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serre

Le Circuit "floristique " du Grès depuis Rouffiac-des-Corbières

Publié le par gibirando

Ce diaporama est agrémenté de diverses musiques composées par Bruno Coulais et tirées de la bande originale du film "Les Saisons". Dans l'ordre de passage, elles ont pour titre : "The Magic Wood", "La Part Sauvage du Monde", "Les Territoires inaccessibles", "La Chasse à Courre", "Le Temps et le Froid", "L'Exode", "Un Monde Disparaît", "La Ronde des Saisons", "Le Printemps", "Au Loin", "Le Survol", "La Toile", "Aquatiques", "La Forêt n'est plus" et "Armures".

Le Circuit "floristique " du Grès depuis Rouffiac-des-Corbières
Le Circuit "floristique " du Grès depuis Rouffiac-des-Corbières

Cliquez sur les images pour les agrandir

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Quand il m’a fallu donner un nom à cette petite boucle pédestre de ma composition, c’est en observant le carte IGN que l’intitulé  « Circuit ‘floristique’ du Grès depuis Rouffiac-des-Corbières » est venu à moi comme une évidence. Alors certes, la géologie du secteur est constituée de grès (*) ; et je l’ai vérifiée ; mais cette vérification était-elle bien utile alors que ce proche secteur situé à l’aplomb nord du château de Peyrepertuse enregistre un lieu-dit Le Grès, une Serre du Grès, un ruisseau du Grès, un col du Grès et une bergerie du Grès ? Oui, elle l’était puisque la géologie la plus visible est quand même le calcaire. Voilà pour l’intitulé principal, mais sans doute serez-vous étonné par l’adjectif « floristique » ? En effet, si la géologie ne me laisse pas indifférent, et si la faune photographiable a été magnifiquement présente elle aussi, le but de cette randonnée était en priorité « floristique » c’est-à-dire tourné vers la flore. Dans ce secteur et à cette époque de l’année, je la soupçonnais « florilège », » floribonde » et « florissante », au sens de « nombreuse et « d’épanouie » ! Bingo si j’ose dire tant il y eut des fleurs diverses, variées et parfois même imprévues à recenser tout au long de ce parcours pas toujours bien fléché mais ô combien génial car toujours au plus près de la Nature. « Voilà déjà longtemps que ma fleur de l’âge a fané alors comme un triste constat que je n’accepte sans doute pas, je pars chercher des fleurs dans la force de mon âge déjà bien avancé ». Voilà désormais ma motivation à partir sur les chemins. Découvrir, observer, apprendre et toujours ce leitmotiv « de ne pas marcher idiot ! » quoi qu’il advienne. Il est 9h15 quand je range ma voiture sur un parking au centre de Rouffiac-des-Corbières, derrière un imposant lavoir. Le village paraît vide, seuls deux ouvriers perchés sur un échafaudage s’affairent contre une façade. Suivi par un chien sorti de nulle part, je démarre sans réfléchir car je connais le début du parcours pour l’avoir déjà emprunté lors d’une longue randonnée dont les objectifs principaux avaient été le château de Peyrepertuse et la Fontaine de la Jacquette au départ de Duilhac. C’était en octobre 2017. Le temps a passé depuis, pas trop bien passé parfois, et faire des distances de 14km est devenue compliqué , et ce d’autant que je sors d’une longue période d’inactivité pour cause d’un genou gauche trop récalcitrant et plus récemment encore d’un très méchant Covid. C’était il y a 15 jours seulement ! Mais l’envie de marcher et le désir de m’aérer sont là alors j’ai inventé ce circuit de 6 ou 7 km avec comme objectif premier de photographier un maximum de fleurs différentes ! En ce printemps plutôt pluvieux, je ne voyais pas de plus beau dessein et ce, d’autant que la journée était annoncée très clémente. Le chien m’a accompagné un peu puis il m’a abandonné. Je me retrouve seul et ça me convient. Après quelques jardins potagers, sur la gauche, un premier champ garni de fleurs sauvages m’oblige à aller voir de plus prés. Grandes marguerites, Trèfles étoilés et Sérapias sont les premières fleurs sauvages à être recenser. Photographiquement bien sûr. Ces premières fleurs attirent quantité de papillons mais ces derniers demandent plus de temps pour être immortaliser. Il va en être ainsi en ce début de parcours jusqu’à ce que le bitume disparaisse et laisse la place à un chemin terreux. Là, or mis deux chevaux qui viennent vers moi se faire cajoler et déguster quelques biscuits plus rien ne m’arrête dans un tourbillon floral. Seuls quelques papillons et passereaux chanteurs ont encore ce pouvoir. Parmi ces oiseaux, un couple de Huppes fasciées que j’entends chanter depuis un bon moment et pour lesquels je réussis avec bonheur à en photographier au moins un. Il est vrai qu’il est perché au sommet d’un grand pin.  Je dis avec « bonheur », tant ces oiseaux sont magnifiques. Puis dès lors qu’ils s’envolent, je reviens vers les fleurs. Il y en a tellement de différentes au bord du chemin que je ne sais plus où donner de la tête. J’en oublie sans doute. Les plus minuscules notamment que j’aperçois bien sûr mais pour lesquelles il faudrait que je m’installe par terre et que j’y passe un temps infini pour les photographier en macros. J’en fais parfois l’impasse. Cette folie s’estompe petit à petit dès lors que le chemin quitte la campagne au profit de la forêt. Un chemin en sous-bois prend le relais. Plus le bois devient touffu est plus les fleurs se font rares. Elles se résument désormais à 4 ou 5 espèces toujours les mêmes. Après avoir cheminé au pied du Sigle de La Rabazole, le chemin rétrécit et devient sentier au pied des Carbonnières. Ce tronçon devient plus monotone, même si dans le silence des sous-bois, plusieurs sangliers que je ne vois pas mais entends seulement me font sursauter. Plus loin, c’est un énorme essaim sauvage d’abeilles qui ralentit mes pas. Leur nid est carrément accroché à un chêne vert au bord du sentier. Si le bourdonnement qu’elles produisent est assez impressionnant, aucune abeille ne m’agresse sans doute sont-elles trop occupées à créer leur colonie.  Après plusieurs photos, je me vois contraint de m’éloigner de l’essaim car quelques-unes se montrent un peu belliqueuses mais sans jamais me piquer.  Dès lors que sur ma gauche, j’entends la rivière Verdouble, je sais que j’en ai fini avec cette partie très boisée. A hauteur d’un petit pont de pierres sur le Verdouble, je retrouve l’asphalte d’une route. Quelques panneaux relatifs aux trails Cathares survenus le week-end précédent sont encore là accrochés à une balustrade. Je suis d’autant bien informé que mon gendre à participer aux 52km, c’est-à-dire au trail des Seigneurs au départ de Cucugnan. 11 heures à courir le gaillard m’a dit ma fille !  Je m’arrête là sur le pont pour manger un peu. Un peu de sandwich puis 2 tranches de cakes aux fruits confits. En contrebas, quelques petits poissons cabotent lentement dans la rivière. Sans doute des chevesnes. Quelques petits morceaux du pain, de thon ou de cake que je jette dans le courant ne semblent pas les intéresser. Dans les arbres, un couple de mésanges semble s’être lancé dans une chevauchée poursuite où l’accouplement paraît être le but final.  Cette course prénuptiale étant entrecoupée de pauses, je réussis quelques jolies photos. Je redémarre sachant que je vais peut-être affronter la partie la plus délicate de la boucle que j’ai prévue. En effet, au niveau de la Bergerie du Grès, je compte sur un chemin en pointillés noirs sur la carte IGN pour rejoindre Rouffiac. Les fameux « chemins noirs », chers à l’écrivain aventurier Sylvain Tesson. Finalement et malgré mon insistance, je ne vais pas trouver le bon sentier. Autour d’une pelouse arborée tout est embroussaillé. Il y a bien en contrebas de la propriété le ruisseau du Grès mais lui aussi paraît impraticable car les broussailles l'envahissent.   Respectueux de la propriété privée, je me vois contraint à chercher une autre voie. Au pire, ça sera la route D.14 si je ne peux pas faire autrement. Je reprends la route initiale sur 100m environ et là j’aperçois sur la droite un sentier filant vers un poste de chasse. Je laisse un puits puis le poste de chasse sur ma droite et l’étroit sentier se poursuit dans une garrigue très verdoyante clairsemée de divers boqueteaux buissonneux. Là, aussi étonné que moi, j’y surprends un beau sanglier solitaire. Une seule photo et il détale. Qu’elle chance il a eu le bougre que je ne sois qu’un chasseur d’images !  Bien que zigzaguant au milieu de ces buissons, je continue à avancer et ça m’encourage. Je reprends mon inventaire floral. Je fais seulement attention à ne pas me frotter aux genêts épineux et autres buissons plutôt hauts car je crains soit de me piquer soit d’attraper des tiques. Au cours de mon cheminement, le bruit des voitures et des motos qui passent tout près sur la D.14 me rassure. Je la considère comme un éventuel échappatoire au cas, je ne pourrais plus avancer là où je suis. Plusieurs casots ruinés envahis par la végétation m’encouragent aussi car ils sont la preuve que ce secteur rural a été jadis occupé par des hommes, ce qui explique probablement que la garrigue ne s’est pas pleinement réinstallée. Au-dessus d’une vieille étable, quelques arbres où chantent divers passereaux m’incitent à m’arrêter plus longuement pour tenter de les photographier. Je sors mes différents appeaux et il ne me faut que 10 minutes pour immortaliser le premier. Un joli serin-cini bien jaune. Puis c’est autour d’une alouette lulu à être immortaliser. En 45 minutes, pendant laquelle j’ai grignoté fruits secs et biscuits, plusieurs autres oiseaux sont venus mais une seule mésange est entrée dans la carte mémoire de mon appareil-photo. Je repars jusqu’à une ruine plus imposante que je vois au loin légèrement sur ma droite. Sur mon bout de carte IGN, le nom d’un lieu-dit « Les Birats » est mentionné mais j’ignore si c’est bien là. Au regard du temps qui a passé, car il est presque 13 heures,  je m'assieds sur une citerne pour terminer mon sandwich et ce, toujours dans la crainte d’attraper des tiques. Dans la ruine, il y a des orchidées que l’on appelle « Orchis homme pendu » à cause de leurs fleurs ressemblant à un petit bonhomme et à leurs labelles à des membres pendants.  Une fauvette peu craintive s'approche de la ruine et  je réussis à la photographier de très près. A-elle son nid dans la ruine ? Probablement. Puis je me remets en route sur un large chemin herbeux en longeant une clôture. Il m’amène direct vers un très long layon où plusieurs poteaux électriques ont été installés.  Le layon descend la colline puis la remonte sur l’autre versant coupant en deux la Serre du Grès, elle-même coupée transversalement par le ruisseau éponyme. Je reconnais immédiatement ce layon, car avant de venir, je l’ai bien remarqué sur la carte aérienne de Géoportail. Plusieurs empreintes de chaussures sur la glaise m’indiquent que ce layon est pratiqué comme chemin. Je me mets à le descendre sans trop de problème mais avec la prudence que le terrain glaiseux exige. Là, de nombreuses fleurs nouvelles non encore aperçues m’arrêtent constamment. Les fleurs, plus quelques papillons nouveaux, deux oiseaux sur les fils électriques, une cabane de berger, je mets presque une heure pour cheminer ce layon. Il est vrai qu’en ayant observé la vue aérienne, je sais qu’une fois atteint le sommet du layon, le plus dur est derrière moi. Je peux me permettre de flâner. Un fois le sommet atteint, une bifurcation se présente devant moi. Je fais le choix opportun de partir à gauche car j’ai l’intime conviction que ce chemin va m’amener au col de Grès. A ce col, la suite est assez simple et de surcroit la fin du circuit étant enregistrée dans mon GPS, ma flânerie peut continuer. Un fois encore, elle est de rigueur jusqu’à Rouffiac. Encore quelques fleurs, d’autres papillons puis dans les ruelles du village, des hirondelles des fenêtres qui s’affairent dans des ornières boueuses afin de construire leur nid. Tout de cette Nature que j’aime est prétexte à m’arrêter. La visite de village clôture cette merveilleuse journée de marche. Et tout ça sous la surveillance ombreuse de la « citadelle du vertige », à savoir l’incroyable et grandiose château de Peyrepertuse.  Je ne sais pas si vous vous lancerez dans cette modeste balade mais personnellement j’y ai pris beaucoup de plaisir, et ce d’autant que tous mes objectifs ont été complétement comblés : recenser et photographier des fleurs, marcher et m’aérer dans la Nature que je n’ai eu de cesse d’observer.  Oui, je peux dire que je suis gré d’avoir accompli ce circuit « floristique » du Grès. Telle qu’expliquée ici et selon le tracé sur carte IGN joint à ce récit, j’estime la distance réalisée à environ 7km. Je l'avoue, je ne l'ai pas mesurée. Carte IGN 2447OT Tuchan – Massif des Corbières top 25.

