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La Vallée "Era Artiga de Lin" et le Goueil de Jouèou (Val d'Aran-Espagne)

Publié le par gibirando


Ce diaporama est agrémenté de diverses musiques de films composées par la compositrice anglaise Rachel Portman. Leurs titres : "We Had Today", "Little Edie On Chair", "Love Is Divine", "Wedding Jewels", "We All Complete", "Main Titles" (avec John Lenehan pianiste et David Snell, compositeur), "Passage of Time", "Vianne Sets Up Shop" et "End Titles" (From "Emma"/Score)"

La Vallée "Era Artiga de Lin" et le Goueil de Jouèou (Val d'Aran-Espagne)

La Vallée "Era Artiga de Lin" et le Goueil de Jouèou (Val d'Aran-Espagne) 

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C’est fin mai lors d’un séjour d’une semaine dans le Val d’Aran que nous avons découvert l’Era Artiga de Lin (*). Nous avions loué un hôtel sympa à Betrén, petit village adjacent à la jolie ville touristique de Vielha. L’hôtel Ço de Pierra était sympa pour de multiples raisons. Son patron, déjà accueillant de nature, nous a mis tout de suite à l’aise en n’ayant aucune exigence supplémentaire car nous avions déjà tout réglé sur Booking.com. Il se contenta de nous remettre la clé et de nous indiquer les services dont nous pouvions bénéficier. La chambre était plutôt grande et disposait en sus d’une mezzanine et de ce fait il y avait 2 grands lits permettant de se reposer, de bien dormir et de regarder la télé le cas échéant. Ce ne fut pas le cas préférant le plus souvent la lecture et compulser les sites Internet pour les visites du lendemain voire des jours suivants. Le secteur en cette période hors saison étant très calme, le parking privatif, le petit déjeuner se présentant sous la forme d’un grand buffet où tout était à volonté, quoi demander de plus à cet hôtel rustique et paisible ? Seule la météo très maussade et un ciel souvent menaçant nous empêcha de faire les quelques petites balades pédestres que j’avais envisagées. On fut donc le plus souvent contraints de remplacer la marche pédestre par des promenades routières mais finalement il y a tellement de jolies routes, de beaux villages, de belles découvertes champêtres et montagnardes à faire que l’on ne vit jamais le temps passer. Du Val d’Aran au Luchonnais en passant par l’Aragon et le Pallars Sobirà, les kilomètres défilèrent sans jamais aucune lassitude. C’est ainsi qu’on découvrit beaucoup de belles choses mais aussi des lieux de restauration aussi divers que variés, allant de la « table familiale d’une dame âgée mais ô combien excellente cuisinière » à Sort jusqu’à la salle à manger d’une cathédrale à Roda de Isábena, petit joyau aragonais qu’on découvrit au pas de course car malheureusement sous une averse torrentielle..

Parmi toutes ces découvertes, reste l’Era Artiga de Lin que je vous présente ici. Ce fut un vrai coup de foudre car après y être allé une première fois sous un ciel très gris, il nous sembla obligatoire d’y retourner lors de la plus belle journée de notre séjour. Quand je dis « belle journée » entendez simplement « quelques coins de ciel bleu ». Comment vous dire à son propos  ? Il nous semblait que ne pas y retourner c’était un peu comme si on avait voulu visiter Paris sans aller voir la Tour Eiffel, Montmartre ou les Champs-Elysées. Ce fut donc notre seule marche pédestre et quand je dis « notre », je devrais dire « je » car Dany peu en forme ce jour-là me lâcha très vite, et avant même le milieu de la vallée pour retourner vers la voiture. Il est vrai que la balade aller et retour que j’avais programmée était plutôt courte. Depuis le parking, où non loin de là se trouve un imposant et magnifique refuge, elle consistait seulement à remonter la vallée jusqu’au pied des premiers pierriers du cirque glaciaire où deux ou trois petits névés subsistaient. C’est donc pratiquement tout seul que j’ai accompli cet aller-retour puis le trajet jusqu’à la cascade Goueil de Jouèou (voir plus loin), Dany m’ayant rejoint là-bas en voiture. Mais quel parcours sur le plan visuel, photographique et floral ! Grâce à un renard coursant un jeune chevreuil et à quelques oiseaux et papillons, je peux rajouter « faunique ». Cette petite vallée est une pure merveille ! Un vrai spectacle ! Je serais bien tenté de vous décrire cette vallée et ce cirque glaciaire mais il y a tant de sites Internet qui en parlent bien mieux que je ne pourrais le faire que j’ai le sentiment que ma description aussi belle soit-elle serait de trop. Vous n’aurez aucun mal à trouver des liens sur n’importe quel moteur de recherches car si en hiver la route qui y mène est fermée à cause des risques d’avalanches, en période estivale le lieu est excessivement prisé. Et puis je me dis que de cette merveilleuse découverte, il restera toutes les photos de mon diaporama musical ainsi que le récit et le plan de la balade expliquée ici. Toutefois, outre tout cela, deux choses restent gravées dans ma mémoire. La première,  c’est une amusante anecdote. La seconde, c’est « l’eau ». Ici, dans ce secteur des Pyrénées, elle est omniprésente. Quoi de plus normal qu’il y ait de l’eau quand on sait que le nom « Val d’Aran » est un toponyme pléonastique signifiant la « vallée de la vallée ».  Or une vallée est un relief façonné par au moins un cours d’eau. Concernant l’anecdote, il faut savoir que pour rejoindre l’Era Artiga de Lin, il faut emprunter une jolie petite route depuis le village de Es Bordes. Ce village est situé au bord de la Nationale N-230 permettant de rejoindre Vielha depuis la France. Là , il suffit de suivre la « Carrer dera Artiga de Lin ». La route est excellente mais comme il s’agit d’une route de montagne, elle est étroite et surtout très souvent humide. Si étroite est un problème pour celui qui  conduit la voiture ; ici en l’occurrence moi ;  humide fut un problème pour Dany mais aussi pour moi car cette route étant très souvent parsemée de grosses limaces brunes ou noires (leur nom vernaculaire est souvent « Loche » et en latin « Deroceras), j’étais prié de les éviter. De ce fait, ma conduite se transforma en une compétition routière où le but était de rouler très lentement mais surtout d’écraser le moins de limaces possibles. Zigzags, ralentissements, estimations précises pour que les bestioles passent au mieux entre les roues, il me fallait calculer tout cela et en même temps faire attention aux éventuels autres véhicules susceptibles de me croiser ou de me suivre. Par bonheur, nous étions hors saison estivale où paraît-il les touristes affluent en grand nombre et tout se passa pour le mieux car nous fûmes pratiquement les seuls sur cette jolie route. Voilà pour l’anecdote prouvant que Dany et moi n’avons aucune limite dans l’amour pour les animaux. Il est vrai que ces limaces n’ont une durée de vie que d’environ un an et qu’il est donc important de ne pas la raccourcir arbitrairement pour notre seul plaisir. Le second souvenir qui m’a profondément marqué est l’eau coulant dans ce secteur des Pyrénées. Il m’a sans doute marqué car les Pyrénées-Orientales où j’habite sont constamment en forte pénurie. Ici, ce n’était pas le cas et avant même d’arriver dans la vallée, on voit de l’eau couler de partout. Il est vrai que la « Carrer dera Artiga de Lin » est parallèle au torrent Joéu qui est un des tout premiers affluents espagnols de la Garonne. Le Goueil de Jouèou (Uelhs deth Joeu en Aranais signifiant les Yeux du Diable ou de Jupiter), magnifique cascade que l’on découvre aussi lors de cette visite n’est-elle pas toujours considérée  par certains hydrologues comme étant la vraie source de la Garonne ? (https://books.openedition.org/pumi/41621?lang=fr). Oui, ce secteur-là a une chance inouïe d’avoir de l’eau en abondance. Aussi, une flore et une faune exceptionnelles y sont constamment présentes. L’ours brun y vient régulièrement faire quelques prudentes virées. Ses escapades n’empêchent nullement quelques passionnées de haute montagne de venir gravir les 3.404m du  pic d’Aneto, le plus haut sommet pyrénéen  étant accessible pour les plus costauds d’entre eux avec un simple aller-retour d’une journée à partir du même parking que celui où nous avons garé notre voiture. Oui, grâce à tout ce que je viens d’écrire cette vallée de l’Era Artiga de Lin restera gravé dans nos têtes. N’ayant procédé à aucune vraie préparation de cette balade, je ne suis pas à même de donner une distance accomplie. Je l’estime à moins de 10km et de toute manière, telle qu’effectuée et indiquée sur le plan IGN espagnol elle est vraiment facile. De plus, des panonceaux sont là pour vous aiguiller. Prudence toutefois autour du torrent Jouèou et de sa cascade, le bouillonnement monstrueux ne laisse aucun doute quant à la puissance des eaux qui s’écoulent ici. Une chute, et c’est un canyoning exponentiel assuré.

