans l’obligation de se mouiller les pieds voire les jambes et au pire de prendre un bain. Malheureusement, en novembre 2014, elle a été emportée par des crues historiques qui atteignirent leur apogée les 29 et 30. Un projet de reconstruction est dans les cartons depuis plusieurs années mais apparemment un budget de financement manque à l’appel. Le passage par ce lieu est en principe interdit même si en été franchir à gué les  4 à 5 mètres de largeur de la rivière est très facile.  Voilà pour la présentation. Mon circuit démarre de la rue de la Paychere (**) où, parce que je suis seul, je réussis à garer ma voiture contre le mur d’une villa. De ces hauts murs, croulent des oranges et des trompettes rouges d’une jolie plante que l’on appelle bignone. Tout autour, c’est déjà un peu la campagne avec des meules de foin, des champs de luzernes et des vignobles. De la cité, je n’aperçois que les toitures et bien évidemment les monuments les plus hauts que sont le Chapître et le clocher de l’église Saint-Pierre et Saint-Paul. Parce que je suis là aussi pour photographier la Nature, d‘emblée la chance est avec moi. Elle se présente sous les traits d’une minuscule vipère qui traverse la ruelle, de chardonnerets élégants car joliment colorés, d’une tarente se chauffant au soleil et de petits papillons. A cause de la saison et de la chaleur qui règne, la flore est rare voire déjà bien fanée. Néanmoins, je trouve quelques fleurs à immortaliser. Plus rien de notable jusqu’à un passage à niveau où circule le train rouge du Pays Cathare et du Fenouillèdes. Quand le train rouge passe, je suis déjà à plus de 200 m de la voie ferrée  et près d’un chenil où une meute de chiens de chasse vocifère aux moindres bruits de mes pas. Avec la chaleur qui règne, je comprends leur exaspération à être enfermés dans des baraques de tôles et de planches entourées de grillages. Quel être vivant accepterait de vivre dans des conditions si indignes ? J’apprécie ma liberté, et ce, d’autant plus après la période obligée de confinement que nous venons de vivre. Si les vignobles restent présents, la garrigue prend de plus en plus de place au rythme de mes pas. Les yeux aux aguets de tout ce qui pourrait se présenter, j’erre de droite à gauche sur ce chemin pourtant quasiment rectiligne, flânant comme jamais, mais avec ce sentiment de liberté que l’expression « prendre la clé des champs » reflète parfaitement. D’ailleurs, un coup d’œil sur mon bout de carte IGN vient magnifiquement me confirmer cette métaphore car le lieu-dit que je traverse s’appelle le Cami de Camps, c’est-à-dire le Chemin des Champs.  Les papillons se font plus présents mais leur petite taille semble inversement proportionnelle à la grande aridité des lieux. Pour l’avoir lu, je sais que les variations de taille voire de coloris chez les lépidoptères peuvent être fonction du climat, de la saisonnalité et de l’altitude. Ici le milieu plutôt sec semble être l’élément déterminant.  Seuls les Machaons et les Flambés, plutôt nombreux, semblent avoir une taille à peu près normale. Mon assiduité à photographier la faune me distrait au point d’en oublier que j’ai un itinéraire à suivre et voilà comment sur un simple aller retour, je fais un kilomètre de mieux ! Je reviens sur mes pas sans trop ronchonner car cet égarement m’a permis de photographier une remuante fauvette et un joli serin. Dans la garrigue, quelques rares pins, parsemés de-ci delà, sont les prémices des pinèdes de pins d’Alep qui ne tardent pas à arriver. Elles se succèdent au fil des premières vrais déclivités, déclivités qui prennent la forme de petites montagnes russes, le terme de « montagne » étant ici très exagéré, le mot « butte » étant plus approprié. Ces collines boisées sont le siège d’innombrables « cicadidés », c’est-à-dire des cigales, toujours très difficiles à photographier. Il faut une bonne vue pour arriver à les repérer sur les arbres où leur immobilité et leur mimétisme sont d’excellents camouflages, et puis surtout dès que l’on approche, elles s’arrêtent de chanter, démultipliant ainsi  la difficulté. Une fois de plus, il me faudra beaucoup de chance et surtout patienter avant de réussir une seule photo d’une unique cigale, et encore parce qu’une d’entre-elles a bien voulu s’envoler et se poser à quelques mètres de moi. Pourtant quel que soit le biotope le tintamarre qu’elles engendrent est extrême et il n’est entrecoupé que par les « tut tut tut » du petit train rouge que l’on entend de temps à autre dans le lointain désormais A l’approche du col de Lenti, la végétation change encore. Si les pins ne disparaissent pas totalement, c’est un maquis méditerranéen qui les supplante avec de nombreux arbustes. Chênes verts, arbousiers, cistes, bruyères arborescentes, filaires et redouls en constituent l’essentiel. Dans ces petits sous-bois, de larges fenêtres s’ouvrent de temps en temps sur d’abruptes collines de calcaire. Ces collines sont bien connues des passionnés de la varappe qui trouvent là des terrains de jeux d’une remarquable dimension, même si dans les Gorges de Galamus et à cause des chutes de pierres, cette activité est interdite car incompatible avec le canyoning  Dans ce décor karstique, la rivière Agly a creusé une belle échancrure dont les deux grosses bosses latérales ressemblent au dos d’un chameau géant : les Gorges de Galamus. C’est vers là-bas que je dois aller. Au col de Lenti (382 m), les panneaux directionnels et les intersections se succèdent sur quelques mètres et j’avoue que pendant un court instant, j’en suis à me demander quelle direction prendre vers la droite ? Pourtant, je suis passé ici en 2011 lors d’un mémorable Tour du Pays Fenouillèdes avec mon fils mais nous venions de Caudiès et allions à Saint-Paul. C’était simple car bien indiqué. J’en emprunte un petit tronçon, juste pour le plaisir de m’élever et de profiter ainsi de quelques panoramas. Reste à trouver le chemin de la Tirounère ? Mon GPS vient m’aider et finalement c’est bien le premier sentier descendant vers la droite qu’il me faut emprunter, même si un panneau mentionne et avertit du détournement consécutif à la destruction de la passerelle de La Tirounère. Après un étroit sentier tout en descente, un large chemin prend le relais. Une nouvelle fois, non loin du lieu-dit Borde del Rey, mon passage engendre les aboiements de quelques chiens que je pense séquestrés dans un chenil. En réalité, je me retrouve avec 4 chiens hurlant derrière moi, babines retroussées et crocs pointus bien visibles et de ce fait, peu engageants. Je cache mon bâton de marche dans mon dos, leur fais face mais n’en mène pas large. Finalement, ils doivent constater que je ne suis pas un sanglier, ils arrêtent très vite leurs hurlements et sur les quatre, trois repartent immédiatement dans le chenil. Le quatrième, un joli chien noir aux oreilles semi-tombantes reste tout seul puis pas du tout agressif et peu farouche semble vouloir me suivre. Alors que j’avance une main pour le caresser, il détale et disparaît. Ouf ! Je respire. Un semblant de silence revient car ici les cigales paraissent moins présentes. La route bitumée descendant vers la Tirounère se présente et dès lors je sais que mon objectif n’est plus très loin. Quelques centaines de mètres et il apparaît. De prime abord sous les traits d’une barrière avec la mention « propriété privée – défense d’entrer », barrière facile à franchir derrière laquelle se poursuit une grande allée bordée de vieux cèdres. Que faire ? Deux voitures sont garées à proximité de l’entrée. A gauche de la barrière, une pancarte annonçant "Un Sentier du Charbonnier" m'incite à la photographier, et ce, afin de l'inscrire sur mes tablettes. Sait-on jamais ! Sur ma droite et en contrebas, j’entends déjà le murmure de la rivière mais j’entends également des voix qui montent jusqu’à moi. Je ne vois pas d’autre issue alors je passe outre l’interdiction. Le lieu-dit La Tirounère est là comme l’indique un panneau de randonnée directionnel. Une longue bâtisse affiche une enseigne « Oxygen Aventure ». Un couple et 2 enfants sont assis autour d’une table de pique-nique mais sont sur le point de partir. Ils partiront peu après. Je me retrouve seul même si en aval j’entends encore quelques voix. Je visite en détail cette berge-là puis me décide à traverser la rivière sur une gravière. Au milieu de la rivière, j’ai de l’eau à hauteur du genou et la profondeur est donc d’environ 50 cm. Sur les galets moussus, ma seule crainte est de glisser avec mon appareil-photo, alors je m’aide de mon bâton de marche. Finalement, or mis cette appréhension, la traversée est simple et sans véritable risque, or mis celui de se retrouver le cul dans l’eau. Qu’en est-il en hiver ? Je ne sais pas. De toute manière, venir ici en hiver ne présente aucun intérêt. Je ne peux donc que vous le déconseiller. Je passe presque 2 heures sur cette rive, pique-niquant, visitant les lieux dans le moindre détail, me baignant à plusieurs reprises, me reposant et profitant de la fraîcheur ambiante et m’évertuant à photographier une faune variée. Elle est bien présente avec des insectes aquatiques, des libellules, des papillons, des lézards et quelques oiseaux dont les plus visibles sont des Bergeronnettes des ruisseaux et des Merles. Mais j’aperçois aussi des Bergeronnettes grises, des pinsons et une fauvette. Concernant le lieu lui-même, nul besoin d’être un spécialiste du captage de l’eau pour comprendre qu’il a été amplement aménagé pour ce faire. Un bac bétonné est suivi d’un seuil formé d’une petite chicane, le tout permettant de casser les éventuels débits trop importants de la rivière. La chicane forme une jolie petite cascade. L’ensemble est bien agencé avec des pare-fous, des échelles et un canal d’irrigation qui file parallèle à la rivière. La roche a été creusée et forme ainsi de petits tunnels où l’eau et les hommes peuvent circuler. C’est d’ailleurs par-là que je quitte les lieux, filant vers le lieu-dit Borde-Massé mais surtout préférant cette ligne droite rejoignant un large chemin plutôt que le sentier balisé des G.R qui se poursuit vers les hauteurs. Là aussi, j’enfreins quelques interdictions mais les endroits sont déserts, les champs en jachère et les quelques bâtis le plus souvent en ruines. Je retrouve le balisage du Tour du Fenouillèdes un peu plus loin et comme ce chemin est quasiment unique car parallèle à l’Agly, son cheminement est très simple. Dans ce cheminement m’amenant vers Saint-Paul, seuls quelques nouveaux oiseaux et de rares fleurs que je veux photographier s’allient à mon désir de prolonger au maximum cette belle journée. Saint-Paul est là, avec sa gare et son pittoresque petit train rouge filant vers d'autres bourgades. C’est sur cette jolie image de voyage que se termine mon propre voyage.  Quand je me le remémore, j’ai comme le sentiment d’avoir feuilleté un joli livre de sciences naturelles que j’ai beaucoup aimé. Cette balade a été longue de 9,300 km (égarements volontaires ou pas) pour des montées cumulées de 314 m et un dénivelé de 127m. Saint-Paul de Fenouillet à 255 m d’altitude est le point le plus bas et le col de Lenti (382 m) le plus haut. Carte IGN 2348 ET Prades - Saint-Paul-de-Fenouillet Top 25.

