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Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

Publié le par gibirando

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.4eme étape : Jeudi 20 août 2009.

Prats-de-Mollo (753 m) - Notre-Dame de Coral (1.091m)

9 kms.

(La plupart des photos de ce Tour du Vallespir peuvent être agrandies en cliquant dessus. 2 fois, la photo occupe parfois le plein écran).

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

Cliquez sur la carte pour l'agrandir. 2 fois pour un plein écran.

"Un doux crépuscule d'avril descendait sur le Vallespir encore embrasé des rougeurs ardentes du couchant. C'était l'heure où le rose et l'orangé se disputent, en tons dégradés, les lisières du ciel et se fondent en cette teinte merveilleuse et indéfinissable qui incendie la crête des hautes montagnes". Extrait du roman " Domenica ou la vallée âpre ". Marie Vallespir.

 

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.SANS MIR, J'AI FAIT LE MINIMUM :

A l'hôtel-restaurant Ausseil, on soigne les clients. Hier soir, le patron a mis tout en œuvre pour que je puisse manger en terrasse. Il est allé chercher un petit guéridon où il m'installa comme un nabab. Seul le service pouvait être critiquable car il a été un peu long mais il faut dire que les tables étaient nombreuses et les clients aussi. Pourtant, en prenant le menu du jour fait d'une escalivade, d'un pavé de morue à la catalane et d'une crème catalane, je pensais pouvoir expédier ce souper typiquement catalan pour partir me coucher tôt. Il n'en a rien été, mais je n'ai pas eu à le regretter. Cette cuisine du terroir était excellente et en plus, tout seul dans mon coin, je me suis bien marré. Il y avait juste derrière moi un groupe de huit personnes, pour moitié catalanes et, pour l'autre moitié parisiennes et le contraste étonnant de ces deux accents antinomiques avait quelque chose de sympathiquement cocasse. Les gens d'ici parlaient ce sympathique français du terroir avec des mots mâchouillés aux intonations catalanes et chez les parigots, les hommes avaient cet accent argotique du titi parisien et les femmes, cet accent pointu à vous crever un œil. Dans le brouhaha général, je ne comprenais pas tout des conversations mais ces échanges et surtout ces sons, que tout opposait, étaient un régal pour mes oreilles et pour mon moral. Aussi, quand le groupe finit par quitter le restaurant, mon intérêt de rester à table disparut avec lui. Il est 23 heures et temps d'aller dormir. Mais du sommeil, il n'y en eut point cette nuit-là. Les orties que j'avais piétinées cet après-midi se rappelaient à mon bon souvenir et les inflammations avaient redoublées d'intensité et étaient devenues insoutenables. A aucun moment, je ne réussis à dormir, à peine somnoler parfois, car dans cette bataille du sommeil et du réveil que se livrait la lassitude et les brûlures, ces dernières gagnaient sans cesse. J'ai essayé une pommade anti-inflammatoire et une à l'arnica, mais sans succès et, seules les douches d'eaux chaudes, que je prenais régulièrement, arrivaient à calmer temporairement ces douleurs.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

En jaune, c'est l'hôtel Ausseil où j'ai été parfaitement reçu. Mais les piqûres d'orties m'ont empêché de dormir. A droite, le porche de la ville fortifiée

Cette nuit sans dormir a été un vrai calvaire, mais elle présenta l'avantage de me laisser un temps infini pour réfléchir. Mais de toutes ces réflexions, deux revenaient sans cesse et se résumaient ainsi :

1- Pourquoi hier m'étais-je obstiné si longtemps dans ce guêpier avant de faire demi-tour ?

2- Que faire aujourd'hui pour ne pas renouveler cette triste et périlleuse expérience, si elle vient à survenir ?

Je répondais à la première interrogation, en reconnaissant mon entêtement à vouloir coûte que coûte cheminer le Tour du Vallespir. Mais est-ce si important de passer par ce chemin ou bien par un autre ? Et le but n'est-il pas de découvrir le Vallespir et d'arriver à l'endroit désiré ? A la première question ma réponse fut " NON " et à la deuxième ce fut " OUI ". Mais au fond de moi, je savais qu'il y avait eu autre chose aussi, quelque chose d'inconscient, comme une espèce de fascination à vouloir me mesurer à des forces et à des éléments que la nature, elle-même, avait vaincus. Après coup, j'avais le sentiment que mon entêtement à vouloir avancer dans cette forêt massacrée avait été un peu comme aller à la rencontre d'un mystère que je me devais d'élucider.

Mais désormais, il fallait que je me penche sur l'essentiel. De la solution à la première réflexion découla la résolution de la seconde et je me mis à compulser immédiatement mes cartes. Car la solution se trouvait automatiquement là. Fallait-il que je continue l'itinéraire du Tour du Vallespir, alors que dans ce secteur de Prats-de-Mollo, nombres de chemins ravagés par la tempête Klaus étaient peut-être encore barrés et impraticables ? Pour atteindre Notre-Dame de Coral, objectif de cette quatrième étape, il y avait le GRP Tour du Vallespir avec 21 kilomètres à parcourir, une rude ascension à la Tour de Mir, que je connaissais bien, par le boisé Bassin du Canidell, puis la rectiligne et aplanie crête boisée du Pic des Miquelets (1.632 m) et pour terminer, la descente boisée du Col d'Ares (1.513 m) jusqu'à l'ermitage. Cet itinéraire qui était enregistré dans mon GPS avait un dénominateur commun : " Boisé ". Le mot qui enfante une grosse boule dans mon estomac que je n'arrive plus à expulser. Mais pour se rendre à Notre-Dame de Coral, il y avait aussi un P.R. (Promenades et randonnées) sur la carte, un itinéraire parfaitement dessiné et surligné en rouge. Je l'avais déjà remarqué en étudiant le Tour du Vallespir. Moins long de 10 à 11 kilomètres que le GRP, je l'avais jugé comme une alternative très intéressante en cas de gros pépins physiques. Or, les pépins physiques étaient là ! Alors que faire ? Ce chemin circulait lui aussi en forêt, mais il présentait l'avantage de couper et de longer de manière quasi parallèle la D.115 qui descend du poste frontière du Col d'Ares. Et je me disais que si des arbres étaient tombés, c'est bien dans ce secteur où se trouve la départementale qu'on avait du certainement les dégager en priorité.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

Prats-de-Mollo a un riche patrimoine historique et culturel. Ici une jolie cour de chapelle fleurie et ornée de fresques où l'on distingue les deux saintes. Mais pas le temps de m'attarder. Dommage !

A 5 heures du matin, quand j'éteins la lumière pour tenter de trouver une dernière fois un sommeil réparateur, j'ai pris quelques bonnes résolutions et pour ne pas en oublier, je les ai écrites dans mon petit calepin :

a) Me rendre demain matin à l'Office du Tourisme et demander des informations sur le GRP Tour du Vallespir qui passe par la Tour de Mir et sur le P.R., l'autre chemin qui va à Notre-Dame de Coral.

b) Si le GRP Tour du Vallespir est dans son intégralité praticable, je l'emprunterai.

c) Si je n'ai pas d'informations suffisamment précises et fiables, j'éviterai le GRP Tour du Vallespir au profit de l'autre chemin.

d) Si ce chemin est lui aussi impraticable, je prendrais la D.115 jusqu'au col de la Guilla puis la piste qui va à Can Moulins et enfin le sentier qui rejoint Notre-Dame de Coral.

e) Informer les responsables de l'Office du Tourisme quant à la galère que j'ai connu hier entre le Puig des Lloses et le Col du Miracle pour que d'autres randonneurs ne tombent pas dans le même piège.

f) Passer à la pharmacie pour acheter un calmant qui soulagera mes brûlures.

g) Penser à passer dans une épicerie car l'hôtel Ausseil ne prépare pas de panier pique-nique.

Dans ce combat de titans que se livrèrent toute la nuit le sommeil et l'éveil, ce dernier finit par jeter l'éponge vers 6 heures du matin et je m'endormis. Mais vers 7 heures, le bruit de quelques véhicules de livraison dans les ruelles avoisinantes arbitrèrent et mirent fin définitivement à cette bagarre dont je sortis comme le seul vaincu, terrassé et fourbu.

Depuis mon départ d'Amélie, c'est le premier jour où je suis réellement fatigué et courbaturé. Mon genou gauche est meurtri, me fait mal et la plaie pourtant peu profonde n'est pas jolie à voir car elle suppure abondamment. La douche chaude me réveille un peu mais n'a pas sur mon organisme cet effet habituel de stimulation. La fatigue est là et si je ne fais rien, elle ne s'arrangera pas au fil de la journée. Je mets sur mon genou une compresse de mercurochrome que je scotche avec un gros bout de sparadrap. Pour calmer les douleurs et les inflammations, je prends dans ma pharmacie deux Propofan et un Cycladol que j'avalerai avec le petit déjeuner.

La terrasse de l'hôtel Ausseil est quasi déserte et hormis un couple de touristes et la charmante serveuse qui vient me servir, il n'y a personne. Je prends seul ce copieux petit déjeuner sous l'œil prévenant et souriant de l'agréable serveuse. Cette dernière m'indique où se trouvent la pharmacie, l'Office du Tourisme et une superette. Par bonheur, tous ces commerces sont situés sur la place du Foirail, mais par contre, elle ne sait pas me dire quels sont les horaires d'ouverture. Les brûlures aux jambes étant toujours virulentes, il m'importe de me soigner dans un premier temps. Par les ruelles désertes, je pars aussitôt en direction de la Place du Foirail. Mais il n'est pas encore 8 heures et tout est fermé sauf la superette qui est ouverte, mais son unique employée est occupée à recevoir un camion de livraison. Au moment où je m'apprête à entrer, la commerçante d'un air ironique et caustique me dit en ricanant : Nous ouvrons à neuf heures ! Je repars vers les ruelles de la ville fortifiée où sans problème, je peux, grâce à une épicerie et à une boulangerie ouvertes, constituer un panier repas pour midi. Je reprends le chemin de l'hôtel, paye ma note par chèque car l'agréable serveuse m'assure que la carte bleue validée à la réservation ne sera pas encaissée et je remonte dans ma chambre. Mon sac à dos est prêt et il ne me reste plus qu'à ranger le pique-nique du midi et partir. Je sors de l'hôtel en remerciant la patronne de l'excellent accueil que j'ai eu et me dirige une nouvelle fois vers la place du Foirail. L'officine est ouverte et la pharmacienne me conseille un gel apaisant " Urticium " et ajoute un petit tube de granules homéopathiques " Urtica Urens ". Assis sur une murette, je badigeonne mes bras et mes jambes de ce gel froid et avale trois granules. Je suis agréablement surpris car les douleurs semblent s'atténuer presque immédiatement.

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Sous un beau soleil, je quitte Prats-de-Mollo par un pont qui enjambe le Tech. C'est décidé, je délaisse Mir, sa tour et je fais ma première entorse volontaire à ce Tour du Vallespir. J'emprunte un PR.12 qui est en partie commun avec le fameux " Cami de la Retirada ". Il va me mener sans problème à Notre-Dame de Coral. Je traverse le torrent Canidell et tombe sur ce petit panneau qui vante les mérites de l'Ortie. Moi qui souffre le martyre et qui n'ait pas dormi de la nuit à cause de cette plante urticante, je suis sidéré d'apprendre qu'elle a des vertus anti-inflammatoires !

La tour de Mir

Indécis et confus, je pars dans la verdure.

Prats se réveille alors sous un ciel éclatant.

Le cœur encore intact d'un esprit d'aventure,

La Tour de Mir domine le vallon flamboyant.

 

Hésitant à grimper vers la haute muraille,

Le maximum à faire est encore important.

Ma tête grande ouverte tel un bel éventail.

La Tour de Mir me nargue idem à un géant.

 

Je balance, j'hésite, tel l'oiseau qui émigre,

Vers un court minimum où un chemin cuisant.

Mes jambes sont en feu mais ne sont pas de givre.

La Tour de Mir fascine les plus agonisants.

 

Ma décision est prise, je rejoins Notre-Dame,

Par le libre sentier de tous les résistants,

Mais l'esprit torturé comme une vieille femme,

La Tour de Mir m'invite de son pic arrogant.

 

Sombres sont les sous-bois, la paresse de mise.

Saint-Antoine est joli et son parc reposant.

L'horizon est bleuté, ma pensée cristallise.

La Tour de Mir m'attire de son feu si luisant.

 

J'escalade, je m'élève vers le col de la Guille,

Car Notre-Dame est belle dans le soleil couchant,

Et mon bras appuyant un bâton si futile,

La Tour de Mir s'enfuit, avec elle mon tourment.

 

La belle du Coral dévoile ses reliques,

Ses trésors que l'ermite a veillés pieusement.

Mes yeux émerveillés par ce pays de biques,

Le feu, la Tour de Mir s'éteint finalement.

 

L'Office du Tourisme est toujours fermé et j'ai maintenant un choix à faire : soit j'attends l'heure de l'ouverture en prenant le risque que l'employée ne puisse pas répondre à mes interrogations quant à la praticabilité des chemins soit je me décide tout de suite et opte pour le P.R pour respecter la résolution prise cette nuit.

En raison de mon état de lassitude avancée et de l'importante différence de distance à parcourir, pratiquement deux fois moins par le P.R., j'opte presque sans réfléchir pour cette solution qui me semble, aujourd'hui, la plus raisonnable. Il y a quelques années, une célèbre publicité annonçait " Mini Mir, il en fait un maximum " mais moi, c'est décidé " je ne vais pas prendre Mir (la tour) et je vais en faire un minimum (de kilomètres) ". Le jeu de mots est un peu lourdaud mais il a le mérite d'être un peu distrayant et de me venir à l'esprit à cet instant où je démarre cette nouvelle journée de marche avec une certaine appréhension.

Je traverse la place du Foirail et me dirige vers le pont qui traverse le Tech. Ici, il n'y a pas de colombes comme à Amélie mais un cadre de verdure exceptionnel et je retrouve le fleuve pour la deuxième fois depuis mon départ. Pas encore alimenté par ses nombreux affluents, il n'est ici qu'un petit torrent de montagne tranquille au débit relativement modeste en été. Mais cette discrétion du fleuve est très relative au regard de la documentation que j'ai pu lire sur l'Aiguat de 1940. Au carrefour adjacent, je trouve quelques panneaux de randonnées dont celui qui monte à la Tour de Mir. Je traverse la D.115 et cette fois, je suis devant le bon panneau avec un P.R.1, un P.R.3, un P.R.19 et surtout celui que je recherche, le P.R.12 indiquant " Notre Dame du Coral - La Coulometa ". Le balisage est blanc et rouge comme les G.R. Il y a dessous celui-ci, un autre panonceau dont l'itinéraire est vraiment chargé d'Histoire c'est le " Cami de la Retidara ", insolite chemin de l'exil que plus de 100.000 réfugiés espagnols empruntèrent en janvier 1939 pour fuir le régime tyrannique du général Franco. Cet exode massif eut une portée considérable sur la petite cité de Prats-de-Mollo et la région du Vallespir tout entière car il fut très difficile d'accueillir correctement toutes ces familles dans cet hiver très rigoureux qui était déjà là. Après la guerre, un grand nombre de famille s'installèrent dans le Vallespir. Ils eurent des enfants, qui ont grandi et sont devenus français. 70 ans ont passés et aujourd'hui c'est par bonheur que je vais emprunter une portion de ce " chemin du malheur " qui monte au Col d'Ares. J'enjambe le pont qui traverse le torrent du Canidell. Au bout du pont, un petit panneau éducatif sur l'ortie a été installé. Il décrit la plante, ses utilisations et vante ses bienfaits. Et là, chose surprenante, moi dont le lit était un véritable bûcher et qui ai " flambé " toute la nuit à cause de cette maudite plante, j'apprends qu'elle a des qualités d'anti-inflammatoire et qu'on peut même en faire des soupes. Non, je me suis endormi et je rêve, je ne suis pas devant ce panneau, je suis encore dans mon lit à l'hôtel Ausseil. Pincez-moi car je ne peux pas croire ça ! Je repars, la sente monte rudement dans un bois de feuillus où dominent les frênes et les grands châtaigniers. Je marche le plus souvent sous une sombre canopée mais parfois, j'arrive, au détour du chemin ou au travers des branches, à apercevoir Prats, juste en dessous qui s'éloigne, ou bien la Tour de Mir sur ma gauche, petite tétine brune dépassant d'un dodu mamelon verdâtre.

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Le PR.12 grimpe dans la forêt. Malgré tout, j'aperçois de temps à autre la Tour de Mir ou les lieux où j'ai cheminé hier. Puis il coupe la D.115 et arrive à la ferme des Casals. Quand il devient un agréable sentier tout en sous-bois, je vais flâner comme jamais je ne l'ai fait depuis mon départ, récupérant ainsi de mon exténuante étape d'hier. 

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Ce chemin tout en sous-bois où je vais paresser, m'amène au col de la Guilla puis sur une piste qui descend vers Can Moulins. Je quitte cette piste par une étroite sente balisée avec des lettres en vieil anglais qui m'entraîne dans le ravin de Coral entre prés fleuris et bois où virevoltent de beaux papillons. Au loin, j'aperçois mon objectif du jour : la chapelle Notre-Dame de Coral.

Je m'arrête souvent pour calmer ma respiration qui a tendance à s'emballer. Si les anti-inflammatoires ont eu pour effet de calmer mes contractures musculaires, je reste néanmoins marqué par ma terrible journée d'hier et ma nuit agitée. Et je me réjouis d'avoir pris ce chemin déjà suffisamment difficile compte tenu de ma fatigue. Après maints zigzags, j'atteins Saint-Antoine, petit ermitage avec une fontaine et une aire de pique-nique. Je profite de ce lieu calme pour souffler un peu et manger le pain au chocolat que j'ai acheté ce matin. Je repars. Le balisage est formidablement distinct. Je traverse la D.115 pour entrer dans un autre bois où le chemin s'est élargi. Ici la forêt ne semble pas avoir souffert du déchaînement de Klaus. La forêt se termine et le chemin débouche dans un immense pré lumineux où tout à coup les beaux panoramas se dévoilent vers le nord. Le chemin traverse le pré et pénètre dans la grande ferme des Casals. Il est 10h30. Je passe au milieu de la ferme que je quitte par une piste terreuse qui continue vers la D.115. Très vite, je délaisse cette piste au profit d'une autre qui aboutit à un portail. Le balisage du P.R.12 est bien là. Je pousse le portail que je prends soin de refermer derrière moi. C'est un large chemin herbeux tout en sous-bois de petits noisetiers qui démarre ici et longe parallèlement la D.115. Après les rudes montées que j'ai eues jusqu'ici, j'apprécie à sa juste valeur ce sentier fleuri au doux dénivelé. Il est si agréable à cheminer et il fait si beau aujourd'hui, que je flâne, m'arrête, repars, m'arrête à nouveau pour observer une fleur, un oiseau ou un papillon. Tout devient prétexte à un rythme de marche nonchalant et placide. Je vais même jusqu'à m'arrêter plusieurs fois pour déjeuner. Un coup c'est un morceau de quiche acheté à la boulangerie ce matin, une autre fois une salade que je trimballe depuis le départ, une autre fois, un morceau de pizza, un gâteau de riz ou bien une orange. C'est simple, quand je retrouve la D.115 au col de la Guilla (1.194 m), je me suis arrêté trois fois, j'ai mangé tout mon déjeuner, il n'est pas encore midi et j'ai mis plus d'une heure depuis la ferme des Casals pour parcourir deux kilomètres. C'est dire la lenteur avec laquelle j'ai marché, mais cette lenteur est aujourd'hui en parfait synchronisme avec mon état de paresse. Un petit panonceau en direction de Notre-Dame du Coral est planté là au bord de la D.115. Il m'expédie de l'autre côté de la route où un grand portail s'ouvre sur une large piste qui descend vers Can Moulins. Les décors changent, ce n'est plus tout à fait la même végétation. Ici, les grands châtaigniers, les frênes et les hêtres ont quasiment disparus au profit des pins, des chênes verts et des chênes lièges. Sous un soleil de plomb et sur cette large piste terreuse qui descend allègrement, je retrouve machinalement mon rythme de marche régulier et habituel. Seul un abreuvoir dans lequel s'écoule une source arrête mon élan. J'y trempe mon bob déjà bien mouillé de sueur que j'enfonce tout dégoulinant sur ma tête. Frais comme un gardon, je repars sous ce cagnard brûlant mais juste avant Can Moulins, je suis à nouveau arrêté dans ma course par un petit panonceau aux lettres écrites en vieil anglais " N + D + du Coral ". De cet endroit, on aperçoit d'ailleurs les toits de l'ermitage. Au sein d'une dense forêt, la chapelle n'est plus qu'à quelques centaines de mètres à vol d'oiseau. Une étroite sente raide descend dans une ravine, se stabilise et passe sous les maisons du hameau isolé de Can Moulins. Puis il descend à nouveau dans le bois d'un autre vallon où coule le Coral. Lors de l'analyse du parcours, j'avais prévu de m'y baigner en cas de fortes chaleurs. Mais si les fortes chaleurs sont là, le ruisseau, lui, n'est qu'un petit filet d'eau où il est très difficile de s'y mouiller ne serait-ce que les pieds.

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Après avoir traîné comme jamais, je finis par arriver très tôt à Notre-Dame de Coral. Comme à Saint-Guillem, la jolie chapelle est un lieu de pèlerinage et d'ermitage depuis des siècles mais ici elle fait aussi hôtellerie et restaurant. Je suis accueilli par deux énormes Saint-Bernard très gentils mais un peu trop baveux à mon goût. Un panonceau m'indique Lamanère, direction que j'aurais à prendre demain.

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Après une sieste bienfaitrice dans ma chambre, balades, visite et photos du site sont au programme. Son calme et son cadre de verdure unique se prête bien à ces activités. D'ici, j'aperçois tout au loin les Tours de Cabrens que je dois approcher demain. Je vais garder de Notre-Dame de Coral un souvenir impérissable et l'envie constante d'y amener un jour toute ma famille. 

Toujours dans les bois, le chemin remonte en zigzaguant jusqu'à l'intersection de deux chemins. Je connais bien cette jonction pour être venu à diverses reprises à Notre-Dame du Coral : il y a le chemin qui descend vers Lamanère et qu'il me faudra prendre demain et celui qui monte en direction de l'ermitage. Il est 13h15 quand j'aperçois les bâtiments et la chapelle. Je suis accueilli aux sons des grognements de deux énormes " Saint-Bernard " qui sont affalés de tout leur long sur le carrelage, certainement frais, du narthex de la chapelle. Ils doivent avoir si chaud qu'ils ne bronchent pas, mais néanmoins, ils m'observent du coin de l'oeil comme pour me dire " ne bouge plus, on te surveille ". Mais, je les connais pour les avoir rencontrés, il y a quelques mois, lors d'une randonnée. Ils sont plus impressionnants que réellement menaçants. Un jeune homme arrive d'un espace privé qui me semble être la cuisine. Je me présente, et il est parfaitement au courant de ma réservation en demi-pension pour une nuit. Force est de constater qu'ici ça fonctionne mieux qu'au Refuge de Batère. Pendant que le jeune homme me parle, les deux molosses se sont levés et sont venus me renifler les mains. Non, renifler n'est pas vraiment le mot. De leurs bajoues humides, ils m'enduisent les mains d'une bave gluante et quand je veux les repousser pour arrêter ce badigeonnage visqueux, le jeune homme me dit : " ils ont peur de votre bâton de marche " ! Je plie mon bâton télescopique et suit le jeune homme qui se dirige à l'étage pour me montrer ma chambre. Ce n'est pas vraiment une chambre mais plutôt un petit dortoir avec trois lits gigognes mais où, en principe, je devrais être seul car peu de randonneurs sont attendus aujourd'hui. Avant de retourner à ses occupations, le jeune homme me demande si je souhaite une boisson fraîche et quand je lui réponds une bière, il m'annonce avec jubilation, et comme si c'était une prouesse, qu'il a même une excellente bière pression. Je ne sais pas si chez lui, cet accueil courtois est habituel mais avec mon tee-shirt détrempé et mon bob avachi, il en a certainement conclu que j'avais dû avoir très chaud toute la matinée et que je devais avoir très soif. Gagné ! Je dépose mes affaires, retourne chercher ma bière et remonte avec dans le dortoir. Maintenant, je n'aspire qu'à une seule chose : " dormir ! ". Je me délecte de cette bière glacée, sors mes effets de toilettes, me déshabille et me précipite en slip sous la première douche venue qui se trouve au fond du couloir. Quand je reviens dans la chambre, et bien que les brûlures se soient formidablement estompées, je m'enduis les bras et les jambes d'Urticium et mets sous ma langue 5 granules d'Urtica Urens que je laisse fondre. Je finis ma bière et me jette sous une couverture et en moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire, je me vois m'endormir comme un bébé rassasié. Il est 16h30 quand je me réveille au doux bruit d'un aspirateur qui ronfle. Celui-ci arrive de l'extérieur et entre par la fenêtre que j'ai laissée grande ouverte. Quand je m'y penche c'est pour constater que la gérante et sa fille sont entrain de nettoyer leur voiture. M'apercevant à la fenêtre, elle semble confuse de m'avoir réveillé mais je la rassure car en réalité, il n'en est rien, je me suis éveillé tout seul après tout de même plus de deux heures d'un sommeil profond et réparateur. Je pars faire quelques photos de Notre-Dame du Coral qui est vraiment un site magique dans un cadre de verdure remarquable. D'ici, j'arrive à voir et à photographier les fameuses " Tours de Cabrens ", au pied desquelles, j'ai prévu de passer demain.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

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Quelques images de ma soirée à Notre-Dame de Coral : la jolie chapelle avec ma chambre dont la première fenêtre est ouverte. Devant la fenêtre de ma chambre où, le soir, je vais assister impuissant à la mise à mort d'un pauvre mulot ballotté par trois horribles matous. La marmotte empaillée de l'excellent restaurant " La Bergerie " qui de ses yeux fixes me regarde manger et enfin le beau coucher de soleil vers le Mont Falgas. Ce soir-là, plusieurs randonneurs m'indiquent l'impossibilité qu'ils ont eu de se rendre à la Tour de Mir à cause des arbres couchés par la tempête Klaus et cela me conforte dans la décision d'avoir préféré le PR.12 plutôt que l'itinéraire du Tour du Vallespir. Cela effacera en partie cette entorse non prévue. 

Assis devant l'entrée de la chapelle, je fais la connaissance d'une randonneuse. Elle marche avec deux amis et font des randonnées en étoiles depuis l'ermitage. Elle vient d'arriver du secteur de la Tour de Mir où ils sont allés randonner aujourd'hui. Au fil de la discussion, elle finit par m'apprendre que, par là-bas, beaucoup d'arbres gisent encore à terre au milieu des pistes et des chemins. Ils ont pas mal galéré et n'ont pas pu respecter la boucle qu'ils avaient initialement envisagée de faire. Puis au moment de faire demi-tour, ils ont éprouvé beaucoup de difficultés pour revenir à l'ermitage depuis la Tour de Mir par un autre chemin. Cette information que je n'ai pas spécialement recherchée arrive à mes oreilles comme un pur soulagement. En effet, après cette difficile journée d'hier et malgré mon désir de faire preuve de prudence, j'avoue que faire le Tour du Vallespir et ne pas respecter son parcours originel me chagrine pas mal. Mais avec cette information, plus aucun regret, j'ai la certitude maintenant d'avoir pris ce matin la bonne décision en choisissant le P.R.12 ! La jeune femme part rejoindre ses amis dans le dortoir. Une petite chatte noire vient se faire câliner, elle ressemble à s'y méprendre à ma petite Milie, mais quand un des deux Saint-Bernard aperçoit ce manège, il est jaloux et veut lui aussi sa part de caresses. Je veux bien le cajoler mais lui ne conçoit pas de recevoir de la tendresse sans en rendre à son tour à grands coups de langue. Et voilà qu'en moins de trois heures, il se met à me passer une deuxième couche de salive collante sur les mains. J'adore les animaux et particulièrement les chiens mais cette écume blanche qui dégouline de ses bajoues a un côté ragoûtant et désagréable et, là c'en est trop. Je remonte vers les toilettes pour me laver les mains puis je me remets au lit pour un peu de lecture. Vers 19h30, je redescends pour m'installer dans la Bergerie. C'est ainsi que s'appelle la jolie salle de restaurant au décor campagnard typiquement catalan. Je suis seul dans la salle, et ce repas, que je mange sous l'œil inerte d'une grosse marmotte empaillée, est vraiment savoureux avec une salade de tomates à la mozzarella, un coquelet rôti avec un excellent petit assortiment de légumes, de riz et d'un délicieux gratin. Et pour clore le tout, on m'apporte une grosse tranche d'un succulent gâteau à la crème pâtissière. Je n'ai vraiment que des louanges à faire de cet accueil de qualité. La chambre est parfaite pour le randonneur que je suis, la cuisine est excellente et raffinée, le tout dans un décor unique et calme et pour couronner le tout avec un rapport qualité/prix des plus raisonnables. Que demander de plus ! Quand je remonte dans la chambre, le soir est entrain de tomber mais le soleil est loin d'être couché. Par la fenêtre, je le regarde décliner peu à peu, grosse boule rouge qui disparaît derrière le Mont Falgas. A cet instant, et en regardant vers ces belles montagnes, je repense à ce " Cami de la Retirada ". Ces chemins de la liberté, ils ont dû en voir passer des contingents de malheureux et de chancelants avec tous ces réfugiés politiques qui étaient obligés de fuir leur pays. Mais dans l'autre sens, cette frontière, elle a dû en voir défiler des bienheureux et des chanceux avec ces résistants et ces combattants de tous bords qui fuyaient le nazisme pour des vies et des destinées nouvelles. Trois chats noirs qui jouent sous ma fenêtre sur la pelouse du parc m'extirpent de cette rêverie et de ces réflexions. Ils jouent à un jeu très cruel, c'est celui du chat et de la souris, comme une parodie d'un " Tom et Jerry " grandeur nature où il y aurait trois " Tom " et dans lequel, le rôle de " Jerry " est tenu par un minuscule mulot dont le sort est scellé d'avance. Les trois " ignobles " matous se renvoient, d'un à l'autre, le petit mulot comme une balle de caoutchouc et quand parfois celui-ci retombe dans l'herbe, j'ai toujours espoir qu'il finisse par arriver à s'échapper. Mais malheureusement, il finit tôt ou tard par se faire rattraper pour un des trois " greffiers ". Décidément la nature est trop cruelle et devant cet impitoyable spectacle, je préfère partir me coucher. Voilà un aspect de l'âpreté du Vallespir que je n'avais pas imaginé au départ de cette randonnée. Comme quoi, on est loin de tout envisager quand on veut se hisser sur " les hauteurs d'une vallée âpre ".

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L'après-midi, ce gentil chat était venu se faire câliner. A la nuit tombante, sur la pelouse de l'ermitage, accompagnés de ses deux compères, il est soudain devenu un " ignoble assassin " suppliciant un pauvre petit mulot qu'ils se renvoyaient de l'un à l'autre comme un simple balle de caoutchouc. Une nouvelle fable était déjà dans ma tête.

 

Trois petits " Tom " et un pauvre Jerry

 

Trois petits " Tom " jouaient dans le parc ombragé.

Noirs étaient leurs pelages, leurs esprits, leurs pensées.

Et ce pauvre " Jerry ", que le diable tirait

Par une fine queue, était désespéré.

 

Un homme à la fenêtre regardant ce spectacle,

Espérait du hasard, une étoile, un miracle.

Mais la dure nature le fit pleurer soudain,

Les petits " Toms " noirs étaient des assassins.

 

Il partit se coucher, sensible à sa faiblesse.

Les petits " Toms " noirs avaient tant de rudesse.

Croquer une souris tels étaient leurs destins,

Un " Jerry ", un mulot ce n'est pas un festin

 

Puis l'homme s'endormit, mais les rêves l'éveillèrent

Sur son lit, un p'tit " Tom " dormait tel un pépère

Sans cauchemar aucun, sur ce qu'il avait fait

Le " Jerry " dans son ventre avait ressuscité.

 

Dans leurs songes, ils sautèrent dans le parc ténébreux

Le P'tit " Tom " et " Jerry " avaient l'air si heureux.

Toute la nuit, ils jouèrent jusqu'au petit matin,

Comme de bons copains, de gentils diablotins.

 

Puis le jour se leva et son lot de tracas,

Les petits " Toms " noirs cherchaient comme un en-cas.

Point de pauvre mulot pour leur combler la faim,

Mais un " Jerry " ailé tel un beau séraphin.

 

Les Petits " Toms " noirs scrutaient en vain le ciel,

En quête d'un oiseau, de leurs airs criminels.

Mais le frêle " Jerry " s'était changé en aigle,

Sur les chats il tomba emportant le plus faible.

 

Il faut vivre la vie comme un chat, un mulot,

Caresser les p'tits " Toms ", ignorer les salauds,

Et si la vie est dure, croque-là doublement

Comme une petit " Jerry " si tendre et si fondant.

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Cliquez sur la tour de Mir pour passer à l'étape suivante

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Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

Publié le par gibirando

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.4eme étape : Jeudi 20 août 2009.

Prats-de-Mollo (753 m) - Notre-Dame de Coral (1.091m)

9 kms.

(La plupart des photos de ce Tour du Vallespir peuvent être agrandies en cliquant dessus. 2 fois, la photo occupe parfois le plein écran).

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

Cliquez sur la carte pour l'agrandir. 2 fois pour un plein écran.

"Un doux crépuscule d'avril descendait sur le Vallespir encore embrasé des rougeurs ardentes du couchant. C'était l'heure où le rose et l'orangé se disputent, en tons dégradés, les lisières du ciel et se fondent en cette teinte merveilleuse et indéfinissable qui incendie la crête des hautes montagnes". Extrait du roman " Domenica ou la vallée âpre ". Marie Vallespir.

 

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.SANS MIR, J'AI FAIT LE MINIMUM :

A l'hôtel-restaurant Ausseil, on soigne les clients. Hier soir, le patron a mis tout en œuvre pour que je puisse manger en terrasse. Il est allé chercher un petit guéridon où il m'installa comme un nabab. Seul le service pouvait être critiquable car il a été un peu long mais il faut dire que les tables étaient nombreuses et les clients aussi. Pourtant, en prenant le menu du jour fait d'une escalivade, d'un pavé de morue à la catalane et d'une crème catalane, je pensais pouvoir expédier ce souper typiquement catalan pour partir me coucher tôt. Il n'en a rien été, mais je n'ai pas eu à le regretter. Cette cuisine du terroir était excellente et en plus, tout seul dans mon coin, je me suis bien marré. Il y avait juste derrière moi un groupe de huit personnes, pour moitié catalanes et, pour l'autre moitié parisiennes et le contraste étonnant de ces deux accents antinomiques avait quelque chose de sympathiquement cocasse. Les gens d'ici parlaient ce sympathique français du terroir avec des mots mâchouillés aux intonations catalanes et chez les parigots, les hommes avaient cet accent argotique du titi parisien et les femmes, cet accent pointu à vous crever un œil. Dans le brouhaha général, je ne comprenais pas tout des conversations mais ces échanges et surtout ces sons, que tout opposait, étaient un régal pour mes oreilles et pour mon moral. Aussi, quand le groupe finit par quitter le restaurant, mon intérêt de rester à table disparut avec lui. Il est 23 heures et temps d'aller dormir. Mais du sommeil, il n'y en eut point cette nuit-là. Les orties que j'avais piétinées cet après-midi se rappelaient à mon bon souvenir et les inflammations avaient redoublées d'intensité et étaient devenues insoutenables. A aucun moment, je ne réussis à dormir, à peine somnoler parfois, car dans cette bataille du sommeil et du réveil que se livrait la lassitude et les brûlures, ces dernières gagnaient sans cesse. J'ai essayé une pommade anti-inflammatoire et une à l'arnica, mais sans succès et, seules les douches d'eaux chaudes, que je prenais régulièrement, arrivaient à calmer temporairement ces douleurs.

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En jaune, c'est l'hôtel Ausseil où j'ai été parfaitement reçu. Mais les piqûres d'orties m'ont empêché de dormir. A droite, le porche de la ville fortifiée

Cette nuit sans dormir a été un vrai calvaire, mais elle présenta l'avantage de me laisser un temps infini pour réfléchir. Mais de toutes ces réflexions, deux revenaient sans cesse et se résumaient ainsi :

1- Pourquoi hier m'étais-je obstiné si longtemps dans ce guêpier avant de faire demi-tour ?

2- Que faire aujourd'hui pour ne pas renouveler cette triste et périlleuse expérience, si elle vient à survenir ?

Je répondais à la première interrogation, en reconnaissant mon entêtement à vouloir coûte que coûte cheminer le Tour du Vallespir. Mais est-ce si important de passer par ce chemin ou bien par un autre ? Et le but n'est-il pas de découvrir le Vallespir et d'arriver à l'endroit désiré ? A la première question ma réponse fut " NON " et à la deuxième ce fut " OUI ". Mais au fond de moi, je savais qu'il y avait eu autre chose aussi, quelque chose d'inconscient, comme une espèce de fascination à vouloir me mesurer à des forces et à des éléments que la nature, elle-même, avait vaincus. Après coup, j'avais le sentiment que mon entêtement à vouloir avancer dans cette forêt massacrée avait été un peu comme aller à la rencontre d'un mystère que je me devais d'élucider.

Mais désormais, il fallait que je me penche sur l'essentiel. De la solution à la première réflexion découla la résolution de la seconde et je me mis à compulser immédiatement mes cartes. Car la solution se trouvait automatiquement là. Fallait-il que je continue l'itinéraire du Tour du Vallespir, alors que dans ce secteur de Prats-de-Mollo, nombres de chemins ravagés par la tempête Klaus étaient peut-être encore barrés et impraticables ? Pour atteindre Notre-Dame de Coral, objectif de cette quatrième étape, il y avait le GRP Tour du Vallespir avec 21 kilomètres à parcourir, une rude ascension à la Tour de Mir, que je connaissais bien, par le boisé Bassin du Canidell, puis la rectiligne et aplanie crête boisée du Pic des Miquelets (1.632 m) et pour terminer, la descente boisée du Col d'Ares (1.513 m) jusqu'à l'ermitage. Cet itinéraire qui était enregistré dans mon GPS avait un dénominateur commun : " Boisé ". Le mot qui enfante une grosse boule dans mon estomac que je n'arrive plus à expulser. Mais pour se rendre à Notre-Dame de Coral, il y avait aussi un P.R. (Promenades et randonnées) sur la carte, un itinéraire parfaitement dessiné et surligné en rouge. Je l'avais déjà remarqué en étudiant le Tour du Vallespir. Moins long de 10 à 11 kilomètres que le GRP, je l'avais jugé comme une alternative très intéressante en cas de gros pépins physiques. Or, les pépins physiques étaient là ! Alors que faire ? Ce chemin circulait lui aussi en forêt, mais il présentait l'avantage de couper et de longer de manière quasi parallèle la D.115 qui descend du poste frontière du Col d'Ares. Et je me disais que si des arbres étaient tombés, c'est bien dans ce secteur où se trouve la départementale qu'on avait du certainement les dégager en priorité.

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Prats-de-Mollo a un riche patrimoine historique et culturel. Ici une jolie cour de chapelle fleurie et ornée de fresques où l'on distingue les deux saintes. Mais pas le temps de m'attarder. Dommage !

A 5 heures du matin, quand j'éteins la lumière pour tenter de trouver une dernière fois un sommeil réparateur, j'ai pris quelques bonnes résolutions et pour ne pas en oublier, je les ai écrites dans mon petit calepin :

a) Me rendre demain matin à l'Office du Tourisme et demander des informations sur le GRP Tour du Vallespir qui passe par la Tour de Mir et sur le P.R., l'autre chemin qui va à Notre-Dame de Coral.

b) Si le GRP Tour du Vallespir est dans son intégralité praticable, je l'emprunterai.

c) Si je n'ai pas d'informations suffisamment précises et fiables, j'éviterai le GRP Tour du Vallespir au profit de l'autre chemin.

d) Si ce chemin est lui aussi impraticable, je prendrais la D.115 jusqu'au col de la Guilla puis la piste qui va à Can Moulins et enfin le sentier qui rejoint Notre-Dame de Coral.

e) Informer les responsables de l'Office du Tourisme quant à la galère que j'ai connu hier entre le Puig des Lloses et le Col du Miracle pour que d'autres randonneurs ne tombent pas dans le même piège.

f) Passer à la pharmacie pour acheter un calmant qui soulagera mes brûlures.

g) Penser à passer dans une épicerie car l'hôtel Ausseil ne prépare pas de panier pique-nique.

Dans ce combat de titans que se livrèrent toute la nuit le sommeil et l'éveil, ce dernier finit par jeter l'éponge vers 6 heures du matin et je m'endormis. Mais vers 7 heures, le bruit de quelques véhicules de livraison dans les ruelles avoisinantes arbitrèrent et mirent fin définitivement à cette bagarre dont je sortis comme le seul vaincu, terrassé et fourbu.

Depuis mon départ d'Amélie, c'est le premier jour où je suis réellement fatigué et courbaturé. Mon genou gauche est meurtri, me fait mal et la plaie pourtant peu profonde n'est pas jolie à voir car elle suppure abondamment. La douche chaude me réveille un peu mais n'a pas sur mon organisme cet effet habituel de stimulation. La fatigue est là et si je ne fais rien, elle ne s'arrangera pas au fil de la journée. Je mets sur mon genou une compresse de mercurochrome que je scotche avec un gros bout de sparadrap. Pour calmer les douleurs et les inflammations, je prends dans ma pharmacie deux Propofan et un Cycladol que j'avalerai avec le petit déjeuner.

La terrasse de l'hôtel Ausseil est quasi déserte et hormis un couple de touristes et la charmante serveuse qui vient me servir, il n'y a personne. Je prends seul ce copieux petit déjeuner sous l'œil prévenant et souriant de l'agréable serveuse. Cette dernière m'indique où se trouvent la pharmacie, l'Office du Tourisme et une superette. Par bonheur, tous ces commerces sont situés sur la place du Foirail, mais par contre, elle ne sait pas me dire quels sont les horaires d'ouverture. Les brûlures aux jambes étant toujours virulentes, il m'importe de me soigner dans un premier temps. Par les ruelles désertes, je pars aussitôt en direction de la Place du Foirail. Mais il n'est pas encore 8 heures et tout est fermé sauf la superette qui est ouverte, mais son unique employée est occupée à recevoir un camion de livraison. Au moment où je m'apprête à entrer, la commerçante d'un air ironique et caustique me dit en ricanant : Nous ouvrons à neuf heures ! Je repars vers les ruelles de la ville fortifiée où sans problème, je peux, grâce à une épicerie et à une boulangerie ouvertes, constituer un panier repas pour midi. Je reprends le chemin de l'hôtel, paye ma note par chèque car l'agréable serveuse m'assure que la carte bleue validée à la réservation ne sera pas encaissée et je remonte dans ma chambre. Mon sac à dos est prêt et il ne me reste plus qu'à ranger le pique-nique du midi et partir. Je sors de l'hôtel en remerciant la patronne de l'excellent accueil que j'ai eu et me dirige une nouvelle fois vers la place du Foirail. L'officine est ouverte et la pharmacienne me conseille un gel apaisant " Urticium " et ajoute un petit tube de granules homéopathiques " Urtica Urens ". Assis sur une murette, je badigeonne mes bras et mes jambes de ce gel froid et avale trois granules. Je suis agréablement surpris car les douleurs semblent s'atténuer presque immédiatement.

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Sous un beau soleil, je quitte Prats-de-Mollo par un pont qui enjambe le Tech. C'est décidé, je délaisse Mir, sa tour et je fais ma première entorse volontaire à ce Tour du Vallespir. J'emprunte un PR.12 qui est en partie commun avec le fameux " Cami de la Retirada ". Il va me mener sans problème à Notre-Dame de Coral. Je traverse le torrent Canidell et tombe sur ce petit panneau qui vante les mérites de l'Ortie. Moi qui souffre le martyre et qui n'ait pas dormi de la nuit à cause de cette plante urticante, je suis sidéré d'apprendre qu'elle a des vertus anti-inflammatoires !

La tour de Mir

Indécis et confus, je pars dans la verdure.

Prats se réveille alors sous un ciel éclatant.

Le cœur encore intact d'un esprit d'aventure,

La Tour de Mir domine le vallon flamboyant.

 

Hésitant à grimper vers la haute muraille,

Le maximum à faire est encore important.

Ma tête grande ouverte tel un bel éventail.

La Tour de Mir me nargue idem à un géant.

 

Je balance, j'hésite, tel l'oiseau qui émigre,

Vers un court minimum où un chemin cuisant.

Mes jambes sont en feu mais ne sont pas de givre.

La Tour de Mir fascine les plus agonisants.

 

Ma décision est prise, je rejoins Notre-Dame,

Par le libre sentier de tous les résistants,

Mais l'esprit torturé comme une vieille femme,

La Tour de Mir m'invite de son pic arrogant.

 

Sombres sont les sous-bois, la paresse de mise.

Saint-Antoine est joli et son parc reposant.

L'horizon est bleuté, ma pensée cristallise.

La Tour de Mir m'attire de son feu si luisant.

 

J'escalade, je m'élève vers le col de la Guille,

Car Notre-Dame est belle dans le soleil couchant,

Et mon bras appuyant un bâton si futile,

La Tour de Mir s'enfuit, avec elle mon tourment.

 

La belle du Coral dévoile ses reliques,

Ses trésors que l'ermite a veillés pieusement.

Mes yeux émerveillés par ce pays de biques,

Le feu, la Tour de Mir s'éteint finalement.

 

L'Office du Tourisme est toujours fermé et j'ai maintenant un choix à faire : soit j'attends l'heure de l'ouverture en prenant le risque que l'employée ne puisse pas répondre à mes interrogations quant à la praticabilité des chemins soit je me décide tout de suite et opte pour le P.R pour respecter la résolution prise cette nuit.

En raison de mon état de lassitude avancée et de l'importante différence de distance à parcourir, pratiquement deux fois moins par le P.R., j'opte presque sans réfléchir pour cette solution qui me semble, aujourd'hui, la plus raisonnable. Il y a quelques années, une célèbre publicité annonçait " Mini Mir, il en fait un maximum " mais moi, c'est décidé " je ne vais pas prendre Mir (la tour) et je vais en faire un minimum (de kilomètres) ". Le jeu de mots est un peu lourdaud mais il a le mérite d'être un peu distrayant et de me venir à l'esprit à cet instant où je démarre cette nouvelle journée de marche avec une certaine appréhension.

Je traverse la place du Foirail et me dirige vers le pont qui traverse le Tech. Ici, il n'y a pas de colombes comme à Amélie mais un cadre de verdure exceptionnel et je retrouve le fleuve pour la deuxième fois depuis mon départ. Pas encore alimenté par ses nombreux affluents, il n'est ici qu'un petit torrent de montagne tranquille au débit relativement modeste en été. Mais cette discrétion du fleuve est très relative au regard de la documentation que j'ai pu lire sur l'Aiguat de 1940. Au carrefour adjacent, je trouve quelques panneaux de randonnées dont celui qui monte à la Tour de Mir. Je traverse la D.115 et cette fois, je suis devant le bon panneau avec un P.R.1, un P.R.3, un P.R.19 et surtout celui que je recherche, le P.R.12 indiquant " Notre Dame du Coral - La Coulometa ". Le balisage est blanc et rouge comme les G.R. Il y a dessous celui-ci, un autre panonceau dont l'itinéraire est vraiment chargé d'Histoire c'est le " Cami de la Retidara ", insolite chemin de l'exil que plus de 100.000 réfugiés espagnols empruntèrent en janvier 1939 pour fuir le régime tyrannique du général Franco. Cet exode massif eut une portée considérable sur la petite cité de Prats-de-Mollo et la région du Vallespir tout entière car il fut très difficile d'accueillir correctement toutes ces familles dans cet hiver très rigoureux qui était déjà là. Après la guerre, un grand nombre de famille s'installèrent dans le Vallespir. Ils eurent des enfants, qui ont grandi et sont devenus français. 70 ans ont passés et aujourd'hui c'est par bonheur que je vais emprunter une portion de ce " chemin du malheur " qui monte au Col d'Ares. J'enjambe le pont qui traverse le torrent du Canidell. Au bout du pont, un petit panneau éducatif sur l'ortie a été installé. Il décrit la plante, ses utilisations et vante ses bienfaits. Et là, chose surprenante, moi dont le lit était un véritable bûcher et qui ai " flambé " toute la nuit à cause de cette maudite plante, j'apprends qu'elle a des qualités d'anti-inflammatoire et qu'on peut même en faire des soupes. Non, je me suis endormi et je rêve, je ne suis pas devant ce panneau, je suis encore dans mon lit à l'hôtel Ausseil. Pincez-moi car je ne peux pas croire ça ! Je repars, la sente monte rudement dans un bois de feuillus où dominent les frênes et les grands châtaigniers. Je marche le plus souvent sous une sombre canopée mais parfois, j'arrive, au détour du chemin ou au travers des branches, à apercevoir Prats, juste en dessous qui s'éloigne, ou bien la Tour de Mir sur ma gauche, petite tétine brune dépassant d'un dodu mamelon verdâtre.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.oSur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

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Le PR.12 grimpe dans la forêt. Malgré tout, j'aperçois de temps à autre la Tour de Mir ou les lieux où j'ai cheminé hier. Puis il coupe la D.115 et arrive à la ferme des Casals. Quand il devient un agréable sentier tout en sous-bois, je vais flâner comme jamais je ne l'ai fait depuis mon départ, récupérant ainsi de mon exténuante étape d'hier. 

