• Bingo, j’ai ma retraite ! Voilà ce que Dany s’est écriée quand, il y a 3 mois, elle a reçu une lettre de l’Assurance Vieillesse (CARSAT) lui confirmant qu’elle allait percevoir sa retraite à taux plein pour raison médicale et ce, malgré une insuffisance certaine du nombre de trimestres cotisés et admis.

    Autant le dire, si elle n’a jamais remis en cause le plaisir et le fait de voir sa polyarthrite chronique (*) enfin reconnue et prise en charge par les médecins conseils de la Sécurité Sociale au titre d’une inaptitude au travail, sa joie a été de courte durée quant à la retraite en question. En effet, quelques jours plus tard, la lettre de calcul de sa retraite arriva et sa joie se transforma soudain en une vraie désillusion.  Le montant annoncé par la CARSAT était de 40,50 euros net par mois ! Enfin, cette désillusion se mua en une authentique « soupe à la grimace » quand il y a quelques jours une nouvelle lettre à l’entête de l’ARRCO arriva : « 86,48 euros » lui annonçait-on pour sa retraite complémentaire et ….par trimestre !

    Bon pour être complet et fair-play, la CARSAT lui attribua en sus au moment du premier versement, une majoration du minimum contributif de 156,49 euros par mois soit un net total de 196,99 euros. Ne me demandez pas de quoi il s’agit et comment ça se calcule, je ne me suis pas encore penché sur le sujet.

    Il est vrai que pour avoir travaillé de 1967 à 2007 soit 40 ans même si c’est le plus souvent à temps partiel,  le total ainsi obtenu de 225,82 euros par mois tout compris, il faut bien reconnaître que ça fait peu !

    Il faut dire aussi qu’en analysant sa carrière, Dany a tout cumulé et quand je parle de cumul, il faut entendre une accumulation d’inconvénients, de désavantages, de désagréments, d’oublis, d’anomalies, d’erreurs plus ou moins voulues parfois, d’obstacles, de malversations enfin tout ce qui vient vous foutre une retraite en l’air, jugez plutôt !

    Pourtant, tout avait bien commencé. En 1967, quand elle commence à bosser comme apprentie dans une supérette, elle n’a  que 15 ans et elle vient d’obtenir son certificat d’études très facilement. Malgré son goût pour les études et d’excellentes notes, son père lui demande d’arrêter l’école et d’aller travailler pour subvenir aux besoins du foyer. En 1968, on se rencontre et pendant que je poursuis mes études, elle travaille déjà à plein temps dans divers commerces et cela jusqu’à la fin de l’année 1972, année où l’on se marie en février et arrive au monde notre premier enfant Jérôme au mois de décembre. Inconvénient sur cette période de 1967 à 1972, elle ne cotisera jamais à aucune retraite complémentaire car à cette époque, les employeurs n’ont pas d’obligation à ce titre. De 1973 à 1975, elle reste au foyer pour élever Jérôme.  Puis en 1976, elle reprend une activité d’assistance maternelle à temps partiel jusqu’en 1977, année qui voit l’arrivée de notre fille Carole au mois d’octobre. Là, elle décide de combiner l’éducation des enfants, son travail d’assistante maternelle à temps partiel et une formation d’animatrice de gymnastique. Elle continue donc son travail de gardienne agrée jusqu’en 1982, année où ayant obtenu tous les diplômes requis, elle commence à entreprendre un travail d’animatrice de gymnastique pour divers clubs et associations. En sa qualité d’assistance maternelle travaillant pour des communes, elle a  toutefois cotisé à l’IRCANTEC (Urssaf des fonctionnaires) de 1976 à 1982 mais toujours pas à le retraite complémentaire. A ce jour, l’IRCANTEC n’a toujours rien versé mais selon les infos reçues, on se dirigerait vers une seule liquidation en raison de la modicité de la retraite à percevoir (300 euros environ pour les 7 années travaillées). De 1982 à la mi-année 1986, elle travaille donc à temps partiel (payée à l’heure de cours) pour divers clubs et associations de gymnastique volontaire avec cette fois, le gros désavantage que ces derniers ne sont tenus à aucun établissement de bulletins de salaires, à aucun versement de cotisations ni auprès de l’URSSAF pour le retraite vieillesse ni auprès d’une quelconque caisse de retraite complémentaire. Aujourd’hui, on appellerait ça du travail au noir. Notez que nous sommes déjà en 1986, que Dany travaille depuis 1967 soit depuis presque 20 ans et qu’elle n’a toujours pas engrangé le moindre point de retraite complémentaire.