(*) Toponymie du nom "Tirounère" : Faut-il que je l'avoue, je n'ai rien trouvé sur Internet expliquant le nom "Tirounère", mais finissant par "ère", on peut seulement imaginer qu'il ait été mis au féminin. J'ai donc chercher avec "tiroun" et là,  j'ai constaté que ce nom apparaissait régulièrement dans la toponymie pyrénéenne et provençale. C'est ainsi que dans les Pyrénées, nous trouvons un "Tiroun de la Croux", un "Tiroun des Sorcières", un "Tiroun dès Oueilles", un "Tiroun Gran", un "Cap des Tirouns", une "Cabane du Tiroun, un lieu-dit "Tiroun" à Loubens en Ariège et des "Tirouns" parcelles cadastrales dans la commune de Bourréac dans les Hautes-Pyrénées. Si ces trouvailles ne m'ont guère plus avancé, Louis Saudinos dans son ouvrage "La toponymie du canton de Bagnères-de-Luchon" nous apprend qu'un "tiroun" peut-être tout à la fois un "mamelon rocheux", un "dôme", une "émergence ronde" mais aussi "un lac sert de bornage aux communes de Cirès, de Cathervielle et de Caubous". Ce lac est-il situé au sommet d'une "émergence ronde" ? Il ne le dit pas mais on peut le supposer, ce qui permettrait de confirmer qu'un "tiroun" est un "éminence ronde" en Pyrénées et qu'il est donc plus simplement une variante des mots "turon", "turrou ou "tyron" que l'on trouve de nos jours dans le lexique pyrénéen pour un sommet arrondi.