 

Le Grès :  Comme expliqué dans mon récit, le nom propre « Grès », donnée à ma balade, est venu à moi comme une évidence et ce parce que sur la carte IGN plusieurs lieux-dits où j’ai marché portaient ce nom : Serre, col, zone topographique, bergerie, ruisseau. Mais ces appellations ne sont pas tombées des nues et le grès, nom commun d’une roche en est grandement à l’origine car dans le passé des mines de grès étaient présentes dans ce secteur de Rouffiac en particulier et de l’Aude en général. Alors ce grès, c’est quoi au juste ?    « Le grès est une roche sédimentaire détritique, issue de l’agrégation de grains de taille majoritairement sableuse (0,063 mm à 2 mm) et consolidé lors de la diagenèse. Les grains qui constituent le grès sont généralement issus de l'érosion de roches préexistantes, qui déterminent en grande partie sa composition, principalement constituée de quartz et feldspath. Selon le degré de cimentation et sa composition, il peut former une roche très friable ou cohérente. Le grès se rencontre dans une grande variété de milieux de dépôt, depuis le domaine continental (rivière, plage) jusqu'au domaine marin (turbidites). Son équivalent non consolidé est généralement appelé sable.», voilà comment Wikipédia nous présente cette roche utilisait comme matériau de construction depuis la nuit des temps. On l’appelle aussi « molasse ». Ici, dans l’Aude, qu’on l’appelle « Grès de Carcassonne » ou bien « Grès d’Alet », ce matériau a toujours été à l’honneur, les plus beaux exemples étant la cité médiévale de Carcassonne avec ses célèbres remparts et sa magnifique basilique Saint-Nazaire-et-Saint-Celse mais aussi les abbayes Sainte-Marie de Lagrasse ou de Fontfroide. Cette courte liste n’est pas exhaustive car on pourrait citer des centaines de monuments ainsi élever avec du grès. Quant à la plupart des communes, toutes ont leurs propres patrimoines construits en grès : habitations, églises, mairies, ponts, oratoires, fontaines, lavoirs, puits, fours à pain, moulins et leurs meules, cheminées, pavages, la liste est aussi longue que les possibilités du grès….car la pierre peut être tendre, moyenne ou dure s’adaptant ainsi à de nombreux usages, et conférant de ce fait une remarquable unité à l’architecture d’un lieu. Concassé, le grès est aussi utilisé dans des structures routières.  Sa capacité à être facilement taillé et sa résistance au gel ont permis aussi la création de nombreuses œuvres d’art de par le monde. Quant à la nuit des temps, en France et ailleurs,  les exemples d’abris sous roche taillés dans des falaises de grès ou bien de dolmens et autres menhirs élevés avec des blocs de grès sont légions y compris dans l’Aude : dolmen de Trillol également appelé Cabane des Maures à Rouffiac-des-Corbières, menhir de Counezeil appelé aussi menhir de Paza, lui aussi situé à Rouffiac-des-Corbières, dolmen de la Madeleine d'Albesse  à Monze, allée couverte de Saint Eugène à Laure-Minervois, dolmens de Bize-Minervois mais on pourrait en citer bien d’ autres. De plus, les formations rocheuses constituées principalement de grès permettent généralement la percolation de l'eau et sont suffisamment poreuses pour stocker de grandes quantités, ce qui en fait des aquifères précieux (source site https://www.futura-sciences.com/). Dans le secteur de Rouffiac-des-Corbières et dans la commune même, plusieurs forages ont été réalisés offrant ici à plusieurs communes une ressource en eau quasiment inépuisable. Ici à Rouffiac-des-Corbières, un forage profond de 110m a recoupé des venues d’eau estimées à 50 m3/h dans les grès fracturés du Turonien (source Calcaires, grès et marnes crétacés et paléocènes du synclinal de Couiza et des synclinaux de Rennes les Bains, Sougraigne, Fourtou, Soulatgé et des anticlinaux de Puivert – Cardou et de Fontaine Salée/Agence de l’eau/BRGM). Sans entrer dans des détails « géologiquement » trop complexes, mes lectures (car je ne suis qu’amateur captivé !) m’ont appris qu’ici à Rouffiac, les grès étaient des grès deltaïques carbonatés supérieurs ou inferieurs du Turonien. Pour une compréhension minimale ; il est donc indispensable de traduire chaque mot :

 

Deltaïque: Le grès formé dans les environnements deltaïques (en rapport avec un delta, soit un type d'embouchure fluviale caractérisé par un fort alluvionnement)  est appelé grès deltaïque. Ces roches ont généralement une texture mal triée et contiennent un mélange de tailles de grains de sédiments, notamment du sable, du limon et de l'argile.

Roche carbonatée : Les roches carbonatées sont des roches sédimentaires résultant de la compaction de sédiments carbonatés et composés d'au moins 50 % de carbonates. Il s'agit essentiellement de la calcite et de la dolomite.

Les qualificatifs inférieur, moyen ou supérieur sont en géologie un moyen de découper une époque et de la définir plus précisément. Exemple : jurassique inférieur.

Turonien : Le Turonien est le deuxième étage stratigraphique du Crétacé supérieur. On le situe entre -93,9 et -89,8 ± 0,3 Ma (million d’années)  après le Cénomanien et avant le Coniacien. Ces derniers constituant d’autres étages géologiques.

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La Serre de l'Artigue del Baurien (566 m) depuis Saint-Paul-de-Fenouillet.

Publié le par gibirando

Ce diaporama est agrémenté de 4 musiques interprétées par Léo Rojas (Flûte de pan). Elles ont pour titre : "El Condor Pasa", "The Last Of Mohican", "Celeste" et "Le Berger Solitaire"

La Serre de l'Artigue del Baurien (566 m) depuis Saint-Paul-de-Fenouillet.

La Serre de l'Artigue del Baurien (566 m) depuis Saint-Paul-de-Fenouillet.

Pour agrandir les photos, cliquez dessus.2 fois pour un plein écran.


 