    A partir de mi-1986, les associations, pour lesquelles Dany travaille, ont obligation d’établir des bulletins de salaires, elles ont obligation de cotiser à l’Urssaf pour la maladie et la retraite (sic), aux ASSEDIC pour le droit au chômage (sic) et également à la retraite complémentaire (mais ça nous le saurons que bien trop tard et la prescription sera passée par là !). Il va en être ainsi jusque dans les années 2000 où sa polyarthrite chronique va contraindre Dany à réduire son activité pour finalement être dans l’obligation d’arrêter de travailler fin 2007 à cause de ses douleurs articulaires qui, très souvent, n’étaient plus supportables et compatibles avec son travail d’instructrice de gymnastique. Ici, tout un chacun pourrait penser qu’elle va avoir droit à des indemnités journalières de maladie ayant cotisé à ce titre à l’URSSAF ou bien qu’elle va pouvoir prétendre à des allocations de chômage, ayant également cotisé aux Assedic et bien non : « RIEN », « NOTHING », « QUE DALLE », « NADA », « MACACHE », « NIET », « NIB ». Vous n’avez pas assez cotisé ou vos heures travaillées sont insuffisantes lui dit-on. Une seule solution lui est proposée : « Vous avez le droit de vous inscrire comme demandeuse d’emploi ». C'est-à-dire que vous ne pouvez plus exercer votre emploi pour raison de maladie et je dirais même d’handicap (handicap reconnu aujourd’hui !) mais la seule solution que l’on vous propose c’est de continuer à travailler si vous voulez gagner un peu d’argent ! Sidérant non ? Enfin, sidérant quand on sait ce que certains tire-au-cul perçoivent pour de prétendues « longues maladies » depuis des années. Qui n’a pas dans sa famille ce type de personnages paresseux et profiteurs du système ?  Nous, nous en avons !

     

    Evidemment, tout cela n’est pas bien grave car moi, en cette année 2007, je travaille encore et mon salaire suffit amplement à nos besoins du moment.

    Nous sommes en 2007, je pars en retraite en mai 2008 avec environ 60% de mes revenus, alors que faire ? Demander pour Dany un départ anticipé pour raison médicale ? Pas possible, nous réponds-t-on à la CRAM (désormais CARSAT), il faut attendre que vous ayez 60 ans et 9 mois, c'est-à-dire mars 2013. Mais peut-on d’ores et déjà reconstituer une carrière qui va s’avérer compliquée ? Non, on verra ça quelques mois avant l’échéance, c’est « largement » suffisant  nous dit-on à l’époque.

    C’est fait, nous y sommes et le rendez-vous est pris avec la CRAM pour début novembre 2012 et il est temps de se mettre à la reconstitution de la carrière de Dany car le dernier document reçu de cet organisme listant les éléments qu’ils ont déjà enregistrés est bourré de « trous ». Le mot « trou » est un doux euphémisme au regard de ce que je vais découvrir.  Je fais le forcing pour être à l’heure le jour venu car outre d’innombrables erreurs, ce n’est pas moins de 480 bulletins de salaires qui sont manquants et je m’empresse d’en faire des photocopies à la fois pour la CARSAT mais également pour le Groupe Mornay, gestionnaire unique des caisses de retraites complémentaires. Ce n’est plus une reconstitution de carrière, c’est un vrai « gruyère » tant il y a de trous, des absences, des oublis, des anomalies, des erreurs auxquelles il faut ajouter de bien belles surprises. En effet, que constatons- nous ?

     

    -         De nombreuses associations ont fait cotiser Dany à l’Urssaf et aux caisses de retraites mais n’ont jamais reversé le moindre centime de cotisations à ces organismes ! A voir  nous dit-on en novembre 2012 ! Nous sommes en juin 2013 et nous n’avons toujours rien vu !

    -         D’autres associations ont prélevés des cotisations à Dany mais ne l’ont jamais déclarée et de ce fait, elles n’ont jamais rien versé ni à l’URSSAF ni à aucune caisse de retraite complémentaire car il semble qu’elles ne se soient jamais déclarées elles-mêmes auprès de ces organismes malgré les obligations qu’elles avaient de le faire ? A voir  nous dit-on en novembre 2012 ! Nous sommes en juin 2013 et nous n’avons toujours rien vu !