Sinon que dire de plus : il y a aussi sur la route la Fontaine de Grésillun ou Grésilhon ainsi qu'une une chapelle dédiée à la Mère de Dieu (Mair de Diu en aranais) mais elle était fermée. A la bonne saison, une Centre d'interprétation accueille le public et un train touristique fait la navette du village d'Es Bordes jusqu'à la vallée. Dans le secteur, l'arboretum de Jouéou mérite le détour même si une mauvaise météo ne nous a pas permis une visite. Alors bien sûr, au départ du parking du refuge, bien d’autres randonnées bien plus difficiles sont possibles et vous n’aurez aucune difficulté à les trouver sur le Net. Enfin, vous serez sans doute nombreux à penser qu'il y a bien trop de fleurs dans ma vidéo. Mais que voulez-vous, la Nature en général, les fleurs, les papillons et les oiseaux en particulier sont devenus des passions. Je les aime, j'aime les connaître, les observer de très près et pour cela rien de mieux que de les photographier. Il y a tant à apprendre sur eux. Tout celà m'incite à penser que plus nous serons nombreux à les regarder de près, à voir leur diversité, leur beauté et plus nous serons nombreux à vouloir les protéger. Nous qui détruisons beaucoup trop la Nature sur cette planète, son avenir n'est-il pas associé au nôtre finalement ?

(*) Toponyme Era Artiga de Lin : Comme toujours en pareil cas quand un toponyme m’interroge, je tente de comprendre si derrière son nom se cache une explication. Et finalement ici c’est assez simple puisque chaque mot a sa propre explication et qu’il suffit de réunir les 3 pour une bonne compréhension de l’ensemble. C’est ainsi que j’ai trouvé que le mot « era » était une zone de battage. En agriculture, le battage étant je vous le rappelle une technique permettant de séparer les graines d’une plante (épi, tige, fruit, graine, gousse, etc…).Le mot « artiga », je me souviens l’avoir déjà analysé lors d’une autre balade intitulée « La Serre de l’Artigue del Baurien depuis St-Paul-de-Fenouillet ». J’avais trouvé qu’il pouvait signifier soit « un terrain défriché soit labouré » Et bien ici, on peut supposer qu’il ait sensiblement la même explication. Enfin concernant le mot « lin », il s’agit tout simplement de la plante oléagineuse et fibreuse dont on tire la célèbre huile mais qui sert aussi à la fabrication du textile connu depuis la nuit des temps puisque les bandelettes de certaines momies avaient été tissées il y a plus de 8000 ans avec des fibres de lin. Le linceul, petite pièce de lin, tire également son nom de la plante.

L’Era Artiga de Lin, c’était donc une terre qui avait été défrichée et déboisée où l’on cultivait du lin, lequel ensuite était battu. Comme très souvent en pareils cas, cette réunion de noms communs est devenue un nom propre par le fait même du langage oral courant. Les agriculteurs disaient « je vais à l’era artiga de lin », c’est à « la zone de battage du lin ». On peut aisément supposer que cette vallée que nous avons remontée, dont son vieux déboisement semble évident au regard de la forêt subsistante, constituait cette zone de culture et de battage. J’ai d’ailleurs pu photographié un pied de Lin cultivé près du refuge mais force de reconnaître que c’était le seul et que je n’ai pas réussi à en voir d’autres. Un cas isolé. Normal sans doute puisque nous étions fin mai et que sa floraison intervient au mieux à la mi-juin et sans doute encore un peu plus tard à cette altitude qui oscille entre 1.200 et 1.500m où la froidure est un élément souvent déterminant. Peu de fleurs de lin visibles dans cette vallée et à cette époque dont le genre compte environ 200 espèces parmi laquelle on trouve le Lin cultivé (Linum usitatissimum) étroitement apparenté au Lin sauvage ou bisannuel (Linum bienne) avec lequel d’ailleurs il est interfertile. Par contre, j’ai pu photographier une fleur de lin. En Aragon, j’ai pu photographié d’autres Lins, certains bleus comme le Lin de Narbonne (Linum narbonense) ou jaunes comme le Lin de France à trois stigmates (Linum trigynum) sans doute.

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Les Chemins de l'Ourriet et des Escocells depuis Urbanya

Publié le par gibirando

  

Ce diaporama est agrémenté avec des musiques jouées par le pianiste italien Giovanni Marradi. Elles ont pour titre "Shadows", "Romantico", "Just For You", "Dreams", "Remember When" et "Mamma" (incomplète). 