9 janvier 2020. 10H30. Nous voilà Dany et moi à Saint-Paul-de-Fenouillet au départ d’une balade pédestre qui doit nous mener au sommet de « la Serre de l’Artigue del Baurien », dénomination bizarroïde d’une modeste colline culminant à 566 m d’altitude.  Comme toutes les collines de ce secteur, elle constitue une petite partie de ces échines calcaires encadrant ce remarquable couloir, lesquels sur une trentaine de kilomètres, forment le singulier synclinal du Fenouillèdes, très souvent appelé aussi Synclinal de Saint-Paul. Grosso modo, ce synclinal va de Caudiès-de-Fenouillèdes jusqu’à Cases-de-Pène. En géologie, un synclinal étant un pli concave, c'est-à-dire un « creux », cette « serre » où nous allons est un « anticlinal ». Quand vous saurez que le creux est occupé par les couches géologiques les plus récentes, les différentes collines qui l’encadrent en sont les parties visibles les plus anciennes. Ici, elles datent de la période qu’on appelle « crétacé inférieur » et de l’étage géologique qu’on appelle Aptien, c'est-à-dire qu’elles auraient vu le jour entre -125 et -113 millions d’années. Une colline ayant par la force des choses deux versants, ici cette  « Serre de l’Artigue del Baurien » domine la vallée de Maury d’un côté et celle de l’Agly de l’autre. Et si il y aurait encore beaucoup à écrire à son sujet, et notamment en terme de sismicité (*), voilà en résumé ce que l’on peut dire de cette « serre » sur le plan géologique. A la fin de ce récit, j’évoquerai également la toponymie de cette appellation assez insolite (**). Pour le reste, voilà déjà 2 mois, et depuis le court « Sentier du Vigneron » réalisé à Leucate, que Dany et moi attendons ce jour-là. Quelques petits « bobos » récalcitrants nous ont contraints à stopper conjointement nos balades pédestres. C’est donc une reprise que nous attendons avec une belle impatience. Si je connais un peu cette « serre », pour l’avoir côtoyée en 2011 lors d’un mémorable Tour du Pays Fenouillèdes avec mon fiston, seule la partie du chemin allant jusqu’à Lesquerde est commune avec le tracé que j’ai envisagé aujourd’hui. Une autre partie est également commune avec un circuit qui s’intitule « Géologie et anciennes mines », mais je n’en connais que peu de choses et tout juste l’entrée barricadée d’une mine de gypse, mine encore en fonctionnement et qui possède une histoire que je vous conte en annexe (*). Comme je le fais régulièrement, j’ai, sur Internet, tenté de découvrir l’Histoire de ce secteur, mais pour être franc or mis l’exploitation minière, il y a peu de choses. Il faut dire que depuis fort longtemps, les mines et carrières sont la principale richesse de l’endroit, et encore de nos jours. Fer, gypse, cuivre mais aussi manganèse, antimoine, alquifoux et plombagine, voilà les différents gisements pour lesquels des concessions ont été demandées dès le 19eme siècle, nous apprend le remarquable site Internet Santpanhols.fr. Pourtant la présence de 2 oppidums romains à Lesquerde, dont un situé sur la serre, tout près de l’ancienne mine de fer, laisse imaginer une présence beaucoup plus ancienne, mais sans doute avec un intérêt minier elle aussi. L’Histoire de village contée par Jean Tosti affermit cette thèse d’une présence romaine et atteste de mines de fer exploitées dès 1759. Je ne suis pas un spécialiste, loin s’en faut, mais d’autres recherches m’ont appris que la géologie est en réalité bien plus complexe avec également d’autres minerais comme le quartz, la limonite, l’hématite, la pyrite, l’oligiste et la chalcopyrite au sein de roches encaissantes comme le calcaire, le granite et la mylonite. Ces lectures très intéressantes au demeurant, puis une analyse assez poussée de la carte I.G.N et de sa vue aérienne m’ont laissé imaginer deux ou trois parcours pédestres possibles. Quand nous démarrons cette balade, rien n’est donc encore figé à ce propos et j’ai enregistré dans mon GPS, le tracé des différents scénarios. Il est donc 10h30 quand nous garons notre voiture, rue de Lesquerde, pile-poil devant les bureaux de la Communauté des Communes Agly-Fenouillèdes. Le démarrage est très simple puisqu’il suffit de suivre la rue en question jusqu’à une déchetterie puis de poursuivre le balisage jaune et rouge du GRP Tour du Fenouillèdes. Or mis quelques oiseaux qui m’occupent et que je tente de photographier, il n’y a rien bien de notable sur cette partie. Il y a bien une biscuiterie Brosseau, mais elle est fermée, et de ce fait je ne peux que supposer qu’elle fabrique ou fabriquait les fameux et délicieux croquants de Saint-Paul. Sur la droite, si la serre est déjà bien visible avec ses différents pylônes de télécommunications, elle ne donne qu’un petit aperçu de ce qui nous attend car c’est sur l’autre versant que nous y grimperons. Dès lors que le chemin entre dans une garrigue typiquement méditerranéenne, la végétation est si haute et si engainante  que toute vision disparaît et il faut donc attendre l’approche du col de Lesquerde pour que s’entrouvre la vallée de Maury. Si le panorama est beau, il reste néanmoins gâché par un ciel un peu trop laiteux et des pylônes et câbles à haute tension qui s’invitent au beau milieu des décors. L’arrivée au col qui devrait grandiose sous un ciel très clair n’est guère plus géniale sous cette lactescence qui blanchit tout.  Lesquerde, vallée de l’Agly, pays Fenouillèdes et Massif du Canigou, d’ici tout paraît décoloré. A la limite, et assez paradoxalement, seule la «  Serre de l’Artigue del Baurien » , dont le calcaire est pourtant très blanc,  offre un très beau contraste sous un ciel bleu bien plus prometteur. La promesse sera en partie tenue et ce voile blanchâtre disparaîtra quelque peu. Quelques photos au col et nous poursuivons le sentier désormais tout en descente. Dany étant souvent devant moi, je la préviens à l’avance de quelques passages délicats car très caillouteux, très pentus ou très ravinés, et parfois les deux ou trois à la fois. Dans un ciel à l’aplomb devenu soudain très bleu, deux vautours fauves viennent faire le spectacle. Comme il est impossible, voire très dangereux, de marcher et de regarder en l’air nous stoppons pour les observer. Emportés par des ascendances thermiques, il s’élèvent peu à peu jusqu’à disparaître de notre vue. Nous repartons. Dans le silence ambiant, quelques chants d’oiseaux m’incitent à rester aux aguets. Grives, fauvettes et tariers se laissent repérer mais pas toujours photographier. Il faut de la patience et beaucoup de chance. Connaissant déjà ce parcours, je sais qu’il est préférable d’éviter le bitume de la D.19 pour atteindre Lesquerde.  C’est chose faite assez simplement, car contrairement à la vieille carte I.G.N dont je détiens un bout, l’itinéraire évitant l’asphalte est parfaitement balisé. Si Lesquerde est vite là, avec ses très belles villas récentes puis ses ruelles aux maisons parfois si colorées,  c’est au préalable ce gros rocher noir omniprésent dominant le village qui marque les esprits. Il s’agit d’un monolithe de fer dont le poids serait estimé à 10.000 tonnes et dont les spécialistes le qualifie soit de limonite ou d’hématite brune, y rajoutant parfois le mot « brut ». Je sais que mon parcours doit y passer mais comme il est déjà 12h30, nous stoppons pour pique-niquer. Devant la mairie, des bancs sont là bien à propos. ¾ h plus tard, nous repartons par la rue principale puis par la bien nommée rue du rocher. Le rocher est vite atteint et si une photo-souvenir à son pied est bien entendu inévitable, force est de reconnaître qu’il est bien moins impressionnant sous cet angle-là. Il faut dire qu’une fois encore, mais pourtant sans chercher, j’y aperçois deux yeux et un nez en trompette. Ça devient une habitude de voir des visages dans les roches ! Alors bien sûr, et vu comme ça, comment ne peut-il pas perdre de sa superbe !?  Une fois encore, nous repartons. Cette fois, la piste est là et elle s’élève en zigzaguant jusqu’au sommet de la serre, à l’endroit même où les nombreux pylônes  lancent leurs hautes flèches dans un ciel bleu et pur. Dans cette montée, un vautour nous accompagne encore bien plus curieux que ceux de ce matin. Au fil de l’élévation, les panoramas se dévoilent, sur le village certes, mais aussi sur une très belle partie du pays Fenouillèdes. L’entrée d’un vieux tunnel, obstruée par la végétation et quelque peu occupée par de grosses toiles d’araignées, nous rappelle l’exploitation minière d’antan. J’ai lu que ce tunnel, construit en 1908, avec une galerie longue de 560 m et traversant la « serre », permettait aux mineurs venant de Saint-Paul de parvenir plus facilement à Lesquerde et vice-versa. Le minerai était extrait grâce à un petit chemin de fer. Ici tout s’est arrêté. Le tunnel en 1930 et l’exploitation totale dans les années 50/60, alors qu’au loin, du côté de Lansac sans doute, quelques fumerolles blanchâtres s’élèvent au dessus d’un parc éolien. Querelles de l’Ancien et du Moderne, si  on est très loin de la l’Académie Française et de la création artistique, le débat n’est peut-être pas clos pour tout le monde. Carrières à ciel ouvert et éoliennes font souvent l’objet de querelles environnementales. En zoomant avec mon appareil-photo, je constate qu’il s’agit d’une usine bien en activité, car probablement de feldspath ce qui expliquerait la fumée blanche.  Le sol sous nos pieds, lui, est jonché de cailloux ferreux. Il suffit de se baisser pour en ramasser des rouges ou des gris, parfois creusés de petits trous, mais toujours très lourds par rapport à une autre petite pierre ordinaire de taille équivalente. Finalement à l’approche de la crête, cette modernité dont je parle se présente sous les traits des fameux pylônes que l’on aperçoit depuis ce matin comme autant de mires à atteindre. A quoi servent-ils ? Aux communications je suppose, mais ne m’en demandez pas plus, car ici protection oblige, tout est clos ! Quand aux indications ne les cherchez pas, il n’y en a pas ! C’est sans doute « top secret ! »  D’ailleurs, et alors que nous sommes pile-poil en dessous, ce ne sont pas eux qui nous intéressent au premier chef mais les merveilleux panoramas qui nous imaginons dès lors que nous serons parvenus à la crête sommitale. Nous y grimpons puis une fois atteinte, nous restons là quelques minutes comme scotchés devant ce spectacle si aérien, spectacle pourtant encore un peu altéré par cette brume laiteuse toujours présente autour de nous. Assis à l’aplomb d’un à-pic impressionnant nécessitant attention et même prudence, j’ai un peu le vertige. Je m’assieds et Dany s’accroche à moi, sans doute prise elle aussi par cette même sensation d’ivresse de l’abîme. Tout comme moi, je ne la sens pas rassurée, alors je lui propose de redescendre afin que nous allions au véritable sommet, situé un peu plus loin et à 566 m d’altitude. Elle descend mais refuse ma proposition préférant m’attendre à l’ombre d’un grand chêne vert. Alors j’y vais seul, poursuivant la piste et découvrant à la fois un mirador destiné à la surveillance contre les incendies et deux bornes géodésiques. La crête est plus spacieuse, plus rassurante et offre de bien meilleures vues sur le synclinal côté Caudiès et sur Saint-Paul.  Mais comme Dany m’attend, je ne m’éternise pas. A l’instant de se retrouver, ici se pose la question du retour. Je propose à Dany d’aller voir l’ancien chemin des mineurs qui en principe se trouve plus bas sur la piste au détour d’un virage. Ce chemin, dit des Mineurs ou de la Mine, je ne le connais que par les lectures que j’en ai faites, quelques photos peu parlantes et une vue aérienne sur Géoportail. Autant dire rien ! Le chemin est assez simple à trouver mais je passe néanmoins devant et demande à Dany de rester à distance. J’amorce la descente, d’abord sur un étroit sentier puis sur un chemin très caillouteux mais qui s’élargit dès lors que j’atteins l’autre versant, c'est-à-dire celui où se trouvent les falaises les plus abruptes. Depuis la crête, qui imaginerait qu’il y ait un chemin ici ? Voilà la première réflexion qui me vient à l’esprit à l’instant où j’amorce la descente. Pourtant, et à ma grande surprise, j’entends des voix qui arrivent d’un peu plus bas ? Alors je stoppe et j’attends. Deux jeunes femmes arrivent vers moi. Quelques minutes plus tard, elles sont suivies de deux messieurs beaucoup âgées qu’elles, dont un qui semble complètement éreinté et à bout de souffle. Dany qui est resté là-haut sur la crête  m’appelle et je lui conseille de ne pas bouger et de m’attendre. La conversation s’installe avec le petit groupe. Ils arrivent de Saint-Paul. Ma première question portant bien évidemment sur la qualité de ce chemin des mineurs, l’homme le plus âgé, celui là même qui est encore très essoufflé s’empresse de me répondre. « Le chemin n’est qu’une succession de caillasses et d’éboulis pendant un bon bout de temps » me dit-il. « Il est donc instable ? » lui dis-je. «  Oui, c’est ça, il est très instable et j’ai eu du mal à progresser » me répond-il. « Pensez-vous que ma femme qui a une prothèse totale du genou puisse l’emprunter sans crainte en descente ? ». Et là, c’est presque en cœur qu’ils s’exclament « non surtout pas ! ». « J’ai 82 ans, j’ai pris ce chemin des dizaines de fois mais je crois que c’est la dernière fois que j’y viens car il est de plus en plus mauvais » rajoute le vieil homme encore bien haletant. « Tu vieillis ! » lui dit une des deux jeunes femmes. Je les remercie tous et sans aucune hésitation, je rebrousse chemin. Ce n’est pas aujourd’hui que je découvrirais ce chemin des mineurs mais je ne suis pas inquiet car je sais qu’une autre issue possible est enregistrée dans mon GPS. Nous redescendons vers Lesquerde. Finalement le chemin permettant d’effectuer une petite boucle est vite là. Il est commun avec l’itinéraire « Géologie et anciennes mines » et d’ailleurs quelques mètres après la bifurcation obligatoire, des vestiges sont très vite là : maisons des mineurs, trémie, ancienne structure supportant des wagonnets, etc….Sur ce parcours, nous n’avons pas l’impression d’avoir perdu au change. Enfin, je n’en sais rien ! Si nous poursuivons cette boucle, qui est bien balisée d’une couleur jaune, je garde toutefois mon GPS allumé car bien évidemment il ne nous faut pas redescendre sur Lesquerde mais remonter vers le col éponyme. Un cairn bien placé au bon endroit nous y aide allègrement. Le col de Lesquerde arrive à point nommé, et si nous y finissons avec plaisir les restes de nos collations, c’est parce que sur notre droite un parapentiste vient de prendre son envol depuis la Serre de l’Artigue del Baurien et que sur notre gauche, un vautour a décidé de faire de même. Finalement, le parapentiste reste seul en l’air car le vautour file se poser au sommet du Causiel, suite logique et rocheuse du pinacle aux pylônes.  Le retour vers Saint-Paul s’effectue sans souci mais sous un ciel carrément plombé au dessus de la commune. Rien de vraiment notable, or mis quelques amandes à glaner que Dany découvre au détour du chemin,  et pour moi, une corneille qui a décidé de jouer avec mes nerfs et mon appareil-photo au sommet d’un pylône à haute tension. Si cette boucle se termine en principe devant les bureaux de la Communauté des Communes Agly-Fenouillèdes où se trouve notre voiture, nous ne prenons que le temps d’y déposer nos sacs à dos dans le coffre et de chausser des tennis plus légères.  Sur un coup de tête, nous venons de décider que la balade se poursuivrait encore par une copieuse visite de la cité dédiée à l’apôtre des Gentils.  Dans ce dédale de petites ruelles bien sympathiques, on regrette de ne pas pouvoir approcher de plus près le fameux « chapitre « , et ce pour cause de très importants travaux de restauration. Oui dommage de ne pas pouvoir se faire une meilleure idée de ce magnifique monument historique, le plus emblématique car le plus symbolique du pays Fenouillèdes ! Ainsi se termine cette très belle journée que nous languissions depuis plus de 2 mois. La finir sans aucun bobo ajoute à notre bonheur.  Telle qu’expliquée ici, mais hors visite de Saint-Paul, cette balade a été longue de 11,3 km pour des montées cumulées de 850 m.  Le dénivelé est de 301 m entre la ligne de départ à 265 m et la borne géodésique de la « Serre de l’Artigue del Baurien » à 566 m. Cartes IGN 2348 ET Prades – Saint-Paul-de-Fenouillet et 2248 OT Thuir – Ille-sur-Têt Top 25.