    -         D’autres associations, au fil des changements de leur bureau, ont retenues et versées leurs cotisations mais parfois que partiellement. A voir….et ainsi de suite….

    -         D’autres ont cotisé à l’Urssaf mais à aucune caisse de retraites complémentaires. Là c’est tout vu car il y aurait prescription, prescription qu’il n’y aurait pas eu en 2007 nous dit-on quand Dany a arrêté de bosser mais rappelez-vous, on nous avait demandé d’attendre pour reconstituer sa carrière ! Bel imbroglio dont on constate les inconvénients aujourd’hui !

    -         D’autres n’ont pas cotisé sur la bonne base parfois pour l’URSSAF, parfois pour les caisses de retraites, parfois pour les deux. Là, ce qui est fait et fait et impossible de revenir en arrière nous dit-on !

    -         Enfin et c’est là, sans doute le plus important des désavantages, c’est que toutes ces associations n’avaient pas l’obligation de cotiser à l’URSSAF Vieillesse et maladie sur le salaire brut comme le font la plupart des employeurs pour leurs salariés mais sur une base forfaitaire qui était 4 ou 5 fois moindre. Exemple : le salaire de Dany était par exemple de 400 francs pour le mois et bien l’employeur cotisait sur une base horaire forfaitaire qui ramenée au mois donnait 100 francs. Bien évidemment, on s’aperçoit aujourd’hui que ce choix de faire cotiser ces clubs et associations n’avait qu’un seul objectif, alléger leurs charges sociales. Or, il faut bien se rendre à l’évidence, ce gros avantage pour les employeurs, c’est transformé en un très gros inconvénient pour le salarié désormais retraité. Rajoutons à cela que de nombreuses associations en ont profité  pour cotiser sur cette base forfaitaire à leur caisse de retraite complémentaire au lieu du salaire brut comme elle avait l’obligation de le faire et la coupe est déjà bien pleine !

    -         Quand on sait que pour valider un trimestre, il faut avoir cotisé sur un salaire minimum qui est fonction de l’année, la coupe est plus que pleine, elle déborde, on se noie dedans et la retraite se transforme en une obole « ridicule » pour ne pas dire « honteuse ». En effet, tout en ayant travaillé et cotisé tous les mois d’une année, le résultat du calcul en nombre de trimestres se transforme le plus souvent en « 0 » voire en « 1 » trimestre. (voir photo).

     

    Voilà pourquoi, ce mois-ci je pousse ce nouveau coup de gueule car malgré notre bonne foi, la justification sans équivoque de tous les bulletins de salaires, une fois encore l’Administration n’a aucunement tenu compte des erreurs, malversations, anomalies, oublis voulus ou non par de nombreux employeurs de Dany. Je passe sur le laps de temps nécessaire à la CARSAT pour reconstituer sa carrière : depuis novembre 2012 et la fourniture des 480 bulletins, nous n’avons aucune nouvelle ou si peu ! Ils sont débordés paraît-il.  Selon l’estimation que j’en ai faite, c’est 36 à 40 % de sa carrière qui est partie en fumée et aux oubliettes tant auprès de l’Urssaf et des caisses de retraites complémentaires. Ce qui me fout aussi en boule, c’est que par mon métier de comptable, de financier et de responsable des ressources humaines, je me souviens d’un temps où avec une simple reconnaissance de travail par un tiers ou une simple attestation d’employeur ou sur l’honneur le plus souvent « bidon », cela donnait droit à 4 trimestres supplémentaires par année prétendument travaillée. Je connais personnellement des dizaines de personnes qui sont partis ainsi à la retraite bien avant l’heure. Et que dire de l’ASPA (**) (anciennement minimum vieillesse) que l’on offre à des étrangers qui n’ont jamais cotisé le moindre centime en France et à qui l’on est capable de donner presque 800 euros mensuels au seul privilège qu’ils posséderaient une carte de séjour de résident en France depuis 10 ans. C’est ça, que l’on appelle la justice sociale ? C’est ça le calcul d’un retraite juste et équitable ? Dix en France sans jamais y avoir travaillé ni cotisé et on peut obtenir 800 euros de l’Assurance Vieillesse contre 40 ans de travail à temps complet et à temps partiel et c’est seulement 40 euros ?  Bien sûr, en lisant ce témoignage, certains vont me taxer de tous les « mots » et de tous les « maux », de vouloir faire de la « préférence nationale », d’autres de mon manque d’esprit de solidarité, enfin que sais-je ?