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Ce chemin tout en sous-bois où je vais paresser, m'amène au col de la Guilla puis sur une piste qui descend vers Can Moulins. Je quitte cette piste par une étroite sente balisée avec des lettres en vieil anglais qui m'entraîne dans le ravin de Coral entre prés fleuris et bois où virevoltent de beaux papillons. Au loin, j'aperçois mon objectif du jour : la chapelle Notre-Dame de Coral.

Je m'arrête souvent pour calmer ma respiration qui a tendance à s'emballer. Si les anti-inflammatoires ont eu pour effet de calmer mes contractures musculaires, je reste néanmoins marqué par ma terrible journée d'hier et ma nuit agitée. Et je me réjouis d'avoir pris ce chemin déjà suffisamment difficile compte tenu de ma fatigue. Après maints zigzags, j'atteins Saint-Antoine, petit ermitage avec une fontaine et une aire de pique-nique. Je profite de ce lieu calme pour souffler un peu et manger le pain au chocolat que j'ai acheté ce matin. Je repars. Le balisage est formidablement distinct. Je traverse la D.115 pour entrer dans un autre bois où le chemin s'est élargi. Ici la forêt ne semble pas avoir souffert du déchaînement de Klaus. La forêt se termine et le chemin débouche dans un immense pré lumineux où tout à coup les beaux panoramas se dévoilent vers le nord. Le chemin traverse le pré et pénètre dans la grande ferme des Casals. Il est 10h30. Je passe au milieu de la ferme que je quitte par une piste terreuse qui continue vers la D.115. Très vite, je délaisse cette piste au profit d'une autre qui aboutit à un portail. Le balisage du P.R.12 est bien là. Je pousse le portail que je prends soin de refermer derrière moi. C'est un large chemin herbeux tout en sous-bois de petits noisetiers qui démarre ici et longe parallèlement la D.115. Après les rudes montées que j'ai eues jusqu'ici, j'apprécie à sa juste valeur ce sentier fleuri au doux dénivelé. Il est si agréable à cheminer et il fait si beau aujourd'hui, que je flâne, m'arrête, repars, m'arrête à nouveau pour observer une fleur, un oiseau ou un papillon. Tout devient prétexte à un rythme de marche nonchalant et placide. Je vais même jusqu'à m'arrêter plusieurs fois pour déjeuner. Un coup c'est un morceau de quiche acheté à la boulangerie ce matin, une autre fois une salade que je trimballe depuis le départ, une autre fois, un morceau de pizza, un gâteau de riz ou bien une orange. C'est simple, quand je retrouve la D.115 au col de la Guilla (1.194 m), je me suis arrêté trois fois, j'ai mangé tout mon déjeuner, il n'est pas encore midi et j'ai mis plus d'une heure depuis la ferme des Casals pour parcourir deux kilomètres. C'est dire la lenteur avec laquelle j'ai marché, mais cette lenteur est aujourd'hui en parfait synchronisme avec mon état de paresse. Un petit panonceau en direction de Notre-Dame du Coral est planté là au bord de la D.115. Il m'expédie de l'autre côté de la route où un grand portail s'ouvre sur une large piste qui descend vers Can Moulins. Les décors changent, ce n'est plus tout à fait la même végétation. Ici, les grands châtaigniers, les frênes et les hêtres ont quasiment disparus au profit des pins, des chênes verts et des chênes lièges. Sous un soleil de plomb et sur cette large piste terreuse qui descend allègrement, je retrouve machinalement mon rythme de marche régulier et habituel. Seul un abreuvoir dans lequel s'écoule une source arrête mon élan. J'y trempe mon bob déjà bien mouillé de sueur que j'enfonce tout dégoulinant sur ma tête. Frais comme un gardon, je repars sous ce cagnard brûlant mais juste avant Can Moulins, je suis à nouveau arrêté dans ma course par un petit panonceau aux lettres écrites en vieil anglais " N + D + du Coral ". De cet endroit, on aperçoit d'ailleurs les toits de l'ermitage. Au sein d'une dense forêt, la chapelle n'est plus qu'à quelques centaines de mètres à vol d'oiseau. Une étroite sente raide descend dans une ravine, se stabilise et passe sous les maisons du hameau isolé de Can Moulins. Puis il descend à nouveau dans le bois d'un autre vallon où coule le Coral. Lors de l'analyse du parcours, j'avais prévu de m'y baigner en cas de fortes chaleurs. Mais si les fortes chaleurs sont là, le ruisseau, lui, n'est qu'un petit filet d'eau où il est très difficile de s'y mouiller ne serait-ce que les pieds.

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Après avoir traîné comme jamais, je finis par arriver très tôt à Notre-Dame de Coral. Comme à Saint-Guillem, la jolie chapelle est un lieu de pèlerinage et d'ermitage depuis des siècles mais ici elle fait aussi hôtellerie et restaurant. Je suis accueilli par deux énormes Saint-Bernard très gentils mais un peu trop baveux à mon goût. Un panonceau m'indique Lamanère, direction que j'aurais à prendre demain.

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Après une sieste bienfaitrice dans ma chambre, balades, visite et photos du site sont au programme. Son calme et son cadre de verdure unique se prête bien à ces activités. D'ici, j'aperçois tout au loin les Tours de Cabrens que je dois approcher demain. Je vais garder de Notre-Dame de Coral un souvenir impérissable et l'envie constante d'y amener un jour toute ma famille. 

Toujours dans les bois, le chemin remonte en zigzaguant jusqu'à l'intersection de deux chemins. Je connais bien cette jonction pour être venu à diverses reprises à Notre-Dame du Coral : il y a le chemin qui descend vers Lamanère et qu'il me faudra prendre demain et celui qui monte en direction de l'ermitage. Il est 13h15 quand j'aperçois les bâtiments et la chapelle. Je suis accueilli aux sons des grognements de deux énormes " Saint-Bernard " qui sont affalés de tout leur long sur le carrelage, certainement frais, du narthex de la chapelle. Ils doivent avoir si chaud qu'ils ne bronchent pas, mais néanmoins, ils m'observent du coin de l'oeil comme pour me dire " ne bouge plus, on te surveille ". Mais, je les connais pour les avoir rencontrés, il y a quelques mois, lors d'une randonnée. Ils sont plus impressionnants que réellement menaçants. Un jeune homme arrive d'un espace privé qui me semble être la cuisine. Je me présente, et il est parfaitement au courant de ma réservation en demi-pension pour une nuit. Force est de constater qu'ici ça fonctionne mieux qu'au Refuge de Batère. Pendant que le jeune homme me parle, les deux molosses se sont levés et sont venus me renifler les mains. Non, renifler n'est pas vraiment le mot. De leurs bajoues humides, ils m'enduisent les mains d'une bave gluante et quand je veux les repousser pour arrêter ce badigeonnage visqueux, le jeune homme me dit : " ils ont peur de votre bâton de marche " ! Je plie mon bâton télescopique et suit le jeune homme qui se dirige à l'étage pour me montrer ma chambre. Ce n'est pas vraiment une chambre mais plutôt un petit dortoir avec trois lits gigognes mais où, en principe, je devrais être seul car peu de randonneurs sont attendus aujourd'hui. Avant de retourner à ses occupations, le jeune homme me demande si je souhaite une boisson fraîche et quand je lui réponds une bière, il m'annonce avec jubilation, et comme si c'était une prouesse, qu'il a même une excellente bière pression. Je ne sais pas si chez lui, cet accueil courtois est habituel mais avec mon tee-shirt détrempé et mon bob avachi, il en a certainement conclu que j'avais dû avoir très chaud toute la matinée et que je devais avoir très soif. Gagné ! Je dépose mes affaires, retourne chercher ma bière et remonte avec dans le dortoir. Maintenant, je n'aspire qu'à une seule chose : " dormir ! ". Je me délecte de cette bière glacée, sors mes effets de toilettes, me déshabille et me précipite en slip sous la première douche venue qui se trouve au fond du couloir. Quand je reviens dans la chambre, et bien que les brûlures se soient formidablement estompées, je m'enduis les bras et les jambes d'Urticium et mets sous ma langue 5 granules d'Urtica Urens que je laisse fondre. Je finis ma bière et me jette sous une couverture et en moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire, je me vois m'endormir comme un bébé rassasié. Il est 16h30 quand je me réveille au doux bruit d'un aspirateur qui ronfle. Celui-ci arrive de l'extérieur et entre par la fenêtre que j'ai laissée grande ouverte. Quand je m'y penche c'est pour constater que la gérante et sa fille sont entrain de nettoyer leur voiture. M'apercevant à la fenêtre, elle semble confuse de m'avoir réveillé mais je la rassure car en réalité, il n'en est rien, je me suis éveillé tout seul après tout de même plus de deux heures d'un sommeil profond et réparateur. Je pars faire quelques photos de Notre-Dame du Coral qui est vraiment un site magique dans un cadre de verdure remarquable. D'ici, j'arrive à voir et à photographier les fameuses " Tours de Cabrens ", au pied desquelles, j'ai prévu de passer demain.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

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Quelques images de ma soirée à Notre-Dame de Coral : la jolie chapelle avec ma chambre dont la première fenêtre est ouverte. Devant la fenêtre de ma chambre où, le soir, je vais assister impuissant à la mise à mort d'un pauvre mulot ballotté par trois horribles matous. La marmotte empaillée de l'excellent restaurant " La Bergerie " qui de ses yeux fixes me regarde manger et enfin le beau coucher de soleil vers le Mont Falgas. Ce soir-là, plusieurs randonneurs m'indiquent l'impossibilité qu'ils ont eu de se rendre à la Tour de Mir à cause des arbres couchés par la tempête Klaus et cela me conforte dans la décision d'avoir préféré le PR.12 plutôt que l'itinéraire du Tour du Vallespir. Cela effacera en partie cette entorse non prévue. 

Assis devant l'entrée de la chapelle, je fais la connaissance d'une randonneuse. Elle marche avec deux amis et font des randonnées en étoiles depuis l'ermitage. Elle vient d'arriver du secteur de la Tour de Mir où ils sont allés randonner aujourd'hui. Au fil de la discussion, elle finit par m'apprendre que, par là-bas, beaucoup d'arbres gisent encore à terre au milieu des pistes et des chemins. Ils ont pas mal galéré et n'ont pas pu respecter la boucle qu'ils avaient initialement envisagée de faire. Puis au moment de faire demi-tour, ils ont éprouvé beaucoup de difficultés pour revenir à l'ermitage depuis la Tour de Mir par un autre chemin. Cette information que je n'ai pas spécialement recherchée arrive à mes oreilles comme un pur soulagement. En effet, après cette difficile journée d'hier et malgré mon désir de faire preuve de prudence, j'avoue que faire le Tour du Vallespir et ne pas respecter son parcours originel me chagrine pas mal. Mais avec cette information, plus aucun regret, j'ai la certitude maintenant d'avoir pris ce matin la bonne décision en choisissant le P.R.12 ! La jeune femme part rejoindre ses amis dans le dortoir. Une petite chatte noire vient se faire câliner, elle ressemble à s'y méprendre à ma petite Milie, mais quand un des deux Saint-Bernard aperçoit ce manège, il est jaloux et veut lui aussi sa part de caresses. Je veux bien le cajoler mais lui ne conçoit pas de recevoir de la tendresse sans en rendre à son tour à grands coups de langue. Et voilà qu'en moins de trois heures, il se met à me passer une deuxième couche de salive collante sur les mains. J'adore les animaux et particulièrement les chiens mais cette écume blanche qui dégouline de ses bajoues a un côté ragoûtant et désagréable et, là c'en est trop. Je remonte vers les toilettes pour me laver les mains puis je me remets au lit pour un peu de lecture. Vers 19h30, je redescends pour m'installer dans la Bergerie. C'est ainsi que s'appelle la jolie salle de restaurant au décor campagnard typiquement catalan. Je suis seul dans la salle, et ce repas, que je mange sous l'œil inerte d'une grosse marmotte empaillée, est vraiment savoureux avec une salade de tomates à la mozzarella, un coquelet rôti avec un excellent petit assortiment de légumes, de riz et d'un délicieux gratin. Et pour clore le tout, on m'apporte une grosse tranche d'un succulent gâteau à la crème pâtissière. Je n'ai vraiment que des louanges à faire de cet accueil de qualité. La chambre est parfaite pour le randonneur que je suis, la cuisine est excellente et raffinée, le tout dans un décor unique et calme et pour couronner le tout avec un rapport qualité/prix des plus raisonnables. Que demander de plus ! Quand je remonte dans la chambre, le soir est entrain de tomber mais le soleil est loin d'être couché. Par la fenêtre, je le regarde décliner peu à peu, grosse boule rouge qui disparaît derrière le Mont Falgas. A cet instant, et en regardant vers ces belles montagnes, je repense à ce " Cami de la Retirada ". Ces chemins de la liberté, ils ont dû en voir passer des contingents de malheureux et de chancelants avec tous ces réfugiés politiques qui étaient obligés de fuir leur pays. Mais dans l'autre sens, cette frontière, elle a dû en voir défiler des bienheureux et des chanceux avec ces résistants et ces combattants de tous bords qui fuyaient le nazisme pour des vies et des destinées nouvelles. Trois chats noirs qui jouent sous ma fenêtre sur la pelouse du parc m'extirpent de cette rêverie et de ces réflexions. Ils jouent à un jeu très cruel, c'est celui du chat et de la souris, comme une parodie d'un " Tom et Jerry " grandeur nature où il y aurait trois " Tom " et dans lequel, le rôle de " Jerry " est tenu par un minuscule mulot dont le sort est scellé d'avance. Les trois " ignobles " matous se renvoient, d'un à l'autre, le petit mulot comme une balle de caoutchouc et quand parfois celui-ci retombe dans l'herbe, j'ai toujours espoir qu'il finisse par arriver à s'échapper. Mais malheureusement, il finit tôt ou tard par se faire rattraper pour un des trois " greffiers ". Décidément la nature est trop cruelle et devant cet impitoyable spectacle, je préfère partir me coucher. Voilà un aspect de l'âpreté du Vallespir que je n'avais pas imaginé au départ de cette randonnée. Comme quoi, on est loin de tout envisager quand on veut se hisser sur " les hauteurs d'une vallée âpre ".

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

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L'après-midi, ce gentil chat était venu se faire câliner. A la nuit tombante, sur la pelouse de l'ermitage, accompagnés de ses deux compères, il est soudain devenu un " ignoble assassin " suppliciant un pauvre petit mulot qu'ils se renvoyaient de l'un à l'autre comme un simple balle de caoutchouc. Une nouvelle fable était déjà dans ma tête.

 

Trois petits " Tom " et un pauvre Jerry

 

Trois petits " Tom " jouaient dans le parc ombragé.

Noirs étaient leurs pelages, leurs esprits, leurs pensées.

Et ce pauvre " Jerry ", que le diable tirait

Par une fine queue, était désespéré.

 

Un homme à la fenêtre regardant ce spectacle,

Espérait du hasard, une étoile, un miracle.

Mais la dure nature le fit pleurer soudain,

Les petits " Toms " noirs étaient des assassins.

 

Il partit se coucher, sensible à sa faiblesse.

Les petits " Toms " noirs avaient tant de rudesse.

Croquer une souris tels étaient leurs destins,

Un " Jerry ", un mulot ce n'est pas un festin

 

Puis l'homme s'endormit, mais les rêves l'éveillèrent

Sur son lit, un p'tit " Tom " dormait tel un pépère

Sans cauchemar aucun, sur ce qu'il avait fait

Le " Jerry " dans son ventre avait ressuscité.

 

Dans leurs songes, ils sautèrent dans le parc ténébreux

Le P'tit " Tom " et " Jerry " avaient l'air si heureux.

Toute la nuit, ils jouèrent jusqu'au petit matin,

Comme de bons copains, de gentils diablotins.

 

Puis le jour se leva et son lot de tracas,

Les petits " Toms " noirs cherchaient comme un en-cas.

Point de pauvre mulot pour leur combler la faim,

Mais un " Jerry " ailé tel un beau séraphin.

 

Les Petits " Toms " noirs scrutaient en vain le ciel,

En quête d'un oiseau, de leurs airs criminels.

Mais le frêle " Jerry " s'était changé en aigle,

Sur les chats il tomba emportant le plus faible.

 

Il faut vivre la vie comme un chat, un mulot,

Caresser les p'tits " Toms ", ignorer les salauds,

Et si la vie est dure, croque-là doublement

Comme une petit " Jerry " si tendre et si fondant.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

Cliquez sur la tour de Mir pour passer à l'étape suivante

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Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

Publié le par gibirando

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.4eme étape : Jeudi 20 août 2009.