(*) Carrière de gypse de Lesquerde et sismicité : Le site de la commune de Lesquerde nous apprend que cette carrière souterraine est encore en activité, activité confirmée par Jean Tosti qui sur son site, rajoute que c’est la société Bournet qui l’exploite, extrayant 30.000 tonnes de minerais par an. Elle est la dernière et la seule des Pyrénées. Le gypse, déjà utilisé pendant l’antiquité et notamment pour les statues, est aussi connu sous l’appellation de « pierre à plâtre ». Le site Wikipédia nous apprend que les anciens plâtriers la désignaient sous le vocable de « pierre de lune ». L’Histoire du Chapitre de Saint-Paul (Le chapitres et les gypseries) nous révèle que vers 1660, le maître-gipier Jean Sabatier a largement utilisé le gypse (guich) de Lesquerde pour la réalisation de très nombreuses décorations de la collégiale, gypseries qui ont pas mal souffert lors d’un séisme survenu en 1996.  Or, la lecture d’un article du 21/12/2012 sur le site de Médiapart explique que ce même séisme du 18 février 1996 a eu pour épicentre cette fameuse carrière de gypse de Lesquerde. Encore plus fort, avec 5,6 de magnitude et située à 7 km de profondeur,  il s’agirait selon le RéNaSS, Réseau National de Surveillance Sismologique de la plus puissante magnitude jamais enregistrée en France. Cette information a brièvement été reprise sur le site Agora Vox. Si ce séisme et ses répliques vous intéressent, sachez que l’Association Française du Génie Parasismique a rédigé un rapport de 116 pages à ce propos accessible sur Internet. Il précise que « l’épicentre instrumental et macrosismique semble bien localisé dans le secteur de Saint-Paul-de-Fenouillet-Lesquerde, les premières répliques analysées se situeraient plus au sud près de Saint-Arnac, Feilluns et Ansignan. L’ensemble de ces villages a par ailleurs fortement ressenti l’événement principal ». Voilà ce que l’on peut dire de cette carrière de gypse, même si or mis ces quelques articles, jamais aucune publicité ne l’a véritablement présentée comme l’épicentre du séisme le plus puissant jamais enregistré en France. Précisons tout de même que ce séisme n’a fait aucune victime et apparemment pas perturbé l’exploitation du gypse. Enfin et pour conclure, rappelons que cet endroit est situé non loin de la frontière entre les plaques tectoniques Eurasienne et Ibérique qui ont, il y a -65 millions d’années, initié la création des Pyrénées. Les deux plaques s’affrontant et coulissant l’une sous l’autre, elles engendrent des tensions occasionnant de nombreuses failles dont celle qui a pour nom « Faille Nord-Pyrénéenne » allant grosso-modo de Saint-Paul-de-Fenouillet jusqu’au Cap Breton.

La Serre de l'Artigue del Baurien (566 m) depuis Saint-Paul-de-Fenouillet. 

Carrière de gypse de Lesquerde photographiée en 2011 lors d'un Tour du Pays Fenouillèdes et épicentre du plus violent séisme connu en France (cliquez sur la photo pour l'agrandir)

(**) Toponymie de la « Serre de l’Artigue del Baurien » : J’ai déjà eu l’occasion d’expliquer l’origine du mot « serre ». De l’occitan « sèrra », elle désigne une colline de forme allongée voire plus simplement une ligne de crêtes. On retrouve cette origine dans les mots « sierra » en espagnol et en castillan et « serra » en Italie,  mais également dans les mots « serra », « serrat » ou « sarrat » en catalan. On le trouve également dans le mot « serres » au pluriel ainsi que dans le mot « serrade » pour un chemin longeant une ligne de crêtes. Au singulier ou au pluriel, il s’agit aussi d’un nom propre ou de famille plutôt répandu. Ici pas de doute, il s’agit bien d’une colline de forme allongée. Concernant le mot « l’Artigue » ou « Lartigue », tous les toponymistes sont également d’accord pour lui attribuer une signification identique, même si selon les régions quelques nuances peuvent exister. Alors pas de doute, il s’agit bien d’une surface défrichée ou d’un terrain labouré pour les rendre cultivable. Une commune près de Saint-Gaudens porte ce nom de « Artigue », du prélatin « artica » et du gascon « artiga » nous précise le site Wikipédia. Idem avec plusieurs lieux, communes et personnages portant ce même nom au singulier ou au pluriel « Artigues ». Dans le livre « Les toponymes pyrénéens » de Robert Aymard, les nuances sont excessivement nombreuses et en faire la liste complète serait bien trop long. En voilà quelques unes : Articaut, Artiès, Artigal, Artigala, Artigalet, Artigou, Artiguette, Lartigau, etc….quand aux définitions en français, ça va de la clairière à la défriche, en passant par un terrain dénudé ou une parcelle déboisée. Ces différents et nombreux toponymes s’expliquent par le fait même que l’on imagine une origine quasi commune dans toutes les langues ;  gascon, occitan, provençal, ibère, basque, catalan ; avec peut-être un étymon originel « artika » (Etymologie occitane). Reste enfin à expliquer le mot « baurien »  que l’on pourrait croire assez simple mais qui est de très loin le moins documenté. Si je dis simple, c’est tout simplement parce que dans les parlers occitans le « B » et le « V » sont identiques et ne sont qu’une question de prononciation. A partir de ce concept, on imagine aisément qu’un « baurien » pourrait être en réalité un « vaurien », c'est-à-dire en français et selon le Larousse « une personne sans aucune valeur morale » voire « un enfant malicieux et indiscipliné ».  Pourtant, selon plusieurs toponymistes, ce n’est pas par là qu’il faut chercher une explication mais plutôt dans le mot « baure », de la racine occitane « vaur » signifiant « ravin » ou « gouffre ». Du gaulois « bawa » ou « baua » signifiant « boue », la « baure » devient parfois « boeyre » ou « bouère » en gascon, « bouirex » en Ariège ou «Bouerzy » en Béarn et « Baurien » en Roussillon nous explique Robert Aymard dans son ouvrage consacré à l'« Hydronymie pyrénéenne ». Selon  ce dernier, une « baure » serait donc en Roussillon un endroit boueux en montagne. Il faut bien reconnaître que cette dernière explication ne paraît guère plausible dans un endroit aussi sec et rocailleux que cette « Serre de l’Artigue del Baurien ». Mais les temps ont pu changer. Dans le même sens, on trouve un col de "Boire" près du hameau de Vira dans la forêt de Boucheville.

Alors cette « Serre de l’Artigue del Baurien » faut-il la traduire comme :

  • la colline du terrain labouré (ou défriché) d’un vaurien ?
  • la colline du terrain labouré (ou défriché) près du ravin ?

Est-ce bien dans ces hypothèses-là qu’il faut continuer à chercher ? A moins que la vérité surgisse soudain d’un gouffre ?

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La Serre de Monfort (1.141 m) depuis Montfort-sur-Boulzane (726 m)

Publié le par gibirando

 

Ce diaporama est agrémenté de 4 chansons des Beatles composées par John Lennon et Paul McCartney. Elles sont jouées successivement par Chris de Burgh (The Long And Winding Road), par Rufus Wainwright (Across the Universe), par The Analogues (The Fool On The Hill et Good Night)

La Serre de Monfort (1.141 m) depuis Montfort-sur-Boulzane (720 m)

La Serre de Monfort (1.141 m) depuis Montfort-sur-Boulzane (720 m)

Pour agrandir les photos, cliquez dessus. 2 fois pour un plein écran.


 

Au printemps 2017, et au départ de Montfort-sur-Boulzane, j’étais parti en solitaire découvrir la Crabixa, montagne ô combien riche dans sa biodiversité selon l’INPN, c'est-à-dire l’Inventaire National du Patrimoine Naturel. Si le sommet de la montagne, à 1.595 m d’altitude s’était dérobé à moi ; bien trop boisé là où j’avais voulu le défier ; autant l’avouer, j’avais été immensément enchanté de tout le reste. Cols de la Couillade, de l’Hommenadel et de l’Hommenet puis Bois de l’Orri et Vallon des Escoumeilles, grâce aux incroyables panoramas aperçus, grâce à une faune si présente et à une flore si luxuriante, cette randonnée est très longtemps restée dans ma tête.  En réalité, elle n’est jamais complètement sortie de ma mémoire puisque l’envie de retourner dans ce secteur est encore là en ce 10 juillet 2019. Il faut dire que j’avais également gardé en tête, mais également en photo, ce grand panneau de bois aperçu à l’instant même où j’en avais terminé.  « Serre de Montfort », il y avait écrit dessus. Et plus bas 8,5 km et 2h30, c'est-à-dire des critères très modestes dont j’avais la conviction qu’ils seraient facilement réalisables par Dany, souvent dans le doute depuis son opération du genou quand il s’agit de randonner. Là, et après les 2 randonnées ariègeoises (Cabanes du Goutets et Tuc de Montcalivert) qui s’étaient formidablement passées, j’étais très confiant. Seule, sur l’instant, la notion de dénivelé m’avait laissé perplexe car le panneau indiquait 720 m pour le plus faible d’entre eux, mais depuis j’avais acquis la certitude qu’il s’agissait de l’altitude au départ de Montfort. En ce 10 juillet, le ciel est bleu, le soleil brille de tous ses feux, tout est donc parfait et surtout cette balade est dans les cordes de Dany. De plus, je connais ses goûts, je sais qu’elle va aimer cette marche en forêt et ces clairières lumineuses qui ne manqueront pas de s’ouvrir sur des panoramas lointains. Dans cette journée qui s’annonce exceptionnelle, seul mon appareil-photo tout nouveau me tracasse un peu. Ne pas réussir à prendre de jolies photos reviendrait à me gâcher cette balade et peut être même la journée. Résidant à Urbanya, ce matin nous nous sommes levés plus tôt qu’à l’habitude. Ria, Cattlar, le col de Roque Jalère, Sournia, Rabouillet, le col d’Aussières, la route est longue et sinueuse depuis Urbanya, mais ô combien magnifique. À elle seule, elle est déjà un merveilleux voyage pour les yeux et les arrêts se multiplient au moins quand il s’agit d’admirer le Canigou et bien d’autres montagnes ou vallées. De plus, une grande partie de ce secteur me ramène 5 ans en arrière et à un fabuleux Tour du Fenouillèdes réalisé avec mon fils. 5 Jours à gambader dans ces paysages que nous traversons, de la Serre de Sournia à la forêt de Boucheville en passant par les Terres Noires. Après ce long périple routier en Conflent et Fenouillèdes, il est 10h15 quand nous garons la voiture à Montfort-sur-Boulzane. Au même endroit que le jour de la Crabixa, tout près de cette ancestrale faneuse en bois à la sortie nord du village. Connaissant la suite jusqu’au lieu-dit la Couillade, j’ai bien l’intention de ne rien changer à mes habitudes, c'est-à-dire flâner et photographier ce que la Nature voudra bien m’offrir. Nous démarrons tranquillement, passons devant le monument aux morts, empruntons les mêmes ruelles qu’il y a 2 ans et le même chemin essentiellement forestier s’élevant longuement vers le lieu-dit.  Tout est quasiment pareil sauf que je ne marche plus tout seul. La différence est de taille, et ce d’autant que si Dany ne court pas, elle ne me laisse guère le temps de photographier la Nature comme j’avais pu le faire précédemment. Alors, je reste néanmoins aux aguets et quand un sujet se présente ; fleur, oiseau ou papillon ; je me laisse distancer sachant que c’est au train que je vais regagner le terrain perdu. Ce chemin longeant en grande partie le Ruisseau de Rambergue est agréable. Il s’élève certes en permanence mais la déclivité est si modeste qu’elle n’est pas vraiment une contrainte. Si les oiseaux et les papillons sont rares dans ces sous-bois ; je n’ai photographié qu’un seul rossignol et trois papillons différents ; de nombreuses fleurs viennent à mon secours dans cette envie permanente d’immortaliser la Nature. Par bonheur, un écureuil roux et espiègle est venu dès le départ égayer notre mise en jambes.  Depuis ce divertissant épisode, je sens bien que Dany n’a pas sa facilité habituelle. Elle ne se plaint jamais mais m’attend souvent dès lors que je prends un peu de retard avec mes photographies. A l’approche de La Couillade, mais sans réellement se plaindre, elle finit par me demander « la montée est encore longue ? ».  En réalité, je lui dis que je n’en sais trop rien. Ce large chemin montant vers la Couillade est quasiment rectiligne et tous les abords se ressemblent. Seule ma montre est là pour m’aider un peu. Je lui dis « nous y serons dans 10 minutes maxi ». En réalité, il n’en faut que la moitié, et quand un grand pan de ciel bleu s’ouvre au-dessus de nos têtes, je lui dis « je crois que nous y sommes ! « Sans doute a-t-elle un peu souffert dans cette longue montée, car immédiatement elle éprouve le besoin de se poser puis même de rallonger cette halte pour entamer son pique-nique. Il faut dire qu’il est déjà 12h10. Moi, et avant même de déjeuner, je mets tout en œuvre pour tenter de photographier la Nature. Comme je le fais depuis quelques temps déjà, et quand la balade s’y prête, je dépose une grosse poignée de graines dans un endroit tranquille mais bien visible afin d’attirer des oiseaux. Sandwich dans une main et appeau dans l’autre, j’alterne les bouchées et les chants d’oiseaux. Dans l’immédiat, et or mis un pinson et une mésange charbonnière qui se sont un peu approchés, aucun passereau ne veut de mes graines et ne répond vraiment à mes sifflets. Même en changeant d’appeau, rien n’y fait. Aussi, le pique-nique terminé et Dany s’étant allongée sur l’herbe, je file photographier des fleurs et des papillons très nombreux ici dans ce secteur. Il faut dire que tout se prête à la présence d’une faune diversifiée dont les insectes sont de loin les plus présents et les plus visibles. Ici, les nombreux feuillus se mélangent aux conifères. Il y a aussi de grands prés donc un avec un enclos recevant de temps à autre quelques troupeaux et leurs déjections.  Il y aussi des clairières et les ruines d’une vieille bergerie. Quelques sources, dont celle de Rambergue, ne sont pas loin. Alors je reste confiant pour enregistrer quelques belles photos même si je ne maitrise pas totalement mon appareil. Dans l’immédiat, et Dany s’étant quelque peu assoupie, j’en profite pour prospecter toutes les prairies et les bois alentours. Au bout d’un quart d’heure, quelle n’est pas ma surprise de voir un jeune chevreuil immergé d’une fougeraie, non loin du pré où j’avais pu en photographier un autre voilà deux ans. A 50 mètres de moi, il s’éloigne sans vraiment détaler alors je tente plusieurs rapprochés quasiment au jugé mais néanmoins dans une précipitation qui ne présage rien de bon. « Enfin, je verrais bien » me dis-je.  A l’instant où je reviens vers Dany, je constate que quelques oiseaux ont déjà repéré le petit tas de graines. Des mésanges notamment. Bleues, nonnettes, huppées et charbonnières sont les plus présentes mais les plus fugaces aussi. J’ai également aperçu deux pinsons, un rouge-gorge, un rougequeue noir et une sitelle. Je suis ravi car je ne m’attendais pas à une telle affluence en si peu de temps. Il est vrai que nous sommes-là depuis plus d’une heure. Dany s’étant réveillée, je lui demande de patienter le temps que je m’essaie à quelques photos ornithologiques. Elle accepte et part ramasser des fraises sauvages, plutôt nombreuses dans le coin. Moi, je pars me cacher mais avec vue sur le petit tas de graines. Finalement, un mur de la bergerie en ruines toute proche est la cache la plus sûre, même si au passage il me faut écraser de nombreux épineux pour créer un poste de guet dépourvu de cuisantes échardes.  