En continuant mes recherches en Provence, j'ai appris que le mot "tiroun" au même titre que le mot "félibre" restaient des mystères. C'est ainsi qu'en lisant un article d'Alfred Jeanroy dans une revue "Romania" de 1894, on peut y lire ceci, extrait d'un texte qui s'intitule "MÉLANGES" : « Que de tres jour, tres niue, iéu noun vous retrouvère, Que. dins lou tèmple erias Que vous disputavias Emé li tiroun de la léi, Emé li sèt felibre de la lèi.»  Il rajoute « Le mot félibre, aussi inconnu du reste que le mot tiroun, ayant évidemment dans ce morceau le sens de « docteur de la loi » , fut acclamé par les sept convives, et l'Armana prouvençau, organe de la nouvelle école, proposé et fondé dans la même séance, l'Armana prouvençau per lou bèl an de Dieu 1855, adoubea e publica de la man di felibre, annonça à la Provence, au Midi et au monde que les rénovateurs de la littérature provençale s'intitulaient « félibres ». Alfred Jeanroy poursuit en disant qu'il pense que le mot "félibre" descend de l'espagnol "féligrés" signifiant "paroissien", "client de l'église" et en un mot un "fidèle". Toujours dans cette suite d'idée et pour le mot "tiroun", il émet "L'hypothèse d'une origine espagnole......" 

Nous sommes loin bien sûr du "sommet arrondi pyrénéen" mais l'avantage d'avoir pris ce « chemin provençal » est qu'il m'a amené vers le très fameux "Félibrige" et à leur trésor cher aux Sept Primadié. Dans ce remarquable trésor, dictionnaire Provençal-Français, et pour faire bref, on y apprend qu'un "tiroun" c'est à la fois un "canard", "un fusil" ou "une corde", cette dernière explication ayant pour origine le verbe "tirer" en français et "tirar" en occitan, définitions que l'on retrouve dans l'occitan "tiron" et à laquelle on peut y rajouter "une lentille d'eau" que l'on appelle aussi "tirounado" en provençal. 

Alors pour la "Tirounère", nous avons le choix ? "Un sommet arrondi ?". Il y en a bien un juste au dessus de la source, piton rocheux magnifique par ailleurs. Un canard ou plutôt une cane ou canette ? Pourquoi pas, ce n'est pas l'eau qui manque ! Une corde avec laquelle on tirait de l'eau de sa source ? C'est une idée ! Une lentille d'eau ? Voilà une explication qui a le mérite de correspondre à ce que l'on voit de nos jours ? Un endroit où les plantes aquatiques ne manquent pas !

Enfin il y a des noms qui ne laissent pas indifférents et c'est le cas des mots basques "Ithuri", "iturri", "uthurri" signifiant fontaine ou source, "turusta" pour cascade. 