Prats-de-Mollo (753 m) - Notre-Dame de Coral (1.091m)

9 kms.

(La plupart des photos de ce Tour du Vallespir peuvent être agrandies en cliquant dessus. 2 fois, la photo occupe parfois le plein écran).

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

Cliquez sur la carte pour l'agrandir. 2 fois pour un plein écran.

"Un doux crépuscule d'avril descendait sur le Vallespir encore embrasé des rougeurs ardentes du couchant. C'était l'heure où le rose et l'orangé se disputent, en tons dégradés, les lisières du ciel et se fondent en cette teinte merveilleuse et indéfinissable qui incendie la crête des hautes montagnes". Extrait du roman " Domenica ou la vallée âpre ". Marie Vallespir.

 

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.SANS MIR, J'AI FAIT LE MINIMUM :

A l'hôtel-restaurant Ausseil, on soigne les clients. Hier soir, le patron a mis tout en œuvre pour que je puisse manger en terrasse. Il est allé chercher un petit guéridon où il m'installa comme un nabab. Seul le service pouvait être critiquable car il a été un peu long mais il faut dire que les tables étaient nombreuses et les clients aussi. Pourtant, en prenant le menu du jour fait d'une escalivade, d'un pavé de morue à la catalane et d'une crème catalane, je pensais pouvoir expédier ce souper typiquement catalan pour partir me coucher tôt. Il n'en a rien été, mais je n'ai pas eu à le regretter. Cette cuisine du terroir était excellente et en plus, tout seul dans mon coin, je me suis bien marré. Il y avait juste derrière moi un groupe de huit personnes, pour moitié catalanes et, pour l'autre moitié parisiennes et le contraste étonnant de ces deux accents antinomiques avait quelque chose de sympathiquement cocasse. Les gens d'ici parlaient ce sympathique français du terroir avec des mots mâchouillés aux intonations catalanes et chez les parigots, les hommes avaient cet accent argotique du titi parisien et les femmes, cet accent pointu à vous crever un œil. Dans le brouhaha général, je ne comprenais pas tout des conversations mais ces échanges et surtout ces sons, que tout opposait, étaient un régal pour mes oreilles et pour mon moral. Aussi, quand le groupe finit par quitter le restaurant, mon intérêt de rester à table disparut avec lui. Il est 23 heures et temps d'aller dormir. Mais du sommeil, il n'y en eut point cette nuit-là. Les orties que j'avais piétinées cet après-midi se rappelaient à mon bon souvenir et les inflammations avaient redoublées d'intensité et étaient devenues insoutenables. A aucun moment, je ne réussis à dormir, à peine somnoler parfois, car dans cette bataille du sommeil et du réveil que se livrait la lassitude et les brûlures, ces dernières gagnaient sans cesse. J'ai essayé une pommade anti-inflammatoire et une à l'arnica, mais sans succès et, seules les douches d'eaux chaudes, que je prenais régulièrement, arrivaient à calmer temporairement ces douleurs.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

En jaune, c'est l'hôtel Ausseil où j'ai été parfaitement reçu. Mais les piqûres d'orties m'ont empêché de dormir. A droite, le porche de la ville fortifiée

Cette nuit sans dormir a été un vrai calvaire, mais elle présenta l'avantage de me laisser un temps infini pour réfléchir. Mais de toutes ces réflexions, deux revenaient sans cesse et se résumaient ainsi :

1- Pourquoi hier m'étais-je obstiné si longtemps dans ce guêpier avant de faire demi-tour ?

2- Que faire aujourd'hui pour ne pas renouveler cette triste et périlleuse expérience, si elle vient à survenir ?

Je répondais à la première interrogation, en reconnaissant mon entêtement à vouloir coûte que coûte cheminer le Tour du Vallespir. Mais est-ce si important de passer par ce chemin ou bien par un autre ? Et le but n'est-il pas de découvrir le Vallespir et d'arriver à l'endroit désiré ? A la première question ma réponse fut " NON " et à la deuxième ce fut " OUI ". Mais au fond de moi, je savais qu'il y avait eu autre chose aussi, quelque chose d'inconscient, comme une espèce de fascination à vouloir me mesurer à des forces et à des éléments que la nature, elle-même, avait vaincus. Après coup, j'avais le sentiment que mon entêtement à vouloir avancer dans cette forêt massacrée avait été un peu comme aller à la rencontre d'un mystère que je me devais d'élucider.

Mais désormais, il fallait que je me penche sur l'essentiel. De la solution à la première réflexion découla la résolution de la seconde et je me mis à compulser immédiatement mes cartes. Car la solution se trouvait automatiquement là. Fallait-il que je continue l'itinéraire du Tour du Vallespir, alors que dans ce secteur de Prats-de-Mollo, nombres de chemins ravagés par la tempête Klaus étaient peut-être encore barrés et impraticables ? Pour atteindre Notre-Dame de Coral, objectif de cette quatrième étape, il y avait le GRP Tour du Vallespir avec 21 kilomètres à parcourir, une rude ascension à la Tour de Mir, que je connaissais bien, par le boisé Bassin du Canidell, puis la rectiligne et aplanie crête boisée du Pic des Miquelets (1.632 m) et pour terminer, la descente boisée du Col d'Ares (1.513 m) jusqu'à l'ermitage. Cet itinéraire qui était enregistré dans mon GPS avait un dénominateur commun : " Boisé ". Le mot qui enfante une grosse boule dans mon estomac que je n'arrive plus à expulser. Mais pour se rendre à Notre-Dame de Coral, il y avait aussi un P.R. (Promenades et randonnées) sur la carte, un itinéraire parfaitement dessiné et surligné en rouge. Je l'avais déjà remarqué en étudiant le Tour du Vallespir. Moins long de 10 à 11 kilomètres que le GRP, je l'avais jugé comme une alternative très intéressante en cas de gros pépins physiques. Or, les pépins physiques étaient là ! Alors que faire ? Ce chemin circulait lui aussi en forêt, mais il présentait l'avantage de couper et de longer de manière quasi parallèle la D.115 qui descend du poste frontière du Col d'Ares. Et je me disais que si des arbres étaient tombés, c'est bien dans ce secteur où se trouve la départementale qu'on avait du certainement les dégager en priorité.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

Prats-de-Mollo a un riche patrimoine historique et culturel. Ici une jolie cour de chapelle fleurie et ornée de fresques où l'on distingue les deux saintes. Mais pas le temps de m'attarder. Dommage !

A 5 heures du matin, quand j'éteins la lumière pour tenter de trouver une dernière fois un sommeil réparateur, j'ai pris quelques bonnes résolutions et pour ne pas en oublier, je les ai écrites dans mon petit calepin :

a) Me rendre demain matin à l'Office du Tourisme et demander des informations sur le GRP Tour du Vallespir qui passe par la Tour de Mir et sur le P.R., l'autre chemin qui va à Notre-Dame de Coral.

b) Si le GRP Tour du Vallespir est dans son intégralité praticable, je l'emprunterai.

c) Si je n'ai pas d'informations suffisamment précises et fiables, j'éviterai le GRP Tour du Vallespir au profit de l'autre chemin.

d) Si ce chemin est lui aussi impraticable, je prendrais la D.115 jusqu'au col de la Guilla puis la piste qui va à Can Moulins et enfin le sentier qui rejoint Notre-Dame de Coral.

e) Informer les responsables de l'Office du Tourisme quant à la galère que j'ai connu hier entre le Puig des Lloses et le Col du Miracle pour que d'autres randonneurs ne tombent pas dans le même piège.

f) Passer à la pharmacie pour acheter un calmant qui soulagera mes brûlures.

g) Penser à passer dans une épicerie car l'hôtel Ausseil ne prépare pas de panier pique-nique.

Dans ce combat de titans que se livrèrent toute la nuit le sommeil et l'éveil, ce dernier finit par jeter l'éponge vers 6 heures du matin et je m'endormis. Mais vers 7 heures, le bruit de quelques véhicules de livraison dans les ruelles avoisinantes arbitrèrent et mirent fin définitivement à cette bagarre dont je sortis comme le seul vaincu, terrassé et fourbu.

Depuis mon départ d'Amélie, c'est le premier jour où je suis réellement fatigué et courbaturé. Mon genou gauche est meurtri, me fait mal et la plaie pourtant peu profonde n'est pas jolie à voir car elle suppure abondamment. La douche chaude me réveille un peu mais n'a pas sur mon organisme cet effet habituel de stimulation. La fatigue est là et si je ne fais rien, elle ne s'arrangera pas au fil de la journée. Je mets sur mon genou une compresse de mercurochrome que je scotche avec un gros bout de sparadrap. Pour calmer les douleurs et les inflammations, je prends dans ma pharmacie deux Propofan et un Cycladol que j'avalerai avec le petit déjeuner.

La terrasse de l'hôtel Ausseil est quasi déserte et hormis un couple de touristes et la charmante serveuse qui vient me servir, il n'y a personne. Je prends seul ce copieux petit déjeuner sous l'œil prévenant et souriant de l'agréable serveuse. Cette dernière m'indique où se trouvent la pharmacie, l'Office du Tourisme et une superette. Par bonheur, tous ces commerces sont situés sur la place du Foirail, mais par contre, elle ne sait pas me dire quels sont les horaires d'ouverture. Les brûlures aux jambes étant toujours virulentes, il m'importe de me soigner dans un premier temps. Par les ruelles désertes, je pars aussitôt en direction de la Place du Foirail. Mais il n'est pas encore 8 heures et tout est fermé sauf la superette qui est ouverte, mais son unique employée est occupée à recevoir un camion de livraison. Au moment où je m'apprête à entrer, la commerçante d'un air ironique et caustique me dit en ricanant : Nous ouvrons à neuf heures ! Je repars vers les ruelles de la ville fortifiée où sans problème, je peux, grâce à une épicerie et à une boulangerie ouvertes, constituer un panier repas pour midi. Je reprends le chemin de l'hôtel, paye ma note par chèque car l'agréable serveuse m'assure que la carte bleue validée à la réservation ne sera pas encaissée et je remonte dans ma chambre. Mon sac à dos est prêt et il ne me reste plus qu'à ranger le pique-nique du midi et partir. Je sors de l'hôtel en remerciant la patronne de l'excellent accueil que j'ai eu et me dirige une nouvelle fois vers la place du Foirail. L'officine est ouverte et la pharmacienne me conseille un gel apaisant " Urticium " et ajoute un petit tube de granules homéopathiques " Urtica Urens ". Assis sur une murette, je badigeonne mes bras et mes jambes de ce gel froid et avale trois granules. Je suis agréablement surpris car les douleurs semblent s'atténuer presque immédiatement.

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Sous un beau soleil, je quitte Prats-de-Mollo par un pont qui enjambe le Tech. C'est décidé, je délaisse Mir, sa tour et je fais ma première entorse volontaire à ce Tour du Vallespir. J'emprunte un PR.12 qui est en partie commun avec le fameux " Cami de la Retirada ". Il va me mener sans problème à Notre-Dame de Coral. Je traverse le torrent Canidell et tombe sur ce petit panneau qui vante les mérites de l'Ortie. Moi qui souffre le martyre et qui n'ait pas dormi de la nuit à cause de cette plante urticante, je suis sidéré d'apprendre qu'elle a des vertus anti-inflammatoires !

La tour de Mir

Indécis et confus, je pars dans la verdure.

Prats se réveille alors sous un ciel éclatant.

Le cœur encore intact d'un esprit d'aventure,

La Tour de Mir domine le vallon flamboyant.

 

Hésitant à grimper vers la haute muraille,

Le maximum à faire est encore important.

Ma tête grande ouverte tel un bel éventail.

La Tour de Mir me nargue idem à un géant.

 

Je balance, j'hésite, tel l'oiseau qui émigre,

Vers un court minimum où un chemin cuisant.

Mes jambes sont en feu mais ne sont pas de givre.

La Tour de Mir fascine les plus agonisants.

 

Ma décision est prise, je rejoins Notre-Dame,

Par le libre sentier de tous les résistants,

Mais l'esprit torturé comme une vieille femme,

La Tour de Mir m'invite de son pic arrogant.

 

Sombres sont les sous-bois, la paresse de mise.

Saint-Antoine est joli et son parc reposant.

L'horizon est bleuté, ma pensée cristallise.

La Tour de Mir m'attire de son feu si luisant.

 

J'escalade, je m'élève vers le col de la Guille,

Car Notre-Dame est belle dans le soleil couchant,

Et mon bras appuyant un bâton si futile,

La Tour de Mir s'enfuit, avec elle mon tourment.

 

La belle du Coral dévoile ses reliques,

Ses trésors que l'ermite a veillés pieusement.

Mes yeux émerveillés par ce pays de biques,

Le feu, la Tour de Mir s'éteint finalement.

 

L'Office du Tourisme est toujours fermé et j'ai maintenant un choix à faire : soit j'attends l'heure de l'ouverture en prenant le risque que l'employée ne puisse pas répondre à mes interrogations quant à la praticabilité des chemins soit je me décide tout de suite et opte pour le P.R pour respecter la résolution prise cette nuit.

En raison de mon état de lassitude avancée et de l'importante différence de distance à parcourir, pratiquement deux fois moins par le P.R., j'opte presque sans réfléchir pour cette solution qui me semble, aujourd'hui, la plus raisonnable. Il y a quelques années, une célèbre publicité annonçait " Mini Mir, il en fait un maximum " mais moi, c'est décidé " je ne vais pas prendre Mir (la tour) et je vais en faire un minimum (de kilomètres) ". Le jeu de mots est un peu lourdaud mais il a le mérite d'être un peu distrayant et de me venir à l'esprit à cet instant où je démarre cette nouvelle journée de marche avec une certaine appréhension.

Je traverse la place du Foirail et me dirige vers le pont qui traverse le Tech. Ici, il n'y a pas de colombes comme à Amélie mais un cadre de verdure exceptionnel et je retrouve le fleuve pour la deuxième fois depuis mon départ. Pas encore alimenté par ses nombreux affluents, il n'est ici qu'un petit torrent de montagne tranquille au débit relativement modeste en été. Mais cette discrétion du fleuve est très relative au regard de la documentation que j'ai pu lire sur l'Aiguat de 1940. Au carrefour adjacent, je trouve quelques panneaux de randonnées dont celui qui monte à la Tour de Mir. Je traverse la D.115 et cette fois, je suis devant le bon panneau avec un P.R.1, un P.R.3, un P.R.19 et surtout celui que je recherche, le P.R.12 indiquant " Notre Dame du Coral - La Coulometa ". Le balisage est blanc et rouge comme les G.R. Il y a dessous celui-ci, un autre panonceau dont l'itinéraire est vraiment chargé d'Histoire c'est le " Cami de la Retidara ", insolite chemin de l'exil que plus de 100.000 réfugiés espagnols empruntèrent en janvier 1939 pour fuir le régime tyrannique du général Franco. Cet exode massif eut une portée considérable sur la petite cité de Prats-de-Mollo et la région du Vallespir tout entière car il fut très difficile d'accueillir correctement toutes ces familles dans cet hiver très rigoureux qui était déjà là. Après la guerre, un grand nombre de famille s'installèrent dans le Vallespir. Ils eurent des enfants, qui ont grandi et sont devenus français. 70 ans ont passés et aujourd'hui c'est par bonheur que je vais emprunter une portion de ce " chemin du malheur " qui monte au Col d'Ares. J'enjambe le pont qui traverse le torrent du Canidell. Au bout du pont, un petit panneau éducatif sur l'ortie a été installé. Il décrit la plante, ses utilisations et vante ses bienfaits. Et là, chose surprenante, moi dont le lit était un véritable bûcher et qui ai " flambé " toute la nuit à cause de cette maudite plante, j'apprends qu'elle a des qualités d'anti-inflammatoire et qu'on peut même en faire des soupes. Non, je me suis endormi et je rêve, je ne suis pas devant ce panneau, je suis encore dans mon lit à l'hôtel Ausseil. Pincez-moi car je ne peux pas croire ça ! Je repars, la sente monte rudement dans un bois de feuillus où dominent les frênes et les grands châtaigniers. Je marche le plus souvent sous une sombre canopée mais parfois, j'arrive, au détour du chemin ou au travers des branches, à apercevoir Prats, juste en dessous qui s'éloigne, ou bien la Tour de Mir sur ma gauche, petite tétine brune dépassant d'un dodu mamelon verdâtre.

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Le PR.12 grimpe dans la forêt. Malgré tout, j'aperçois de temps à autre la Tour de Mir ou les lieux où j'ai cheminé hier. Puis il coupe la D.115 et arrive à la ferme des Casals. Quand il devient un agréable sentier tout en sous-bois, je vais flâner comme jamais je ne l'ai fait depuis mon départ, récupérant ainsi de mon exténuante étape d'hier. 