Les Chemins de l'Ourriet et des Escocells depuis Urbanya

Les Chemins de l'Ourriet et des Escocells depuis Urbanya

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Urbanya le 9 juin 2021. Voilà ci-après comment nous avons réalisé cette randonnée que j'ai intitulée « Les Chemins de l'Ourriet et des Escocells (*) »Quand avec Dany nous avons démarré cette balade, je m’étais fixé le but d’atteindre le lieu-dit l’Orriet. Ce lieu-dit, qui est la ruine d’un très vieux mas de montagne, j’ai déjà eu l’occasion  de l’évoquer dans une autre balade que j’avais intitulée « Le Chemin de l’Ourriet depuis Urbanya ». Situé à 1.074 m d’altitude et Dany ne connaissant pas les lieux, je me disais que cette modeste élévation suffirait à son bonheur. En effet, si modeste soit-elle, cette déclivité offre de superbes et amples panoramas sur le vallon d’Urbanya. En montagne, la vision de grands espaces, Dany adore ça et moi aussi. La météo est superbe et au sein d’un printemps plutôt mi-figue mi-raisin, on se dit qu’il faut profiter des journées comme aujourd’hui. Si je ne me fixe pas d’objectif plus lointain c’est parce que je sais que nos formes physiques respectives ne sont pas au top. Dany souffre régulièrement de sa polyarthrite chronique et principalement aux hanches, quant à moi avec des dyspnées et des sifflements respiratoires, je suis très loin d’avoir totalement récupéré de mon embolie pulmonaire du mois de mars. Malgré tout ça nos volontés et surtout nos envies de randonner sont restées intactes. Il est 12h30 quand nous démarrons sous un ciel bleu ciel que quelques nuages blancs se complaisent à maculer. Ce chemin qui s’élève au-dessus de la rivière je le connais par cœur. Je sais que je vais y rencontrer un tas de fleurs et que parmi elles, il me faudra faire des choix et ne retenir que celles qui me paraissent les plus intéressantes pour mon reportage photos. Les plus intéressantes seront bien sûr les plus belles : celles qui touchent à ma sensibilité :  mais surtout les plus rares ou les plus saisonnières, celles qu’il faut parfois chercher pour les trouver si le hasard ne le fait pas pour moi. Les fleurs bien sûr, mais aussi celles qui volent et que les entomologistes appellent « papillons ». Ici, ils sont pléthores mais les photographier n’est jamais évident quand une petite brise est de la partie comme aujourd’hui. Pour tout le reste de la faune ; et Dieu sait si elle peut être présente et variée ; je sais que le hasard, la chance, mon abnégation et ma patience feront ce qu’il faut. Comme je le prévoyais, les premiers décamètres sont les plus pénibles et les plus éprouvants. Toutes les levées de genoux plus hautes que la normale deviennent une épreuve, et cela, aussi bien pour Dany que pour moi. Alors rien ne presse et je dis à Dany de prendre son temps et ce d’autant que tous les clichés que je m’autorise me permettent de prendre le mien. Nous avons atteint le niveau de la cascade d’Urbanya et nous sommes d’accord pour dire que ça va déjà bien mieux. Il va en être ainsi au fil de notre cheminement et quand l’Orriet est atteint, je suis très surpris d’entendre Dany me dire « et après qu’est-ce qu’il y a ? ». Elle s’assoie néanmoins pour m’entendre lui répondre « il y a 2 ruisseaux formant comme une clairière » puis « plus haut il y a une piste forestière permettant éventuellement d’effectuer une boucle ». « Allons jusqu’à la clairière » me dit-elle. Et nous voilà repartis pour quelques décamètres supplémentaires. Quand nous arrivons à la jonction du Correc du Col del Torn avec celui de Sardana, je lui annonce que nous sommes parvenus à la clairière. Elle bougonne gentiment et je me dis que c’est plutôt bon signe : « Tu appelles cela une clairière ? » s’exclame-t-elle, rajoutant aussitôt « j’appelle ça un sous-bois ! » « Les arbres ont poussé » lui dis-je en guise de réponse puis le silence s’installe. Pas très longtemps et la phrase que j’attendais survient « Et la piste dont tu m’as parlé, elle est loin ? » « Non pas très loin, à 200, 250 m tout au plus, mais je te préviens, il n’y a pas vraiment de sentier et il faut pas mal zigzaguer au sein du maquis pour l’atteindre ! » «  Et tu es sûr de la trouver ? » « Oui, je suis sûr car il suffit de suivre le Correc du Col del Torn ». « Allons-y ! » me dit-elle d’un air bien décidé. Je suis sur le point de lui dire de ne pas râler si les choses ne se passent pas comme elle le veut mais finalement je me retiens. Je ne veux rien gâcher de ce bel après-midi qui se passe formidablement bien et en tous cas au-delà de mes espérances initiales. Je vois qu’elle prend plaisir à marcher, à découvrir des panoramas qui lui étaient inconnus et comme je sais qu’il y en aura bien d’autres encore plus beaux si nous atteignons cette « fameuse » piste, j’ouvre ce « chemin évanoui » sans ne plus rien rajouter. Oui, un chemin a bien existé et quelques grosses pierres sont encore là pour prouver qu’il était creux. Mais le temps, la végétation et le désintérêt des hommes ont fait leur œuvre de sabotage. En garder un quelconque fil est totalement impossible. Alors Dany me suit, ne peste pas me demandant seulement de l’attendre dès lors que je prends un peu trop d’avance dans ce dédale où il faut constamment slalomer entre les rochers de schistes, les genêts, les prunelliers et les églantiers.  Ici, hors de question de m’amuser à faire des photos et je suis essentiellement concentré à chercher l’itinéraire le plus court mais également le plus praticable, tâche pas si aisée que ça même si c’est la énième fois que je m’y attelle. Finalement la piste si convoitée est là et franchement elle est très belle car très verdoyante avec de surcroît un panorama magique. Elle est en plus un étage végétatif car ici commence la forêt de pins à crochets et quelques autres résineux. On oublie très vite les difficultés qu’il nous a fallu franchir pour arriver jusqu’ici. Malgré un décalage évident, le « V » que forme la vallée d’Urbanya ajoutée à celle de Nohèdes est presque d’une symétrie parfaite avec le « V » inversé du Massif du Canigou. Des fleurs, quelques papillons souvent les mêmes et de nombreux oiseaux mais ici moins craintifs sont des offrandes permanentes à ma passion pour la photo. Une fois encore, le clou de ce spectacle grandeur Nature se présente sous les traits d’un chevreuil qui se régale de jeunes pousses. Deux photos et le voilà qui s’éclipse dans cette végétation exubérante. Le large chemin verdoyant que nous cheminons est une invitation à flâner. Il s’élève en douceur jusqu’au col de Les Bigues mais afin de raccourcir cette randonnée qu’au départ je n’aurais jamais imaginé aussi longue, je fais le choix de redescendre par le sentier des Escocells. Plutôt pentu, ce sentier consiste à suivre une longue clôture qui se termine à seulement quelques encablures du village. C’est le chemin le plus court pour rejoindre Urbanya. S’il est plutôt bien débroussaillé au départ, c’est de moins en moins le cas au fil de la descente où les genêts l’envahissent très souvent. S’il faut parfois les écarter ou les enjamber pour passer, poser nos pieds sur les branches est souvent synonyme de glissades et de chutes par bonheur sans conséquence. Si nous redoublons d’attentions pour éviter de tomber, chaque petite « gamelle »  se transforme désormais en éclats de rire et en franches rigolades. Oui, pas de doute, les ramures des genêts sont de vrais savonnettes ! Ce n’est pourtant pas à cause de ça qu’on les surnomme « à balais » ! Finalement la clôture se termine, les broussailles s’amplifient et après un très bref égarement, je réussis à retrouver le sentier qui débouche à hauteur du Correc del Menter, non loin de la cascade que nous rejoignons. Nous y passons de longues minutes bien agréables car l’endroit est reposant et rafraichissant. Après cette longue descente sur le chemin des Escocells, cette pause n’est pas superflue. Dans les petites vasques creusées par les jets d’eau de la cascade, deux minuscules truitelles et de remuantes « demoiselles »  m’occupent encore longtemps à la photographie. Après la passerelle, le large chemin nous entraîne très rapidement vers le village. De nombreux clichés dont ceux d’une couleuvre vipérine cherchant pitance dans la rivière viennent s’ajouter à mon reportage-photos. En arrivant à la maison, les paroles que nous échangeons Dany et moi ne laissent planer aucune équivoque. Nous sommes à la fois ravis et incroyablement étonnés d’avoir réussi cette balade au regard de nos conditions physiques que l’on pensait sinon pitoyables du tout moins très mauvaises. Qui l’aurait cru au départ ? En tous cas, nous considérons cette randonnée à la fois comme une prouesse et une promesse. Cette balade a été longue de 7 km. Le dénivelé est de 475 m entre le point le plus bas à 870 m à Urbanya et le plus haut à 1.345 m juste avant le descente vers Les Escocells. Les montées cumulées sont de 680 m. Carte I.G.N 2348 ET Prades- Saint-Paul-de Fenouillet - Top 25.