Enfin, si quelqu'un connaît la solution, je suis preneur. Merci.

(**) Toponymie du nom "Paychère" : Si le nom "tirounère" garde ses mystères, le nom "paychère" est plus facile à expliquer. D'ailleurs, j'ai trouvé l'explication peu loin de Saint-Paul de Fenouillet car dans un excellent site consacré à  Prats-de-Sournia et aux Fenouillèdes. Voici le lien. On peut y lire ceci  dans un article consacré aux Toponymes du Fenouillèdes : "Paissièra : ( Paychère, Paychèro ). Ce n’est pas un toponyme à proprement parler mais à Prats ce sont les veines nourricières du territoire. A lui seul le Rèc de la Farda en a compté 13. Ce terme désigne la prise d’eau et en Fenouillèdes avec la rigole d’amenée au champ, jardin ou pré. Considérant l’étendue de ce réseau, elles devaient avoir un nom pour les différencier." Cette thèse est d'ailleurs confirmée dans le remarquable site "Etymologie-Occitane.fr" où on peut lire qu'une Passièra est un « barrage de rivière, digue; chaussée d’un moulin; écluse, réservoir à poissons; .......Pansieire à Valleraugue (Gard) est  attesté en 2013 par mon petit-fils Aymerik, originaire du village.» Je vous laisse le soin d'aller sur le lien pour visionner la photo de cette "paychère" de Valleraugue dans le Gard. On y apprend qu'au 12eme siècle, elle était constitué d'échalas de bois lesquels mis les uns contre les autres formaient un barrage.

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La Serre de l'Artigue del Baurien (566 m) depuis Saint-Paul-de-Fenouillet.

Publié le par gibirando

Ce diaporama est agrémenté de 4 musiques interprétées par Léo Rojas (Flûte de pan). Elles ont pour titre : "El Condor Pasa", "The Last Of Mohican", "Celeste" et "Le Berger Solitaire"

La Serre de l'Artigue del Baurien (566 m) depuis Saint-Paul-de-Fenouillet.

La Serre de l'Artigue del Baurien (566 m) depuis Saint-Paul-de-Fenouillet.

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9 janvier 2020. 10H30. Nous voilà Dany et moi à Saint-Paul-de-Fenouillet au départ d’une balade pédestre qui doit nous mener au sommet de « la Serre de l’Artigue del Baurien », dénomination bizarroïde d’une modeste colline culminant à 566 m d’altitude.  Comme toutes les collines de ce secteur, elle constitue une petite partie de ces échines calcaires encadrant ce remarquable couloir, lesquels sur une trentaine de kilomètres, forment le singulier synclinal du Fenouillèdes, très souvent appelé aussi Synclinal de Saint-Paul. Grosso modo, ce synclinal va de Caudiès-de-Fenouillèdes jusqu’à Cases-de-Pène. En géologie, un synclinal étant un pli concave, c'est-à-dire un « creux », cette « serre » où nous allons est un « anticlinal ». Quand vous saurez que le creux est occupé par les couches géologiques les plus récentes, les différentes collines qui l’encadrent en sont les parties visibles les plus anciennes. Ici, elles datent de la période qu’on appelle « crétacé inférieur » et de l’étage géologique qu’on appelle Aptien, c'est-à-dire qu’elles auraient vu le jour entre -125 et -113 millions d’années. Une colline ayant par la force des choses deux versants, ici cette  « Serre de l’Artigue del Baurien » domine la vallée de Maury d’un côté et celle de l’Agly de l’autre. Et si il y aurait encore beaucoup à écrire à son sujet, et notamment en terme de sismicité (*), voilà en résumé ce que l’on peut dire de cette « serre » sur le plan géologique. A la fin de ce récit, j’évoquerai également la toponymie de cette appellation assez insolite (**). Pour le reste, voilà déjà 2 mois, et depuis le court « Sentier du Vigneron » réalisé à Leucate, que Dany et moi attendons ce jour-là. Quelques petits « bobos » récalcitrants nous ont contraints à stopper conjointement nos balades pédestres. C’est donc une reprise que nous attendons avec une belle impatience. Si je connais un peu cette « serre », pour l’avoir côtoyée en 2011 lors d’un mémorable Tour du Pays Fenouillèdes avec mon fiston, seule la partie du chemin allant jusqu’à Lesquerde est commune avec le tracé que j’ai envisagé aujourd’hui. Une autre partie est également commune avec un circuit qui s’intitule « Géologie et anciennes mines », mais je n’en connais que peu de choses et tout juste l’entrée barricadée d’une mine de gypse, mine encore en fonctionnement et qui possède une histoire que je vous conte en annexe (*). Comme je le fais régulièrement, j’ai, sur Internet, tenté de découvrir l’Histoire de ce secteur, mais pour être franc or mis l’exploitation minière, il y a peu de choses. Il faut dire que depuis fort longtemps, les mines et carrières sont la principale richesse de l’endroit, et encore de nos jours. Fer, gypse, cuivre mais aussi manganèse, antimoine, alquifoux et plombagine, voilà les différents gisements pour lesquels des concessions ont été demandées dès le 19eme siècle, nous apprend le remarquable site Internet Santpanhols.fr. Pourtant la présence de 2 oppidums romains à Lesquerde, dont un situé sur la serre, tout près de l’ancienne mine de fer, laisse imaginer une présence beaucoup plus ancienne, mais sans doute avec un intérêt minier elle aussi. L’Histoire de village contée par Jean Tosti affermit cette thèse d’une présence romaine et atteste de mines de fer exploitées dès 1759. Je ne suis pas un spécialiste, loin s’en faut, mais d’autres recherches m’ont appris que la géologie est en réalité bien plus complexe avec également d’autres minerais comme le quartz, la limonite, l’hématite, la pyrite, l’oligiste et la chalcopyrite au sein de roches encaissantes comme le calcaire, le granite et la mylonite. Ces lectures très intéressantes au demeurant, puis une analyse assez poussée de la carte I.G.N et de sa vue aérienne m’ont laissé imaginer deux ou trois parcours pédestres possibles. Quand nous démarrons cette balade, rien n’est donc encore figé à ce propos et j’ai enregistré dans mon GPS, le tracé des différents scénarios. Il est donc 10h30 quand nous garons notre voiture, rue de Lesquerde, pile-poil devant les bureaux de la Communauté des Communes Agly-Fenouillèdes. Le démarrage est très simple puisqu’il suffit de suivre la rue en question jusqu’à une déchetterie puis de poursuivre le balisage jaune et rouge du GRP Tour du Fenouillèdes. Or mis quelques oiseaux qui m’occupent et que je tente de photographier, il n’y a rien bien de notable sur cette partie. Il y a bien une biscuiterie Brosseau, mais elle est fermée, et de ce fait je ne peux que supposer qu’elle fabrique ou fabriquait les fameux et délicieux croquants de Saint-Paul. Sur la droite, si la serre est déjà bien visible avec ses différents pylônes de télécommunications, elle ne donne qu’un petit aperçu de ce qui nous attend car c’est sur l’autre versant que nous y grimperons. Dès lors que le chemin entre dans une garrigue typiquement méditerranéenne, la végétation est si haute et si engainante  que toute vision disparaît et il faut donc attendre l’approche du col de Lesquerde pour que s’entrouvre la vallée de Maury. Si le panorama est beau, il reste néanmoins gâché par un ciel un peu trop laiteux et des pylônes et câbles à haute tension qui s’invitent au beau milieu des décors. L’arrivée au col qui devrait grandiose sous un ciel très clair n’est guère plus géniale sous cette lactescence qui blanchit tout.  Lesquerde, vallée de l’Agly, pays Fenouillèdes et Massif du Canigou, d’ici tout paraît décoloré. A la limite, et assez paradoxalement, seule la «  Serre de l’Artigue del Baurien » , dont le calcaire est pourtant très blanc,  offre un très beau contraste sous un ciel bleu bien plus prometteur. La promesse sera en partie tenue et ce voile blanchâtre disparaîtra quelque peu. Quelques photos au col et nous poursuivons le sentier désormais tout en descente. Dany étant souvent devant moi, je la préviens à l’avance de quelques passages délicats car très caillouteux, très pentus ou très ravinés, et parfois les deux ou trois à la fois. Dans un ciel à l’aplomb devenu soudain très bleu, deux vautours fauves viennent faire le spectacle. Comme il est impossible, voire très dangereux, de marcher et de regarder en l’air nous stoppons pour les observer. Emportés par des ascendances thermiques, il s’élèvent peu à peu jusqu’à disparaître de notre vue. Nous repartons. Dans le silence ambiant, quelques chants d’oiseaux m’incitent à rester aux aguets. Grives, fauvettes et tariers se laissent repérer mais pas toujours photographier. Il faut de la patience et beaucoup de chance. Connaissant déjà ce parcours, je sais qu’il est préférable d’éviter le bitume de la D.19 pour atteindre Lesquerde.  C’est chose faite assez simplement, car contrairement à la vieille carte I.G.N dont je détiens un bout, l’itinéraire évitant l’asphalte est parfaitement balisé. Si Lesquerde est vite là, avec ses très belles villas récentes puis ses ruelles aux maisons parfois si colorées,  c’est au préalable ce gros rocher noir omniprésent dominant le village qui marque les esprits. Il s’agit d’un monolithe de fer dont le poids serait estimé à 10.000 tonnes et dont les spécialistes le qualifie soit de limonite ou d’hématite brune, y rajoutant parfois le mot « brut ». Je sais que mon parcours doit y passer mais comme il est déjà 12h30, nous stoppons pour pique-niquer. Devant la mairie, des bancs sont là bien à propos. ¾ h plus tard, nous repartons par la rue principale puis par la bien nommée rue du rocher. Le rocher est vite atteint et si une photo-souvenir à son pied est bien entendu inévitable, force est de reconnaître qu’il est bien moins impressionnant sous cet angle-là. Il faut dire qu’une fois encore, mais pourtant sans chercher, j’y aperçois deux yeux et un nez en trompette. Ça devient une habitude de voir des visages dans les roches ! Alors bien sûr, et vu comme ça, comment ne peut-il pas perdre de sa superbe !?  