Finalement, je vais réussir trois ou quatre photos d’oiseaux bien au-delà de mes espérances. Il est temps de se remettre en route, direction cette fois la "Serre de Montfort" que je ne connais pas. Le sentier continue de s’élever très modestement dans une forêt où les feuillus et les résineux, tous très beaux, se partagent l’espace. Un nouveau petit collet est atteint puis le chemin bascule avec une vue superbe sur une vaste prairie de fauche mais également sur les contreforts plus ou moins boisés du Pic Dourmidou, du Pech Pedré et de la Montagne de Crabixa. La prairie, elle, a été récemment fauchée et plusieurs bottes bien rondes de paille sont là soigneusement rangées à son extrémité. Voilà donc la partie la plus visible de la Serre de Montfort, même si je sais qu’elle se poursuit plus loin sur la gauche, c’est-à-dire vers l’est. Avant de venir, j’ai longuement analysé une vue aérienne sur Géoportail, et je sais, qu’outre le nôtre, d’autres chemins y circulent. Sans Dany avec moi, j’aurais sans doute tenté l’aventure de les emprunter, mais aujourd’hui je préfère me cantonner au circuit choisi. L’aventure m’aurait d’autant plus tentée, qu’outre ces chemins ; il y a paraît-il les ruines d’un ou deux vieux castrums médiévaux, mais les quelques renseignements que j’ai pu trouver sur Internet sont nettement insuffisants pour se lancer dans une recherche opportune.  D’ailleurs, et si j’en crois ce que j’ai lu de l’Histoire de Monfort, il y aurait eu plusieurs forts, tours défensives ou châteaux protégeant le village et ses alentours, dont un fort originel qui aurait donné son nom latin de « Montis fortis in valle alba », que l’on peut traduire en « Montfort dans la vallée blanche ». Ce Castrum de Montefortis, lié au système défensif du château tout proche de Puilaurens, et avec lui la partie la plus ancienne du village, seraient situés sur le Roc d’al Castiellas. Ce lieu-dit, je ne l’ai jamais trouvé sur aucune carte.  Toutefois, et selon les quelques renseignements lus, il est clairement indiqué comme étant à l’ouest du village actuel, et donc on peut raisonnablement supposer qu’il n’est pas très loin de la Serre de Montfort. L’ensemble, castrum et hameau, aurait été détruit lors de la guerre entre la France et l'Aragon en 1496.  Un autre castellum, dont il ne resterait que quelques moellons, aurait existé aussi sur un autre roc tout proche de la bergerie des Escoumeilles, et c’est en premier lieu celui qui m’aurait intéressé puisque cette bergerie est bien connue et parfaitement située, et surtout non loin du tracé d’aujourd’hui. Enfin, un manoir féodal, ancienne demeure seigneuriale au Moyen-Âge, existe encore dans le village actuel mais ses divers remaniements lui ont fait perdre son caractère primitif. Il serait occupé par la mairie. Enfin, il faut noter que la seigneurie de Montfort a été longtemps la propriété de la famille du Vivier que j’ai longuement eu l’occasion d’évoquer lors d’une autre balade intitulée « le Cami del Viver depuis Saint-Martin de Fenouillet ».  Voilà ce que j’ai pu lire sur Internet sur un remarquable site appartenant à un dénommé Jean Alain Monfort. Si vous voulez en savoir plus sur Montfort-sur-Boulzane et tous les Montfort en général, je ne peux que vous conseiller la lecture de ce site, sans doute le plus complet sur ce patronyme. Alors qui sait, peut-être que ces vestiges et leur Histoire seront l’occasion rêvée de revenir ici pour une nouvelle balade ? Dans l’immédiat, et alors que je tente encore de photographier la multitude de papillons qui occupent cette prairie ; et que Dany est partie loin devant moi ; quelle n’est pas notre surprise d’entendre d’abord, puis d’apercevoir ensuite, une vieille « guimbarde » toute pétaradante remonter la piste et venir vers nous. Au delà du bruit que fait la voiture ; la vue de deux molosses courant derrière elle est bien plus angoissante. En courant, j’ai rattrapé Dany et désormais les deux chiens qui nous ont aperçus, nous vocifèrent dessus à seulement quelques mètres de nos jambes respectives. Nous rangeons nos bâtons télescopiques dans nos sacs à dos. La voiture arrive et un homme en descend. Il nous salue très brièvement et nous indique que ses deux chiens sont plus aboyeurs que méchants, surtout quand il est là précise-t-il. Les chiens continuant à courir autour de nous, et toujours en vociférant, babines bien moussantes, nous ne sommes qu’à moitié rassurés, surtout qu’il ressort de leurs gesticulations incessantes, un spectaculaire dynamisme et une incroyable force. L’homme se met à nous expliquer qu’il habite tout près d’ici, dans un mas isolé au milieu de la forêt, et qu’il a ressenti le besoin de dresser plusieurs chiens depuis qu’il y a quelques années des hommes sont venus le torturer pour tenter de le détrousser. Il rajoute qu’il ne vit que très modestement avec ses chiens, et si sa vieille guimbarde est déjà là pour justifier ses dires, sa très mauvaise dentition pleine de chicots en parachève leurs authenticités. Après cette troublante conversation, nous le saluons et reprenons notre chemin. Sa voiture ne redémarrant pas, nous lui proposons de la pousser mais il refuse notre aide. Après maints et maints essais infructueux, la voiture redémarre et disparaît bruyamment dans la prairie que nous venons de traverser. Ouf ! Les chiens disparaissent aussi. Le chemin emprunte désormais une bonne piste forestière et descend encadré d’immenses arbres. Un bout de la toiture de la maison de « l’homme aux chiens » apparaît au dessus de la canopée. Ainsi cerné par une haute végétation, le chemin devient forcément plus monotone et ce, malgré des fleurs et des papillons qui restent bien présents et que je continue de recenser photographiquement parlant. Un panonceau « point de vue » propose un allere retour au col de l’Hommenet. Nous en faisons l’impasse.  Les panoramas, eux, ont quasiment disparus et chaque petite fenêtre qui s’ouvre est l’occasion de s’arrêter pour observer celui qui se présente. Ce n’est que bien des décamètres plus bas et dès lors que nous enjambons puis dominons le Ruisseau des Escoumeilles qu’ils reviennent. La Serre de Montfort et son pinacle terminal sont désormais sur notre gauche. A l’aide de mon appareil-photo et en zoomant, j’essaie de voir si les ruines d’un château sont visibles mais la colline est bien trop éloignée pour acquérir des certitudes. Je ne vois que des bois ou bien quelques rares pierriers mais rien de suffisamment précis m’indiquant la présence de vieilles ruines médiévales. L’itinéraire zigzague un peu et longe désormais le Ruisseau des Escoumeilles se trouvant sur notre droite. Moi, sur cette piste presque rectiligne, je continue ma moisson de photos. Fleurs et papillons sont toujours bien présents.  Grâce à la présence du petit torrent, les oiseaux qui avaient quelque peu disparus refont surface. A cause de l’exubérance de la végétation, les photographier reste un difficile challenge. Patience et beaucoup de chance sont nécessaires. En général, la chance de photographier une oiseau se présente sur des branches mortes ou encore peu feuillues. Dans cette longue piste vers l’arrivée, seule la bergerie des Escoumeilles nous arrête quelques minutes. Plus loin, de nombreux chiens de chasse enfermés dans des enclos grillagés arrêtent Dany beaucoup plus longtemps. Au travers des grilles, elle tente d’offrir des caresses à tous les chiens « accessibles », lesquels en guise de suppliques, ne s’arrêtent pas d’aboyer. Il suffit de leur toucher le bout du museau pour qu’ils cessent.  Je suis certain que si Dany en avait la possibilité, elle leur ouvrirait les portes en grand pour qu’ils partent gambader. Dès lors que l’itinéraire tourne à gauche, suivant ainsi la courbe du ruisseau des Escoumeilles, je sais que Montfort n’est plus très loin. Quelques toitures apparaissent et le village est vite là. Nous le traversons tels deux lambins, tant il est joli à découvrir et que l’envie d’en terminer n’est pas encore totalement présente. Tout est prétexte à s’arrêter : une séculaire fontaine, un vieux lavoir, l’église, une tuile peinte, des hirondelles et des moineaux nichant sous les toits, des gros bouquets d’hortensias et quelques trépidants rougequeues noirs. Finalement, la vue du grand panneau en bois esquissant cette balade met fin à cette flânerie. La voiture est là. Cette balade telle qu’expliquée ici a été longue de 9,6 km. Les montées cumulées ont été de 730 m. Le dénivelé est de 414 m entre le point le bas à 726 m au départ de Montfort et le plus haut à 1.140 m au niveau du collet avant de descendre vers la Serre de Montfort. Carte IGN 2348 ET Prades – Saint-Paul de Fenouillet Top 25.