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Ce chemin tout en sous-bois où je vais paresser, m'amène au col de la Guilla puis sur une piste qui descend vers Can Moulins. Je quitte cette piste par une étroite sente balisée avec des lettres en vieil anglais qui m'entraîne dans le ravin de Coral entre prés fleuris et bois où virevoltent de beaux papillons. Au loin, j'aperçois mon objectif du jour : la chapelle Notre-Dame de Coral.

Je m'arrête souvent pour calmer ma respiration qui a tendance à s'emballer. Si les anti-inflammatoires ont eu pour effet de calmer mes contractures musculaires, je reste néanmoins marqué par ma terrible journée d'hier et ma nuit agitée. Et je me réjouis d'avoir pris ce chemin déjà suffisamment difficile compte tenu de ma fatigue. Après maints zigzags, j'atteins Saint-Antoine, petit ermitage avec une fontaine et une aire de pique-nique. Je profite de ce lieu calme pour souffler un peu et manger le pain au chocolat que j'ai acheté ce matin. Je repars. Le balisage est formidablement distinct. Je traverse la D.115 pour entrer dans un autre bois où le chemin s'est élargi. Ici la forêt ne semble pas avoir souffert du déchaînement de Klaus. La forêt se termine et le chemin débouche dans un immense pré lumineux où tout à coup les beaux panoramas se dévoilent vers le nord. Le chemin traverse le pré et pénètre dans la grande ferme des Casals. Il est 10h30. Je passe au milieu de la ferme que je quitte par une piste terreuse qui continue vers la D.115. Très vite, je délaisse cette piste au profit d'une autre qui aboutit à un portail. Le balisage du P.R.12 est bien là. Je pousse le portail que je prends soin de refermer derrière moi. C'est un large chemin herbeux tout en sous-bois de petits noisetiers qui démarre ici et longe parallèlement la D.115. Après les rudes montées que j'ai eues jusqu'ici, j'apprécie à sa juste valeur ce sentier fleuri au doux dénivelé. Il est si agréable à cheminer et il fait si beau aujourd'hui, que je flâne, m'arrête, repars, m'arrête à nouveau pour observer une fleur, un oiseau ou un papillon. Tout devient prétexte à un rythme de marche nonchalant et placide. Je vais même jusqu'à m'arrêter plusieurs fois pour déjeuner. Un coup c'est un morceau de quiche acheté à la boulangerie ce matin, une autre fois une salade que je trimballe depuis le départ, une autre fois, un morceau de pizza, un gâteau de riz ou bien une orange. C'est simple, quand je retrouve la D.115 au col de la Guilla (1.194 m), je me suis arrêté trois fois, j'ai mangé tout mon déjeuner, il n'est pas encore midi et j'ai mis plus d'une heure depuis la ferme des Casals pour parcourir deux kilomètres. C'est dire la lenteur avec laquelle j'ai marché, mais cette lenteur est aujourd'hui en parfait synchronisme avec mon état de paresse. Un petit panonceau en direction de Notre-Dame du Coral est planté là au bord de la D.115. Il m'expédie de l'autre côté de la route où un grand portail s'ouvre sur une large piste qui descend vers Can Moulins. Les décors changent, ce n'est plus tout à fait la même végétation. Ici, les grands châtaigniers, les frênes et les hêtres ont quasiment disparus au profit des pins, des chênes verts et des chênes lièges. Sous un soleil de plomb et sur cette large piste terreuse qui descend allègrement, je retrouve machinalement mon rythme de marche régulier et habituel. Seul un abreuvoir dans lequel s'écoule une source arrête mon élan. J'y trempe mon bob déjà bien mouillé de sueur que j'enfonce tout dégoulinant sur ma tête. Frais comme un gardon, je repars sous ce cagnard brûlant mais juste avant Can Moulins, je suis à nouveau arrêté dans ma course par un petit panonceau aux lettres écrites en vieil anglais " N + D + du Coral ". De cet endroit, on aperçoit d'ailleurs les toits de l'ermitage. Au sein d'une dense forêt, la chapelle n'est plus qu'à quelques centaines de mètres à vol d'oiseau. Une étroite sente raide descend dans une ravine, se stabilise et passe sous les maisons du hameau isolé de Can Moulins. Puis il descend à nouveau dans le bois d'un autre vallon où coule le Coral. Lors de l'analyse du parcours, j'avais prévu de m'y baigner en cas de fortes chaleurs. Mais si les fortes chaleurs sont là, le ruisseau, lui, n'est qu'un petit filet d'eau où il est très difficile de s'y mouiller ne serait-ce que les pieds.

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Après avoir traîné comme jamais, je finis par arriver très tôt à Notre-Dame de Coral. Comme à Saint-Guillem, la jolie chapelle est un lieu de pèlerinage et d'ermitage depuis des siècles mais ici elle fait aussi hôtellerie et restaurant. Je suis accueilli par deux énormes Saint-Bernard très gentils mais un peu trop baveux à mon goût. Un panonceau m'indique Lamanère, direction que j'aurais à prendre demain.

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Après une sieste bienfaitrice dans ma chambre, balades, visite et photos du site sont au programme. Son calme et son cadre de verdure unique se prête bien à ces activités. D'ici, j'aperçois tout au loin les Tours de Cabrens que je dois approcher demain. Je vais garder de Notre-Dame de Coral un souvenir impérissable et l'envie constante d'y amener un jour toute ma famille. 

Toujours dans les bois, le chemin remonte en zigzaguant jusqu'à l'intersection de deux chemins. Je connais bien cette jonction pour être venu à diverses reprises à Notre-Dame du Coral : il y a le chemin qui descend vers Lamanère et qu'il me faudra prendre demain et celui qui monte en direction de l'ermitage. Il est 13h15 quand j'aperçois les bâtiments et la chapelle. Je suis accueilli aux sons des grognements de deux énormes " Saint-Bernard " qui sont affalés de tout leur long sur le carrelage, certainement frais, du narthex de la chapelle. Ils doivent avoir si chaud qu'ils ne bronchent pas, mais néanmoins, ils m'observent du coin de l'oeil comme pour me dire " ne bouge plus, on te surveille ". Mais, je les connais pour les avoir rencontrés, il y a quelques mois, lors d'une randonnée. Ils sont plus impressionnants que réellement menaçants. Un jeune homme arrive d'un espace privé qui me semble être la cuisine. Je me présente, et il est parfaitement au courant de ma réservation en demi-pension pour une nuit. Force est de constater qu'ici ça fonctionne mieux qu'au Refuge de Batère. Pendant que le jeune homme me parle, les deux molosses se sont levés et sont venus me renifler les mains. Non, renifler n'est pas vraiment le mot. De leurs bajoues humides, ils m'enduisent les mains d'une bave gluante et quand je veux les repousser pour arrêter ce badigeonnage visqueux, le jeune homme me dit : " ils ont peur de votre bâton de marche " ! Je plie mon bâton télescopique et suit le jeune homme qui se dirige à l'étage pour me montrer ma chambre. Ce n'est pas vraiment une chambre mais plutôt un petit dortoir avec trois lits gigognes mais où, en principe, je devrais être seul car peu de randonneurs sont attendus aujourd'hui. Avant de retourner à ses occupations, le jeune homme me demande si je souhaite une boisson fraîche et quand je lui réponds une bière, il m'annonce avec jubilation, et comme si c'était une prouesse, qu'il a même une excellente bière pression. Je ne sais pas si chez lui, cet accueil courtois est habituel mais avec mon tee-shirt détrempé et mon bob avachi, il en a certainement conclu que j'avais dû avoir très chaud toute la matinée et que je devais avoir très soif. Gagné ! Je dépose mes affaires, retourne chercher ma bière et remonte avec dans le dortoir. Maintenant, je n'aspire qu'à une seule chose : " dormir ! ". Je me délecte de cette bière glacée, sors mes effets de toilettes, me déshabille et me précipite en slip sous la première douche venue qui se trouve au fond du couloir. Quand je reviens dans la chambre, et bien que les brûlures se soient formidablement estompées, je m'enduis les bras et les jambes d'Urticium et mets sous ma langue 5 granules d'Urtica Urens que je laisse fondre. Je finis ma bière et me jette sous une couverture et en moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire, je me vois m'endormir comme un bébé rassasié. Il est 16h30 quand je me réveille au doux bruit d'un aspirateur qui ronfle. Celui-ci arrive de l'extérieur et entre par la fenêtre que j'ai laissée grande ouverte. Quand je m'y penche c'est pour constater que la gérante et sa fille sont entrain de nettoyer leur voiture. M'apercevant à la fenêtre, elle semble confuse de m'avoir réveillé mais je la rassure car en réalité, il n'en est rien, je me suis éveillé tout seul après tout de même plus de deux heures d'un sommeil profond et réparateur. Je pars faire quelques photos de Notre-Dame du Coral qui est vraiment un site magique dans un cadre de verdure remarquable. D'ici, j'arrive à voir et à photographier les fameuses " Tours de Cabrens ", au pied desquelles, j'ai prévu de passer demain.

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Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.oSur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.oSur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

Quelques images de ma soirée à Notre-Dame de Coral : la jolie chapelle avec ma chambre dont la première fenêtre est ouverte. Devant la fenêtre de ma chambre où, le soir, je vais assister impuissant à la mise à mort d'un pauvre mulot ballotté par trois horribles matous. La marmotte empaillée de l'excellent restaurant " La Bergerie " qui de ses yeux fixes me regarde manger et enfin le beau coucher de soleil vers le Mont Falgas. Ce soir-là, plusieurs randonneurs m'indiquent l'impossibilité qu'ils ont eu de se rendre à la Tour de Mir à cause des arbres couchés par la tempête Klaus et cela me conforte dans la décision d'avoir préféré le PR.12 plutôt que l'itinéraire du Tour du Vallespir. Cela effacera en partie cette entorse non prévue. 

Assis devant l'entrée de la chapelle, je fais la connaissance d'une randonneuse. Elle marche avec deux amis et font des randonnées en étoiles depuis l'ermitage. Elle vient d'arriver du secteur de la Tour de Mir où ils sont allés randonner aujourd'hui. Au fil de la discussion, elle finit par m'apprendre que, par là-bas, beaucoup d'arbres gisent encore à terre au milieu des pistes et des chemins. Ils ont pas mal galéré et n'ont pas pu respecter la boucle qu'ils avaient initialement envisagée de faire. Puis au moment de faire demi-tour, ils ont éprouvé beaucoup de difficultés pour revenir à l'ermitage depuis la Tour de Mir par un autre chemin. Cette information que je n'ai pas spécialement recherchée arrive à mes oreilles comme un pur soulagement. En effet, après cette difficile journée d'hier et malgré mon désir de faire preuve de prudence, j'avoue que faire le Tour du Vallespir et ne pas respecter son parcours originel me chagrine pas mal. Mais avec cette information, plus aucun regret, j'ai la certitude maintenant d'avoir pris ce matin la bonne décision en choisissant le P.R.12 ! La jeune femme part rejoindre ses amis dans le dortoir. Une petite chatte noire vient se faire câliner, elle ressemble à s'y méprendre à ma petite Milie, mais quand un des deux Saint-Bernard aperçoit ce manège, il est jaloux et veut lui aussi sa part de caresses. Je veux bien le cajoler mais lui ne conçoit pas de recevoir de la tendresse sans en rendre à son tour à grands coups de langue. Et voilà qu'en moins de trois heures, il se met à me passer une deuxième couche de salive collante sur les mains. J'adore les animaux et particulièrement les chiens mais cette écume blanche qui dégouline de ses bajoues a un côté ragoûtant et désagréable et, là c'en est trop. Je remonte vers les toilettes pour me laver les mains puis je me remets au lit pour un peu de lecture. Vers 19h30, je redescends pour m'installer dans la Bergerie. C'est ainsi que s'appelle la jolie salle de restaurant au décor campagnard typiquement catalan. Je suis seul dans la salle, et ce repas, que je mange sous l'œil inerte d'une grosse marmotte empaillée, est vraiment savoureux avec une salade de tomates à la mozzarella, un coquelet rôti avec un excellent petit assortiment de légumes, de riz et d'un délicieux gratin. Et pour clore le tout, on m'apporte une grosse tranche d'un succulent gâteau à la crème pâtissière. Je n'ai vraiment que des louanges à faire de cet accueil de qualité. La chambre est parfaite pour le randonneur que je suis, la cuisine est excellente et raffinée, le tout dans un décor unique et calme et pour couronner le tout avec un rapport qualité/prix des plus raisonnables. Que demander de plus ! Quand je remonte dans la chambre, le soir est entrain de tomber mais le soleil est loin d'être couché. Par la fenêtre, je le regarde décliner peu à peu, grosse boule rouge qui disparaît derrière le Mont Falgas. A cet instant, et en regardant vers ces belles montagnes, je repense à ce " Cami de la Retirada ". Ces chemins de la liberté, ils ont dû en voir passer des contingents de malheureux et de chancelants avec tous ces réfugiés politiques qui étaient obligés de fuir leur pays. Mais dans l'autre sens, cette frontière, elle a dû en voir défiler des bienheureux et des chanceux avec ces résistants et ces combattants de tous bords qui fuyaient le nazisme pour des vies et des destinées nouvelles. Trois chats noirs qui jouent sous ma fenêtre sur la pelouse du parc m'extirpent de cette rêverie et de ces réflexions. Ils jouent à un jeu très cruel, c'est celui du chat et de la souris, comme une parodie d'un " Tom et Jerry " grandeur nature où il y aurait trois " Tom " et dans lequel, le rôle de " Jerry " est tenu par un minuscule mulot dont le sort est scellé d'avance. Les trois " ignobles " matous se renvoient, d'un à l'autre, le petit mulot comme une balle de caoutchouc et quand parfois celui-ci retombe dans l'herbe, j'ai toujours espoir qu'il finisse par arriver à s'échapper. Mais malheureusement, il finit tôt ou tard par se faire rattraper pour un des trois " greffiers ". Décidément la nature est trop cruelle et devant cet impitoyable spectacle, je préfère partir me coucher. Voilà un aspect de l'âpreté du Vallespir que je n'avais pas imaginé au départ de cette randonnée. Comme quoi, on est loin de tout envisager quand on veut se hisser sur " les hauteurs d'une vallée âpre ".

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 4 : Prats-de-Mollo  - Notre-Dame de Coral - 9 kms.

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L'après-midi, ce gentil chat était venu se faire câliner. A la nuit tombante, sur la pelouse de l'ermitage, accompagnés de ses deux compères, il est soudain devenu un " ignoble assassin " suppliciant un pauvre petit mulot qu'ils se renvoyaient de l'un à l'autre comme un simple balle de caoutchouc. Une nouvelle fable était déjà dans ma tête.

 

Trois petits " Tom " et un pauvre Jerry

 

Trois petits " Tom " jouaient dans le parc ombragé.

Noirs étaient leurs pelages, leurs esprits, leurs pensées.

Et ce pauvre " Jerry ", que le diable tirait

Par une fine queue, était désespéré.

 

Un homme à la fenêtre regardant ce spectacle,

Espérait du hasard, une étoile, un miracle.

Mais la dure nature le fit pleurer soudain,

Les petits " Toms " noirs étaient des assassins.

 

Il partit se coucher, sensible à sa faiblesse.

Les petits " Toms " noirs avaient tant de rudesse.

Croquer une souris tels étaient leurs destins,

Un " Jerry ", un mulot ce n'est pas un festin

 

Puis l'homme s'endormit, mais les rêves l'éveillèrent

Sur son lit, un p'tit " Tom " dormait tel un pépère

Sans cauchemar aucun, sur ce qu'il avait fait

Le " Jerry " dans son ventre avait ressuscité.

 

Dans leurs songes, ils sautèrent dans le parc ténébreux

Le P'tit " Tom " et " Jerry " avaient l'air si heureux.

Toute la nuit, ils jouèrent jusqu'au petit matin,

Comme de bons copains, de gentils diablotins.

 

Puis le jour se leva et son lot de tracas,

Les petits " Toms " noirs cherchaient comme un en-cas.

Point de pauvre mulot pour leur combler la faim,

Mais un " Jerry " ailé tel un beau séraphin.

 

Les Petits " Toms " noirs scrutaient en vain le ciel,

En quête d'un oiseau, de leurs airs criminels.

Mais le frêle " Jerry " s'était changé en aigle,

Sur les chats il tomba emportant le plus faible.

 

Il faut vivre la vie comme un chat, un mulot,

Caresser les p'tits " Toms ", ignorer les salauds,

Et si la vie est dure, croque-là doublement

Comme une petit " Jerry " si tendre et si fondant.

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Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo 15 kms.

Publié le par gibirando

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.3eme étape : Mercredi 19 août 2009.