 (*) Escocells : Si j'ai longuement tenté d'expliquer les mots "Ourriet" et "Orriet" dans une balade précédente intitulée « Le Chemin de l'Ourriet (1.359 m) depuis Urbanya (856 m) » sans que cela soit trop compliqué, donner une signification formelle au mot "Escocells" sur la commune d'Urbanya a été nettement plus complexe. Cette complexité commence par le fait même qu'il n'existe pas de traduction française à ce mot dans la langue espagnole. Quant à la langue catalane ; celle qui nous intéresse ici ; le traducteur de Google indique qu'il s'agit d'une "garderie" quand le mot "escocell" est au singulier et de "pépinières" quand le mot est mis au pluriel. De prime abord, on voit mal le rapport qu'il peut y avoir entre une garderie et des pépinières mais en réfléchissant un peu, on peut néanmoins se dire qu'une garderie est faite pour garder un groupe de personnes et le plus souvent de jeunes enfants et une pépinière prise hors de son contexte agricole ou forestier un lieu où l'on trouve également un groupe de personnes et qui en l'occurrence peut être composé d'enfants. Exemple : une pépinière de jeunes agriculteurs, une pépinière d'informaticiens, une pépinière de surdoués. Comme on le voit, la recherche dans sa méthode la plus moderne ne permet pas d'apporter une explication concrète à la toponymie trouvée sur la géographie d'Urbanya.  Il m'a fallu continuer mes recherches et c'est le mot "escocell" dans le Wikipedia catalan qui m'a finalement apporté une explication plus plausible. En effet, traduit en français, il donne "une grille d'arbre", ces fameuses grilles que l'on trouve de nos jours tout autour des arbres sur tous les grands boulevards arborés. L'Encyclopédie catalane donne la même explication. Toutefois, l'article en question développe le sujet et indique qu'il peut s'agir aussi d'un simple trou circulaire autour d'un arbre. L'Institut d'Estudis Catalans (Intitut des Etudes Catalanes) dans son dictionnaire catalan/valencien/baléare donne la signification suivante : « Fossé que le vigneron fait autour d'une vigne en travaillant la terre et que la charrue n'a pas pu atteindre lorsque les agriculteurs sont passés (Rosselló, Conflent). Comme on le voit ici, la région du Conflent est carrément nommée et on peut donc supposer sans trop de risques de se tromper que les Escocells d'Urbanya ou d'ailleurs soient plus largement des fossés, des rigoles voire des tranchées autour d'un champ ou d'un pré permettant de gérer l'eau qui s'y écoule. On notera d'ailleurs que le mot "écoulements" a une lointaine mais certaine ressemblance avec le mot "escocell" que les linguistes et les géographes ont parfois écrit sur leur carte en "Escaussels" ou "Escausseils" mais le plus souvent en "Escauccels" . Concernant ce dernier mot, l'IEC donne la signification suivante : « Excavation faite en grattant le sol. Dans les montagnes, le pommier étant planté dans n'importe quelle zone de terre,  il est nécessaire que ces excavations soient faites autour des souches du tronc afin que l'eau puisse les irriguer avec le plus de justesse ». Fosses, fossés, rigoles, tranchées, trous, excavations, il ne fait plus aucun doute, les Escocells d'Urbanya étaient sans doute de petites canalisations permettant d'irriguer avec justesse et parcimonie de l'eau des vergers ou des vignes. Oui, l'eau était déjà un bien très précieux. Il le sera de plus en plus !

 

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Tour du Capcir - Etape 3 Gîte Le Moulin à Rieutort - Les Bones Hores aux Bouillouses

Publié le par gibirando

Ce diaporama est agrémenté de 6 musiques d'Ennio Morricone extraites d'une compilation intitulée "Relaxing Moment". Elles ont pour titre : "Tema Di Ada", "Infazia E Maturità", "La Spiaggia", "In Ogni Una Storia", "Tre Anni Fa Una Sera", "Il Figlio E La Nostalgia".

Tour du Capcir - Etape 3 Gîte Le Moulin à Rieutort - Les Bones Hores aux Bouillouses

Tour du Capcir - Etape 3 Gîte Le Moulin à Rieutort - Les Bones Hores aux Bouillouses

Tour du Capcir - Etape 3 Gîte Le Moulin à Rieutort - Les Bones Hores aux Bouillouses

Tour du Capcir - Etape 3 Gîte Le Moulin à Rieutort - Les Bones Hores aux Bouillouses

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3eme étape – 13 septembre 2013 : du gîte Le Moulin à Rieutort (1.517 m) à l’hôtel-restaurant Les Bones Hores aux Bouillouses (2.019 m) soit 28 km pour un dénivelé de 887 m et des montées cumulées de 1.734 m. Point culminant au collet proche du lieu-dit La Muntanyeta (2.327 m) – Point le plus bas au pont de Les Moulines (1.440 m).

 

Cette nuit, j’ai fait un rêve.  Je marchais sur la crête d’une montagne avec Blek le Roc et ses deux compagnons Roddy et le professeur Occultis, mais il y avait aussi Jérôme, ses deux amis Cathy et Fred mais également Dany, Carole ma fille, mon gendre JC et mon frère Daniel. Mes petits-enfants aussi. Oui, nous étions tous là sur cette crête et c’était clairement celle du Madres cheminée hier. Oui, nous marchions tous en ensemble, riant comme si une bonne humeur communicative s’était emparée de nous tous. Par contre, je ne me souviens pas comment ce rêve s’est terminé. Sans doute avait-il juste été là pour me faire démarrer cette journée avec enthousiasme. En me réveillant, et après le souvenir de ce rêve agréable, la première idée qui m’est passée par la tête a été de me dire : « nous sommes déjà à la moitié de ce Tour du Capcir et bon sang que le temps est vite passé ! » puis dans la foulée : « il faut que j’en profite un maximum ! ». En me levant, je me suis dirigé vers la petite fenêtre pour regarder le ciel. J’étais passablement déçu car il était plutôt blanc mais je ne voulais pas me mettre la pression inutilement car selon Alex, le propriétaire du gîte, aucune pluie n’était annoncée pour les 2 prochains jours. Alors, je suis parti sous la douche car il était 7h30 et nous avions commandé le p’tit déj pour 8 heures. Globalement, je me sentais en bien meilleure forme que les jours précédents et j’étais plutôt content car l’étape s’annonçait assez « phénoménale ». Mon tracé G.P.S que j’avais refait des dizaines de fois avec mon logiciel CartoExplorer m’avait toujours indiqué une distance de 28 kilomètres environ et des montées cumulées assez ahurissantes. Ahurissantes pour moi bien sûr et mes 64 printemps. Comme toujours, les calculs de Jérôme étaient un peu plus optimistes mais il faut dire que nous n’avions pas la même manière d’effectuer les tracés et pas le même logiciel non plus. Lui, ses tracés étaient plus directs alors que les miens étaient toujours plus nuancés et plus dans le détail. Alors je préférais me fier aux miens, et quand j’essayais de me souvenir d’une étape aussi longue lors d’un autre tour pédestre, deux étapes réalisées avec Dany revenaient à ma mémoire : « En 2004, 32 kilomètres entre le  Pont-de-Montvert et Florac lors d’une étape mémorable sur le Chemin de Stevenson ! ». Quant à la deuxième, c’était 12h30 de marche sur le G.R.10 en 2001, non loin de là, entre le lac du Lanoux et Bolquère. Si je parle en heure, c’est parce qu’à l’époque, je n’avais pas encore de G.P.S et bien sûr pas de logiciel cartographique. Avec le recul, j’avais estimé cette étape à environ 29 à 30 kilomètres et d’ailleurs, Dany l’avait terminée avec les plantes des deux pieds à vif !  Moi, par chance, je l’avais accompli sans aucun souci physique. C’était une autre époque, mon appareil photo était un argentique et j’avais 13 années de moins. Comme allais-je me comporter sur celle-ci ? Cette question m’avait turlupiné mais ce n’était plus le cas. J’avais décidé d’être positif. A 8h30, tout le monde est au rendez-vous du petit déjeuner et dans la salle à manger, une superbe table nous attend. Rien ne manque à l’appel et Sia et Alex se sont démenés sans compter pour satisfaire nos goûts et nos appétits respectifs. Cela est d’autant plus dommage que nous ne pouvons pas nous éterniser et qu’au bout de 20 minutes, nous sommes contraints de quitter cette table à regrets, le ventre rassasié pour quelques heures il est vrai. Les Bouillouses sont loin, et moi, je l’avoue, je pars un peu dans l’inconnu, même si certains tronçons de cette étape autour des Camporells et des Bouillouses n’ont plus aucun secret pour moi.  Nous saluons nos charmants hôteliers en les remerciant de leur excellent accueil et surtout sans oublier de leur dire que tout a été parfait à tous points de vue. En sortant du gîte, une fois encore, je fais l’amer constat d’une météo très mitigée. De gros nuages blancs et de grands pans de ciel bleu se partagent l’espace. Au loin, droit devant nous,  une grande étendue crayeuse chapeaute la vallée de l’Aude. Poussés par un « bon » vent frisquet, les nuages courent vers le sud et en l’espace de quelques minutes, le ciel est à même de changer du tout au tout. Soit nous sommes enveloppés d’une brume grisâtre et humide ou bien couronnés d’un ciel bleu d’une pureté presque absolue. A la sortie de Rieutort, nous reprenons la petite route empruntée hier,  mais cette fois dans le sens inverse. Au bout de quelques minutes, nous apercevons Jérôme ; qui a pris un peu d’avance et qui marche avec son G.P.S à la main ; quitter la route pour descendre dans une vaste prairie. Or mis un peu d’herbe couchée par endroits, indiquant que d’autres personnes sont déjà passées,  rien ne mentionne qu’il y ait là un itinéraire. Mais quelques centaines de mètres plus loin, nous atterrissons sur un chemin bien plus large dont le sol est nettement plus marqué par les passages. Ce chemin suit une longue ligne de poteaux électriques. Ces deux raccourcis nous évitent le bitume de la route et nous emmènent plus directement sur l’itinéraire du Tour du Capcir que l’on retrouve à hauteur du pont de la Polideta. Je reconnais immédiatement le parcours que nous avions emprunté 15 jours auparavant lors de notre tour du lac de Puyvalador avec Dany. Après le pont de la Polideta vient aussitôt celui des Molines. Des arches séculaires dont la tradition prétend qu’ils sont « romains » mais les historiens contestent cette idée. En réalité, aucune mention historique n’en fait état et de ce fait, personne ne sait vraiment les dater. Selon des spécialistes, les techniques de construction seraient plutôt moyenâgeuses. Si le premier pont a enjambé le rec del Cirerol descendant de Rieutort, avec celui des Molines nous enjambons le Galbe. Ce farouche torrent, nous allons devoir le suivre sur de nombreux kilomètres au sein même de la belle vallée portant bien évidemment son nom. Rappelons au passage que Rieutort ou plutôt Riutort en occitan signifie « rivière tordue », c’est dire si nos ancêtres attachaient déjà de l’importance à l’eau. Après, les ponts, un plaisant chemin creux car bordé de pierres sèches, nous entraîne vers le hameau d’Espousouille. Plaisant, car ce chemin est continuellement verdoyant et fleuri, de nombreux papillons y virevoltent, les décors sont très changeants et du torrent monte une constante fraîcheur bien agréable pour marcher. Les gazouillis d’innombrables passereaux et le rugissement du torrent se livrent une bataille de décibels. Quand les chants des oiseaux s’arrêtent, seules les pierres qui roulent au fond du lit du Galbe laissent entendre leur fracas. La première fois que je suis venu à Espousouille, ce qui m’a le plus frappé c’est bien sûr la splendeur de la Vallée du Galbe elle-même mais surtout la beauté et la densité de la forêt qui domine le village. Après les maisons du hameau au bout d’une verdoyante prairie,  des sapins à perte de vue se profilent devant nous. Une fois de plus, Espousouille semble désert et rien n’arrête notre marche en avant, or mis l’envie d’en prendre quelques clichés. Il ne nous faut que quelques minutes pour traverser le hameau qui est le dernier avant l’arrivée ce