     

    Et bien non, je n’ai pas honte de ce que je pense et de ce que j’écris car après tout, que reproche-t-on vraiment aux mots « préférence » et  « nationale ». La préférence ça peut-être un mot très « gentil » somme toute, pouvant signifier « choix », « goût », « prédilection », « attirance » voire « option » et pas seulement « faveur » ou « privilège ». Quant au mot « national » venant de « nation », j’ai appris à l’école primaire et secondaire que des millions d’hommes se sont battus pour elle au cours de l’Histoire de France et de nombreux en sont morts, il n’y a pas si longtemps que ça, aux guerres de 14-18 et  de 39-45. Faut-il avoir l’esprit tordu pour y voir uniquement la relation avec le « national socialisme » !

    Pourquoi, devrais-je avoir honte de  mettre ces deux mots bout en bout pour râler ? Parce que le premier à l’avoir « inventé » politiquement parlant était un adhérent du Front National ?

    Que ceux qui me jetteront la pierre aillent s’exiler 10 ans dans de nombreux pays pour percevoir l’ASPA de la contrée en question et quand ils auront perçu le premier centime, nous en reparlerons bien tranquillement.

     

    Quand je pense à tous ces régimes de retraites spéciaux et privilégiés, à tous ces écarts injustes qu’il y a trop souvent entre les retraités des secteurs privés et publics,  à ces systèmes de retraites dits « chapeaux », à ces parachutes dorés de ces grands patrons déjà si richissimes, quand je pense que notre gouvernement actuel veut encore durcir et surtout retarder les départs en retraite, quand je pense que l’on vient nous coller des taxes supplémentaires sur nos retraites à cause d’une prétendue crise qui bien évidemment ne touche que les plus démunis, je le dis tout ça est absolument lamentable !

     

    Bingo, je l’ai dit !

     

    (*) Dany souffre d’une polyarthrite chronique depuis 1989. Elle avait 37 ans. Cette maladie est réellement devenu handicapante à partir de 1995. Elle avait 43 ans et sa maladie a été reconnue par la Sécurité Sociale comme une affectation de longue durée dont les soins ont été pris en charge à 100%. Début des années 2000, les douleurs articulaires sont telles que le seul traitement efficace s’avère être une chimiothérapie légère par piqûres ou par absorption de comprimés mais malgré la soi-disant légèreté du dosage,  les effets secondaires sont tels qu’elle est contrainte d’arrêter ce traitement au bout de quelques années. Heureusement ce traitement déjà effectué et les cures thermales semblent avoir un effet bénéfique sur sa maladie dont les douleurs sont très souvent en dents de scie faites de poussées parfois fulgurantes et de rémissions soudaines.

     

    (**) ASPA – Allocations de Solidarité aux Personnes Agées :

    787,26 euros par mois pour une personne seule et 1 222,27 euros par mois pour deux personnes.


    Montant des plafonds de ressources : Personne seule : 9 447,21 euros par an - Deux personnes : 14 667,32 euros par an.

     

    Créée en 1998 sous le Gouvernement Jospin, l'Allocation de Solidarité aux Personnes Agées (ASPA) a remplacé depuis cette date le minimum vieillesse. 
    Jusqu'à présent, les étrangers issus de pays tiers à la Communauté européenne pouvaient en bénéficier sous certaines conditions. Ils devaient justifier d'une résidence stable et régulière en France et être titulaires d'un titre de travail depuis au moins cinq ans. Ces conditions n'étaient toutefois pas exigées des étrangers admis au regroupement familial
     et qui disposaient simplement d'un titre de séjour sans condition d'antériorité, ni avoir cotisé au régime d'assurance vieillesse
    La Loi de financement de la sécurité sociale a durci ces conditions d'accès. Les nouveaux demandeurs de l'ASPA devront justifier d'un titre de séjour régulier depuis au moins dix ans, même s'ils ont été admis au titre du regroupement familial. Cette nouvelle disposition n'est toutefois pas applicable aux réfugiés et apatrides.


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