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La Serre du Bosc del Prior (828 m) depuis Corneilla-de-Conflent (548 m)

Publié le par gibirando

Ce diaporama est enjolivé de la chanson "Vénus"  écrite par Ed Marshall et Peter De Angelis, successivement interprétée ici par les excellents Frankie Avalon, Les Compagnons de la Chanson, Johnny Tillotson, Gloria Lasso, The Lettermen, Johnny Mathis.

La Serre du Bosc del Prior (828 m) depuis Corneilla-de-Conflent (548 m)

La Serre du Bosc del Prior (828 m) depuis Corneilla-de-Conflent (548 m)


Avec Dany, mon épouse, on marche ensemble depuis de longues années. Un peu moins désormais à cause de ses problèmes articulaires. En randonnée, je la connais par cœur. Je sais ce qu’elle aime et je sais aussi ce qu’elle n’aime pas. Malgré ça, il m’arrive parfois d’être très embêté dans les challenges qu’elle me fixe. C’est le cas en cette magnifique journée d’automne. Nous sommes début novembre. L’envie de marcher est là, mais elle m’a fixé dans la balade qu’elle est prête à faire, les contours suivants : pas trop loin, c'est-à-dire pas trop de route à faire en voiture depuis Urbanya où nous résidons, pas plus d’une dizaine de kilomètres à marcher, un dénivelé le plus modeste possible et la connaissant, je sais que c’est environ 300 mètres au maximum, et enfin et surtout de beaux panoramas à observer, de préférence à l’heure du pique-nique. Rien que ça ! Ce n’est plus un challenge c’est une prouesse, un défi qu’elle me demande ! Alors, je reprends un à un les éléments. Pas trop loin, ça exclut automatiquement toutes les régions autre que le Conflent. La Cerdagne et le Capcir où depuis Urbanya nous allons marcher habituellement sont bien trop loin. Les autres régions du département équivaudraient à rentrer à notre domicile. Il faut donc que je cherche ou que j’invente une randonnée d’une dizaine de kilomètres et de 300 mètres de dénivelé maximum dans le Conflent. Marcher à Urbanya ? Non, les dénivelés sont bien trop costauds à moins de refaire des balades déjà faites des dizaines de fois. De beaux panoramas ? Il n’y a pas d’inquiétude à avoir car dans le Conflent, je connais peu de randonnée où le Canigou ne soit pas la toile de fond. Alors, je me mets à chercher sur la carte I.G.N et le Conflent uniquement, et à force de la scruter, figurez-vous que je finis par trouver la randonnée presque idéale. En regardant la carte cadastrale sur Géoportail, je l’ai naturellement intitulé la « Serre du Bosc del Prior » car l’itinéraire emprunte une longue crête qui s’appelle « la Serre » circulant dans un bois au joli nom de « Bosc del Prior », le « Bois du Prieur ». Cette balade démarrant depuis le très beau village de Corneilla-de-Conflent et filant jusqu’à celui de Fillols, au pied du Canigou, tout semble réuni pour en faire la randonnée rêvée de Dany. Avec l’itinéraire tel que je l’imagine sur mon logiciel CartoExploreur tout rentre parfaitement dans le moule. Un premier tracé succinct me donne une boucle de 10,800 km de distance et de 280 mètres de dénivelé. Si je rajoute une visite de Fillols, on ne devrait pas dépasser les 12 km et les 300 m de dénivelé. En ce 7 novembre 2015, il n’est pas encore 10h quand nous démarrons de Corneilla-de-Conflent. Personnellement, j’ai découvert ce village, très récemment, lors d’une agréable randonnée sur le Circuit des Minerais au mois de mai dernier. Revenir ici, m’enchante car j’ai immédiatement aimé ce village paisible avec son imposante et merveilleuse église Sainte-Marie dont malheureusement, je ne connais toujours pas l’intérieur. Il y a également une tour moyenâgeuse. Après quelques photos souvenirs de ces deux monuments, nous nous mettons vraiment en route. Au centre du village, mon GPS m’indique une altitude de 540 mètres. Derrière l’église, je constate qu’une affiche explique quelques balades et parmi elles, il y en a une, « le Circuit Roman », dont le tracé est sensiblement similaire au mien sauf le retour depuis Fillols. Quand à la partie intitulée « la Serre », moi, je l’ai prévue au retour alors que là, elle amène le randonneur directement vers Fillols. Je prends une photo de l’affiche et du circuit, ça peut toujours servir. Dany est partie devant, car moi je traîne déjà. Il faut dire que d’emblée, un oiseau plutôt étrange est venu provoquer mon goût immodéré pour l’ornithologie et la photo. Un oiseau que je ne connais pas en tous cas et dont j’apprendrais le nom qu’après l’avoir rechercher sur Internet : un Capucin bec de plomb (Lonchura malabarica) dont la lecture de son statut en France m’apprend qu’il ne serait présent que dans la région PACA et jamais vu dans les Pyrénées-Orientales sauf en cage. Alors migration nouvelle ou échappé d’une volière ? L’avenir nous le dira ! Au départ, le sentier reprend à l’identique celui du P.R Circuit des Minerais. Il n’y a donc pas de difficultés, le balisage jaune est bien présent et il suffit de le suivre. Tout en montant, les paysages se dévoilent sur Corneilla, sur le Vallon du Cady, sur le Massif du Canigou, sur le pic des Tres Estelles et sur la Serre de Badebany plus connu sous le nom de Canalettes à cause de son incroyable sous-sol. Dany paraît ravie même si l’essentiel du dénivelé est là, sur cette portion de la boucle imaginée. La déclivité est plutôt douce et tout va bien pour l’instant. Contempler la flore, la faune et les paysages sous un soleil radieux suffit à notre bonheur commun. Moi, j’y rajoute le plaisir de la photographie.  Au lieu-dit Cabanels, je retrouve quelques aspects déjà découverts au mois de mai dernier : murets en pierres sèches, ruines, terrasses et autres vestiges agropastoraux, postes de chasse et orris. La météo est superbe et le ciel est même un peu trop opalin en raison des fortes différences de températures entre la nuit et le jour. Cette brume laiteuse s’estompe peu à peu et il fait déjà bien chaud. Un temps idéal pour randonner mais un peu moins pour prendre des photos, la luminosité n’étant pas suffisamment parfaite. En moins d’une heure, nous avons atteint le Roc Ample, intersection de chemins à 704 mètres d’altitude. Dix minutes plus tard, nous voilà devant les enclos de La Collade où de nombreuses « gasconnes » en sont déjà à se prélasser en mâchonnant leurs dernières ripailles. Le fourrage était bon, le soleil est presque au zénith et l’herbe est tendre, alors elles en profitent pour se reposer avant la prochaine traite ou peut être l’abattoir. Lait ou viande, je ne sais pas ce qui les attend vraiment. Nous repartons sans tarder car pour Dany et moi, cette vision d’un cheptel ou d’un seul animal nous laisse toujours dans la perplexité, tant l’on sait la dimension du gaspillage dans l’alimentation contemporaine. Le parcours étant désormais nouveau pour moi, je rallume mon G.P.S et sort de ma poche mon bout de carte où se trouve le tracé enregistré. A cette intersection, il y a quatre directions et celle que nous devons prendre est la piste qui file vers le nord-est. Elle contourne le lieu-dit « Font de la Berjoan ». Ici, mon G.P.S ne captant pas bien les satellites, nous empruntons la bonne piste qu’après quelques longs instants d’hésitations. Quelques ramasseurs de champignons, têtes baissées et culs en l’air, sont bien trop occupés à chercher leurs joyaux champêtres, de gros cèpes en l’occurrence, pour perdre du temps à nous indiquer le bon chemin. Quelques mètres plus loin et au regard de nos pas hésitants, une très gentille demoiselle s’approche de nous et nous confirme que nous sommes bien sur la piste menant à Fillols. La piste est large et la haute forêt de pins sylvestres, sapins et autres cèdres de l’Atlas bien agréable à cheminer. Elle devient d’autant plus agréable que très vite un ample panorama s’entrouvre sur un vaste plateau bosselé et boisé et sur le pic du Canigou et toute sa partie nord-ouest de son massif si fracturé. En effet, vu d’ici, les flancs du massif sont une succession ininterrompue de ravins et de protubérances rocheuses ou boisées. L’automne a déjà largement coloré tous ces paysages. Des couleurs chaudes. Aussi chaudes pour le plaisir de nos yeux que la météo du jour sur nos têtes.  Il n’est pas encore midi quand nous atteignons la chapelle ruinée de Saint-Pierre de Fillols. Face au Canigou et dominant Fillols, ce sont les abords herbeux et ensoleillés de cette vieille chapelle romane qui vont faire office d’aire de pique-nique improvisée. Assis directement sur l’herbe et dos contre un mur de l’église, nous allons y rester une bonne heure à casser la croûte et à nous reposer en écoutant les chants entêtants mais ô combien apaisants de nombreux oiseaux qui ont élus domicile dans un immense chêne tout proche. Après cette longue pause, nous partons visiter Fillols où l’essentiel de la vie semble tourbillonner autour de sa belle église Saint Félix. Là, une fois Fillols découvert, retour vers Saint-Pierre puis montée assez sévère mais très courte vers des pylônes qui s’élèvent au dessus de la Serre. Sur ce large layon sableux au milieu de la belle forêt du Bosc del Prior, une fois la pente gravie, le chemin se stabilise puis chevauche de tous petits mamelons avant de redescendre vers la Collade. Ici et comme je l’avais supposé en imaginant le tracé de cette balade, les vues sont superbes mais rarement à 360 degrés. Vers le nord, les pins empêchent le plus souvent toute vision. Dommage. En tous cas, Dany continue d’être aux anges et c’est bien là l’essentiel. Il faut dire que les vues sur Corneilla et tout le Conflent en général y sont somptueuses. Moi, je suis également enchanté, car sur cette crête, les papillons à photographier y sont encore plutôt nombreux malgré la saison automnale déjà bien avancée. Il est vrai que la plupart du temps, ils sont complètement "escagassés" comme on dit dans mon beau pays de Provence. Ils ont fait de la résistance pour parvenir vivant en novembre mais à quel prix le plus souvent ? Gagnent-ils quelques semaines de vie à cause du réchauffement climatique ? En retrouvant la Collade et son enclos à bétail, j’ai la conviction d’avoir déjà atteint mon but : celui d’avoir su trouver une belle et facile randonnée pour le bonheur de Dany ! Désormais, il ne reste plus qu’à redescendre vers Corneilla-de-Conflent, ancienne capitale et résidence d’hiver des comtes de Cerdagne. Dix siècles sont passés mais décidément, il faut bien admettre que nos gouvernants anciens n’étaient pas si idiots que ça. Ils savaient où il faisait bon vivre. Ils savaient s’entourer d’hommes ingénieux pour construire de superbes édifices dont certains ont réussi à traverser le temps. Ils savaient ce qui était bon pour leur peuple et ce qui ne l’était pas ! Pas vraiment comme aujourd’hui, il faut bien l’avouer ! Telle que nous l’avons réalisée, visite de Fillols incluse, cette balade est longue de 13,4 km. Le dénivelé est de 280 m et les montées cumulées de 765 m. Une balade idéale à faire en toutes saisons. Carte IGN 2349 ET Massif du Canigou Top 25.

 

 

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Le Trau del Cavall (Falaises et Contrebandiers) (540 m) depuis Vingrau

Publié le par gibirando


Cette chanson est agrémentée de 5 chansons du regretté Michel Berger. Elles ont pour titre : "Le Paradis Blanc", "Quelques Mots d'Amour", "Message Personnel""Chanter Pour Ceux Qui Sont Loin de Chez Eux" et "Pour Me Comprendre".