Saint-Guillem (1.287 m)-Prats-de-Mollo (753 m) 15 kms.

(La plupart des photos de ce Tour du Vallespir peuvent être agrandies en cliquant dessus. 2 fois, la photo occupe parfois le plein écran).

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Cliquez sur la carte pour l'agrandir. 2 fois pour un plein écran.

Nous nous aventurâmes jusqu'au village de Prats-de-Mollo. J'avoue que je préférai les bocages de la plaine à ces grandes montagnes couvertes de chênes verts et qui semblent plus faites pour abriter des bandits, que pour assurer le couvert à des honnêtes gens. Extrait de l'essai " Voyage en France en 1787, 1788, 1789 ". Arthur Young (1741-1820) agriculteur, agronome et écrivain britannique.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.LA FAUTE A KLAUS :

Malgré cette anxiété que j'ai eu hier soir, j'ai fini par m'assoupir. Quand j'y repense, je constate que c'était plutôt une appréhension momentanée qu'une vraie obsession. Puis vers minuit, j'ai été réveillé par un bruit. C'était comme le bruit d'un grattement. Mais une fois éveillé, je me suis aperçu qu'un autre bruit venait du volet d'un petit vasistas qui était resté ouvert et qui grinçait sous une légère brise nocturne. A la faible clarté de ma lampe frontale, je n'ai rien observé qui correspondait au grattement qui m'avait réveillé. Par contre, le rayon plus large que ma lampe projetait contre le mur du refuge me fit remarquer qu'il manquait une grosse pierre à 15 centimètres de ma paillasse. Au fond de ce trou ainsi constitué, il y avait un nid de souris fait d'une bourre blanche, de poils et de fibres diverses. Mais de souris, il n'y en avait point ! Est-ce elle qui grattait avant que je ne me réveille ? Avait-elle eu le temps de décamper avant que je n'éclaire la lampe ? Pour ne plus être embêté par ce grincement lugubre et ces grattements désagréables, je pris les sages résolutions de fermer le vasistas et de déménager ma litière à l'autre bout du bat-flanc. Puis, j'ai profité de ce réveil fortuit pour partir uriner dehors. Le ciel tout entier était étoilé et une belle voie lactée blanchissait le firmament au dessus de la chapelle de l'ermitage. La nuit était douce et quasi silencieuse. Seule une petite brise, frissonnant les feuilles, tentait sans succès de rompre cette quiétude. Comme j'appréciais pleinement l'instant présent, cette sérénité, cette paix secrète et intime, loin du monde bruyant et trop insociable que j'avais quitté, je suis resté de longues minutes sur le pas de la porte, les yeux levés vers le ciel et l'ermitage qui se découpait, à écouter ce silence avant de partir me recoucher. Une fois encore, cette nuit-là fut bénéfique et, à mon grand étonnement, je n'ai ressenti à mon réveil aucune contracture musculaire, ni aucune douleur, malgré les deux longues étapes déjà accomplies et la rusticité du couchage qui ne m'avait pas empêché de dormir profondément.

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Quand je quitte Saint-Guillem, vers le sud, le jour est déjà levé mais le hameau est encore dans la pénombre. Ici les panneaux sont on ne peut plus clairs mais mal placés et je vais me tromper avant de me raviser et de reprendre le bon chemin.

Il est 7 heures. Vers le sud, le jour est déjà levé mais Saint-Guillem de Combret, blotti au fond du vallon de Coumelade, est encore dans une obscure nébulosité. Bloqués par les hauts monts environnants, les rayons du soleil mettront encore plus d'une heure avant d'éclairer complètement le minuscule hameau. Je déjeune de deux gâteaux de riz vite expédiés et d'une grande gorgée d'eau et range tranquillement mes affaires et mon sac à dos en prêtant attention à ne rien oublier dans le refuge. Il est 8 heures quand je démarre avec ma trousse de toilettes, mon gant et ma serviette à la main. Je sais qu'il y a dans le hameau, non loin d'ici, une auge ou plutôt un vieux lavoir dans lequel, par un tuyau de PVC, s'écoule une eau de source cristalline. J'ai bien l'intention de me raser et de faire un brin de toilettes car j'ai la désagréable sensation de me sentir sale et poussiéreux. Je mets un quart d'heure pour me laver et tenter de parfaire ma présentation. Mais j'ai le sentiment que l'eau glacée a eu un seul effet non négligeable sur mon organisme, celui de lui assener un " claquant " coup de fouet qui me permet de démarrer cette étape dans d'excellentes conditions. Je profite pour remplir mes deux gourdes et mon camelback d'une eau fraîche et renouvelée.

La large piste s'élève rapidement au dessus de l'ermitage. Sur ma droite, là même où hier après-midi j'ai galéré, la tempête Klaus a laissé un immense chantier de désolation dans cette forêt qui était pourtant magnifique. Par contre, en face de moi, les flancs du Puig dels Sarraïs (1.830 m) et du col de Serre-Vernet (1.808m) que je dois cheminer semblent moins meurtris. Il y a bien deci delà, quelques cicatrices, quelques sillons d'immenses résineux couchés, mais rien de bien inquiétant, en tous cas vu d'ici.

Quelques minutes plus tard, et alors que je m'apprête à poursuivre la piste, je remarque inopinément sur ma droite un panonceau qui semble m'indiquer Prats-de-Mollo et le col de Serre-Vernet par un autre chemin qui s'enfonce dans la forêt. Et je commets là une nouvelle erreur en ne sortant pas immédiatement mon GPS. Quand je le sors, c'est bien trop tard, car mon GPS ne capte plus aucun satellite masqué qu'il est au fond de ce sous-bois touffu. Deuxième erreur, je ne sors pas ma carte non plus, tranquillisé, il est vrai, par ce rassurant panneau. Et quand je sors ma carte, c'est encore beaucoup trop tard car j'ai marché ainsi une " bonne " demi-heure jusqu'à m'inquiéter de ne plus rencontrer le balisage jaune et rouge qui était pourtant bien visible jusqu'à présent. Au regard de la carte, je me rends à l'évidence, je me suis trompé, une fois de plus. Quitte à avoir perdu une heure, je décide de faire demi-tour car ce chemin qui zigzague toujours en forêt sans aucun balisage apparent me trouble et ne m'amènera nulle part et en tous cas pas où je dois aller.

Quand je retrouve la piste et le panonceau, selon moi, très mal placé à cet endroit, j'ai effectivement perdu une heure. Je m'avance sur la piste et quelques dizaines de mètres plus loin, j'aperçois effectivement les marques de peinture jaune et rouge propres au GRP du Vallespir. Je poursuis la piste et enjambe le fougueux torrent de Coumelade par un large pont bétonné. Peu après, la piste se sépare en deux, mais le balisage est ici parfait et m'oriente vers la droite. Plutôt plane au début, maintenant la piste monte allégrement, effectue deux larges courbes, avant d'atteindre le col Baxo à 1.473 mètres. Au fond de ce petit col herbeux, un nouveau panneau sollicite un départ à gauche. Ici une minuscule sente, encadrée d'une clôture, est barrée d'un petit portail qui est là pour empêcher les bovins de passer mais pas les randonneurs. Sans trop m'en apercevoir, et malgré l'heure perdue, j'ai déjà fait 190 mètres de dénivelé sur les 521 que je dois accomplir pour atteindre les 1.808 mètres du Col de Serre-Vernet. C'est bien sûr encourageant, mais j'évite de trop penser aux 331 mètres restant sur les trois kilomètres d'ascension qui doivent m'amener au pinacle de ce tour du Vallespir.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.oSur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

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J'ai quitté Saint-Guillem par un chemin qui enjambe la rivière Coumelade. Parfaitement balisé, il s'élève rapidement par le col Baxo, file à travers des bois touffus où coulent quelques petits ruisseaux. Mais parfois le chemin se transforme en balcon et j'ai le bonheur d'être en surplomb de superbes paysages. Saint-Guillem est déjà très loin.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Ce chemin parfois en balcon me laisse entrevoir Saint-Guillem que j'ai quitté ce matin. On aperçoit les bois saccagés par la tempête Klaus. Celui au dessus du hameau où j'ai galéré hier lors de mon arrivée et celui en dessous du refuge où se trouve un bel arboretum avec notamment quelques séquioas.

 Malgré le dénivelé, le petit chemin est changeant et agréable. Cheminant le plus souvent en sous-bois et recouvert d'un épais tapis de feuilles mortes, il coupe quelques ruisseaux, affluents de la Coumelade et monte rectiligne offrant quelquefois de magnifiques vues vers le sud mais surtout sur Saint-Guillem et tout le Bassin de Coumelade. Puis soudain, il bifurque dans le sens opposé en direction du Col de Serre-Vernet dans un bois de petits pins chétifs. Il n'est pas tout à fait midi quand j'arrive au col, point culminant de ce périple avec ses 1.808 mètres

Vaste pré herbeux entouré de pins et de sapins, il semble être le paradis pour nombre de génisses et de vaches blanches indolentes. La plupart sont affalées sur la verte prairie et même mon passage laisse indifférent tous ces bovins, qui repus, ne tournent même pas la tête quand je m'approche d'eux. Ici, les panoramas à 360° sont splendides de tous côtés. De nombreux hauts sommets et de nouveaux pics apparaissent, de nombreuses crêtes composent l'horizon : la Crête des Sept Hommes (2.651m), le Pla Guillem (2.301m), les Roques Blanches (2.252m), les Esquerdes de Rotja (2.316m), le Roc Colom (2.507m) et le Pic de Costabonne (2.465m) pour ne citer que les crêtes les plus connues et les plus attractives. Mais il y aussi de profonds ravins et surtout cette immense et épaisse forêt domaniale qui n'en finit plus de s'étendre sur ce magnifique Haut-Vallespir. Ici, il y a aussi un panneau, mais il ne sert plus à rien car il gît à terre et n'indique plus aucune direction. Je le redresse et essaie en vain de retrouver son emplacement originel. De dépit, je le pose contre un petit pin dans la position qui me semble la plus appropriée avec St Guillem dans la direction d'où je viens. A l'aide d'un bout de ficelle que j'ai trouvé sur la pelouse, j'ai beau l'attacher avec bons sens à une branche du pin, je ne suis guère plus avancé quand à la direction à prendre pour me rendre à Prats-de-Mollo.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

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J'arrive au col de Serre Vernet. A 1.808 mètres, c'est le point culminant de mon périple. Les paysages sur le très Haut-Vallespir sont superbes de tous côtés. Ce col est aussi le paradis de vaches et des génisses. Le panonceau indicatif gît à terre, je le redresse et l'attache à un pin mais je ne suis pas plus avançé quant à la direction à prendre pour aller à Prats. Heureusement j'ai mon GPS !

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J'effraie un petit veau puis je m'arrête pour déjeuner dans cet éboulis qui descend très raide du Puig dels Sarraïs vers la vallée de la Parcigoule. Je ne peux trouver plus beau spectacle ! Mais la descente est loin d'être finie, je dois encore atteindre deux cols, celui de la Collade d'En Mandoulé et le col de Coumeille, petit pré verdâtre que j'aperçois tout en bas.

Mais heureusement, ma carte IGN est là et mon GPS aussi et à force d'avancer dans différentes directions vers le sud, je finis par trouver le bon itinéraire qui file sur le pré puis contourne quelques rochers. Il est midi et j'ai faim, mais comme la suite de l'étape est essentiellement faite de descentes, je prends la décision de continuer un peu pour m'offrir comme hors d'oeuvre un splendide panorama dégagé. Cette sente allie pelouses, petits bois de pins et de feuillus mais aussi rocailles et rochers plus ou moins gros. Mais il y aussi de nombreux et bas genévriers derrière lesquels quelques veaux ruminent leur fourrage. L'un d'entre eux peut se vanter de m'avoir fait une belle frayeur et tressaillir quand il a débouché devant moi alors que je marchai dans un silence de cathédrale. Mais je suppose que lui aussi, il a du avoir une peur " bleue " ! En contournant maintenant le rocailleux Puig dels Sarraïs, le chemin n'est désormais plus qu'amoncellement de blocs déchiquetés et gros pierriers escarpés. Je redouble de vigilance pour éviter toute chute qui, ici, serait catastrophique pour de pas dire fatale. Il est temps que je m'arrête pour déjeuner car je ne trouverai pas meilleur belvédère que ces éboulis, bien exposés au soleil, qui descendent raides vers le vallon de la Parcigoule. Il n'y a plus aucun obstacle devant moi et je déguste à la fois ma salade et ce magnifique spectacle. Assis sur une grosse pierre plate bien chaude et adossé à une autre, j'ai trouvé, dans de ce fauteuil improvisé mais un peu dur il est vrai, une terrasse peu confortable pour mes fesses mais idéale pour mes yeux.

D'ici, je jouis d'un panorama exceptionnel sur le Bassin de la Parcigoule mais aussi sur une immense partie de ce Haut-Vallespir que je suis venu découvrir. C'est d'ailleurs en mangeant dans ce gros pierrier que j'ai imaginé le titre de mon voyage et de ce récit : " Sur les hauteurs d'une vallée âpre ".

Après trois jours de marche, et à cet instant précis, il me semblait qu'aucun autre endroit traversé ne méritait plus ce terme de " âpre " que cet immense magma rocheux. Dans cet éboulis, les aspérités ne manquent pas et l'âpreté, je la touche à chaque instant. Le déroulement imminent de ce Tour du Vallespir me montra malheureusement et très vite que je n'avais pas encore tout connu de cette légendaire âpreté. Quand je repars, la sente, où du moins ce que j'en devine grâce à un balisage abondant et précis, se complique sacrément en étant toujours très rocheuse mais en devenant encore plus abrupte. Pour éviter toute chute, je m'applique à poser mes pieds sur des pierres stables et quand les marches sont trop hautes à descendre, je m'aide autant de mes mains que de mes pieds.

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J'en ai fini avec la longue descente le long du flanc pierreux du Puig dels Sarraïs. Au col de Coumeille, une étrange croix gravée dans la pierre et le pic de Granarols que le chemin contourne au milieu d'une jolie pelouse jonchée de carlines blanches pour se diriger vers un autre puig , celui des Lloses. Ce puig, je vais m'en souvenir très longtemps !

Après un premier petit col herbeux, la Collade d'En Mandoulé sur la carte, la descente abrupte continue mais la sente moins rocailleuse mais plus terreuse devient plus facile jusqu'au Col de Coumeille (1.566m). Ce collet, petite prairie vert clair, encadrée par le Puig dels Sarraïs et le Pic de Granarols (1.690m) je l'ai entrevu dès le début de la descente du col de Serre-Vernet et depuis je languis de l'atteindre tant mon appréhension d'une mauvaise chute dans ce champ de pierres est ancrée dans ma tête. Aussi, je suis si soulagé en l'atteignant que la première chose est de déposer mon sac à dos et de m'allonger les bras en croix sur ce vert herbage. Mais, à cet endroit, je ne suis pas le seul à avoir fait une croix, un autre chemineau a cru utile d'en graver une dans la pierre, moins éphémère que la mienne. Au regard de son usure générale, des vieilles mousses et de l'érosion de petits conglomérats dans son cadre, cette croix me paraît très ancienne. Depuis quand était-elle là ? Je ne suis pas un spécialiste ni de l'archéologie ni de la géologie mais pour l'avoir lu, je sais que le Vallespir a été occupé bien avant le néolithique, époque où l'homme a vraiment commencé à maîtriser le polissage et la sculpture de la pierre. Alors cette croix, est-ce vraiment une croix ancienne ou une cupule comme celles que les hommes préhistoriques ont laissés gravés un peu partout dans le département ? Quelle âge a-t-elle cette gravure ? 5000 ans, 8000 ans, 10000 ans ? Est-elle plus récente et liée au christianisme ? Ou bien a-t-elle été sculpté par un preux et inventif chevalier en partance pour une croisade ? Comme toujours en pareil cas, j'en prends une photo avec l'idée de l'exposer dans mon futur récit à la fois pour l'agrémenter mais aussi avec le secret espoir que cette photo pourra être vue par de vrais spécialistes qui pourront ainsi et sans doute répondre à nombre de mes interrogations.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

L'étrange croix photographiée au col de Coumeille. Je suis preneur, si quelqu'un a des réponses aux questions que je me pose au sujet de cette croix ?

