• Mes beaux parents et le gant blanc de Marcel Cerdan

    Suite à quelques récents problèmes (mais ce n’étaient pas les premiers !) que je viens de rencontrer avec ce qu’il me reste de ma belle-famille, je voulais rendre hommage à mes beaux-parents que j’ai beaucoup aimé au point que lorsque mon père est décédé en 1980, j’ai considéré mon beau-père comme mon propre « paternel » tant nous étions proches l’un de l’autre. Il faut dire qu’il me le rendait bien, puisqu’en société, il n’hésitait pas lui-même à crier sur tous les toits qu’il me considérait comme son propre fils. Pendant les nombreuses années où je les ai connus, je ne me souviens pas avoir eu une seule altercation avec eux. Mes beaux-parents étaient ce que l’on appelle des « braves gens », travailleurs, sans histoire et sans problème, respectueux des autres et honnêtes. Ils avaient des principes qu’ils tenaient de l’éducation qu’ils avaient reçus mais c’étaient de bons principes. Par exemple, ils n’aimaient pas devoir de l’argent et d’ailleurs, j’ai souvenir que mon beau-père avait une « sainte » horreur des crédits qu’il évitait de faire dès qu’il le pouvait. Mes beaux-parents, je peux le dire, étaient irréprochables à tous points de vue et  si je devais donner une couleur pour décrire leurs façons d’être et de se comporter, je dirais qu’ils étaient « blancs ». Sans tache. Blancs comme neige.

    Mes beaux-parents sont enterrés au cimetière sud de Perpignan et même si c’est un lieu où je ne vais pas spécialement avec « enthousiasme », j’y vais en tous cas avec tendresse, sans appréhension et sans mauvaise image du passé. Cela n’a pas toujours été le cas car ma belle-mère est morte dans mes bras en 1987 d’une crise cardiaque et j’ai longtemps été obsédé et surtout désarçonné par les images de cette mort aussi pénible et rapide qu’inattendue. En outre, elle n'avait que 71 ans et je trouvais ce départ injuste tant je pensais qu’elle était heureuse chez nous auprès de nos enfants et de sa fille. Quand à mon beau-père, il est parti un an avant, en 1986, il avait 75 ans et ce sont les cigarettes qu’il fumait trop excessivement qui l’ont sans doute tué. Mais quand je revois sa photo sur la pierre tombale, je ne me souviens que des très bons souvenirs que nous avons partagés ensemble au cours des nombreuses parties de pêche dont nous étions de fervents adeptes ou bien lorsqu’il me donnait vaillamment la main à parfaire la maison que ma femme et moi venions d’acheter.

    Je n’ai donc aucune crainte à aller rendre visite à mes beaux-parents et pour moi ce n’est pas une corvée bien au contraire, c’est un retour vers le passé que ne m’est ni désagréable ni contraignant d’autant qu’en me rendant sur leur tombe, je passe inévitablement devant ce gant blanc de Marcel Cerdan. Un gant aussi blanc que pouvaient l’être mes beaux parents. Voilà un sportif que j’aurais bien aimé connaître mais il est parti bien trop tôt pour cela et j’avais seulement 6 mois quand l’avion qui l’amenait prendre sa revanche contre Jake LaMotta s’est écrasé sur l’archipel des Açores le 28 octobre 1949. C’est bizarre car malgré qu’il fût mort, j’ai, pendant mon enfance et ma jeunesse, toujours entendu parlé de lui comme quelqu’un qui semblait là, encore bien réel, bien actuel, bien vivant. Il n’existait pas seulement dans le cœur des gens qui l’aimaient ou qui parlaient de lui, non, il était là, bien présent, comme si un prochain match allait être programmé. Enfant, pendant très longtemps, j’ai attendu ce matche dont j’étais déjà certain que le « bombardier marocain » sortirait vainqueur. Je pense qu’il devait en être de même pour beaucoup d’enfants de ma génération. Pour moi, enfant des rues de Marseille,  Marcel Cerdan était l’image du sportif parfait qui s’était pleinement accompli dans un sport d’une extrême rudesse mais où la « triche » ne peut pas exister : Champion de France, champion d’Europe puis champion du monde en 1948 contre Tony Zale qu’on appelait pourtant le « roi du K.O ».

    C’est bizarre quand je vais voir mes beaux-parents et que je passe devant ce gros gant blanc et le tombeau de Marcel Cerdan, je ne peux m’empêcher de me dire que la vie est parfois mal faite et en tous cas injuste. En tous cas, mourir à 33 ans, à la force de l’âge comme est parti Marcel Cerdan, c’est insupportable. Moi, je n’y vois pas de manifestation divine mais certains croyants y verront un signe, puisque c’est l’âge où Jésus a assurément été crucifié. Marcel était né en 1916 comme ma belle-mère. Marcel avait vécu toute sa jeunesse à Casablanca dans la ville même où mes beaux-parents avaient mené l’essentiel de leur existence avant de venir en France tout comme Marcel.

    Etranges trajectoires,  car de Casablanca, leurs trois destins les ont amenés à venir se reposer pour l’éternité au cimetière sud de Perpignan.

    Les tombeaux sont à quelques mètres l’un de l’autre et les voilà désormais réunis tous les trois près de ce gant blanc, symbole pour moi, de bons souvenirs, de joies, de bonheurs que ces trois personnes m’ont donné au cours de mon enfance, de ma jeunesse et de ma vie mais inévitablement empreints de nostalgie et de mélancolie.

    Oui, mais avant tout cela, ce gant blanc est synonyme des grandes qualités de cœur que mes beaux-parents et Marcel Cerdan possédaient. Trois destinées à la fois bien différentes et si ressemblantes à bien des égards. Trois destinées, blanches comme ce gant de boxe.

    « Le Pla Ségala en raquettes (2.200/2.320m) depuis le col de Mantet (1.760m)La Tour de Goa (1.268 m) depuis Vernet-les-Bains (670 m) »

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :