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Deux bouteilles de limonade perdues dans la mer du Web…..

Publié le par gibirando

Ce mois-ci, pas de coup de gueule, et à la place, une espèce d’appel « léger » voire « futile » diront certains. Ils n’auront pas tort. Appel à l’entraide, à la généalogie et à l’Histoire. Histoires des Pyrénées-Orientales certes mais également Histoire tout court à propos de 2 vieilles bouteilles de limonade que j’ai trouvées au cours de mes pérégrinations pédestres. Appels car j’ai espoir que cet article réveillera des souvenirs auprès des internautes. Sauf miracles,  il n’y aura probablement pas de réactions immédiates,  mais comme 2 bouteilles jetées à la mer, lesquelles, un jour ou l’autre, s’échoueront sur des rives favorables et enchantées, je garde bon espoir d’obtenir quelques informations les concernant..... Espoir que des personnes propices et curieuses les ramasseront un jour et seront à même de faire avancer le voyage de ces deux bouteilles.

Deux bouteilles de limonade perdues dans la mer du Web…..

C’est donc bien une invitation au voyage que je vous propose avec cet article.

 

J’ai déjà le début de ce voyage car je sais qui les a faites fabriquées, qui les a remplies de limonade, je sais où elles ont été bues puis oubliées. Les principales questions restent quand et pourquoi ne retrouve-t-on rien à leur sujet ? La première bouteille, je l’ai trouvée le 16 août 2010 au hameau ruiné de Fontanills au dessus d’Arles-sur-Tech, au cours d’une balade que j’avais tout bonnement intitulée « Le hameau oublié de Fontanills par Can Rigall à partir d’Arles sur Tech ». Quant à la deuxième bouteille, retrouvée dans les vestiges d’un vieux cortal au lieu-dit Escausseils au dessus d’Urbanya, c’est  par bonheur je l’ai découverte à moitié enterrée mais intacte le 29 août 2011 lors d’une randonnée qui avait pour titre le « Serrat de Calvaire ». Vous pouvez retrouver ces deux balades sur mon blog.

 

C’est donc à un an d’intervalle que j’ai découvert ces deux bouteilles bien différentes d’aspect, une en verre vert, l’autre en verre blanc, mais avec néanmoins de grandes similitudes quand aux éléments gravés permettant de se lancer dans des recherches historiques. Depuis, elles dormaient sagement sur une étagère de mon bureau d’où j’ai décidé de les sortir pour tenter de leur donner une seconde vie. Une vie que j’espère aussi pétillante que la limonade qu’elles ont contenu mais ce n’est pas gagné !

 

La première bouteille, probablement la plus ancienne, car avec un verre vert, soufflé soit à la bouche ou au moins artisanalement, offre les mentions suivantes : « Limonade J.DELCLOS ARLES SUR TECH ». Mentions gravées en relief sur la bouteille. Les nombreuses imperfections, pliures de la pâte encore liquide au bas de la bouteille notamment, causé par le souffle, ajoute un charme supplémentaire à ce flacon de 25 cm de hauteur pour un poids de 555 grammes et un cul de 55 mm de diamètre. Le bouchon mécanique est en céramique blanc mais sans aucune mention. La partie métallique servant à articuler l’ouverture et la fermeture du bouchon est en très bon état si l’on imagine les conditions difficiles au grand air que la bouteille a eu à subir au fil des décennies. Le bouchon dispose de son joint en caoutchouc d’origine. Je précise d’origine car j’ai trouvé la bouteille fermée et le caoutchouc étant collé au verre, je n’ai jamais pris le risque d’essayer de l’ouvrir et ainsi, de  décoller l’ensemble au risque de tout abîmer. Le cul-de-bouteille semble avoir subi quelques chocs, petite cassure et brèche sur l’arête et fêlure évidente, mais prouve si besoin que ce verre était d’une extraordinaire résistance. En 2010, j’ai procédé à quelques recherches sur Internet. Elles m’ont amené sur le site Ebay car j’avais trouvé une annonce de vente faisant état d’une autre bouteille de limonade Delclos. Suite à cette similitude, j’ai pris contact par messagerie avec la personne qui la vendait et j’ai pu apprendre que ma bouteille aurait peut –être plus de 100 ans. Quelques années de plus aujourd’hui.  Il s’agissait d’une jeune dame. S’agissait-il d’une arrière petite-fille de ce fameux J.DELCLOS ? Je ne sais pas. En tous cas, elle a prétendu être une descendante du limonadier d’Arles-sur-Tech. L’annonce a disparu depuis et de ce fait, j’ai perdu tout contact avec cette personne pour obtenir de plus amples précisions. Bien évidemment, je ne peux garantir cette datation mais j’aurais tendance à la cautionner au regard de l’Histoire (*) que j’ai pu lire au sujet des limonades et des limonadiers en général. Mes recherches m’ont au moins permis d’en apprendre beaucoup à ce sujet et je prends plaisir à en faire un long condensé.

 

La deuxième bouteille est en verre blanc. Le fait de l’avoir retrouvé ouverte a quelque peu terni son aspect, aussi bien intérieur qu’extérieur, à moins que qu’il ne s’agisse d’un résultat inéluctable consécutif à son ancienneté. La partie terne disparaît dès qu’on mouille le verre mais revient très vite au séchage. Egalement gravées en relief sur le flanc de la bouteille, on peut lire les mentions suivantes : « AUBERT AMEDEE  PRADES  PYREES ORIENTALES ». Le bouchon en céramique blanc présente les mêmes informations écrites en rouge. Le joint en caoutchouc d’origine est encore présent mais très collé à la céramique et la partie mobile métallique est bien plus rouillée que celle de la première bouteille. Il est vrai que j’ai trouvé la bouteille en partie enterrée et elle a donc souffert de cet ensevelissement. Elle est haute de 22,5 cm et le cul à un diamètre de 6 cm. Au cours de mes recherches sur le Net, je n’ai pas trouvé suffisamment d’informations me permettant d’élaborer le début d’une histoire et seule une conviction personnelle me laisse penser que cette bouteille serait un peu plus récente que la précédente. Est-elle en verre soufflée ? N’étant pas un spécialiste, je ne saurais l’affirmer. Une chose est sûre, le verre est très épais et la bouteille est lourde, plus lourde que la première car elle pèse 600 grammes. En France, les communes portant la dénomination de PRADES sont pléthores, j’en ai dénombré au moins 7 sur la carte I.G.N, plus celles ayant un nom composé, mais la bouteille ayant été trouvée au dessus d’Urbanya, on peut raisonnablement penser qu’il s’agit de PRADES dans le Conflent et dans les Pyrénées-Orientales. En réalité, toutes les autres communes sont situées dans d’autres  départements et sont donc éloignées de plusieurs centaines de kilomètres du lieu de la découverte, la plus proche étant Prades en Ariège distante de 100 km d’Urbanya.

 

Voilà ce que je peux dire de ces deux bouteilles trouvées lors de mes balades.

 

Les quelques recherches généalogiques sur Internet que j’ai commencé d’entreprendre m’ont permis de prendre quelques contacts. J’ai déjà obtenu une réponse négative et les autres tardent à venir. Dans l’immédiat, les recherches concernant DELCLOS sont difficiles car le seul « J » du prénom ne les facilite pas. Concernant, AUBERT Amédée à Prades, j’ai retrouvé sur le site Filae un acte de mariage réalisé dans cette commune en 1878. On y apprend qu’un AUBERT Amédée s’est marié avec une prénommée Marguerite HUGUET, or ce jeune homme s’est déclaré comme « ouvrier brasseur » ! De la bière à la limonade, il n’y a qu’un pas que certains ont franchi puisque très souvent les brasseurs fabriquaient également de la limonade ou que les limonadiers brassaient de la bière. Faut-il le franchir encore ? Faut-il, si j’ose dire, faire ou pas un panaché rafraîchissant de cette information ? Je ne sais pas. Peut-être faut-il attendre un peu les résultats de cet appel. Le brasseur AUBERT est-il devenu limonadier un peu plus tard ? Ces questions restent dans l’immédiat sans réponse. Il faut dire que les noms AUBERT et DELCLOS sont des noms relativement répandus, ce qui ne facilite pas les recherches. Néanmoins, je ne désespère pas.

 

Dans le remarquable site de l’historien Jean Tosti consacré aux communes des Pyrénées-Orientales, je note que les noms AUBERT et DELCLOS figurent parmi les noms les plus portés au 19eme siècle dans les communes mentionnées sur les bouteilles, c’est donc un point réconfortant et je peux espérer que de nombreux descendants se retrouvent dans cet appel.

 

Donc, si les noms des limonadiers J.DELCLOS à Arles-sur-Tech et AUBERT Amédée à Prades dans le 66 vous parlent encore, vous pouvez de me contacter par mail ou par la rubrique contact de mon blog. Je suis preneur de toutes les informations au sujet de ces 2 bouteilles. Merci d’avance.

 

Enfin, je tiens à préciser que mes recherches n’ont pas le moindre intérêt spéculatif ni financier. Sur le site Ebay, les vieilles bouteilles de limonade sont légions à des tarifs de 5, 8 ou 10 euros mais jamais guère plus. Non au contraire, mon envie d’avancer dans mes recherches relève plus de la curiosité historique et ma démarche est même philanthropique car je suis disposé à offrir ces bouteilles aux héritiers qui me prouveront par n’importe quel moyen qu’ils sont bien les descendants de ces limonadiers qu’étaient J.DELCLOS ET Amédée AUBERT. A bon entendeur, salut !

 

(*) Histoire de la limonade : La limonade est une boisson froide constituée de jus de citron, d'eau plate et de sucre. Au départ, elle était non gazeuse. Elle tient son nom du limonier, citronnier originaire du nord de l’Inde mais dont la culture de son fruit, le limon, a été développée d’abord en Louisiane puis s’est étendue au reste de la planète. D’autres variétés de citronniers sont ensuite entrées dans la composition. Désormais, la boisson peut être gazeuse ou non suivant le pays où elle est consommée. En France, sa fabrication manufacturière pour être commercée date du 17eme siècle et est lancée initialement par des distillateurs d’alcools mais l’Histoire retient que la boisson a été inventée bien avant. C’est ainsi que dans le livre de Jules Forni consacré aux « Origines et histoire de la corporation des restaurateurs et limonadiers de Paris : discours prononcé au banquet du 20 avril 1886 », on apprend que sa recette remonte à l’ancienne Rome, puis aurait débarquée à Paris quand la princesse Catherine de Médicis se marie avec le roi de France Henri II, fils de François 1er. Ce sont des gens de sa cour qui la ramènent avec elle d’Italie. En 1673, Louis XIV  pour remplir sa cassette particulière profite du succès de la limonade pour créer une maîtrise particulière à la profession moyennant finance. Personne ne se présentant pour l’acheter, le roi l’impose d’office par décret au tarif de 150 livres, soit la moitié du prix d’acquisition du brevet de fabrication. Trois ans plus tard, la Compagnie des maîtres limonadiers et marchands d’eau de vie de Paris voit le jour. Elle regroupe les commerçants fabriquant et vendant la limonade mais bien d’autres boissons également. On en compte presque 600 dans Paris. Ils ont le monopole du commerce de rue. Le terme « limonadier » remplace celui de « tavernier » dans l’esprit des consommateurs. Dans les années 1704, 1705 et 1706, la corporation connaît quelques soubresauts suite à des changements de statuts. Les limonadiers perdent des privilèges.  En 1713,  grâce à un nouvel édit, la profession retrouve ses privilèges antérieurs. En 1746, les maîtres limonadiers sont séparés en deux catégories : les limonadiers distillateurs et les limonadiers confiseurs. Plus tard, en 1773, cette corporation est rattachée à celle des vinaigriers car si le sucre a servi traditionnellement à la fermentation, à cette époque on commence à ajouter du vinaigre blanc pour lui donner cet aspect pétillant, le vinaigre présentant l’avantage de modérer l’explosivité liée à la fermentation. En 1776, avec l’abolition des jurandes par Turgot, la corporation des limonadiers disparaît. Peu à peu, mais nous sommes déjà au 19eme siècle, les eaux gazeuses remplacent l’eau plate. De ce fait, elle devient une boisson encore plus appréciée car plus rafraîchissante. La profession se développe au point que la France compte 3 à 4000 limonadiers vers la fin du 19eme siècle. Finalement, le terme de « limonadier » est étendu à l’ensemble des cafetiers et des débiteurs de boissons. La profession de fabricant de limonades se raréfie au fil du 20eme siècle pour atteindre son paroxysme à la fin des années 80 et 90. Il subsiste néanmoins de très vieilles maisons :

 

- Brissaud, la plus ancienne limonaderie date de 1824.

- Elixia a vu le jour en 1856, créée par Faustin Girardet.

- Fontestorbes, sise à Bélesta en Ariège, fabrique la plus ancienne limonade artisanale depuis 1885.

- Geyer Frères avec sa marque fétiche Lorina a été créée en 1895.

 

Voilà pour les plus anciennes même si parmi les très nombreuses qui ont été créées au cours du 20eme siècle, il en subsiste encore quelques unes qu’il serait trop long de citer ici. Aujourd’hui dans les limonades industrielles, l’aspect gazéifiant et pétillant est obtenu grâce à un dosage précis d’acide citrique et par injection de gaz. Désormais, les limonadiers diversifient leurs produits et cherchent en permanence de nouvelles saveurs en y incorporant d’autres essences. Les nouvelles limonades se déclinent à la fraise, à la cerise, à la pomme et on en trouve même au basilic !

 

La limonade n’a pas fini de nous faire pétiller les papilles……

 

 

 

 

 

 

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La Batterie (887 m) et la chapelle Santa Engracia depuis Arles-sur-Tech (270 m)

Publié le par gibirando

Diaporama sur la musique "2 Hearts, 1 Soul" du groupe Yinyues (free music)

La Batterie (887 m) et la chapelle Santa Engracia depuis Arles-sur-Tech (270 m)

La Batterie (887 m) et la chapelle Santa Engracia depuis Arles-sur-Tech (270 m)

Pour agrandir les photos cliquez dessus. 2 fois pour un plein écran.


 

La « Batterie Santa Engracia », à l’altitude de 887 mètres, est une sortie pédestre bien connue des randonneurs catalans. L’ancienne batterie de Vauban n’est pas à proprement parlée une « incontournable » des Pyrénées-Orientales mais elle demeure une balade relativement bien prisée de nombreux clubs de marche. Indifféremment, on peut y grimper soit depuis Arles-sur-Tech soit depuis Amélie-les-Bains, différents itinéraires avec de multiples variantes pouvant être organisés autour de cet objectif principal ou secondaire. Personnellement, cette randonnée dort dans mes tablettes depuis les années 2008/2009. En avril 2008, et alors que depuis les thermes d’Amélie, j’avais réalisé un court aller retour vers la chapelle éponyme, j’avais découvert des panonceaux mentionnant cette fameuse « Grande Batterie ». Ce jour-là, le temps m’avait manqué pour m’y rendre. Je m’étais donc contenté de découvrir la belle Chapelle Santa Engracia magnifiquement restaurée par de courageux bénévoles ainsi que sa grande croix blanche dominant superbement Amélie et les Gorges du Montdony. Depuis, j’avais gardé de ce lieu, le souvenir de ses divins aspects : sérénité d’un havre de paix et stupéfiant mirador. J’ai décidé de l’inscrire à nouveau au programme de cette sortie. En effet, la batterie et la chapelle peuvent faire l’objet d’une sortie commune ou séparée. Un an plus tard, en août 2009, lors mon Tour du Vallespir en 6 jours, la « Batterie Santa Engracia » est revenue sur le devant de ma scène pédestre. A l’époque et lors de la dernière étape entre Saint-Laurent-de-Cerdans et Amélie-les-Bains, j’étais passé à 5 minutes d’elle sans y aller, faisant ainsi l’impasse mais avec le projet avéré d’y revenir. Avec ce récit, c’est donc chose faite mais pas sans peine car la déclivité sur un terrain pas toujours facile est loin d’être évidente : 617 mètres de dénivelé jusqu’à la batterie depuis la ligne de départ à Arles-sur-Tech situé à 270 mètres d’altitude. Il est 10 h quand je laisse ma voiture sur la place Joseph Monin à proximité de la Salle des Fêtes. Je demande mon chemin à un passant et ce dernier m’indique que le célèbre G.R.10 que je dois emprunter passe derrière la salle. Je trouve aisément le panonceau et le fameux balisage blanc et rouge. Parmi diverses directions, je prends note de celle qui m’intéresse au premier chef : « Coll de Paracolls – 2 h – G.R.10 », même si je sais que pour atteindre la batterie, il me faudra tourner au préalable et juste avant ce col. Je me dirige vers une vieille usine amplement délabrée dont l’exploitation consistait à traiter le minerai de fer en provenance des mines de Batère. Je tourne à droite puis longe les murs de l’usine aux vestiges rouillés par le temps puis enjambe le pont sur le Tech. Oiseaux au bord de la rivière, fleurs printanières mais surtout quelques vieilles cartes postales contant la vie passée d’Arles-sur-Tech freinent mes premières ardeurs. Cette vie passée, c’est celle de l’exploitation du fer dont j’ai toujours essayé d’approfondir mes connaissances de l’Histoire à travers des bouquins mais en les complétant au mieux par des balades pédestres : Mines de Batère et de la Pinouse, Rapalum, les Manerots, FormenteraEscaro autant de sites « vallespiriens » et « conflentistes » que j’ai pris plaisir à découvrir. Au bout du pont, un deuxième panonceau accroché à un transformateur électrique se présente et sa comparaison avec le premier me laisse assez songeur : « Coll de Paracolls – 3,6 km ». Deux heures pour effectuer moins de 4 kilomètres, je me dis que ça promets ! Décidément, le Vallespir ne changera jamais et restera toujours « la vallée âpre » si chère aux Romains auxquels elle doit son nom : « Vallis asperi ».  Ce rapide calcul est assez contradictoire avec l’analyse du parcours jusqu’à la batterie que j’ai trouvé sur un site Internet dont le jeune webmestre annonce la boucle que je dois effectuer comme étant « une randonnée facile ». Excusable parce que jeune, l’insoucieux ignore que ce qui est facile à 30 ans ne l’est pas nécessairement à 67, d’où mon refus quasi systématique de décrire mes randonnées avec ce genre de références. La facilité ou la difficulté et le temps de marche d’une randonnée sont des critères bien trop personnels. En tous cas, ils le sont pour moi et j’avoue n’avoir jamais été trop attentif au « fameux » indice IBP mis en place par la fédération. Le mieux est de bien se connaître et de connaître son état de forme du moment. Est-ce mon désir de tenir le temps imparti par ce panonceau mais voilà que j’ai déjà perdu le balisage du G.R.10 ? Un demi-tour presque immédiat et un retour vers la dernière empreinte blanche et rouge me remettent dans le droit chemin, qui n’est pas droit du tout. En effet, il est surtout peu logique car il tourne à gauche en franchissant la clôture que j’avais suivie par erreur, puis très curieusement, il traverse un muret en pierres sèches, désormais effondré. Derrière le mur, l’itinéraire est bien là. Il continue et coupe très vite une large piste allant vers Can Valent. La suite bien balisée devient plus évidente à suivre même si le terrain, lui, ne l’est pas vraiment. Une sente très ravinée, parfois caillouteuse, parfois gréseuse, parfois carrément rocheuse s’élève rudement et souvent en zigzaguant au milieu des bruyères arborescentes et des genêts fleuris. La végétation plus haute se résume à quelques rares chênes. Ces derniers sont verts, rouvres ou plus rarement lièges mais au fur et à mesure de l’élévation, ils se mélangent à d’autres essences et notamment aux grands hêtres puis aux châtaigniers qui finalement vont prendre le quasi monopole au plus haut de la forêt. Dallé par endroits, je foule de mes gros godillots le sentier muletier du temps jadis. C'était la route la plus courte entre la France et l’Espagne. C’était le temps où le mulet et l’âne étaient les meilleurs amis du paysan, du contrebandier, du soldat et du vagabond. Dans cet entrelacs minéral et végétal peu aisé, les mains viennent quelquefois en aide aux pieds pour franchir un palier. Un palier, c’est l’occasion pour moi de souffler un peu et de profiter pleinement des jolies vues s’ouvrant sur Arles et son ample vallée du Tech. Au dessus de la cité et sur l’autre versant, le Massif du Canigou est encore bien enneigé, mais comme il est bien trop chapeauté d’un capuchon de nuages blancs, il a à l’apparence d’une montagne plutôt modeste qu’un géant aurait dégauchie. Aujourd’hui, et malgré un saupoudrage de neige, les plus hauts pics perdent leur aspect glorieux et somptueux. Parfois, ces paliers sont enrichis d’un poteau couronné d’une pancarte faisant référence au « kilomètre vertical », course pédestre bien connue consistant à démarrer d’Arles-sur-Tech située à 284 m d’altitude puis à atteindre au plus vite le Pilo de Belmaig ou Pilon de Belmatx perché 1.000 mètres plus haut. Je ne cours pas, bien au contraire, et pourtant, après mes récents problèmes de santé, les paliers 484 et 684 mètres sont pour moi autant de petites satisfactions à les avoir déjà atteints dans un délai plus que correct. Je ne retiens vraiment de cette difficile ascension qu’un nom inscrit sur mon bout de carte I.G.N : la Font de les Amors. Inutile de traduire mais où est-elle au juste cette source prodigieuse ? Un filet d’eau de quelques centimètres me fait imaginer que « les Amors » sont là. Il faut dire que tout en montant, les panoramas se raréfient, et dans ces sous-bois de châtaigniers, or mis de bien trop rares fenêtres qui s’entrouvrent sur des bouts de Vallespir, rien n’incite à une flânerie exagérée. Les plantes fleuries se raréfient et je n'ai photographié qu’un seul rouge-gorge depuis les oiseaux aperçus au pont sur le Tech. Sans trop d’illusions et à chaque pin rencontré ou presque, je ralentis un peu mon allure, car j’ai toujours espoir de découvrir l’Isabelle, ce fameux papillon protégé si rarissime à voir mais paraît-il présent dans le Haut-Vallespir. Ici, les pins sont rares et l’Isabelle encore plus. Je n’en vois point bien évidemment. Quand j’atteins l’intersection filant vers la Batterie Santa Engracia, c’est avec une satisfaction certaine que j’observe ma montre indiquant 12h15. Je sais que l’objectif est désormais à moins de 2 kilomètres et la déclivité bien moindre que celle déjà accomplie. Je décide d’aller manger à la batterie. Le sentier plus doux et enfin bien plus praticable devient plus agréable à cheminer. Seuls un ruisseau rafraîchissant, deux couples d’anglais un peu paumés et les ruines du Mas Nou d’Eixena ralentissent mes pas soudain redevenus plus alertes. Il est 13 heures tapantes quand je retrouve le panonceau déjà vu lors de Mon Tour du Vallespir : « Grande Batterie – 0h05 – P.R.1 ». Cette fois, pas question d’éviter cette « Grande Batterie » même si je sais qu’elle n’est ni de cuisine ni celle d’un orchestre et seulement militaire. En tous cas, une chose est sûre, cette batterie rechargera mes accus. Effectivement, la Batterie de Santa Engracia est déjà là avec sa muraille colossale et ce n’est ni un orchestre que j’entends, ni des prières dédiées à Sainte-Engrâce mais bien les fous rires joyeux mais très sonores d’un groupe de randonneurs. Ils occupent par petits groupes la totalité de la plate-forme militaire mais ils ont tous l’air de bien se marrer chacun dans leur coin. Une dame vient vers moi et me demande si je suis seul puis elle passe son chemin quand je lui réponds. « Oui, je suis seul ! »  Finalement je comprends que ma présence aussi soudaine qu’imprévue a failli contrarier chez elle une envie très pressante. Je laisse la dame à son besoin naturel et le reste du groupe sur la vaste et vieille esplanade stratégique et monte au sommet d’un rocher faisant office de pinacle. Je ne regrette pas ces quelques mètres supplémentaires d’élévation, car d’ici, le cul assis sur une borne géodésique et la girouette franco-catalane tournoyant au dessus de ma tête, il n’y a pas de meilleur poste d’observation sur une immense partie du Vallespir et bien plus loin encore vers la Plaine du Roussillon et la Méditerranée. Vers le nord, le ciel s’est quelque peu éclairci et le sieur Canigou, bien qu’encore coiffé d’un gros bonnet cotonneux, décide enfin de dévoiler ses plus beaux atours. Vers le sud et sous un firmament bleu et limpide, les rocs Saint-Sauveur et de France (Frausa) me rappellent à leurs agréables souvenirs d’une récente balade. Vers les autres points cardinaux, dont une rose des vents me donne l’orientation, se sont là aussi des paysages magiques de tous côtés. C’est avec un émerveillement et un étonnement sans cesse renouvelés, que ces paysages défilent à nouveau devant mes yeux, comme au temps de mon périple tout autour du Vallespir. Le récit de ce périple au sein de cette magnifique région et au dessus de cette belle vallée du Tech, je l’avais intitulé « Sur les hauteurs d’une vallée âpre ». Âpre le périple l’avait été en 2009, âpre, la balade l’est encore aujourd’hui, car si j’ai attendu la fin du pique-nique et que le groupe de randonneurs ait quitté les lieux pour partir visiter tous les recoins de la batterie, j’en suis à peine au tout début de ma découverte qu’une mauvaise chute m’envoie choir dans les branches d’un ciste desséché. Le ciste est déjà mort depuis longtemps mais ses branches sont encore suffisamment dures et ligneuses pour me déchirer l’avant-bras gauche sur 5 ou 6 cm. Après ma « gamelle » du Tour de la Pelade dont j’étais sorti avec une égratignure superficielle de la main droite, cette fois-ci, il s’agit d'une coupure bien plus profonde qu’il me faut soigner. Rien n’y fait et malgré une trousse à pharmacie bien achalandée en pansements de toutes sortes, mon sang s’écoule de la plaie comme d’un robinet grand ouvert. Le saignement se poursuivra pendant presque 4 heures sans que rien ne l’arrête ou presque. Le plus efficace restera le mouchoir en papier directement collé sur la plaie sanguinolente mais quand le papier est gorgé de sang, il refuse de coller et tombe lui aussi. Je vais renouveler l’opération pratiquement jusqu’à l’arrivée où enfin, le sang coagulé fera finalement office de cautérisation naturelle. Dans l’immédiat, et malgré cet incident qui me fait perdre pas mal de temps, je décide de poursuivre mes découvertes, d’abord celle de la « Grande Batterie » puis la boucle initialement prévue. Pour le néophyte que je suis, la batterie se résume à de hautes et larges fortifications composées d’impressionnantes murailles mais bien évidemment un tacticien militaire y trouvera bien d’autres intérêts architecturaux et surtout stratégiques. Elles sont construites en pierres sèches et sans aucun mortier. Les seuls mortiers que la batterie ait connus ont été ceux que les artilleurs ont été contraints de monter jusqu’ici. On imagine bien évidemment, l’immense besogne que cette construction a du nécessiter et les efforts entrepris par les soldats pour y amener des pièces d’artillerie permettant de tirer plus de 2 km en contrebas. Paradoxe de l’Histoire, ici aucun coup de canon n’aurait jamais résonné. Avant de venir ici et comme je le fais la plupart du temps, j’ai tenté de m’initier à l’Histoire de cette batterie en cherchant un maximum d’informations sur Internet. Autant l’avouer, je suis resté quelque peu sur ma faim et ce malgré de nombreuses informations sporadiques recueillies de-ci de-là. J’ai néanmoins appris qu’elle aurait été construite en 1670 selon les directives de Vauban qui était venu visité le Roussillon l’année précédente. A-t-elle été construite en même temps que la citadelle de Fort-les-Bains (Fort d’Amélie) ou du moins dans sa continuité, on peut le supposer. Cette dernière a été construite en 1670 sur le site de vieux édifices médiévaux et sur les conseils de Noël Bouton, comte de Chamilly et intendant du Languedoc qui voulait réprimer la contrebande du sel et mettre fin à la révolte des Angelets (1661-1675). Les Angelets étaient ces vallespiriens initiés par le célèbre Josep de la Trinxeria qui étaient entrés en révolte contre Louis XIV suite à l’instauration de la gabelle après le Traité des Pyrénées de 1659, traité qui avait vu le Vallespir espagnol et catalan annexé par la France. Cette annexion s’est faite dans la douleur et quand on sait que les travaux de construction du fort étaient financés avec les impôts payés par les vallespiriens et qu’en plus certains « gabelous » y résidaient, on comprend mieux les animosités qu’il y avait dans les deux camps et l’envie d’en découdre. Dès l’automne 1670, Jacques de Borelly de Saint Hilaire, ingénieur militaire de Vauban, dessine de nouveaux plans et poursuit le chantier déjà entrepris. Le fort terminé, Saint Hilaire et les différents commandants du fort se plaignent d’un manque criant d’infrastructures et demandent des moyens financiers supplémentaires à Louvois. Des modestes aménagements sont apportés mais Louis XIV, Louvois et Vauban sont réticents à trop investir car ils jugent que le lieu est bien trop petit et de ce fait, n’est pas réellement stratégique. En 1674, les Espagnols assiègent Fort-les-Bains alors que de nombreux travaux sont en cours. Le siège est rapidement levé mais malgré cette première alerte, la configuration du fort et ses moyens de défense évoluent assez peu. Il faut attendre 1679 et la deuxième visite de Vauban dans le Roussillon pour qu’il soit jugé utile à la sécurité du Roussillon et des Pyrénées sans qu’il soit reconnu pour autant comme une pièce maîtresse de la « ceinture de fer ». De grosses améliorations sont néanmoins apportées. Comme vous le voyez, autour de l’Histoire de Fort-les-Bains, cette « Grande Batterie » est peu ou jamais évoquée et l’on sait seulement qu’elle était un moyen supplémentaire de le défendre d’abord contre les Angelets puis contre les Espagnols. La frontière étant très proche et le relief géographique très alambiqué, les premiers ingénieurs avaient sans doute compris que le fort serait vulnérable à partir des versants montagneux qui l’entourent et le dominent. Ils ne s’étaient pas trompés puisqu’en 1793, et après un long siège de plusieurs semaines, le fort commandé par le gouverneur Michel Jean Paul Daudiès tombe aux mains des soldats espagnols du général Antonio Ricardos. Le fort et ses alentours dont les « batteries », petite et grande, continueront à être occupés par des militaires pendant encore un siècle. Voilà ce que l’on peut dire de l’Histoire de cette « Grande Batterie ». Il existe également une « Petite Batterie » mais j’ignore où elle se trouve et la carte I.G.N ne la mentionne pas. Après cette découverte non accidentelle mais accidentée de la « Grande Batterie », je continue l’itinéraire vers la Chapelle Santa Engracia. Cet itinéraire, on l'appelle plus communément le chemin du 25eme léger, en référence à un vaillant régiment d'artillerie créé en 1796 dont les faits d'armes glorieux un peu partout sont nombreux, y compris ici en Roussillon. Je connais déjà cette « route stratégique » pour aller à la chapelle et je sais que les vues plongeantes sur Arles y sont exceptionnelles. Depuis ce chemin, un rapproché photographique me permet même d’y voir ma voiture distante de plus de 2 km. Le désir de refaire ce chemin et l’envie de retourner à la chapelle sont donc intacts tant j’avais trouvé ses extérieurs et ses alentours bien agréables et reposants. La chapelle est encore paisible et par bonheur, quand je pousse sa jolie porte, celle-ci s’ouvre assez « divinement » je l’avoue. Je ne m’y attendais pas, tant de nombreuses chapelles du département demeurent hermétiquement closes aux randonneurs. L’intérieur est sobre mais beau, bien à l’image de tout ce que l’on peut voir ici : table d’orientation, paysages, décors, jardins, fontaine, lieux de repos aménagés avec des bancs, nombreuses pancartes explicatives de son histoire, croix panoramique, j’y passe plus d’une heure, en grande partie avec l’agréable compagnie d’un gentil couple de touristes. Ils profitent de mon culot à avoir pousser la porte de la chapelle et tout comme moi, eux aussi vont laisser un petit laïus sur le livre d’or. Nous sortons ensemble de l’église et dès lors qu’ils aperçoivent qu’un saignement s’écoule de mon bras, ils veulent coûte que coûte l’arrêter. Malgré leur trousse à pharmacie encore bien plus garnie que la mienne, ils n’y parviennent qu’à moitié et je quitte Santa Engracia direction l’arrivée avec un gros paquet de mouchoirs en papier imbibés d’une coagulation rougeâtre bien plus impressionnante que douloureuse. Les mouchoirs ne tombent plus enrobés qu’ils sont d’un gros morceau de sparadrap mais un petit filet de sang continue de se manifester. Est-ce la perte de sang alliée à la longueur de la balade, mais la fatigue commence à se faire sentir. Je languis l’arrivée et seules deux chèvres perdues sur des rochers abrupts au dessus d’un profond ravin me stoppent dans cette longue descente vers Arles-sur-Tech. Je les observe longuement. Perchées sur un étroit piton rocheux, elles semblent chercher une issue mais sans trop de succès. Elles montent puis redescendent, partent à gauche puis à droite comme un peu perdues dans ce décor minéral et végétal apparemment fermé, mais vraisemblablement ouvert car comment auraient-elles pu arriver sur ce parapet rocheux ? Je ne peux malheureusement rien faire pour elles et je repars avec dans la tête, l’histoire de la chèvre de Monsieur Seguin qui voulait courir la montagne et qui finalement avait été dévorée par un loup. Ici, elles courent la montagne mais peu de chance qu’un loup les dévore. Peut être un vautour fauve et encore ? Je me raisonne. Elles s’en sortiront en trouvant l'exutoire qui leur a permis de prendre pied sur cette falaise escarpée. Une demi-heure plus tard, je retrouve l’asphalte quitté depuis ce matin 10h. Il est 16h30. « Mas Draguines » m’indique un panneau signalétique devant un petit groupe d’habitations. Je ne quitte plus cette route de la Batllie qui descend vers des rangées d’immeubles et un centre sportif, si j’en crois mon bout de carte I.G.N. Le Tech s’écoule devant moi et j’y file direct en coupant au milieu des immeubles et des pelouses. Ce raccourci m’amène très vite sur un large chemin herbeux ressemblant à la fois à un parcours sportif et à un arboretum. En tous cas, trois ou quatre personnes courent au milieu de ludiques panneaux donnant les noms des arbres que l’on rencontre ici. Je remonte la rive droite du Tech et si les arbres m’intéressent, les oiseaux fréquentant le bord de la rivière ont de loin ma préférence. Je prends encore le temps d’en photographier quelques-uns.  Après cet intermède, la boucle est bientôt terminée. J’aperçois l’usine désaffectée sur l’autre berge, le pont et le transformateur électrique devant moi. Je finis les restes de mon casse-croûte au bord du fleuve, dans la quiétude d’une petite grève et sous le regard un peu inquiet d’un couple de colverts. Ils sommeillent côte à côte et je fais en sorte ne pas les déranger. Pour eux, comme pour moi, le printemps est là et c’est la saison des passions et des sentiments. Il leur faut un peu de tranquillité pour s’aimer. Ma passion de la randonnée, je l’ai bien assouvie aujourd’hui et la tranquillité, j’en ai eu ma dose pareillement, mais n’empêche qu’il faut que je rentre à la maison. Je vis en couple moi aussi. Je traverse le pont, la balade tire à sa fin. Elle a été longue de 12,9 km incluant la visite de toutes les curiosités. Le dénivelé est de 623 m entre le point le plus bas à 264 m sur la rive du Tech et le plus haut à 887 m à la batterie. Les montées cumulées s’élèvent à 1.205 m. Carte IGN 2449OT Céret – Amélie-les-Bains-Palalda – Vallée du Tech Top 25. 

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La Batterie (887 m) et la chapelle Santa Engracia depuis Arles-sur-Tech (270 m)

Publié le par gibirando

Diaporama sur la musique "2 Hearts, 1 Soul" du groupe Yinyues (free music)

La Batterie (887 m) et la chapelle Santa Engracia depuis Arles-sur-Tech (270 m)

La Batterie (887 m) et la chapelle Santa Engracia depuis Arles-sur-Tech (270 m)

Pour agrandir les photos cliquez dessus. 2 fois pour un plein écran.


 

La « Batterie Santa Engracia », à l’altitude de 887 mètres, est une sortie pédestre bien connue des randonneurs catalans. L’ancienne batterie de Vauban n’est pas à proprement parlée une « incontournable » des Pyrénées-Orientales mais elle demeure une balade relativement bien prisée de nombreux clubs de marche. Indifféremment, on peut y grimper soit depuis Arles-sur-Tech soit depuis Amélie-les-Bains, différents itinéraires avec de multiples variantes pouvant être organisés autour de cet objectif principal ou secondaire. Personnellement, cette randonnée dort dans mes tablettes depuis les années 2008/2009. En avril 2008, et alors que depuis les thermes d’Amélie, j’avais réalisé un court aller retour vers la chapelle éponyme, j’avais découvert des panonceaux mentionnant cette fameuse « Grande Batterie ». Ce jour-là, le temps m’avait manqué pour m’y rendre. Je m’étais donc contenté de découvrir la belle Chapelle Santa Engracia magnifiquement restaurée par de courageux bénévoles ainsi que sa grande croix blanche dominant superbement Amélie et les Gorges du Montdony. Depuis, j’avais gardé de ce lieu, le souvenir de ses divins aspects : sérénité d’un havre de paix et stupéfiant mirador. J’ai décidé de l’inscrire à nouveau au programme de cette sortie. En effet, la batterie et la chapelle peuvent faire l’objet d’une sortie commune ou séparée. Un an plus tard, en août 2009, lors mon Tour du Vallespir en 6 jours, la « Batterie Santa Engracia » est revenue sur le devant de ma scène pédestre. A l’époque et lors de la dernière étape entre Saint-Laurent-de-Cerdans et Amélie-les-Bains, j’étais passé à 5 minutes d’elle sans y aller, faisant ainsi l’impasse mais avec le projet avéré d’y revenir. Avec ce récit, c’est donc chose faite mais pas sans peine car la déclivité sur un terrain pas toujours facile est loin d’être évidente : 617 mètres de dénivelé jusqu’à la batterie depuis la ligne de départ à Arles-sur-Tech situé à 270 mètres d’altitude. Il est 10 h quand je laisse ma voiture sur la place Joseph Monin à proximité de la Salle des Fêtes. Je demande mon chemin à un passant et ce dernier m’indique que le célèbre G.R.10 que je dois emprunter passe derrière la salle. Je trouve aisément le panonceau et le fameux balisage blanc et rouge. Parmi diverses directions, je prends note de celle qui m’intéresse au premier chef : « Coll de Paracolls – 2 h – G.R.10 », même si je sais que pour atteindre la batterie, il me faudra tourner au préalable et juste avant ce col. Je me dirige vers une vieille usine amplement délabrée dont l’exploitation consistait à traiter le minerai de fer en provenance des mines de Batère. Je tourne à droite puis longe les murs de l’usine aux vestiges rouillés par le temps puis enjambe le pont sur le Tech. Oiseaux au bord de la rivière, fleurs printanières mais surtout quelques vieilles cartes postales contant la vie passée d’Arles-sur-Tech freinent mes premières ardeurs. Cette vie passée, c’est celle de l’exploitation du fer dont j’ai toujours essayé d’approfondir mes connaissances de l’Histoire à travers des bouquins mais en les complétant au mieux par des balades pédestres : Mines de Batère et de la Pinouse, Rapalum, les Manerots, FormenteraEscaro autant de sites « vallespiriens » et « conflentistes » que j’ai pris plaisir à découvrir. Au bout du pont, un deuxième panonceau accroché à un transformateur électrique se présente et sa comparaison avec le premier me laisse assez songeur : « Coll de Paracolls – 3,6 km ». Deux heures pour effectuer moins de 4 kilomètres, je me dis que ça promets ! Décidément, le Vallespir ne changera jamais et restera toujours « la vallée âpre » si chère aux Romains auxquels elle doit son nom : « Vallis asperi ».  Ce rapide calcul est assez contradictoire avec l’analyse du parcours jusqu’à la batterie que j’ai trouvé sur un site Internet dont le jeune webmestre annonce la boucle que je dois effectuer comme étant « une randonnée facile ». Excusable parce que jeune, l’insoucieux ignore que ce qui est facile à 30 ans ne l’est pas nécessairement à 67, d’où mon refus quasi systématique de décrire mes randonnées avec ce genre de références. La facilité ou la difficulté et le temps de marche d’une randonnée sont des critères bien trop personnels. En tous cas, ils le sont pour moi et j’avoue n’avoir jamais été trop attentif au « fameux » indice IBP mis en place par la fédération. Le mieux est de bien se connaître et de connaître son état de forme du moment. Est-ce mon désir de tenir le temps imparti par ce panonceau mais voilà que j’ai déjà perdu le balisage du G.R.10 ? Un demi-tour presque immédiat et un retour vers la dernière empreinte blanche et rouge me remettent dans le droit chemin, qui n’est pas droit du tout. En effet, il est surtout peu logique car il tourne à gauche en franchissant la clôture que j’avais suivie par erreur, puis très curieusement, il traverse un muret en pierres sèches, désormais effondré. Derrière le mur, l’itinéraire est bien là. Il continue et coupe très vite une large piste allant vers Can Valent. La suite bien balisée devient plus évidente à suivre même si le terrain, lui, ne l’est pas vraiment. Une sente très ravinée, parfois caillouteuse, parfois gréseuse, parfois carrément rocheuse s’élève rudement et souvent en zigzaguant au milieu des bruyères arborescentes et des genêts fleuris. La végétation plus haute se résume à quelques rares chênes. Ces derniers sont verts, rouvres ou plus rarement lièges mais au fur et à mesure de l’élévation, ils se mélangent à d’autres essences et notamment aux grands hêtres puis aux châtaigniers qui finalement vont prendre le quasi monopole au plus haut de la forêt. Dallé par endroits, je foule de mes gros godillots le sentier muletier du temps jadis. C'était la route la plus courte entre la France et l’Espagne. C’était le temps où le mulet et l’âne étaient les meilleurs amis du paysan, du contrebandier, du soldat et du vagabond. Dans cet entrelacs minéral et végétal peu aisé, les mains viennent quelquefois en aide aux pieds pour franchir un palier. Un palier, c’est l’occasion pour moi de souffler un peu et de profiter pleinement des jolies vues s’ouvrant sur Arles et son ample vallée du Tech. Au dessus de la cité et sur l’autre versant, le Massif du Canigou est encore bien enneigé, mais comme il est bien trop chapeauté d’un capuchon de nuages blancs, il a à l’apparence d’une montagne plutôt modeste qu’un géant aurait dégauchie. Aujourd’hui, et malgré un saupoudrage de neige, les plus hauts pics perdent leur aspect glorieux et somptueux. Parfois, ces paliers sont enrichis d’un poteau couronné d’une pancarte faisant référence au « kilomètre vertical », course pédestre bien connue consistant à démarrer d’Arles-sur-Tech située à 284 m d’altitude puis à atteindre au plus vite le Pilo de Belmaig ou Pilon de Belmatx perché 1.000 mètres plus haut. Je ne cours pas, bien au contraire, et pourtant, après mes récents problèmes de santé, les paliers 484 et 684 mètres sont pour moi autant de petites satisfactions à les avoir déjà atteints dans un délai plus que correct. Je ne retiens vraiment de cette difficile ascension qu’un nom inscrit sur mon bout de carte I.G.N : la Font de les Amors. Inutile de traduire mais où est-elle au juste cette source prodigieuse ? Un filet d’eau de quelques centimètres me fait imaginer que « les Amors » sont là. Il faut dire que tout en montant, les panoramas se raréfient, et dans ces sous-bois de châtaigniers, or mis de bien trop rares fenêtres qui s’entrouvrent sur des bouts de Vallespir, rien n’incite à une flânerie exagérée. Les plantes fleuries se raréfient et je n'ai photographié qu’un seul rouge-gorge depuis les oiseaux aperçus au pont sur le Tech. Sans trop d’illusions et à chaque pin rencontré ou presque, je ralentis un peu mon allure, car j’ai toujours espoir de découvrir l’Isabelle, ce fameux papillon protégé si rarissime à voir mais paraît-il présent dans le Haut-Vallespir. Ici, les pins sont rares et l’Isabelle encore plus. Je n’en vois point bien évidemment. Quand j’atteins l’intersection filant vers la Batterie Santa Engracia, c’est avec une satisfaction certaine que j’observe ma montre indiquant 12h15. Je sais que l’objectif est désormais à moins de 2 kilomètres et la déclivité bien moindre que celle déjà accomplie. Je décide d’aller manger à la batterie. Le sentier plus doux et enfin bien plus praticable devient plus agréable à cheminer. Seuls un ruisseau rafraîchissant, deux couples d’anglais un peu paumés et les ruines du Mas Nou d’Eixena ralentissent mes pas soudain redevenus plus alertes. Il est 13 heures tapantes quand je retrouve le panonceau déjà vu lors de Mon Tour du Vallespir : « Grande Batterie – 0h05 – P.R.1 ». Cette fois, pas question d’éviter cette « Grande Batterie » même si je sais qu’elle n’est ni de cuisine ni celle d’un orchestre et seulement militaire. En tous cas, une chose est sûre, cette batterie rechargera mes accus. Effectivement, la Batterie de Santa Engracia est déjà là avec sa muraille colossale et ce n’est ni un orchestre que j’entends, ni des prières dédiées à Sainte-Engrâce mais bien les fous rires joyeux mais très sonores d’un groupe de randonneurs. Ils occupent par petits groupes la totalité de la plate-forme militaire mais ils ont tous l’air de bien se marrer chacun dans leur coin. Une dame vient vers moi et me demande si je suis seul puis elle passe son chemin quand je lui réponds. « Oui, je suis seul ! »  Finalement je comprends que ma présence aussi soudaine qu’imprévue a failli contrarier chez elle une envie très pressante. Je laisse la dame à son besoin naturel et le reste du groupe sur la vaste et vieille esplanade stratégique et monte au sommet d’un rocher faisant office de pinacle. Je ne regrette pas ces quelques mètres supplémentaires d’élévation, car d’ici, le cul assis sur une borne géodésique et la girouette franco-catalane tournoyant au dessus de ma tête, il n’y a pas de meilleur poste d’observation sur une immense partie du Vallespir et bien plus loin encore vers la Plaine du Roussillon et la Méditerranée. Vers le nord, le ciel s’est quelque peu éclairci et le sieur Canigou, bien qu’encore coiffé d’un gros bonnet cotonneux, décide enfin de dévoiler ses plus beaux atours. Vers le sud et sous un firmament bleu et limpide, les rocs Saint-Sauveur et de France (Frausa) me rappellent à leurs agréables souvenirs d’une récente balade. Vers les autres points cardinaux, dont une rose des vents me donne l’orientation, se sont là aussi des paysages magiques de tous côtés. C’est avec un émerveillement et un étonnement sans cesse renouvelés, que ces paysages défilent à nouveau devant mes yeux, comme au temps de mon périple tout autour du Vallespir. Le récit de ce périple au sein de cette magnifique région et au dessus de cette belle vallée du Tech, je l’avais intitulé « Sur les hauteurs d’une vallée âpre ». Âpre le périple l’avait été en 2009, âpre, la balade l’est encore aujourd’hui, car si j’ai attendu la fin du pique-nique et que le groupe de randonneurs ait quitté les lieux pour partir visiter tous les recoins de la batterie, j’en suis à peine au tout début de ma découverte qu’une mauvaise chute m’envoie choir dans les branches d’un ciste desséché. Le ciste est déjà mort depuis longtemps mais ses branches sont encore suffisamment dures et ligneuses pour me déchirer l’avant-bras gauche sur 5 ou 6 cm. Après ma « gamelle » du Tour de la Pelade dont j’étais sorti avec une égratignure superficielle de la main droite, cette fois-ci, il s’agit d'une coupure bien plus profonde qu’il me faut soigner. Rien n’y fait et malgré une trousse à pharmacie bien achalandée en pansements de toutes sortes, mon sang s’écoule de la plaie comme d’un robinet grand ouvert. Le saignement se poursuivra pendant presque 4 heures sans que rien ne l’arrête ou presque. Le plus efficace restera le mouchoir en papier directement collé sur la plaie sanguinolente mais quand le papier est gorgé de sang, il refuse de coller et tombe lui aussi. Je vais renouveler l’opération pratiquement jusqu’à l’arrivée où enfin, le sang coagulé fera finalement office de cautérisation naturelle. Dans l’immédiat, et malgré cet incident qui me fait perdre pas mal de temps, je décide de poursuivre mes découvertes, d’abord celle de la « Grande Batterie » puis la boucle initialement prévue. Pour le néophyte que je suis, la batterie se résume à de hautes et larges fortifications composées d’impressionnantes murailles mais bien évidemment un tacticien militaire y trouvera bien d’autres intérêts architecturaux et surtout stratégiques. Elles sont construites en pierres sèches et sans aucun mortier. Les seuls mortiers que la batterie ait connus ont été ceux que les artilleurs ont été contraints de monter jusqu’ici. On imagine bien évidemment, l’immense besogne que cette construction a du nécessiter et les efforts entrepris par les soldats pour y amener des pièces d’artillerie permettant de tirer plus de 2 km en contrebas. Paradoxe de l’Histoire, ici aucun coup de canon n’aurait jamais résonné. Avant de venir ici et comme je le fais la plupart du temps, j’ai tenté de m’initier à l’Histoire de cette batterie en cherchant un maximum d’informations sur Internet. Autant l’avouer, je suis resté quelque peu sur ma faim et ce malgré de nombreuses informations sporadiques recueillies de-ci de-là. J’ai néanmoins appris qu’elle aurait été construite en 1670 selon les directives de Vauban qui était venu visité le Roussillon l’année précédente. A-t-elle été construite en même temps que la citadelle de Fort-les-Bains (Fort d’Amélie) ou du moins dans sa continuité, on peut le supposer. Cette dernière a été construite en 1670 sur le site de vieux édifices médiévaux et sur les conseils de Noël Bouton, comte de Chamilly et intendant du Languedoc qui voulait réprimer la contrebande du sel et mettre fin à la révolte des Angelets (1661-1675). Les Angelets étaient ces vallespiriens initiés par le célèbre Josep de la Trinxeria qui étaient entrés en révolte contre Louis XIV suite à l’instauration de la gabelle après le Traité des Pyrénées de 1659, traité qui avait vu le Vallespir espagnol et catalan annexé par la France. Cette annexion s’est faite dans la douleur et quand on sait que les travaux de construction du fort étaient financés avec les impôts payés par les vallespiriens et qu’en plus certains « gabelous » y résidaient, on comprend mieux les animosités qu’il y avait dans les deux camps et l’envie d’en découdre. Dès l’automne 1670, Jacques de Borelly de Saint Hilaire, ingénieur militaire de Vauban, dessine de nouveaux plans et poursuit le chantier déjà entrepris. Le fort terminé, Saint Hilaire et les différents commandants du fort se plaignent d’un manque criant d’infrastructures et demandent des moyens financiers supplémentaires à Louvois. Des modestes aménagements sont apportés mais Louis XIV, Louvois et Vauban sont réticents à trop investir car ils jugent que le lieu est bien trop petit et de ce fait, n’est pas réellement stratégique. En 1674, les Espagnols assiègent Fort-les-Bains alors que de nombreux travaux sont en cours. Le siège est rapidement levé mais malgré cette première alerte, la configuration du fort et ses moyens de défense évoluent assez peu. Il faut attendre 1679 et la deuxième visite de Vauban dans le Roussillon pour qu’il soit jugé utile à la sécurité du Roussillon et des Pyrénées sans qu’il soit reconnu pour autant comme une pièce maîtresse de la « ceinture de fer ». De grosses améliorations sont néanmoins apportées. Comme vous le voyez, autour de l’Histoire de Fort-les-Bains, cette « Grande Batterie » est peu ou jamais évoquée et l’on sait seulement qu’elle était un moyen supplémentaire de le défendre d’abord contre les Angelets puis contre les Espagnols. La frontière étant très proche et le relief géographique très alambiqué, les premiers ingénieurs avaient sans doute compris que le fort serait vulnérable à partir des versants montagneux qui l’entourent et le dominent. Ils ne s’étaient pas trompés puisqu’en 1793, et après un long siège de plusieurs semaines, le fort commandé par le gouverneur Michel Jean Paul Daudiès tombe aux mains des soldats espagnols du général Antonio Ricardos. Le fort et ses alentours dont les « batteries », petite et grande, continueront à être occupés par des militaires pendant encore un siècle. Voilà ce que l’on peut dire de l’Histoire de cette « Grande Batterie ». Il existe également une « Petite Batterie » mais j’ignore où elle se trouve et la carte I.G.N ne la mentionne pas. Après cette découverte non accidentelle mais accidentée de la « Grande Batterie », je continue l’itinéraire vers la Chapelle Santa Engracia. Cet itinéraire, on l'appelle plus communément le chemin du 25eme léger, en référence à un vaillant régiment d'artillerie créé en 1796 dont les faits d'armes glorieux un peu partout sont nombreux, y compris ici en Roussillon. Je connais déjà cette « route stratégique » pour aller à la chapelle et je sais que les vues plongeantes sur Arles y sont exceptionnelles. Depuis ce chemin, un rapproché photographique me permet même d’y voir ma voiture distante de plus de 2 km. Le désir de refaire ce chemin et l’envie de retourner à la chapelle sont donc intacts tant j’avais trouvé ses extérieurs et ses alentours bien agréables et reposants. La chapelle est encore paisible et par bonheur, quand je pousse sa jolie porte, celle-ci s’ouvre assez « divinement » je l’avoue. Je ne m’y attendais pas, tant de nombreuses chapelles du département demeurent hermétiquement closes aux randonneurs. L’intérieur est sobre mais beau, bien à l’image de tout ce que l’on peut voir ici : table d’orientation, paysages, décors, jardins, fontaine, lieux de repos aménagés avec des bancs, nombreuses pancartes explicatives de son histoire, croix panoramique, j’y passe plus d’une heure, en grande partie avec l’agréable compagnie d’un gentil couple de touristes. Ils profitent de mon culot à avoir pousser la porte de la chapelle et tout comme moi, eux aussi vont laisser un petit laïus sur le livre d’or. Nous sortons ensemble de l’église et dès lors qu’ils aperçoivent qu’un saignement s’écoule de mon bras, ils veulent coûte que coûte l’arrêter. Malgré leur trousse à pharmacie encore bien plus garnie que la mienne, ils n’y parviennent qu’à moitié et je quitte Santa Engracia direction l’arrivée avec un gros paquet de mouchoirs en papier imbibés d’une coagulation rougeâtre bien plus impressionnante que douloureuse. Les mouchoirs ne tombent plus enrobés qu’ils sont d’un gros morceau de sparadrap mais un petit filet de sang continue de se manifester. Est-ce la perte de sang alliée à la longueur de la balade, mais la fatigue commence à se faire sentir. Je languis l’arrivée et seules deux chèvres perdues sur des rochers abrupts au dessus d’un profond ravin me stoppent dans cette longue descente vers Arles-sur-Tech. Je les observe longuement. Perchées sur un étroit piton rocheux, elles semblent chercher une issue mais sans trop de succès. Elles montent puis redescendent, partent à gauche puis à droite comme un peu perdues dans ce décor minéral et végétal apparemment fermé, mais vraisemblablement ouvert car comment auraient-elles pu arriver sur ce parapet rocheux ? Je ne peux malheureusement rien faire pour elles et je repars avec dans la tête, l’histoire de la chèvre de Monsieur Seguin qui voulait courir la montagne et qui finalement avait été dévorée par un loup. Ici, elles courent la montagne mais peu de chance qu’un loup les dévore. Peut être un vautour fauve et encore ? Je me raisonne. Elles s’en sortiront en trouvant l'exutoire qui leur a permis de prendre pied sur cette falaise escarpée. Une demi-heure plus tard, je retrouve l’asphalte quitté depuis ce matin 10h. Il est 16h30. « Mas Draguines » m’indique un panneau signalétique devant un petit groupe d’habitations. Je ne quitte plus cette route de la Batllie qui descend vers des rangées d’immeubles et un centre sportif, si j’en crois mon bout de carte I.G.N. Le Tech s’écoule devant moi et j’y file direct en coupant au milieu des immeubles et des pelouses. Ce raccourci m’amène très vite sur un large chemin herbeux ressemblant à la fois à un parcours sportif et à un arboretum. En tous cas, trois ou quatre personnes courent au milieu de ludiques panneaux donnant les noms des arbres que l’on rencontre ici. Je remonte la rive droite du Tech et si les arbres m’intéressent, les oiseaux fréquentant le bord de la rivière ont de loin ma préférence. Je prends encore le temps d’en photographier quelques-uns.  Après cet intermède, la boucle est bientôt terminée. J’aperçois l’usine désaffectée sur l’autre berge, le pont et le transformateur électrique devant moi. Je finis les restes de mon casse-croûte au bord du fleuve, dans la quiétude d’une petite grève et sous le regard un peu inquiet d’un couple de colverts. Ils sommeillent côte à côte et je fais en sorte ne pas les déranger. Pour eux, comme pour moi, le printemps est là et c’est la saison des passions et des sentiments. Il leur faut un peu de tranquillité pour s’aimer. Ma passion de la randonnée, je l’ai bien assouvie aujourd’hui et la tranquillité, j’en ai eu ma dose pareillement, mais n’empêche qu’il faut que je rentre à la maison. Je vis en couple moi aussi. Je traverse le pont, la balade tire à sa fin. Elle a été longue de 12,9 km incluant la visite de toutes les curiosités. Le dénivelé est de 623 m entre le point le plus bas à 264 m sur la rive du Tech et le plus haut à 887 m à la batterie. Les montées cumulées s’élèvent à 1.205 m. Carte IGN 2449OT Céret – Amélie-les-Bains-Palalda – Vallée du Tech Top 25. 