soir aux Bouillouses. Seul, un panonceau indicatif de randonnée à sa sortie réussit à nous ralentir mais il faut dire qu’il a la bienveillance de nous rafraîchir la mémoire et de remettre quelque peu les pendules à l’heure : « Refuge des Camporells- 4h40 » et « Lac des Bouillouses – 7h15 » ! Les dés sont jetés et ils ne nous restent plus qu’à marcher ! A vrai dire, je suis sans doute le seul à être impressionné par ces horaires. Comme à leurs habitudes, Cathy et Jérôme ont décidé d’élever la cadence et leur train de marche n’est pas le même que celui de Fred et surtout que le mien. Eux, que je qualifie de modernes, en sont déjà à prendre le T.G.V  de la randonnée pédestre alors qu’avec Fred, notre train à nous est plutôt celui d’un vieux « vapeur » aimant exagérément la flânerie. Un « train de sénateur » en quelque sorte, même si certains sénateurs détestent cette expression pourtant si appropriée parfois à cause de leurs façons si indolentes de se déplacer. Jean de la Fontaine ne l’avait-il pas reprise à son compte dans le lièvre et la tortue faisant allusion aux sénateurs de la Rome antique quant à leur marche lente et solennelle ? Les lièvres, ce sont Cathy et Jérôme. Fred et moi sommes les tortues, encore que pour Fred rien ne soit figé. Il aime bien s'attarder auprès de la Nature mais quand il le veut, il sait marcher vite lui aussi. Malgré ça, les écarts ne sont pas très importants car la piste est très bonne et d’une douce déclivité. De ce fait, nous tenons néanmoins le rythme et cela même en bavardant allègrement. Comme je l’ai supposé à Espousouille, la piste file magnifiquement au milieu d’immenses conifères et sur la gauche, on entend le Galbe chantonner mais en sourdine en raison de la distance qui nous en sépare. Par endroits, quand les grands arbres ont la louable attention de s’en écarter un peu, nous dominons le joli et rafraichissant petit torrent au milieu de quelques prés verdoyants. Au fur et à mesure que l’on s’avance dans la vallée, la chanson du torrent se fait plus précise et même plus tonitruante car plusieurs cascades successives font entendre leur fracas. Après le Cortal Pujol et en arrivant au croisement du Pont des Plans de l’Orriet, la piste rejoint le torrent. Ici, en raison de l’aplanissement du terrain, le Galbe perd toute sa vigueur et n’est qu’une banale rivière, sans aucune profondeur, aux eaux transparentes mais plutôt mollassonnes.  Les rayons du soleil frappent ses eaux limpides et les galets de schistes qui dorment au fond du lit renvoient des milliers de reflets d’or et d’argent, telles des flèches lancées vers le ciel, En arrivant au Refuge de la Jaceta (1.645m), nous marquons une pause. Il est déjà 11 heures et d’un même élan, nous estimons que le temps de grignoter un petit en-cas est arrivé. Un simple petit en-cas et seulement quelques minutes de pause car pour le vrai pique-nique ce n’est pas vraiment l’heure. Une table et des bancs de bois permettent de se reposer agréablement. Le refuge non gardé est très propre, spacieux et semble être une étape accueillante. Le lieu est charmant et plus ouvert sur les décors environnants, car ici la vallée est plus vaste, le lit du torrent très proche de l’itinéraire du Tour du Capcir. Après ce bref repos, on se remet en route. L’inclinaison se faisant plus sévère, je suis vite largué mais je monte à mon train et même si je ne marche pas aussi vite que mes acolytes, je continue à être en bien meilleure forme que le premier jour. Le chemin se stabilise et redescend de nouveau vers le lit du Galbe. La vallée s’élargit encore et droit devant les premiers névés apparaissent mouchetant de blanc les flancs du pic des Mortiers. Une nouvelle baraque, celle de la Jaca de la Llosa se présente mais personne ne s’y arrête. J’y lis très rapidement sur un panneau qu’elle est réservée en priorité aux bergers. Tout s’explique car ici, au bord et dans le lit même du Galbe, de nombreux et magnifiques chevaux sont là à faire le spectacle. La plupart broutent placidement l’herbe verdoyante en bordure du torrent. D’autres pataugent dans son lit. Quelques poulains restent accolés à leur mère, la tétant dès que l’occasion se présente. Mais si tous ces chevaux semblent paisibles, ils vivent à l’état sauvage et on se garde bien de tenter de les caresser. D’ailleurs, parmi eux, un semble tout particulièrement excité et  il a comme on dit,  « la danse de Saint-Guy ». Il se roule dans l’herbe les quatre fers en l’air, se relève soudainement puis part en courant, s’arrêtant net et recommençant les mêmes acrobaties un peu plus loin. Ce cadre somptueux avec ces superbes chevaux nous incite à prendre plusieurs photos souvenirs. Des photos où nous sommes tous les quatre, ce qui n’est pas arrivé si souvent depuis le départ, or mis au sommet du Madres. Après l’installation et le positionnement de nos appareils photo et la mise en fonction de nos retardateurs, les clichés sont « dans la boîte ». Mes compagnons s’éternisant avec les chevaux et la piste se transformant ici en une étroite et caillouteuse sente se mettant à monter, je me remets en route sans trop les attendre, prenant ainsi une petite avance. Cette avance, ils vont la rattraper avec une facilité si déconcertante, presque à vous dégoûter de marcher avec eux pour quelqu’un qui y prêterait trop d’attention. Si j’y prête cas, c’est plus par admiration et surtout sans jalousie, car bien au contraire, je suis très heureux de marcher avec ces trois jeunes gens. Néanmoins, j’arrive en premier sur le petit pont enjambant le Galbe et je les attends car ils sont déjà là à quelques mètres de moi en surplomb du torrent. En réalité, ce n’est déjà plus le Galbe mais le Correc dels Serrat Verds, un de ses affluents. A ma droite, arrive un autre petit torrent, affluent lui aussi, c’est le rec de la Pierre Ecrite, nom donné à ce ruisseau à cause d’une étonnante pierre gravée bien connue se trouvant dans ce secteur de la montagne. Une étrange pierre avec des gravures surprenantes que les spécialistes ont beaucoup de mal à attribuer et à dater. J’ai longtemps espéré la découvrir mais malheureusement, elle n’est pas sur l’itinéraire du Tour du Capcir, sauf à faire une entorse à notre étape déjà bien longue. Du petit pont, nous repartons comme un seul homme mais cet homme se coupe très rapidement, d’abord en deux, puis en trois, puis en quatre. Il faut dire que la déclivité est assez violente et n’a plus rien à voir avec celles que nous avons connues depuis le départ de Rieutort. Heureusement, la montée vers la Jasse des Formigues permet des vues nouvelles car plus aériennes et pour moi, ces vues sont synonymes d’arrêts photos. Qui dit photos, dit arrêts et qui dit arrêts, dits pauses. La « jasse », verdoyante prairie plutôt plane entourée de sapins, est un opportun palier pour reprendre mon souffle. Notre souffle. On le reprend d’autant mieux qu’un groupe de randonneurs, vétérans et hâbleurs, nous arrêtent pour bavarder et blaguer. Mon âge bien avancé parmi mes trois compagnons d’une autre génération devenant le sujet essentiel de ces gentilles mais équivoques plaisanteries. Les dames n'étant pas les dernières à me « chambrer » !  