Une fois encore, nous repartons. Cette fois, la piste est là et elle s’élève en zigzaguant jusqu’au sommet de la serre, à l’endroit même où les nombreux pylônes  lancent leurs hautes flèches dans un ciel bleu et pur. Dans cette montée, un vautour nous accompagne encore bien plus curieux que ceux de ce matin. Au fil de l’élévation, les panoramas se dévoilent, sur le village certes, mais aussi sur une très belle partie du pays Fenouillèdes. L’entrée d’un vieux tunnel, obstruée par la végétation et quelque peu occupée par de grosses toiles d’araignées, nous rappelle l’exploitation minière d’antan. J’ai lu que ce tunnel, construit en 1908, avec une galerie longue de 560 m et traversant la « serre », permettait aux mineurs venant de Saint-Paul de parvenir plus facilement à Lesquerde et vice-versa. Le minerai était extrait grâce à un petit chemin de fer. Ici tout s’est arrêté. Le tunnel en 1930 et l’exploitation totale dans les années 50/60, alors qu’au loin, du côté de Lansac sans doute, quelques fumerolles blanchâtres s’élèvent au dessus d’un parc éolien. Querelles de l’Ancien et du Moderne, si  on est très loin de la l’Académie Française et de la création artistique, le débat n’est peut-être pas clos pour tout le monde. Carrières à ciel ouvert et éoliennes font souvent l’objet de querelles environnementales. En zoomant avec mon appareil-photo, je constate qu’il s’agit d’une usine bien en activité, car probablement de feldspath ce qui expliquerait la fumée blanche.  Le sol sous nos pieds, lui, est jonché de cailloux ferreux. Il suffit de se baisser pour en ramasser des rouges ou des gris, parfois creusés de petits trous, mais toujours très lourds par rapport à une autre petite pierre ordinaire de taille équivalente. Finalement à l’approche de la crête, cette modernité dont je parle se présente sous les traits des fameux pylônes que l’on aperçoit depuis ce matin comme autant de mires à atteindre. A quoi servent-ils ? Aux communications je suppose, mais ne m’en demandez pas plus, car ici protection oblige, tout est clos ! Quand aux indications ne les cherchez pas, il n’y en a pas ! C’est sans doute « top secret ! »  D’ailleurs, et alors que nous sommes pile-poil en dessous, ce ne sont pas eux qui nous intéressent au premier chef mais les merveilleux panoramas qui nous imaginons dès lors que nous serons parvenus à la crête sommitale. Nous y grimpons puis une fois atteinte, nous restons là quelques minutes comme scotchés devant ce spectacle si aérien, spectacle pourtant encore un peu altéré par cette brume laiteuse toujours présente autour de nous. Assis à l’aplomb d’un à-pic impressionnant nécessitant attention et même prudence, j’ai un peu le vertige. Je m’assieds et Dany s’accroche à moi, sans doute prise elle aussi par cette même sensation d’ivresse de l’abîme. Tout comme moi, je ne la sens pas rassurée, alors je lui propose de redescendre afin que nous allions au véritable sommet, situé un peu plus loin et à 566 m d’altitude. Elle descend mais refuse ma proposition préférant m’attendre à l’ombre d’un grand chêne vert. Alors j’y vais seul, poursuivant la piste et découvrant à la fois un mirador destiné à la surveillance contre les incendies et deux bornes géodésiques. La crête est plus spacieuse, plus rassurante et offre de bien meilleures vues sur le synclinal côté Caudiès et sur Saint-Paul.  Mais comme Dany m’attend, je ne m’éternise pas. A l’instant de se retrouver, ici se pose la question du retour. Je propose à Dany d’aller voir l’ancien chemin des mineurs qui en principe se trouve plus bas sur la piste au détour d’un virage. Ce chemin, dit des Mineurs ou de la Mine, je ne le connais que par les lectures que j’en ai faites, quelques photos peu parlantes et une vue aérienne sur Géoportail. Autant dire rien ! Le chemin est assez simple à trouver mais je passe néanmoins devant et demande à Dany de rester à distance. J’amorce la descente, d’abord sur un étroit sentier puis sur un chemin très caillouteux mais qui s’élargit dès lors que j’atteins l’autre versant, c'est-à-dire celui où se trouvent les falaises les plus abruptes. Depuis la crête, qui imaginerait qu’il y ait un chemin ici ? Voilà la première réflexion qui me vient à l’esprit à l’instant où j’amorce la descente. Pourtant, et à ma grande surprise, j’entends des voix qui arrivent d’un peu plus bas ? Alors je stoppe et j’attends. Deux jeunes femmes arrivent vers moi. Quelques minutes plus tard, elles sont suivies de deux messieurs beaucoup âgées qu’elles, dont un qui semble complètement éreinté et à bout de souffle. Dany qui est resté là-haut sur la crête  m’appelle et je lui conseille de ne pas bouger et de m’attendre. La conversation s’installe avec le petit groupe. Ils arrivent de Saint-Paul. Ma première question portant bien évidemment sur la qualité de ce chemin des mineurs, l’homme le plus âgé, celui là même qui est encore très essoufflé s’empresse de me répondre. « Le chemin n’est qu’une succession de caillasses et d’éboulis pendant un bon bout de temps » me dit-il. « Il est donc instable ? » lui dis-je. «  Oui, c’est ça, il est très instable et j’ai eu du mal à progresser » me répond-il. « Pensez-vous que ma femme qui a une prothèse totale du genou puisse l’emprunter sans crainte en descente ? ». Et là, c’est presque en cœur qu’ils s’exclament « non surtout pas ! ». « J’ai 82 ans, j’ai pris ce chemin des dizaines de fois mais je crois que c’est la dernière fois que j’y viens car il est de plus en plus mauvais » rajoute le vieil homme encore bien haletant. « Tu vieillis ! » lui dit une des deux jeunes femmes. Je les remercie tous et sans aucune hésitation, je rebrousse chemin. Ce n’est pas aujourd’hui que je découvrirais ce chemin des mineurs mais je ne suis pas inquiet car je sais qu’une autre issue possible est enregistrée dans mon GPS. Nous redescendons vers Lesquerde. Finalement le chemin permettant d’effectuer une petite boucle est vite là. Il est commun avec l’itinéraire « Géologie et anciennes mines » et d’ailleurs quelques mètres après la bifurcation obligatoire, des vestiges sont très vite là : maisons des mineurs, trémie, ancienne structure supportant des wagonnets, etc….Sur ce parcours, nous n’avons pas l’impression d’avoir perdu au change. Enfin, je n’en sais rien ! Si nous poursuivons cette boucle, qui est bien balisée d’une couleur jaune, je garde toutefois mon GPS allumé car bien évidemment il ne nous faut pas redescendre sur Lesquerde mais remonter vers le col éponyme. Un cairn bien placé au bon endroit nous y aide allègrement. Le col de Lesquerde arrive à point nommé, et si nous y finissons avec plaisir les restes de nos collations, c’est parce que sur notre droite un parapentiste vient de prendre son envol depuis la Serre de l’Artigue del Baurien et que sur notre gauche, un vautour a décidé de faire de même. Finalement, le parapentiste reste seul en l’air car le vautour file se poser au sommet du Causiel, suite logique et rocheuse du pinacle aux pylônes.  Le retour vers Saint-Paul s’effectue sans souci mais sous un ciel carrément plombé au dessus de la commune. Rien de vraiment notable, or mis quelques amandes à glaner que Dany découvre au détour du chemin,  et pour moi, une corneille qui a décidé de jouer avec mes nerfs et mon appareil-photo au sommet d’un pylône à haute tension. Si cette boucle se termine en principe devant les bureaux de la Communauté des Communes Agly-Fenouillèdes où se trouve notre voiture, nous ne prenons que le temps d’y déposer nos sacs à dos dans le coffre et de chausser des tennis plus légères.  Sur un coup de tête, nous venons de décider que la balade se poursuivrait encore par une copieuse visite de la cité dédiée à l’apôtre des Gentils.  Dans ce dédale de petites ruelles bien sympathiques, on regrette de ne pas pouvoir approcher de plus près le fameux « chapitre « , et ce pour cause de très importants travaux de restauration. Oui dommage de ne pas pouvoir se faire une meilleure idée de ce magnifique monument historique, le plus emblématique car le plus symbolique du pays Fenouillèdes ! Ainsi se termine cette très belle journée que nous languissions depuis plus de 2 mois. La finir sans aucun bobo ajoute à notre bonheur.  Telle qu’expliquée ici, mais hors visite de Saint-Paul, cette balade a été longue de 11,3 km pour des montées cumulées de 850 m.  Le dénivelé est de 301 m entre la ligne de départ à 265 m et la borne géodésique de la « Serre de l’Artigue del Baurien » à 566 m. Cartes IGN 2348 ET Prades – Saint-Paul-de-Fenouillet et 2248 OT Thuir – Ille-sur-Têt Top 25.