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La « Batterie Santa Engracia », à l’altitude de 887 mètres, est une sortie pédestre bien connue des randonneurs catalans. L’ancienne batterie de Vauban n’est pas à proprement parlée une « incontournable » des Pyrénées-Orientales mais elle demeure une balade relativement bien prisée de nombreux clubs de marche. Indifféremment, on peut y grimper soit depuis Arles-sur-Tech soit depuis Amélie-les-Bains, différents itinéraires avec de multiples variantes pouvant être organisés autour de cet objectif principal ou secondaire. Personnellement, cette randonnée dort dans mes tablettes depuis les années 2008/2009. En avril 2008, et alors que depuis les thermes d’Amélie, j’avais réalisé un court aller retour vers la chapelle éponyme, j’avais découvert des panonceaux mentionnant cette fameuse « Grande Batterie ». Ce jour-là, le temps m’avait manqué pour m’y rendre. Je m’étais donc contenté de découvrir la belle Chapelle Santa Engracia magnifiquement restaurée par de courageux bénévoles ainsi que sa grande croix blanche dominant superbement Amélie et les Gorges du Montdony. Depuis, j’avais gardé de ce lieu, le souvenir de ses divins aspects : sérénité d’un havre de paix et stupéfiant mirador. J’ai décidé de l’inscrire à nouveau au programme de cette sortie. En effet, la batterie et la chapelle peuvent faire l’objet d’une sortie commune ou séparée. Un an plus tard, en août 2009, lors mon Tour du Vallespir en 6 jours, la « Batterie Santa Engracia » est revenue sur le devant de ma scène pédestre. A l’époque et lors de la dernière étape entre Saint-Laurent-de-Cerdans et Amélie-les-Bains, j’étais passé à 5 minutes d’elle sans y aller, faisant ainsi l’impasse mais avec le projet avéré d’y revenir. Avec ce récit, c’est donc chose faite mais pas sans peine car la déclivité sur un terrain pas toujours facile est loin d’être évidente : 617 mètres de dénivelé jusqu’à la batterie depuis la ligne de départ à Arles-sur-Tech situé à 270 mètres d’altitude. Il est 10 h quand je laisse ma voiture sur la place Joseph Monin à proximité de la Salle des Fêtes. Je demande mon chemin à un passant et ce dernier m’indique que le célèbre G.R.10 que je dois emprunter passe derrière la salle. Je trouve aisément le panonceau et le fameux balisage blanc et rouge. Parmi diverses directions, je prends note de celle qui m’intéresse au premier chef : « Coll de Paracolls – 2 h – G.R.10 », même si je sais que pour atteindre la batterie, il me faudra tourner au préalable et juste avant ce col. Je me dirige vers une vieille usine amplement délabrée dont l’exploitation consistait à traiter le minerai de fer en provenance des mines de Batère. Je tourne à droite puis longe les murs de l’usine aux vestiges rouillés par le temps puis enjambe le pont sur le Tech. Oiseaux au bord de la rivière, fleurs printanières mais surtout quelques vieilles cartes postales contant la vie passée d’Arles-sur-Tech freinent mes premières ardeurs. Cette vie passée, c’est celle de l’exploitation du fer dont j’ai toujours essayé d’approfondir mes connaissances de l’Histoire à travers des bouquins mais en les complétant au mieux par des balades pédestres : Mines de Batère et de la Pinouse, Rapalum, les Manerots, FormenteraEscaro autant de sites « vallespiriens » et « conflentistes » que j’ai pris plaisir à découvrir. Au bout du pont, un deuxième panonceau accroché à un transformateur électrique se présente et sa comparaison avec le premier me laisse assez songeur : « Coll de Paracolls – 3,6 km ». Deux heures pour effectuer moins de 4 kilomètres, je me dis que ça promets ! Décidément, le Vallespir ne changera jamais et restera toujours « la vallée âpre » si chère aux Romains auxquels elle doit son nom : « Vallis asperi ».  Ce rapide calcul est assez contradictoire avec l’analyse du parcours jusqu’à la batterie que j’ai trouvé sur un site Internet dont le jeune webmestre annonce la boucle que je dois effectuer comme étant « une randonnée facile ». Excusable parce que jeune, l’insoucieux ignore que ce qui est facile à 30 ans ne l’est pas nécessairement à 67, d’où mon refus quasi systématique de décrire mes randonnées avec ce genre de références. La facilité ou la difficulté et le temps de marche d’une randonnée sont des critères bien trop personnels. En tous cas, ils le sont pour moi et j’avoue n’avoir jamais été trop attentif au « fameux » indice IBP mis en place par la fédération. Le mieux est de bien se connaître et de connaître son état de forme du moment. Est-ce mon désir de tenir le temps imparti par ce panonceau mais voilà que j’ai déjà perdu le balisage du G.R.10 ? Un demi-tour presque immédiat et un retour vers la dernière empreinte blanche et rouge me remettent dans le droit chemin, qui n’est pas droit du tout. En effet, il est surtout peu logique car il tourne à gauche en franchissant la clôture que j’avais suivie par erreur, puis très curieusement, il traverse un muret en pierres sèches, désormais effondré. Derrière le mur, l’itinéraire est bien là. Il continue et coupe très vite une large piste allant vers Can Valent. La suite bien balisée devient plus évidente à suivre même si le terrain, lui, ne l’est pas vraiment. Une sente très ravinée, parfois caillouteuse, parfois gréseuse, parfois carrément rocheuse s’élève rudement et souvent en zigzaguant au milieu des bruyères arborescentes et des genêts fleuris. La végétation plus haute se résume à quelques rares chênes. Ces derniers sont verts, rouvres ou plus rarement lièges mais au fur et à mesure de l’élévation, ils se mélangent à d’autres essences et notamment aux grands hêtres puis aux châtaigniers qui finalement vont prendre le quasi monopole au plus haut de la forêt. Dallé par endroits, je foule de mes gros godillots le sentier muletier du temps jadis. C'était la route la plus courte entre la France et l’Espagne. C’était le temps où le mulet et l’âne étaient les meilleurs amis du paysan, du contrebandier, du soldat et du vagabond. Dans cet entrelacs minéral et végétal peu aisé, les mains viennent quelquefois en aide aux pieds pour franchir un palier. Un palier, c’est l’occasion pour moi de souffler un peu et de profiter pleinement des jolies vues s’ouvrant sur Arles et son ample vallée du Tech. Au dessus de la cité et sur l’autre versant, le Massif du Canigou est encore bien enneigé, mais comme il est bien trop chapeauté d’un capuchon de nuages blancs, il a à l’apparence d’une montagne plutôt modeste qu’un géant aurait dégauchie. Aujourd’hui, et malgré un saupoudrage de neige, les plus hauts pics perdent leur aspect glorieux et somptueux. Parfois, ces paliers sont enrichis d’un poteau couronné d’une pancarte faisant référence au « kilomètre vertical », course pédestre bien connue consistant à démarrer d’Arles-sur-Tech située à 284 m d’altitude puis à atteindre au plus vite le Pilo de Belmaig ou Pilon de Belmatx perché 1.000 mètres plus haut. Je ne cours pas, bien au contraire, et pourtant, après mes récents problèmes de santé, les paliers 484 et 684 mètres sont pour moi autant de petites satisfactions à les avoir déjà atteints dans un délai plus que correct. Je ne retiens vraiment de cette difficile ascension qu’un nom inscrit sur mon bout de carte I.G.N : la Font de les Amors. Inutile de traduire mais où est-elle au juste cette source prodigieuse ? Un filet d’eau de quelques centimètres me fait imaginer que « les Amors » sont là. Il faut dire que tout en montant, les panoramas se raréfient, et dans ces sous-bois de châtaigniers, or mis de bien trop rares fenêtres qui s’entrouvrent sur des bouts de Vallespir, rien n’incite à une flânerie exagérée. Les plantes fleuries se raréfient et je n'ai photographié qu’un seul rouge-gorge depuis les oiseaux aperçus au pont sur le Tech. Sans trop d’illusions et à chaque pin rencontré ou presque, je ralentis un peu mon allure, car j’ai toujours espoir de découvrir l’Isabelle, ce fameux papillon protégé si rarissime à voir mais paraît-il présent dans le Haut-Vallespir. Ici, les pins sont rares et l’Isabelle encore plus. Je n’en vois point bien évidemment. Quand j’atteins l’intersection filant vers la Batterie Santa Engracia, c’est avec une satisfaction certaine que j’observe ma montre indiquant 12h15. Je sais que l’objectif est désormais à moins de 2 kilomètres et la déclivité bien moindre que celle déjà accomplie. Je décide d’aller manger à la batterie. Le sentier plus doux et enfin bien plus praticable devient plus agréable à cheminer. Seuls un ruisseau rafraîchissant, deux couples d’anglais un peu paumés et les ruines du Mas Nou d’Eixena ralentissent mes pas soudain redevenus plus alertes. Il est 13 heures tapantes quand je retrouve le panonceau déjà vu lors de Mon Tour du Vallespir : « Grande Batterie – 0h05 – P.R.1 ». Cette fois, pas question d’éviter cette « Grande Batterie » même si je sais qu’elle n’est ni de cuisine ni celle d’un orchestre et seulement militaire. En tous cas, une chose est sûre, cette batterie rechargera mes accus. Effectivement, la Batterie de Santa Engracia est déjà là avec sa muraille colossale et ce n’est ni un orchestre que j’entends, ni des prières dédiées à Sainte-Engrâce mais bien les fous rires joyeux mais très sonores d’un groupe de randonneurs. Ils occupent par petits groupes la totalité de la plate-forme militaire mais ils ont tous l’air de bien se marrer chacun dans leur coin. Une dame vient vers moi et me demande si je suis seul puis elle passe son chemin quand je lui réponds. « Oui, je suis seul ! »  Finalement je comprends que ma présence aussi soudaine qu’imprévue a failli contrarier chez elle une envie très pressante. Je laisse la dame à son besoin naturel et le reste du groupe sur la vaste et vieille esplanade stratégique et monte au sommet d’un rocher faisant office de pinacle. Je ne regrette pas ces quelques mètres supplémentaires d’élévation, car d’ici, le cul assis sur une borne géodésique et la girouette franco-catalane tournoyant au dessus de ma tête, il n’y a pas de meilleur poste d’observation sur une immense partie du Vallespir et bien plus loin encore vers la Plaine du Roussillon et la Méditerranée. Vers le nord, le ciel s’est quelque peu éclairci et le sieur Canigou, bien qu’encore coiffé d’un gros bonnet cotonneux, décide enfin de dévoiler ses plus beaux atours. Vers le sud et sous un firmament bleu et limpide, les rocs Saint-Sauveur et de France (Frausa) me rappellent à leurs agréables souvenirs d’une récente balade. Vers les autres points cardinaux, dont une rose des vents me donne l’orientation, se sont là aussi des paysages magiques de tous côtés. C’est avec un émerveillement et un étonnement sans cesse renouvelés, que ces paysages défilent à nouveau devant mes yeux, comme au temps de mon périple tout autour du Vallespir. Le récit de ce périple au sein de cette magnifique région et au dessus de cette belle vallée du Tech, je l’avais intitulé « Sur les hauteurs d’une vallée âpre ». Âpre le périple l’avait été en 2009, âpre, la balade l’est encore aujourd’hui, car si j’ai attendu la fin du pique-nique et que le groupe de randonneurs ait quitté les lieux pour partir visiter tous les recoins de la batterie, j’en suis à peine au tout début de ma découverte qu’une mauvaise chute m’envoie choir dans les branches d’un ciste desséché. Le ciste est déjà mort depuis longtemps mais ses branches sont encore suffisamment dures et ligneuses pour me déchirer l’avant-bras gauche sur 5 ou 6 cm. Après ma « gamelle » du Tour de la Pelade dont j’étais sorti avec une égratignure superficielle de la main droite, cette fois-ci, il s’agit d'une coupure bien plus profonde qu’il me faut soigner. Rien n’y fait et malgré une trousse à pharmacie bien achalandée en pansements de toutes sortes, mon sang s’écoule de la plaie comme d’un robinet grand ouvert. Le saignement se poursuivra pendant presque 4 heures sans que rien ne l’arrête ou presque. Le plus efficace restera le mouchoir en papier directement collé sur la plaie sanguinolente mais quand le papier est gorgé de sang, il refuse de coller et tombe lui aussi. Je vais renouveler l’opération pratiquement jusqu’à l’arrivée où enfin, le sang coagulé fera finalement office de cautérisation naturelle. Dans l’immédiat, et malgré cet incident qui me fait perdre pas mal de temps, je décide de poursuivre mes découvertes, d’abord celle de la « Grande Batterie » puis la boucle initialement prévue. Pour le néophyte que je suis, la batterie se résume à de hautes et larges fortifications composées d’impressionnantes murailles mais bien évidemment un tacticien militaire y trouvera bien d’autres intérêts architecturaux et surtout stratégiques. Elles sont construites en pierres sèches et sans aucun mortier. Les seuls mortiers que la batterie ait connus ont été ceux que les artilleurs ont été contraints de monter jusqu’ici. On imagine bien évidemment, l’immense besogne que cette construction a du nécessiter et les efforts entrepris par les soldats pour y amener des pièces d’artillerie permettant de tirer plus de 2 km en contrebas. Paradoxe de l’Histoire, ici aucun coup de canon n’aurait jamais résonné. Avant de venir ici et comme je le fais la plupart du temps, j’ai tenté de m’initier à l’Histoire de cette batterie en cherchant un maximum d’informations sur Internet. Autant l’avouer, je suis resté quelque peu sur ma faim et ce malgré de nombreuses informations sporadiques recueillies de-ci de-là. J’ai néanmoins appris qu’elle aurait été construite en 1670 selon les directives de Vauban qui était venu visité le Roussillon l’année précédente. A-t-elle été construite en même temps que la citadelle de Fort-les-Bains (Fort d’Amélie) ou du moins dans sa continuité, on peut le supposer. Cette dernière a été construite en 1670 sur le site de vieux édifices médiévaux et sur les conseils de Noël Bouton, comte de Chamilly et intendant du Languedoc qui voulait réprimer la contrebande du sel et mettre fin à la révolte des Angelets (1661-1675). Les Angelets étaient ces vallespiriens initiés par le célèbre Josep de la Trinxeria qui étaient entrés en révolte contre Louis XIV suite à l’instauration de la gabelle après le Traité des Pyrénées de 1659, traité qui avait vu le Vallespir espagnol et catalan annexé par la France. Cette annexion s’est faite dans la douleur et quand on sait que les travaux de construction du fort étaient financés avec les impôts payés par les vallespiriens et qu’en plus certains « gabelous » y résidaient, on comprend mieux les animosités qu’il y avait dans les deux camps et l’envie d’en découdre. Dès l’automne 1670, Jacques de Borelly de Saint Hilaire, ingénieur militaire de Vauban, dessine de nouveaux plans et poursuit le chantier déjà entrepris. Le fort terminé, Saint Hilaire et les différents commandants du fort se plaignent d’un manque criant d’infrastructures et demandent des moyens financiers supplémentaires à Louvois. Des modestes aménagements sont apportés mais Louis XIV, Louvois et Vauban sont réticents à trop investir car ils jugent que le lieu est bien trop petit et de ce fait, n’est pas réellement stratégique. En 1674, les Espagnols assiègent Fort-les-Bains alors que de nombreux travaux sont en cours. Le siège est rapidement levé mais malgré cette première alerte, la configuration du fort et ses moyens de défense évoluent assez peu. Il faut attendre 1679 et la deuxième visite de Vauban dans le Roussillon pour qu’il soit jugé utile à la sécurité du Roussillon et des Pyrénées sans qu’il soit reconnu pour autant comme une pièce maîtresse de la « ceinture de fer ». De grosses améliorations sont néanmoins apportées. Comme vous le voyez, autour de l’Histoire de Fort-les-Bains, cette « Grande Batterie » est peu ou jamais évoquée et l’on sait seulement qu’elle était un moyen supplémentaire de le défendre d’abord contre les Angelets puis contre les Espagnols. La frontière étant très proche et le relief géographique très alambiqué, les premiers ingénieurs avaient sans doute compris que le fort serait vulnérable à partir des versants montagneux qui l’entourent et le dominent. Ils ne s’étaient pas trompés puisqu’en 1793, et après un long siège de plusieurs semaines, le fort commandé par le gouverneur Michel Jean Paul Daudiès tombe aux mains des soldats espagnols du général Antonio Ricardos. Le fort et ses alentours dont les « batteries », petite et grande, continueront à être occupés par des militaires pendant encore un siècle. Voilà ce que l’on peut dire de l’Histoire de cette « Grande Batterie ». Il existe également une « Petite Batterie » mais j’ignore où elle se trouve et la carte I.G.N ne la mentionne pas. Après cette découverte non accidentelle mais accidentée de la « Grande Batterie », je continue l’itinéraire vers la Chapelle Santa Engracia. Cet itinéraire, on l'appelle plus communément le chemin du 25eme léger, en référence à un vaillant régiment d'artillerie créé en 1796 dont les faits d'armes glorieux un peu partout sont nombreux, y compris ici en Roussillon. Je connais déjà cette « route stratégique » pour aller à la chapelle et je sais que les vues plongeantes sur Arles y sont exceptionnelles. Depuis ce chemin, un rapproché photographique me permet même d’y voir ma voiture distante de plus de 2 km. Le désir de refaire ce chemin et l’envie de retourner à la chapelle sont donc intacts tant j’avais trouvé ses extérieurs et ses alentours bien agréables et reposants. La chapelle est encore paisible et par bonheur, quand je pousse sa jolie porte, celle-ci s’ouvre assez « divinement » je l’avoue. Je ne m’y attendais pas, tant de nombreuses chapelles du département demeurent hermétiquement closes aux randonneurs. L’intérieur est sobre mais beau, bien à l’image de tout ce que l’on peut voir ici : table d’orientation, paysages, décors, jardins, fontaine, lieux de repos aménagés avec des bancs, nombreuses pancartes explicatives de son histoire, croix panoramique, j’y passe plus d’une heure, en grande partie avec l’agréable compagnie d’un gentil couple de touristes. Ils profitent de mon culot à avoir pousser la porte de la chapelle et tout comme moi, eux aussi vont laisser un petit laïus sur le livre d’or. Nous sortons ensemble de l’église et dès lors qu’ils aperçoivent qu’un saignement s’écoule de mon bras, ils veulent coûte que coûte l’arrêter. Malgré leur trousse à pharmacie encore bien plus garnie que la mienne, ils n’y parviennent qu’à moitié et je quitte Santa Engracia direction l’arrivée avec un gros paquet de mouchoirs en papier imbibés d’une coagulation rougeâtre bien plus impressionnante que douloureuse. Les mouchoirs ne tombent plus enrobés qu’ils sont d’un gros morceau de sparadrap mais un petit filet de sang continue de se manifester. Est-ce la perte de sang alliée à la longueur de la balade, mais la fatigue commence à se faire sentir. Je languis l’arrivée et seules deux chèvres perdues sur des rochers abrupts au dessus d’un profond ravin me stoppent dans cette longue descente vers Arles-sur-Tech. Je les observe longuement. Perchées sur un étroit piton rocheux, elles semblent chercher une issue mais sans trop de succès. Elles montent puis redescendent, partent à gauche puis à droite comme un peu perdues dans ce décor minéral et végétal apparemment fermé, mais vraisemblablement ouvert car comment auraient-elles pu arriver sur ce parapet rocheux ? Je ne peux malheureusement rien faire pour elles et je repars avec dans la tête, l’histoire de la chèvre de Monsieur Seguin qui voulait courir la montagne et qui finalement avait été dévorée par un loup. Ici, elles courent la montagne mais peu de chance qu’un loup les dévore. Peut être un vautour fauve et encore ? Je me raisonne. Elles s’en sortiront en trouvant l'exutoire qui leur a permis de prendre pied sur cette falaise escarpée. Une demi-heure plus tard, je retrouve l’asphalte quitté depuis ce matin 10h. Il est 16h30. « Mas Draguines » m’indique un panneau signalétique devant un petit groupe d’habitations. Je ne quitte plus cette route de la Batllie qui descend vers des rangées d’immeubles et un centre sportif, si j’en crois mon bout de carte I.G.N. Le Tech s’écoule devant moi et j’y file direct en coupant au milieu des immeubles et des pelouses. Ce raccourci m’amène très vite sur un large chemin herbeux ressemblant à la fois à un parcours sportif et à un arboretum. En tous cas, trois ou quatre personnes courent au milieu de ludiques panneaux donnant les noms des arbres que l’on rencontre ici. Je remonte la rive droite du Tech et si les arbres m’intéressent, les oiseaux fréquentant le bord de la rivière ont de loin ma préférence. Je prends encore le temps d’en photographier quelques-uns.  Après cet intermède, la boucle est bientôt terminée. J’aperçois l’usine désaffectée sur l’autre berge, le pont et le transformateur électrique devant moi. Je finis les restes de mon casse-croûte au bord du fleuve, dans la quiétude d’une petite grève et sous le regard un peu inquiet d’un couple de colverts. Ils sommeillent côte à côte et je fais en sorte ne pas les déranger. Pour eux, comme pour moi, le printemps est là et c’est la saison des passions et des sentiments. Il leur faut un peu de tranquillité pour s’aimer. Ma passion de la randonnée, je l’ai bien assouvie aujourd’hui et la tranquillité, j’en ai eu ma dose pareillement, mais n’empêche qu’il faut que je rentre à la maison. Je vis en couple moi aussi. Je traverse le pont, la balade tire à sa fin. Elle a été longue de 12,9 km incluant la visite de toutes les curiosités. Le dénivelé est de 623 m entre le point le plus bas à 264 m sur la rive du Tech et le plus haut à 887 m à la batterie. Les montées cumulées s’élèvent à 1.205 m. Carte IGN 2449OT Céret – Amélie-les-Bains-Palalda – Vallée du Tech Top 25. 