La suite de l’itinéraire ressemble très souvent à ce premier tronçon : une rude montée, un palier, une rude montée, un palier et ainsi de suite même si les décors sont parfois bien dissemblables. Dans cette montée, d’autres randonneurs nous accompagnent quelques temps et à bien y réfléchir, c’est bien la toute première fois que nous en voyons sur le même itinéraire que le nôtre. Oui, nous avons marché dans une quasi solitude depuis 2 jours. Ici, même si les chemins sont parfois bien différents, le dénominateur commun c’est l’eau. Il en coule de tous les côtés et d’inégales manières : petits torrents, ruisseaux tranquilles, arabesques liquides plus ou moins longues, tourbières spongieuses, flaques cristallines, minuscules cascades. Malgré la saison bien avancée, je cherche quelques fleurs à photographier mais elles sont plutôt rares dans ces milieux très humides. Je réussis néanmoins à en trouver quelques-unes, les plus nombreuses étant des Séneçons des Pyrénées et des Marguerites des Alpes, petite marguerite poussant dans les rocailles. Plus rares sont les Adénostyles, jolies fleurs roses poussant carrément les pieds dans l'eau, mais je suis certain que si j'avais le temps de chercher, je découvrirais bien d'autres fleurs. Mais aujourd'hui,  mon temps n'est pas à la découverte botanique et puis de toute manière, plus je m'élève et plus la minéralité occupe les lieux.  Cette difficile mais non moins agréable ascension se termine au pied de la Muntanyeta (2.436 m), la « Petite Montagne », sur un sentier au départ herbeux puis devenant caillouteux se transformant peu à peu en un pierrier essentiellement composé de petites caillasses. Nous sommes à plus de 2.320 mètres d’altitude et la plupart des hauts sommets environnants culminent à 2.600 ou 2.700 mètres. Tout autour, ce n’est qu’un magma impressionnant d’énormes rochers. Là, au sommet d’un collet, point culminant de la journée à 2.327 m, nous basculons sur un autre versant, celui des « Estanys des Camporells ». Ici, le terrain change du tout au tout passant d’une minéralité extrême à une steppe rase et herbeuse. Sur notre droite quelques hauts sommets servent de frontière avec l’Ariège et la Réserve Nationale d’Orlu. Avec ce col, l’heure du pique-nique est arrivée. En réalité, elle est arrivée depuis longtemps car il est déjà 13h30 passé et le premier joli coin sous la forme d’une mare aux eaux transparentes entourée d’une herbe verte et tendre recueille un accord unanime pour une halte. Pas de doute, nous sommes tous à l’unisson pour déposer nos chaudes carcasses sur l’herbe et les godillots de nos pieds dans ce lieu ô combien rafraîchissant. La mienne de carcasse est en tous cas assez lasse par les montées à répétition et réclame un peu de repos. Il est déjà 13h45 et si la première résolution a été de nous déchausser et de tremper nos pieds endoloris dans cette mare limpide, tenir les pieds bien longtemps dans cette eau glaciale relève de la prouesse ou de l'insensibilité. Tout le monde en conclut que déposer ses fesses sur l’herbe fraîche est bien plus agréable et opportun. On pique-nique tous d’un bel appétit, moi le premier et je suis d’autant plus joyeux que les grosses difficultés de la journée sont désormais derrière moi, même si l’arrivée est encore très lointaine. Alors que nous nous reposons, allongés sur l’herbe, soudain je m’aperçois que les sommets des deux Péric, petit et grand, dépassent de la ligne d’horizon et aussitôt, je me mets à penser à la dernière fois où j’étais venu aux Camporells avec Dany. Un triste souvenir. Nous étions partis de la station de ski de Formiguères et avions atteint les Camporells par la Serra de Mauri et en arrivant nous avions appris qu’une femme venait de chuter depuis le sommet du Petit Péric. Une chute de 2 à 300 mètres en contrebas qui nous avaient profondément choqués et attristés. J’avais été d’autant plus perturbé qu’en regardant mes photos, et notamment une d'entre-elles en rapproché, je m’étais aperçu que le corps de la défunte était visible au sein même des éboulis se trouvant sous le sommet. Quelques minutes après la tragédie, le groupe de randonneurs et d’amis accompagnant cette dame était arrivé au refuge dans un silence de cathédrale. Ils étaient tous complètement décomposés et atterrés par la chute de leur collègue à laquelle ils avaient assisté impuissants.  Gardien du refuge, bénévoles, secouristes, peloton de gendarmes de Haute-Montagne, de nombreuses personnes étaient partis vers les éboulis où se trouvait la malheureuse. Mais c’était déjà trop tard. On avait terminé cette balade, avec dans le ciel, le ballet incessant des hélicoptères qui étaient venus déposer les gendarmes puis chercher la défunte.  Sans compter un étrange petit nuage, lequel dans un ciel très pur, était venu jouer un hallucinant ange gardien juste au dessus de la dépouille. Voilà ce que ces Péric me remémoraient. Une journée mémorablement triste et qui apostrophe longtemps. Heureusement la bonne humeur quasi permanente de Jérôme et de ses amis coupe court à mes pensées de cette triste journée. Après une heure de repos, on se remet en route et bien que j’essaie de penser à autre chose, j’ai un mal fou à oublier ce drame. J’ai d’autant plus de mal, qu’au fur et à mesure que l’on descend vers les Estanys et le refuge, la scène de la tragédie, c'est-à-dire le Petit Péric et ses éboulis se dévoilent à mes yeux. Je suis à la fois triste de ce terrible souvenir et très heureux de voir que Cathy, Fred et Jérôme apprécient à sa juste valeur ce cadre grandiose qui se dévoile peu à peu à leurs regards. Les petits étangs bleutés défilant sur notre droite les attirent comme des aimants. Il faut dire que la douce descente sur ce versant-là permet une découverte progressive et le plus souvent en surplomb des magnifiques lacs bleutés qui se succèdent ; Estany Llarge, Estany Gros, Estany del Mig et Estany de la Basseta ; et dans ce décor à la fois minéral mais par endroits très boisé, l’arrivée au refuge représente une véritable apothéose. Le refuge étant en complète réfection, nous ne jugeons pas  utile d’y entrer et nous partons nous reposer sur les berges du grand lac. Aujourd’hui, heureusement, aucun hélicoptère ne vient troubler notre placide repos et seuls de nombreux vautours fauves tournoient très haut dans le ciel. Après de multiples photos, nous longeons le grand lac puis nous arrivons à celui de la Basseta et en surplomb d’autres lacs magnifiquement bleutés mais plus petits. Ici aussi, de l’eau, il en coule de toutes parts et je suis ravi de voir que mes compagnons sont aussi enchantés que moi de marcher dans cette nature féerique. Après les petits « estanys », l’itinéraire devient un peu plus compliqué, car plus caillouteux mais surtout à cause de courtes montées et descentes qui se succèdent jusqu’au Pla des Carboneres puis encore jusqu’aux flancs de la Serra dels Alarbs. Là, avant la longue descente vers le refuge de la Balmette que je connais bien pour être venu faire l’ascension du Puig del Pam, une biche peu farouche a amplement les honneurs de nos appareils-photos. La distante qui nous sépare d’elle doit lui paraître suffisante car elle continue à brouter tranquillement tout en levant la tête de temps à autre pour nous observer sans crainte apparente. Qu’adviendrait-il de cette jolie biche si nous n’avions pas été uniquement des chasseurs d’images mais des chasseurs tout court ? Un appel téléphonique de Dany m’arrête dans la descente. Je m’arrête. Mes compagnons qui continuent disparaissent dans les bosses des prairies où paissent d’innombrables bovins et chevaux.  