(*) Carrière de gypse de Lesquerde et sismicité : Le site de la commune de Lesquerde nous apprend que cette carrière souterraine est encore en activité, activité confirmée par Jean Tosti qui sur son site, rajoute que c’est la société Bournet qui l’exploite, extrayant 30.000 tonnes de minerais par an. Elle est la dernière et la seule des Pyrénées. Le gypse, déjà utilisé pendant l’antiquité et notamment pour les statues, est aussi connu sous l’appellation de « pierre à plâtre ». Le site Wikipédia nous apprend que les anciens plâtriers la désignaient sous le vocable de « pierre de lune ». L’Histoire du Chapitre de Saint-Paul (Le chapitres et les gypseries) nous révèle que vers 1660, le maître-gipier Jean Sabatier a largement utilisé le gypse (guich) de Lesquerde pour la réalisation de très nombreuses décorations de la collégiale, gypseries qui ont pas mal souffert lors d’un séisme survenu en 1996.  Or, la lecture d’un article du 21/12/2012 sur le site de Médiapart explique que ce même séisme du 18 février 1996 a eu pour épicentre cette fameuse carrière de gypse de Lesquerde. Encore plus fort, avec 5,6 de magnitude et située à 7 km de profondeur,  il s’agirait selon le RéNaSS, Réseau National de Surveillance Sismologique de la plus puissante magnitude jamais enregistrée en France. Cette information a brièvement été reprise sur le site Agora Vox. Si ce séisme et ses répliques vous intéressent, sachez que l’Association Française du Génie Parasismique a rédigé un rapport de 116 pages à ce propos accessible sur Internet. Il précise que « l’épicentre instrumental et macrosismique semble bien localisé dans le secteur de Saint-Paul-de-Fenouillet-Lesquerde, les premières répliques analysées se situeraient plus au sud près de Saint-Arnac, Feilluns et Ansignan. L’ensemble de ces villages a par ailleurs fortement ressenti l’événement principal ». Voilà ce que l’on peut dire de cette carrière de gypse, même si or mis ces quelques articles, jamais aucune publicité ne l’a véritablement présentée comme l’épicentre du séisme le plus puissant jamais enregistré en France. Précisons tout de même que ce séisme n’a fait aucune victime et apparemment pas perturbé l’exploitation du gypse. Enfin et pour conclure, rappelons que cet endroit est situé non loin de la frontière entre les plaques tectoniques Eurasienne et Ibérique qui ont, il y a -65 millions d’années, initié la création des Pyrénées. Les deux plaques s’affrontant et coulissant l’une sous l’autre, elles engendrent des tensions occasionnant de nombreuses failles dont celle qui a pour nom « Faille Nord-Pyrénéenne » allant grosso-modo de Saint-Paul-de-Fenouillet jusqu’au Cap Breton.