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Le Hameau oublié de Fontanills par Can Rigall (880 m) depuis Arles-sur-Tech

Publié le par gibirando


Ce diaporama est agrémenté de 2 standards du jazz joués par Miles Davis avec notamment John Coltrane et Julian Cannonball Adderley. Ils ont pour titre "Milestones (Miles)" et "Blue In Green" composée par Bill Evans.

  

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Bien qu’Arles-sur-Tech (275 m) soit une ville où les légendes et les récits authentiques se confondent parfois, je ne vais pas vous raconter de balivernes sur cette boucle que je décris aujourd’hui. En effet, en ce jour très chaud du mois d’août, mon idée première en partant randonner était de grimper d’abord vers la Salt de la Maria Valenta, cette illustre chute d’eau du nom d'une jeune fille qui pendant la Guerre du Roussillon et alors qu’elle était poursuivie par les soldats préféra se jeter dans le vide du haut du la cascade plutôt que d’être capturée. Cette belle cataracte de plus de 20 mètres de hauteur, personnellement je l’avais découverte pour la première fois dans le beau roman de Marie Vallespir intitulé « Domenica ou la vallée âpre ». Cette fiction a pour décor le Vallespir et plus particulièrement Arles-sur-Tech et ses merveilles dans laquelle la cascade sert de toile de fonds à l’intrigue. Ma deuxième idée en allant au pied de la cascade était bien sûr de me baigner dans le bassin de ce lieu parait-il paradisiaque avant de poursuivre ma longue randonnée vers le hameau de Fontanills. Mais est-ce une prémonition, voilà qu’avant de démarrer, je m’arrête à l’Office du Tourisme d’Arles pour obtenir quelques renseignements sur le parcours que j’envisage d’effectuer. Et là, qu’elle n’est pas ma surprise quand la conseillère m’indique que la Salt de la Maria Valenta se situe sur un domaine privé dont le propriétaire interdit l’accès aux randonneurs. Elle me recommande de suivre le chemin balisé en jaune et surtout de pas en sortir. Je ressors un peu déçu de l’Office du Tourisme mais comme je suis respectueux de la vie privée des autres, j’accepte avec regrets cette idée d’être obligé de changer quelque peu mon itinéraire initial. Je déplie ma carte IGN et modifie mon parcours pour celui présenté ici qui ne diffère guère de celui envisagé hormis qu’il suit un itinéraire inversé et évite le bassin de la Maria Valenta. J’emprunte comme initialement prévu la rue du Barri d’Amont qui m’amène vers le passage à gué sur le Tech où se trouve le point de départ à la Fontaine du Buis. A cette aire de pique-nique, je tourne à gauche, je traverse le parc en passant devant le restaurant, la fontaine et après une chicane, je monte à droite dans la sombre forêt au milieu d’un champ de Balsamines de Balfour. De cette magnifique futaie composée pour l’essentiel de très hauts châtaigniers, je vais en sortir exclusivement à l’approche du lieu-dit Can Rigall. Dans cette longue montée, il n’y a pas de panoramas impressionnants pour vous couper le souffle mais seulement un sentier en sous-bois à la raide déclivité. Et comme disait ma belle-sœur quant elle randonnait avec moi : « j’étouffe dans ces sous-bois ! ». En vérité et comme ici, ce n’était pas les sous-bois qui l’étouffaient à ma belle-sœur, mais bien le « bon » dénivelé, conjugué sans doute pour elle à un manque de condition physique évident. Peu de temps après avoir coupé une piste, des panonceaux se présentent, je délaisse celui qui part directement vers l’oratoire et je poursuis vers Can Rigall en suivant les marques de peinture jaunes bien présentes sur les arbres. Je coupe le Correc de la Coma, petit ru bourbeux où poussent une multitude de champignons tous très différents. La végétation se fait plus basse et je finis par déboucher en plein soleil sur un large chemin herbeux qui, sur ma droite, aboutit à un portail entouré de clôtures. Mon GPS m’indique que je ne suis plus très loin du « waypoint » que j’ai enregistré comme étant Can Rigall. Je poursuis tout droit à travers quelques bruyères roses et arrive sur un plateau qui domine admirablement ce magnifique domaine privé servant parait-il de gîte. Ici, grâce aux splendides panoramas sur la vallée du Tech, sur le Massif du Canigou, malheureusement enfoui sous les nuages et sur une grande partie du Vallespir, je ne regrette plus la traversée de ce sous-bois « étouffant » et les efforts accomplis. Et comme il est l’heure de déjeuner, c’est devant cet extraordinaire et paisible spectacle que je reprends des forces. Requinqué, je repars tout droit et un peu plus haut, je tombe sur de nouveaux panonceaux indiquant un carrefour de plusieurs chemins. Une nouvelle fois, je poursuis tout droit celui en jaune indiquant le « Belmaig », fameux pilon, fierté des Arlésiens connu pour son trail du kilomètre vertical. Quelques mètres plus haut d’autres panonceaux indicatifs se présentent encore et ici, il est temps de tourner à droite et de suivre celui indiquant clairement l’oratoire et Arles-sur-Tech. Le sentier descend d’abord dans des broussailles composées le plus souvent de bruyères, de genêts, de genévriers et de buplèvres puis il zigzague dans les fougères et les sapinettes avant de longer la clôture du domaine pour atterrir sur la piste devant le portail de la propriété. J’ignore la piste qui se poursuit à droite et juste en face le portail de Can Rigall, je prends à gauche de la piste un sentier peu évident mais néanmoins toujours balisé en jaune qui descend d’abord dans le bois pour déboucher aussitôt dans une jolie clairière fleurie au bout de laquelle trône une ruine envahie par les lierres. Fontanills qu’il s’appelle ce vieil hameau en ruines et oublié de tous au milieu d’une végétation exubérante. Selon l’historien Jean Tosti, les premiers écrits sur Fontanills datent de 993. Face au Canigou, le hameau domine superbement plusieurs ravines. Ici les ronces, les figuiers et les lierres se sont appropriés le village mais quelques bâtiments semblent encore bien debout et leurs murs très épais tendent à prouver la solidité des constructions d’autrefois. Mais il faut être néanmoins prudent et ne pas s’aventurer dans ces ruines car si les murs en pierres ont résisté à l’usure du temps, il n’en ai pas de même des boiseries, poutres et autres solives des planchers et des charpentes que l’humidité et la pourriture ont rongées et vermoulues inéluctablement. En quittant Fontanills qui signifie « petites fontaines », vous remarquerez sur la gauche un étroit canal en ciment, il fait la jonction entre le hameau et un minuscule mais ingénieux barrage qui permettait de détourner le lit du petit ruisseau de Can Guillat. Ce canal alimentait sans doute une ou plusieurs fontaines du village et irriguait les cultures et les jardins. L’étroit sentier toujours balisé en jaune se poursuit en zigzaguant dans la forêt puis au milieu de hauts genêts où il semble continuer à monter vers les contreforts de la Serra de Montner. Soudain, à un replat, il s’élargit et dévale par la droite en direction du fond de la ravine du Correc de la Senyoral. J’enjambe le ruisseau que je vais longer par sa rive gauche. La descente sur un terreau très humide planté de grandes fougères est parfois glissante et mérite une grande attention. Quelques câbles d’acier, vestiges de l’ancienne exploitation minière de giobertite jonchent le sol du sentier et se dressent parfois dans le ciel jusqu’à disparaître dans la canopée des immenses châtaigniers. Parsemé d’énormes coulemelles, le chemin finit par atteindre un ancien puits à glace et la cascade de la Maria Valenta qu’on ne peut ici entrevoir qu’à travers quelques branchages. Je monte vers la grotte où on était retrouver les reliques des saints d’Arles Abdon et Sennen puis vers l’oratoire qui leur a été dédié. Après ces « divines » mais difficiles découvertes, notamment en ce qui concerne la grotte que l’on ne peut atteindre que grâce à des cordes judicieusement installées, le sentier redescend vers Arles en direction de la chapelle de Santa Creu. Je rejoins une piste terreuse qui devient bitume à l’approche de la cité et peu après la chapelle interdite au public. Le chemin longe le Tech sur sa rive droite, je passe devant le stade et je retrouve l’aire de pique-nique de la Fontaine du Buis, le passage à gué sur le Tech et la ville historique. En principe, ici se termine cette longue boucle d’une quinzaine de kilomètres environ sauf si vous ne connaissez pas Arles-sur-Tech. En effet, quitter cette belle cité historique sans avoir au préalable visité (même en payant 3,50 €) son admirable abbaye avec son cloître harmonieux et sa très contreversée Sainte-Tombe est un véritable sacrilège. Je vous l’ai dit en préambule, à Arles-sur-Tech, il y a beaucoup d’histoires très intéressantes qui souvent s’entremêlent. Il y en a des vraies, des fausses, celles dont on ne sait pas si elles sont vraies ou fausses, des séculaires et des plus récentes, des légendaires et des chimériques, des féeriques et des imaginaires, des catholiques et des païennes, des merveilleuses et d’autres très effroyables, mais quitter ainsi le quotidien pour remonter le temps l’espace d’une journée sans trop se poser de questions, n’est ce pas la plus belle des manières pour découvrir ce petit coin du Vallespir ? Je ne regrette qu’une chose : ne pas avoir pu me baigner dans la claire fontaine de la belle Maria Valenta. Je vous conseille vivement la lecture du site Internet dédié à Arles-sur-Tech de l’historien Jean Tosti car outre l’histoire de la ville il dispose d’autres liens très instructifs : http://www.jtosti.com/villages/arles.htm. Carte IGN 2449 OT Ceret-Amélie-les-Bains-Palalda Top 25.

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Le Val de Bonabosc (799 m)

Publié le par gibirando


Ce diaporama est agrémenté de la musique d'Ennio et Andrea Morricone "Cinema paradiso", tirée du film au même titre et interprétée ici par le trompettiste américain Chris Botti et le violoncelliste américain Yo-Yo Ma, extrait de l'album "Chris Botti in Boston"


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J’avais entendu parlé de cette randonnée sous la dénomination « Ravin de Bonabosc » mais je n’y étais jamais allé.  Je viens de la retrouver sous l’intitulé « Val de Bonabosc » dans le topo-guide que l’on vient de m’offrir pour Noël : «  Les Pyrénées-Orientales…. à pied » édité par la FFRandonnée. Dans ce petit livret, on apprend qu’à Bonabosc, la châtaigneraie a été plantée au 19eme siècle pour fabriquer des futailles (tonneaux) à une époque où la viticulture connaissait un essor économique très important. Quant aux chemins et sentiers de ce vallon, ils ont été crées par les paysans et les bergers pour se rendre plus facilement d’un mas à l’autre, d’une bergerie à une autre. Quand j’ai analysé cette randonnée sur ma carte IGN puis sur CartoExploreur, j’ai émis quelques craintes car aucun tracé de cette boucle n’y figurait. J’arrivais à suivre parfaitement les pistes forestières mais dans le haut du ravin, dans les parties rocailleuses, le tracé se perdait dans des sentiers incertains et parfois absents.  C’est donc avec un peu d’appréhension que j’ai enregistré dans mon GPS, un tracé hasardeux et que je croyais très aléatoire. Mais pour ceux qui ne connaissent pas cette randonnée et qui voudraient l’accomplir, sachez qu’il n’y a aucune raison de s’alarmer car ce P.R. est parfaitement balisé en jaune d’un bout à l’autre et les panonceaux sont nombreux. Quand nous sommes partis pour cette balade vallespirienne, tout le Roussillon était recouvert d’une épaisse chape nuageuse grisâtre. Mais la veille, comme la météo avait annoncé un temps plutôt clément et ensoleillé avec une tramontane à 90 kilomètres heure,  nous n’avons pas trop réfléchi. Quand nous sommes arrivés à l’entrée d’Arles-sur-Tech et que nous avons emprunté la petite route qui serpente le long de la rivière de Bonabosc, direction le Moulinot, le ciel était toujours aussi plombé. Puis, quelques minutes plus tard, quand, nous avons laissé notre voiture sur le parking de Can Gall, nous étions encore plus inquiets car le ciel paraissait menaçant,  il n’y avait pas un souffle de vent, pas le moindre frémissement, pas le moindre brin d’air ne faisait trembler le feuillage des arbres ;  alors, nous nous interrogions : comment pourra-t-il faire soleil si la tramontane n’entre pas dans la partie et ne chasse pas cette immense édredon nébuleux, gris et immobile. Mais, une fois encore, nous n’avons pas gambergé longtemps et bâtons en mains et sacs à doc harnachés, nous sommes partis pour cette jolie balade. Nous n’avions pas encore fait 100 mètres sur le bitume en direction de Moulinot qu’une légère brise se leva. Fraîche, elle venait du nord et descendait du haut du ravin, du côté du col de Formentere. Puis, au fur et à mesure que l’on s’élevait sur la route forestière du Dolmen,  au milieu des châtaigniers et des chênes verts, cette brise se transforma en un vent soufflant en rafales.  La tramontane était de sortie et c’était sans doute la promesse d’un grand soleil et d’un beau ciel bleu !  Pour mes photos, jusqu’à présent ternes et sans relief car sans luminosité, j’avais l’espoir quelles s’améliorent au fil de la marche.  Le Pilon de Belmatx légèrement saupoudré de neige occupait l’essentiel de  l’horizon. Nous sommes passés devant une curieuse fontaine datant de 1936 et au nom insolite : « La  Fontaine des Chômeurs ».  Malgré les bourrasques que nous prenions le plus souvent en pleine face, rien ne bougeait. Le ciel semblait immuable et nous avions l’impression d’avancer, sur cette piste de la belle forêt domaniale du Bas-Vallespir, dans un monde sans soleil. Nous avons quitté la route forestière pour un large chemin herbeux,  avons enjambé le petit ruisseau de Bonabosc, avons suivi le panonceau Mas Pujol pour grimper vers l’étroite corniche des Echades sur laquelle nous avons avancé avec une extrême prudence, tant les rafales avaient redoubler de violence. Je suivais le texte du topo-guide et j’étais en quête des cinq grands cèdres qui y sont mentionnés quand arrivant sur le plateau en question, je m’aperçus qu’ils n’étaient plus là : sur le sol subsistaient seulement cinq grandes taches blanchâtres ; c’était celles des cinq souches des cinq grands cèdres que l’on avait scié et abattu. Pourquoi ? Effets de la tempête ou autre cause ? Mystère ! Au point culminant (799 m), nous nous sommes arrêtés pour déjeuner dans un bosquet de petits pins, bien à l’abri du vent et le premier coin de ciel bleu apparut à cet instant. En même temps, l’éternel Canigou montra le bout de son pic enneigé. Pendant le pique-nique, nous avons attendu en vain un chaud soleil mais quand nous sommes repartis quelques tièdes rayons transpercèrent enfin la couverture nuageuse. Au fur et mesure que nous avancions sur l’autre versant du ravin, plutôt en descente d’ailleurs, ce qui semble plutôt contradictoire, le Massif du Canigou se dévoilait davantage ; magnifiquement blanc dans un ciel de plus en plus pur, nous nous retournions sans cesse pour l’observer. Après les pâles photos que j’avais prises jusqu’à présent, l’objectif de mon numérique se tournait le plus souvent vers le pic du Canigou comme attiré lui aussi par tant de beauté. Peu après un cortal en ruines, un petit sanglier fila sous notre nez. Le chemin du retour fût agréable car il alterna bois de chênes verts et de liège, petites pinèdes, belvédères sur le Bonabosc,  miradors sur la Souque, le Belmatx et le Canigou, petits rus, plats herbeux donnant sur les panoramas merveilleux du Vallespir et sente en balcons dominant une immense partie de la Vallée du Tech.  Nous sommes arrivés au Mas Roviro que nous avons contourné par le gauche pour retrouver une piste sableuse DFCI qui nous amena sans problème mais en zigzaguant à notre voiture à travers les chênes-lièges, les mimosas et les arbousiers déjà en boutons. La boucle d’une douzaine de kilomètres pour un dénivelé de 426 mètres se termina sous un soleil resplendissant et dans un ciel purgé de tout nuage. La météo avait finalement eu raison et nous aussi de faire cette belle petite randonnée. Au départ, l’itinéraire est donné pour 3h20 et nous l’avons accompli en 4 h10 arrêts inclus.  Carte IGN 2449 OT Céret-Amélie-les-Bains-Palalda-Vallée du Tech Top 25.

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