Il faut dire que cette descente avec des panoramas grandioses sur les montagnes, Péric et Carlit notamment, mais surtout sur le lac cobalt des Bouillouses est une vraie invitation à la flânerie. De plus, l’hôtel des Bones Hores, c’est à dire la ligne d’arrivée étant visible, on a d’ici une relative « bonne » idée de la distante restant à parcourir et donc pas vraiment envie de courir. Ce n’est donc que 20 minutes plus tard que je rejoins mes compères juste avant le refuge de la Balmette. Ils me font part de leur inquiétude de ne pas m’avoir vu arriver plus vite dans cette longue descente plutôt facile. Une fois les explications fournies,  nous profitons pleinement de la cabane et de ce lieu insolite où de nombreuses vaches déambulent au milieu d’étranges et dodus magmas granitiques.  Les deux sont des prétextes à plusieurs photos. Après cet arrêt improvisé près du refuge, nous prenons le sentier qui descend  vers les Bouillouses. C’est un sentier plutôt pénible car caillouteux à souhait et composé d’un véritable enchevêtrement de rochers, de bois et de ruisseaux. Heureusement, peu après, quelques vastes parties planes et herbeuses compensent cette laborieuse descente vers le lac de barrage. Peu après, je reconnais le sentier du célèbre GR.10 que nous avions emprunté avec Dany lors de la 3eme étape d'un mémorable Mérens-les Vals - Mantet. Mémorable car partir marcher 8 jours avec tente et bardas, c'était la toute première fois qu'on s'y risquait. Mémorable à cause des décors cheminés certes mais pour bien d'autres raisons et notamment celle de ne pas avoir pu terminer le parcours prévu à cause des plantes des pieds de Dany qui n'étaient devenues qu'ampoules à vif et rougeâtres. C'était en 2001. Le récit de cette longue, difficile mais merveilleuse pérégrination, je l'avais intitulé « Les Conquérants de l'Agréable », parodiant ainsi un livre que je venais de lire, celui du célèbre alpiniste Lionel Terray, « Les Conquérants de l'inutile ». Oui, bien incapables d'escalader la moindre paroi de montagne, Dany et moi trouvions bien plus agréables de cheminer autour d'elles en prenant soin de les éviter. Le G.R.10 était là pour ça. Une fois de plus, les souvenirs ressuscitent, même s'ils ne sont jamais vraiment morts et simplement oubliés. Un simple panonceau « Porteille de la Grave - GR.10 » a suffit ! Désormais, je reconnais très bien le petit sentier qui longe le lac. Il est malaisé lui aussi, car il ne cesse de monter et descendre jusqu’au barrage et après les nombreux kilomètres, il finit par « casser les pattes ». Il est d’autant plus difficile à cheminer qu’il est parfois caillouteux et que de très nombreuses racines grosses et lisses effleurant le sol nécessitent d’incessantes levées des pieds bien plus hautes que ne le serait la montée normale d’un escalier. Heureusement les belles mais rares vues sur l’immense lac compensent un peu la pénibilité de ce sentier. En arrivant aux Bones  Hores, je m’aperçois mais bien trop tard que j’ai perdu une polaire que Cathy m’avait prêtée. Sans doute s’est-elle détachée de mon sac à dos en restant accrochée à une branche ? Je suis tellement agacé que je suis disposé à faire demi-tour, mais Cathy m’en dissuade en me disant qu’elle n’en a pas vraiment besoin et qu’elle n’a pas beaucoup de valeur. Sans doute a–t-elle un peu pitié de moi après les nombreux kilomètres parcourus ? J’aurais fait de même. Autant l’avouer aussi, la vue du grand hôtel des Bones Hores est pour moi un réel soulagement pourtant je ne suis pas plus fatigué que ça. En tous cas, beaucoup moins que je ne l’appréhendais au départ ce matin. Je m’aperçois que j’ai bien récupéré de ma terrible méforme du premier jour. La dernière étape s’annonce donc sous d’excellents auspices. Non, si je suis satisfait d’en avoir terminé, c’est surtout parce que je m’étais fait un monde de cette très longue étape et que je l’avais considérée comme excessivement difficile, en tous cas la plus difficile des quatre. En réalité et après réflexion, la plus ardue a été la première avec cette « terrible » montée vers le col de Passeduc, mais avec il est vrai une condition physique déplorable par manque de sommeil et sans doute un stress au delà du raisonnable. Aujourd’hui tout ça a disparu et j’en suis heureux. Les « Bones Hores » est un grand et superbe hôtel et un rendez-vous presque obligé des randonneurs qui viennent marcher dans ce secteur du Capcir. La plupart grimpent vers le pic du Carlit, plus haut sommet des Pyrénées-Orientales au milieu des innombrables lacs et cette balade sur une journée est sans doute une des plus belles du département. Même si d’autres hébergements sont possibles autour du barrage, aucun n’a les potentialités et les possibilités d’accueil des Bones Hores. Tous les randonneurs que je connais et qui ont séjournés là, m’ont toujours donné des avis très positifs. Ici, on est très bien accueilli, on y dort et on y mange toujours très bien et je crois que c’est très clairement le cas pour nous aussi. Tout le monde a été enchanté de cette fin d’étape et cette nouvelle nuit à l’hôtel, après une si longue escapade, a été très bénéfique. Moi, j’ai été véritablement émerveillé de cette troisième étape. Elle est superbe. La Vallée du Galbe, la longue montée vers les Camporells, les estanys des Camporells et les Bouillouses, pour moi pas de doute, tout cette partie est un véritable petit Canada français. Un Canada, certes où je ne suis jamais allé, mais que j’ai vu à maintes et maintes reprises à la télé et qui ressemble parfois à s’y méprendre à ce coin paradisiaque du Capcir mais aussi bien sûr à ces décors qui jalonnaient les aventures de Blek le Roc. Aujourd’hui, Blek le Roc n’est pas revenu dans mes pensées et ma bonne forme physique y est certainement pour quelque chose. Voilà, les pensées que j’ai dans la tête à l’instant même où je pose ma tête sur l’oreiller.  Je suis certain que Blek le Roc aurait été enchanté de marcher avec nous aujourd’hui et de connaître la Vallée du Galbe,  les Camporells et les Bouillouses. Par contre, je ne sais pas s’il aurait apprécié les Bones Hores, lui que je n’ai toujours vu que dans des cabanes de trappeurs, des tepees indiens ou bien dans des fortins faits de rondins de bois. De nouveau, je m’endors avec ces songes d’enfants mais conscient tout de même qu’un autre rêve s’achève dès demain : celui d’avoir pu réaliser ce Tour du Capcir avec Jérôme et ses amis ! Après le Tour du Fenouillèdes en 2011, voilà un autre Tour du Bonheur qui va se terminer ! Dans ma tête à demi ensommeillée, mes pensées tourbillonnent de plaisir. Le passé et le présent s’entremêlent une fois encore mais aujourd’hui aucune tristesse ne vient les troubler. A bien y réfléchir, mais c’est très lointain maintenant, je ne me souviens pas avoir vu Blek le Roc dormir ou bien se reposer une seule fois ?

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