La Serre de l'Artigue del Baurien (566 m) depuis Saint-Paul-de-Fenouillet. 

Carrière de gypse de Lesquerde photographiée en 2011 lors d'un Tour du Pays Fenouillèdes et épicentre du plus violent séisme connu en France (cliquez sur la photo pour l'agrandir)

(**) Toponymie de la « Serre de l’Artigue del Baurien » : J’ai déjà eu l’occasion d’expliquer l’origine du mot « serre ». De l’occitan « sèrra », elle désigne une colline de forme allongée voire plus simplement une ligne de crêtes. On retrouve cette origine dans les mots « sierra » en espagnol et en castillan et « serra » en Italie,  mais également dans les mots « serra », « serrat » ou « sarrat » en catalan. On le trouve également dans le mot « serres » au pluriel ainsi que dans le mot « serrade » pour un chemin longeant une ligne de crêtes. Au singulier ou au pluriel, il s’agit aussi d’un nom propre ou de famille plutôt répandu. Ici pas de doute, il s’agit bien d’une colline de forme allongée. Concernant le mot « l’Artigue » ou « Lartigue », tous les toponymistes sont également d’accord pour lui attribuer une signification identique, même si selon les régions quelques nuances peuvent exister. Alors pas de doute, il s’agit bien d’une surface défrichée ou d’un terrain labouré pour les rendre cultivable. Une commune près de Saint-Gaudens porte ce nom de « Artigue », du prélatin « artica » et du gascon « artiga » nous précise le site Wikipédia. Idem avec plusieurs lieux, communes et personnages portant ce même nom au singulier ou au pluriel « Artigues ». Dans le livre « Les toponymes pyrénéens » de Robert Aymard, les nuances sont excessivement nombreuses et en faire la liste complète serait bien trop long. En voilà quelques unes : Articaut, Artiès, Artigal, Artigala, Artigalet, Artigou, Artiguette, Lartigau, etc….quand aux définitions en français, ça va de la clairière à la défriche, en passant par un terrain dénudé ou une parcelle déboisée. Ces différents et nombreux toponymes s’expliquent par le fait même que l’on imagine une origine quasi commune dans toutes les langues ;  gascon, occitan, provençal, ibère, basque, catalan ; avec peut-être un étymon originel « artika » (Etymologie occitane). Reste enfin à expliquer le mot « baurien »  que l’on pourrait croire assez simple mais qui est de très loin le moins documenté. Si je dis simple, c’est tout simplement parce que dans les parlers occitans le « B » et le « V » sont identiques et ne sont qu’une question de prononciation. A partir de ce concept, on imagine aisément qu’un « baurien » pourrait être en réalité un « vaurien », c'est-à-dire en français et selon le Larousse « une personne sans aucune valeur morale » voire « un enfant malicieux et indiscipliné ».  Pourtant, selon plusieurs toponymistes, ce n’est pas par là qu’il faut chercher une explication mais plutôt dans le mot « baure », de la racine occitane « vaur » signifiant « ravin » ou « gouffre ». Du gaulois « bawa » ou « baua » signifiant « boue », la « baure » devient parfois « boeyre » ou « bouère » en gascon, « bouirex » en Ariège ou «Bouerzy » en Béarn et « Baurien » en Roussillon nous explique Robert Aymard dans son ouvrage consacré à l'« Hydronymie pyrénéenne ». Selon  ce dernier, une « baure » serait donc en Roussillon un endroit boueux en montagne. Il faut bien reconnaître que cette dernière explication ne paraît guère plausible dans un endroit aussi sec et rocailleux que cette « Serre de l’Artigue del Baurien ». Mais les temps ont pu changer. Dans le même sens, on trouve un col de "Boire" près du hameau de Vira dans la forêt de Boucheville.

Alors cette « Serre de l’Artigue del Baurien » faut-il la traduire comme :

  • la colline du terrain labouré (ou défriché) d’un vaurien ?
  • la colline du terrain labouré (ou défriché) près du ravin ?

Est-ce bien dans ces hypothèses-là qu’il faut continuer à chercher ? A moins que la vérité surgisse soudain d’un gouffre ?

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