Le Trau del Cavall (Falaises et Contrebandiers) (540 m)  depuis Vingrau

TRAUCAVALLIGN
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Une fois encore, c’est vers les Corbières et plus exactement vers Vingrau et sa Serre que j’avais jeté mon dévolu en cette belle journée de printemps. Outre le plaisir de faire un peu d’exercice et d’aller m’oxygéner, mon but était comme souvent guidé par mon désir de découvrir la flore et éventuellement la faune de cette belle contrée. Ma curiosité fut amplement satisfaite puisque c’est presque une centaine de végétaux (fleurs, plantes, arbres et arbustes) et de nombreux animaux que j’ai pu photographier ce jour-là. En flânant bien plus encore, j’aurais pu très facilement doubler ces chiffres qui sans doute peuvent paraître ridicules quand on sait que c’est plus de 1.000 espèces végétales et plus de 300 espèces d’oiseaux que l’on a recensées uniquement dans cette chaîne montagneuse. D’un autre côté et en y réfléchissant, ces chiffres sont très substantiels si l’on tient compte que ces photos sont prises au cours d’une seule saison et d’une longue marche d’une seule journée, sur un sentier unique, connu et ouvert à chacun, qu’il n’y a pas de volonté de ma part de me cacher pour surprendre un quelconque animal, qu’il n’y a pas de volonté d’aller à la recherche ou à la rencontre d’espèces particulières comme le feraient de vrais professionnels de la photo ou de la nature et qu’enfin mon petit appareil numérique aussi performant soit-il n’est pas vraiment adapté à la prise de vues d’animaux surtout quand ces derniers sont en mouvement. Seul le hasard enfante mes photos faunistiques ou floristiques qu’on se le dise. A Vingrau, sur les panonceaux indicatifs, cette randonnée que je vous décris ci-dessous, est intitulée « Falaises et Contrebandiers ». Si le mot « falaises » s’expliquent très facilement puisque cette balade emprunte pour une grande partie la longue colline de la Serre de Vingrau, bien connue des fans de la grimpe, j’avoue que j’ai éprouvé un peu plus de difficultés à comprendre pourquoi on y avait adjoint le terme de « contrebandiers ». Il y a bien dans ces falaises, une grotte des Contrebandiers mais comme la dernière carte IGN l’ignore totalement en ne précisant pas sa position, elle n’apporte rien de concret quant aux raisons historiques à cette dénomination. Sans doute fallait-il remonter au temps où Vingrau était situé sur la frontière entre les royaumes de France et d’Aragon que le Traité de Corbeil de 1258 avait officialisé ? J’avoue que sur Internet, je n’ai pas trouvé grand-chose sur le sujet si ce n’est qu’au temps du Royaume d’Aragon des droits de passage à la frontière étaient prélevés sur de nombreuses denrées. Comme toujours, ce sont ces droits qui ont engendrés la contrebande mais il n’est pas certain qu’avec le Traité des Pyrénées de 1659 et la disparition de la frontière, le commerce illicite et les contrebandiers aient disparus avec elle. Alors ces contrebandiers qui étaient-ils ? Quels trafics y faisaient-ils ? Grâce à leur esprit de conquête et à l’expansion toujours plus grande de leur royaume, les Rois d’Aragon ont développé un important négoce maritime en Méditerranée et bien plus  loin encore sur la bordure atlantique et jusqu’en Afrique. On ne doit pas oublier que ces monarques ont été aussi les Rois de Majorque et qu’ils régnaient sur une bonne partie de la « grande bleue ». On peut donc imaginer que pour les fraudeurs, tous les produits de ce commerce étaient bons à passer sans avoir à payer les taxes exigibles : matières premières, tissus, denrées alimentaires, vins, armes, semences, etc.…. On peut supposer aussi qu’avec la proximité des salins méditerranéens, le trafic du sel y ait joué un rôle fondamental surtout quand la gabelle fut instaurée. Or si mes recherches Internet ne m’ont pas permis d’en apprendre bien plus de cette contrebande et m’ont laissé quelque peu sur ma faim, elles m’ont presque systématiquement ramené vers un lieu qui semblait emblématique de ce territoire des Corbières : le Trau del Cavall. Il semble qu’au sein de cette frontière matérialisée ici par la Serre, très éloignée des axes de communication habituels, ce « Trou du Cheval » ait été un passage idéal à la fois pour y pratiquer la contrebande mais également pour surprendre l’adversaire lors des nombreux conflits entre les deux royaumes. Or, ces rivalités n’ont jamais cessé à partir du moment où le Roussillon fut annexé et devint aragonais. A titre d’exemple, ce collet sépare quelques forteresses très proches des deux camps : AguilarQuéribus et Peyrepertuse côté français et Salveterra (Opoul), Tautavel et Salses côté aragonais. Autant d'endroits où les rivalités furent constantes mais où désormais il fait bon de randonner. Le village de Vingrau lui-même bascula à différentes reprises dans un camp puis dans l’autre.  Enfin on peut noter que sur les cartes cadastrales, certains ont transformé ce « Trou du Cheval » en « Pas du Cheval »  peut-être selon l’idée, que le « Trau » ne serait pas un « trou » mais un « trot ». Une fois tous ces éléments en mains, il m’a paru évident que ce « Trau del Cavall » était bien l’objectif incontestable de cette randonnée et il m’a donc semblé logique d’y attribuer le nom de mon article. C’était d’autant plus cohérent que cette trouée naturelle représente presque exactement le point géographique médian de cette longue balade. Bien sûr, reste à expliquer pourquoi ce lieu s’appelle ainsi et le folklore régional laisse circuler l’histoire de ce commerçant ambulant qui, de village en village, venait projeter des films cinématographiques aux populations.  Un soir, entre Vingrau et Périllos, surpris par un terrible orage, il ne trouve rien de mieux que de s’abriter dans une grotte pour protéger sa monture et tout son matériel et c’est, dit-on, ce conte populaire qui aurait donné le nom à ce lieu. Au delà du fait que l’on peut se demander pourquoi cette trouée s’est soudainement transformée en caverne, on peut aussi se poser la question de savoir pourquoi ce projectionniste itinérant empruntait ce passage très difficile plutôt qu’une voie plus praticable qui existait déjà au temps du cinéma, fusse-t-il muet. Mais toutes ces questions sont inutiles et on peut d’emblée éliminer ce récit traditionnel pour expliquer la dénomination de ce lieu. En effet, le « Trau del Cavall »  figure sur les cartes Cassini dont tous les levés sur le terrain ont été réalisés au 18eme siècle. Cette appellation est donc automatiquement et au moins antérieure à l’arrivée du cinéma de plus d’un siècle. Non, la réalité est sans doute beaucoup simple et cette trouée a été appelée ainsi car elle était, dans cette longue colline, le seul passage accessible aux cavaliers de tous bords.  Alors, oublions un peu l’Histoire de cette belle contrée et profitons d’une merveilleuse journée ensoleillée pour partir à sa découverte. Nous quittons Vingrau par la D.12 en suivant le balisage jaune propre au P.R, direction le Bac del Trau (tiens encore un trou !), c'est-à-dire Tuchan. Très rapidement, un panonceau nous demande de quitter le bitume au profit d’un étroit sentier qui entre et grimpe dans la garrigue. Cette petite ascension laisse d’ores et déjà entrevoir de très belles vues sur Vingrau et sur le relief particulièrement découpé de la blanche et oblongue Serre qui se détache dans un ciel incroyablement pur mais que la chaleur matinale rend déjà laiteux. Ici, dans ce maquis plutôt bas et rabougri, or mis quelques pins clairsemés, rien ne laisse présager que l’on évolue dans la forêt domaniale du Bas-Agly. D’ailleurs cette végétation typiquement méditerranéenne, ce qui ne signifie pas inintéressante loin s’en faut, on ne va plus la quitter de la journée. Si la déclivité s’élève dès le départ, la suite du parcours jusqu’au pied de la Serre va s’aplanir et même être constante dans des altitudes très modestes oscillant entre 270 et 310 mètres. Cette longue partie est donc sans aucune difficulté si ce n’est sa longueur d’une dizaine de kilomètres jusqu’au « Trau del Cavall ». Elle risque donc de vous paraître assommante mais si vous prêtez attention à la flore et à la nature en général, vous observerez qu’elle est assez remarquable et colorée mais également constamment changeante selon que l’on alterne les passages en maquis, au fond d’une ravine (Ravin du Correc des Conques), dans des sous-bois parfois très différents ou bien que se succèdent vignes, murs de pierres sèches, anciens champs en jachère ou ruines de vieux cortals oubliés. Ici, sans exception, toutes les plantes et les fleurs de notre garrigue méditerranéenne sont présentes mais il en ait une très étonnante et qui étrangement foisonne par endroit, c’est la Férule commune. Il s’agit d’une ombellifère ressemblant quelque peu au fenouil mais avec les particularités d’avoir une tige énorme et creuse, de mesurer parfois plus de deux mètres de haut et surtout ne n’avoir aucune senteur d’anis. Attention toutefois à ne pas la confondre car sa consommation est, contrairement à celle de son cousin le fenouil, éminemment toxique à cause de son « latex ». Quand à la faune, elle est, en cette magnifique journée printanière, omniprésente pour peu qu’on daigne y prêter attention et l’observer silencieusement : lézards, passereaux, rapaces, papillons et insectes butineurs ou sauteurs sont les principaux locataires diurnes de cet habitat extrêmement sauvage. Plus on approche du « Trau del Cavall » et plus on rencontre de vestiges dont les cartes nous octroient des patronymes aux origines parfois disparates : Borde de Rotllan (Rolland), Jasse de Didot, Cortal d’en Domenge, Cortal Miquel et Mas Llenço (Llansou). Si on élargit le champ de nos investigations cartographiques, ces disparités s’accentuent : Cassanova, Fontanell, Parès, Parros, Résungles, Molto, Sarda, Duran, etc.… Au fil des siècles, on voit bien que les différents conquérants de ce territoire ont inévitablement laissé bien plus que des empreintes de leurs passages.  C’est en arrivant au mas Llenço, envahi par la végétation et aux murs copieusement couverts de lierres, que débute la véritable ascension de la Serre. Bien balisé en jaune mais superbement bordé de bleus par les innombrables aphyllanthes de Montpellier, l’étroit sentier caillouteux s’élève progressivement mais plutôt gentiment en direction d’une brèche rocheuse bien visible. Notre cible du jour, le « Trau del Cavall » est là, au bout de ce chemin. Sur la droite, de vieux murets de pierres sèches et des orris laissent imaginer une vie pastorale passée assez intense. Est-ce une peu de lassitude ou est-ce la forte canicule mais parfois on croit voir brouter quelques moutons au milieu des broussailles ? Non, les troupeaux d’ovins ont vraiment disparu depuis longtemps et il s’agit de quelques roches blanches qui ont dévalé les flancs de la falaise pour s’immobiliser dans les cistes, les chênes kermès et les romarins.  Une fois atteint le « Trau del Cavall », on s’attend à ce que le regard bascule sur un monde bien différent. Non, la réalité est nettement plus fade et aussi bien devant que derrière, les paysages sont quasiment semblables. Ils sont essentiellement constitués d’immensités de garrigues et de calcaires se terminant par de élévations plus ou moins hautes. Seuls quelques vignobles bien alignés, quelques champs verdoyants et quelques blancs et lointains hameaux donnent une touche d’humanité à ce patchwork sauvage, imprécis et confus. Au loin, vers l’est, c'est-à-dire vers Opoul se dresse le plateau reconnaissable de Salvaterra, vaste nid d’aigles où les ruines crénelées de l’ancienne forteresse sont encore parfaitement visibles. Vers le nord, la longue échine cabossée de la Serre se poursuit puis, tout en zigzaguant, elle semble se perdre dans un océan de collines plus ou moins lointaines et plus ou moins hautes. Quelques sommets reconnaissables se détachent : le Puig del Ginebre, la Serra de la Gran Cremada et le Montolier de Perellos. Vers l’ouest, c’est la Montagne de Tauch qui emplit l’horizon. Le sud, lui, tout proche attend qu’on grimpe sur ses bosses, semblables à de blanches « montagnes russes » mais le soleil désormais à son zénith ne l’entend pas de la même oreille et accable les plus vaillants. On bascule dans la trouée puis sur quelques mètres, on descend sur l’autre versant de la Serre. Le sentier se perd dans la rocaille et si le balisage jaune ou les cairns n’étaient pas bien présents, à coup sûr on s’y égarerait. L’itinéraire remonte rudement.  Ici, pendant quelques temps et pour progresser, les mains deviennent aussi précieuses que les pieds et quand le sentier se stabilise enfin, on en ait déjà à chevaucher la crête sommitale avec de beaux panoramas des deux côtés. La tiédeur laiteuse du matin a laissé la place à une brume blanchâtre plus opaque qui empêche toute vision très lointaine. La Méditerranée et la plaine du Roussillon restent invisibles. Moi, dans cette ascension déjà compliquée, le photographe botaniste amateur que je suis, est encore plus embarrassé que le commun des randonneurs car comment avancer convenablement, appareil photo en mains, dans ce dédale minéral où d’incroyables fleurs sont venues se loger dans la moindre fente et le moindre interstice de la roche. Comment avancer quant on ne sait plus où donner de la tête tant la flore y ait insolite, merveilleuse et à la fois prolifique et parfois rarissime ? Œillets des rochers, œillets piquants de toutes sortes, géraniums, centranthe, ornithogale, iris et campanules des Corbières et bien d’autres fleurs embellissent le parcours.  Quelques passereaux et rapaces jouent aux voltigeurs en bordure des falaises. Leurs piaillements nous interpellent. Les papillons et les sauterelles semblent nous accompagner dans cette aventure printanière. Quelque soit l’univers que l’on chemine : crêtes calcaires, éboulis caillouteux, plates-formes herbeuses, pinèdes, affleurements de lapiaz, vallon (Correc des Collets) encadrant de hautes falaises, on y découvre une flore et une faune exceptionnelle et ce, jusqu’à l’arrivée à Vingrau. En chemin, on découvre le refuge non gardé Yves Bernard offrant la possibilité d’un abri solide aux randonneurs au long cours ou en cas d’intempéries. Nous profiterons de son ombrage rafraîchissant pour y faire une simple halte goûter avant d’en terminer par le Planal de l’Eixartell laissant entrevoir de superbes vues aériennes sur le vallon de Cassanova, ses vignobles et ses jasses et enfin sur le superbe village de Vingrau. Nous sommes restés environ huit heures sur ce parcours, arrêts compris, mais il ne faut pas trop se fier à cette durée-là tant nous aimons flâner et perdre notre temps à tout observer dans ce type d’univers à la fois sauvage, hostile mais superbe. Alors il est sans doute plus simple que je vous dise que cette balade est longue de 18 à 19 kilomètres environ, que l’altitude la plus basse est à 140 mètres peu après le départ de Vingrau, que le point culminant est à 540 mètresau sein même de la Serre et que les montées cumulées se chiffrent approximativement à plus de 650 mètres. Au fait, savez-vous que Vingrau a pour origine l’expression latine « viginti gradi » signifiant les « vingt grades » mais qu’il faut traduire plus simplement en « vingt marches » ? En effet, le chemin principal menant au village passe par un col que l'on appelle "le Pas de l’Escala". Or, à l’époque romaine,  ce « Pas de l’Echelle » était constitué d'un voie pavée dans laquelle vingt marches avaient été sculptées dans un passage difficile de la falaise. Peu à peu, le nom s'est transformé en "Pas de Vingrad", "Pas de vingt graus", puis enfin "Vingrau". (Source : https://www.les-pyrenees-orientales.com/Villages/Vingrau.php) Bon, il n’était pas si fous que ça ces romains et en tous cas bien moins que moi car ma balade, je peux vous le certifier, elle comporte bien plus que vingt marches !!! Allez-y et vous verrez par vous-mêmes. Carte IGN 2547 OT Durban – Corbières – Leucate- Plages du Roussillon Top 25.

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