Au col de Coumeille, le chemin contourne le Pic de Granarols pour arriver au Puig des Lloses (1.413m). Ici, le sentier tout en pente douce et très praticable est un réel plaisir. Atteindre ce nouvel objectif n'est cette fois qu'une simple formalité. Il est 14 heures tapantes quand j'arrive au Puig des Lloses. Les panneaux directionnels y sont au nombre de trois : " 1- Le Tour du Vallespir vers Saint-Guillem, à savoir l'itinéraire que je viens de parcourir, 2-Prats-de-Mollo par le Col de Cavanelles, col situé à 30 minutes et bien sûr, 3 Prats-de-Mollo par le GRP Tour du Vallespir que je dois suivre pour respecter le tracé de mon GPS et celui de topo-guide de Georges Véron. Le Puig des Lloses ressemble plutôt à un petit collet avec un replat d'où l'on a une vue plongeante sur Prats-de-Mollo. Ici, je retrouve une flore que j'avais perdue de vue depuis le col de Formentere, faite de sorbiers des oiseleurs, de maigres genêts, de rachitiques genévriers et toujours ces bas massifs de bruyères roses que je côtoie depuis mon départ. Mais une chose me surprend sans trop m'inquiéter sur l'instant, ce sont ces petits amoncellements de branchages cassés dont on voit très bien qu'ils ont été laissés là en l'état depuis la tempête Klaus. Quand à Prats-de-Mollo, d'ici, la cité n'est visible que parce qu'une multitude de grands sapins ont été étêtés ou fracassés sur un vaste périmètre. Mais quand je poursuis la sente du Tour du Vallespir en direction du Col du Miracle, je ne suis pas vraiment inquiet. Il y a bien, dés le départ, un pin en travers du sentier mais je l'enjambe très facilement. 50 mètres plus loin, il y en a deux autres mais ceux-là je ne peux pas les enjamber et suis obligé de les contourner, assez facilement il est vrai. Puis, les pins et les sapins renversés en travers se succèdent. J'enjambe, contourne, passe parfois en dessous et quand je ne peux pas, par dessus. Je commence vraiment à galérer et mes membres sont déjà bien égratignés. Mais en y prêtant attention, je remarque que je ne suis pas le seul à être passer par là. Je vois parfaitement que les bas-côtés du sentier ont été piétinés car la terre est meuble aux endroits où un contournement était la seule alternative. Randonneurs, chasseurs, animaux ? Puis, d'un coup plus rien, plus d'arbres couchés sur plusieurs centaines de mètres. J'arrive au ravin du Pas des Vaques qui n'est ici qu'un petit ru où coule un mince filet d'eau sur un fond boueux. Avec un mouchoir en papier que je mouille au préalable, j'éponge toutes mes égratignures. Je traverse le ruisseau sans problème et poursuis mon chemin dans un sombre sous-bois, ce qui me convient très bien, car ça signifie que tous les arbres sont encore debout. Mais ça ne dure malheureusement pas et là, un peu plus loin, ça se complique car il n'y a pas de réel passage, et en tous cas aucune trace d'un franchissement antérieur. Quand je le peux, j'enjambe, mais quand les troncs sont trop hauts, je tente de passer dessous, mais parfois en vain car le problème avec les sapins, c'est qu'ils sont parfois partiellement déracinés et ont encore toutes leurs épaisses ramures. Et quand ils n'ont plus leurs ramilles, c'est encore pire car leurs branches sèches sont autant de poignards qu'il me faut éviter. Alors, je contourne, je descends, je monte tout en essayant de ne pas trop m'éloigner du chemin. Souvent, je suis contraint d'ôter mon sac à dos, qui, dans ce dédale, est un terrible handicap. Ouf ! J'ai réussi à franchir ce nouvel obstacle mais voilà que 150 mètres plus loin, il en apparaît une autre, aussi difficile que le précédent sinon plus.

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Au Puig des Lloses, les panonceaux sont nombreux et j'aperçois Prats-de-Mollo tout en bas, pourtant je vais me fourvoyer pendant plus de quatre heures dans cette forêt du Miracle ravagée par la terrible tempête Klaus. En vain. De cette forêt, je vais en ressortir meurtri, égratigné, ensanglanté et surtout brûlé des épaules aux chevilles pour être tombé dans de hautes orties ! De surcroît, je vais perdre mon appareil-photo, ce qui va m'obliger à retourner dans ce fatras pour le retrouver. 

Je suis fatigué et sanguinolent mais dans ma tête, je me dis que si j'en ai passé un, je peux en franchir d'autres. Je me dis aussi que les forestiers du coin doivent bien être conscients que le Tour du Vallespir est barré par tous ces arbres abattus et je suppose qu'ils ont commencé à déboiser en partant de Prats-de-Mollo et en remontant le sentier. Ce n'est pas possible, ce traquenard va bien finir par s'arrêter ! Je passe plus facilement ce nouveau barrage et arrive à un endroit où le sentier fait un angle droit près d'un piton rocheux en surplomb de Prats-de-Mollo. Ici, je prends conscience des dégâts considérables que la tempête Klaus a provoqué dans ce secteur mais j'arrive néanmoins à parcourir encore 500 mètres sans trop de difficultés avant de tomber sur une autre empreinte d'une forêt complètement ravagée. J'enjambe, je contourne, remonte et redescend sans trop me préoccuper du chemin qui a définitivement disparu dans cet amas incommensurable d'arbres brisés, de troncs fracassés, de branches amoncelées et de branchages empilés. Dans ma tête, j'espère surtout que ce nouveau sillon dévasté ne sera pas trop large et qu'une nouvelle fois, je pourrai le franchir. Par moment, j'arrive dans des impasses. Il m'est impossible de contourner, de passer dessous et malgré la hauteur où se trouvent les troncs, souvent à plus d'un mètre du sol, la seule solution reste de les enjamber. Je n'en suis pas à ma première enjambée mais cette fois, le tronc est-il un peu plus haut où est-ce la fatigue, toujours est-il, que droit sur le rondin, je me sens partir en arrière entraîné par le poids de mon sac. Un coup de reins pour me rétablir, mais ce coup de reins est bien trop puissant et voilà que je pars en avant ! J'ai beau mouliner l'espace avec mes bras pour tenter de tenir en équilibre mais c'est trop tard, mes mains ne rencontrent que le vide et en tous cas, rien où s'accrocher. Je pars en avant, je vais tomber et me rompre le cou dans ce monstrueux chaos, mais une dernière inspiration me donne l'intuition et le sursaut que plutôt que de tomber n'importe où et n'importe comment, il faut mieux que je me jette à un endroit choisi. Voilà, j'ai réussi, si je puis dire ! Je me retrouve planté au milieu d'un gros massif de ronces et de hautes orties. Mon genou gauche a malgré tout cogné fortement une grosse branche et je saigne abondamment. Mais ce n'est pas ça le plus douloureux, mais toutes ces petites brûlures d'orties qui, peu à peu, en partant des chevilles, semblent monter tout le long de mon corps, enflammant surtout mes jambes mais également mes bras. J'ai l'impression de flamber debout et malgré la douleur, je reste planté là au milieu de cette désolation, de ce néant. Je suis tout à coup comme tétanisé par l'angoisse. Mais je perçois que cette angoisse est arrivée de manière soudaine car jusqu'à présent, j'étais trop occupé à m'en sortir. Une fraction de quelques secondes, il me vient à l'esprit de sortir mon portable et d'appeler des secours. Mais en me retournant, et malgré cette complète désolation, je constate que ce n'est pas le néant absolu : à vol d'oiseau, je ne suis pas très loin d'une piste blanche et sableuse que je distingue en contrebas à quatre ou cinq cent mètres. Je discerne des voitures qui y circulent et aussi un mas. Et même si à cet instant précis, je voudrais être un oiseau, je n'en suis pas un ! Je me suis foutu tout seul dans cette " mouise " et il faut que j'en sorte tout seul aussi ! Mais faire cinq cent mètres dans cette dévastation, je sais à l'avance que c'est une impossible gageure.

La faute à Klaus Schümann

 

Il y a 220 ans, Gavroche chantait :

Je suis tombé par terre c'est la faute à Voltaire.

Le nez dans le ruisseau, c'est la faute à Rousseau.

 

Il y a 220 secondes exactement, j'ai hurlé :

Je suis tombé sur un os, c'est bien la faute à Klaus.

Le nez dans les gentianes, c'est la faute à Schümann.

 

Il y a 220 ans, Gavroche chantait :

Je ne suis pas notaire, c'est la faute à Voltaire.

Je suis petit oiseau, c'est la faute à Rousseau.

 

Il y a 220 secondes, j'ai crié :

J'ai chuté sur les lloses, c'est bien la faute à Klaus

J'ai brisé mes organes, c'est la faute à Schümann

 

Je voudrais faire un saut et atterrir à Prats-de-Mollo,

Je ne suis pas petit oiseau, c'est la faute à mon père !

Alors il me faut être costaud et que j'ai un sursaut !

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Le 24 janvier 2009, la tempête Klaus a provoqué de considérables dégâts dans le Haut-Vallespir. En août, les plaies sont loin d'être toutes cicatrisées.

C'est donc décidé, je vais rebrousser chemin jusqu'au Puig des Lloses et descendre à Prats-de-Mollo par le col de Cavanelles. La première chose à faire, c'est retrouver le sentier mais où peut-il bien être dans ce " labyrinthe " végétal trop urticant à mon goût. Seul mon GPS peut me le dire et il faut d'abord que je sorte de ce roncier qui m'enveloppe comme une toile d'araignée. D'ailleurs des araignées, il y en a pas mal ici et comme elles n'apprécient pas trop mon intrusion dans leur domaine réservé, elles me piquent elles aussi. Mais bon, je n'en suis plus à une piqûre près ! Seule solution, sortir par là où je suis arrivé, c'est-à-dire par le haut. Cette fois, j'ôte mon sac à dos, dont je vérifie au préalable toutes les fermetures et je l'envoie valdinguer par-dessus le tronc dont je viens de choir. Je me hisse sur le tronc et me mets carrément à cheval sur lui. Un point GPS me situe à une cinquantaine de mètres du chemin qui est vers le nord et pour moi vers le haut. Je récupère mon sac et poursuit ainsi mes divagations. Je jette mon sac, me hisse à nouveau, le récupère et ainsi de suite. Parfois, je jette mon sac un peu plus loin car j'arrive à jouer les équilibristes sur plusieurs troncs couchés de concert et ma progression s'accélère. Je vais mettre un gros quart d'heures pour retrouver le sentier et encore plus d'une heure pour rejoindre le Puig des Lloses. Quand je regarde ma montre, j'ai du mal à le croire : il est déjà 17 heures et voilà trois heures que je me fourvoie dans cette forêt du Miracle, la mal nommée. Il faut absolument que j'appelle l'hôtelier pour le prévenir que j'aurai du retard. De ce côté-là au moins je serais tranquille et quand je l'ai au bout du fil, effectivement il me rassure. J'ai réservé, j'ai payé et la chambre à l'hôtel Ausseil m'est complètement allouée quoi qu'il m'arrive. Mais s'il savait ce brave homme ce qu'il vient de m'arriver ! Mais n'en parlons plus, j'en suis sorti, même si c'est fourbu, écorché, entaillé, égratigné, brûlé et ensanglanté de la tête aux chevilles. Maintenant, le sentier qui descend vers le Col de Cavanelles au milieu des genêts et des hautes fougères est plutôt agréable et les panoramas sont suffisamment beaux pour que je me remette à prendre des photos. Mais où est mon appareil ? Il n'est pas dans une de mes poches et je ne me souviens pas l'avoir rangé dans mon sac ! Non, il était dans sa housse accrochée à ma ceinture et à ma ceinture, je n'ai plus rien désormais ! Le bouton-pression a dû s'ouvrir et je l'ai perdu ! Je suis désespéré car perdre mon appareil photo c'est comme si j'avais perdu la mémoire de ces trois premiers jours depuis Amélie-les-Bains. Pour moi, c'est inimaginable et il faut que je le retrouve. Sans trop réfléchir, je sors ma dernière gourde d'eau de mon sac à dos et je jette ce dernier dans les hauts genêts en m'assurant qu'on ne le voit pas depuis le chemin. Deux petites branches en forme de croix que je place au bord du sentier pour retrouver cet endroit et me voilà entrain de remonter le sentier, presque en courant, vers cet " enfer vert " où j'ai sans aucun doute perdu mon appareil. Où se trouvera-t-il ? Loin, près ? L'ai-je perdu quand je suis tombé de ce tronc plus haut que les autres ? S'est-il décroché dans le roncier ? Ou bien sous un tronc que j'ai franchi comme un tunnel ? Voilà les questions et bien d'autres qui grouillent dans ma tête alors que je me jette dans cette " impossible " quête. Vu l'heure et le temps que j'ai mis la première fois, il faut à la fois que je fasse vite mais sans pour autant négliger mes recherches. Ce serait idiot de passer à côté sans voir l'appareil par précipitation. L'absence du sac à dos m'aide considérablement mais au fond de moi, je sais que selon l'endroit où la housse est tombée de ma ceinture, c'est comme rechercher une minuscule aiguille dans une énorme botte de foin. Sans le sac mais avec une gourde à la main, je passe néanmoins tous les petits obstacles plus aisément, je traverse le ru du Pas des Vaques, je franchis le premier couloir de sapins anéantis avant que le sentier fasse un angle droit. Rien ! Il me reste encore un barrage à franchir avant ce virage et comme pour le précèdent, j'essaie de me souvenir par où je suis passé à l'aller mais aussi au retour. Et là, au moment où je me baisse pour passer sous les branches encore vertes d'un immense sapin déraciné, le miracle survient ! La petite housse avec mon numérique à l'intérieur est là au milieu du sentier sous la verte ramure. Ouf ! Ouf ! Ouf ! Je respire à pleins poumons. Quel soulagement. Je vérifie mon appareil que j'enfonce au plus profond de la poche de mon short et par sécurité supplémentaire, je referme celle-ci avec le Velcro consacré. Une fois encore, il ne me reste plus qu'à rebrousser chemin. Ce ne sera que la quatrième fois que j'emprunte cet itinéraire et si ça continue, je vais finir par en connaître le moindre recoin par coeur ! D'ailleurs, c'est le cas, car dans ma précipitation et alors que je me suis arrêté pour boire un coup, j'ai posé machinalement mon bob sur un rocher et je l'ai oublié. Mais je ne suis pas inquiet car je sais parfaitement où il se trouve.

Il est 18 heures quand je passe une nouvelle fois devant la panonceau " Puig des Lloses - 1.413 m - PR6B - Prats-de-Mollo par le Col de Cavanelles - 30 mn ".

A cet instant précis, je ne sais pas pourquoi, il me vient une abominable anxiété : Et si ce chemin, lui aussi, était impraticable, barré par une forêt saccagée ? Après tout, il n'y a pas d'autre chemin et le peu que j'en ai parcouru avant de retourner chercher mon appareil photo ne me laisse aucune certitude et ne me permet pas d'être rassuré. Après tout, Prats-de-Mollo que j'aperçois en bas est au moins à trois kilomètres à vol d'oiseau et il faut au bas mot compter au minimum le double par le chemin. Tout est encore possible ! Cette terrible angoisse, elle va soudain se transformer en une grosse boule au creux de mon estomac et elle va rester là, encore blotti pendant une heure et demie. Autant, j'ai été longtemps serein cet après-midi même au plus fort de mes élucubrations, autant maintenant je prends conscience que je peux ne pas arriver au bout de cette étape, en tous cas aujourd'hui. Mais je sais aussi que je n'ai pas le choix dans la direction à prendre et je continue. Je récupère mon sac. Les photos que j'avais voulu prendre tout à l'heure, je les prends maintenant. Mais j'avoue que je n'ai plus le cœur à ça ! J'ai toujours cette appréhension et ces questions qui fourmillent dans ma tête et je ne pense plus qu'à une chose : descendre, descendre, et descendre encore au plus vite vers Prats-de-Mollo. Comme prévu et sans problème, j'arrive au bout de 30 minutes à ce que je crois être le col de Cavanelles. A gauche, un grand champ en pente avec un large chemin qui le contourne, un autre chemin qui part droit devant moi et un autre qui part complètement à gauche. Je n'ai plus de tracé sur mon GPS et je ne vois plus le balisage jaune que j'ai entr'aperçu dans la descente. Je suis contraint de stopper pour regarder ma carte IGN. J'en profite pour manger et absorber un peu d'énergisant car je suis exténué. Le chemin qui part droit devant moi n'existe pas sur la carte. Ça m'étonne mais je l'oublie. Celui qui part à droite se termine dans un cul de sac. Je l'oublie aussi. Reste celui qui part à gauche et qui semble être le bon à la lecture de la carte. Je redémarre, c'est bon, j'aperçois un coup de peinture jaune sur le piquet d'une clôture. Je contourne ce lopin de terre que je voyais d'en haut. Le chemin continue de tourner, puis à mon étonnement, il se remet à nouveau à monter. Je suis éreinté et je n'en crois pas yeux quand je retrouve le petit pin sous lequel je viens de manger, il y a un instant. Je n'ai fait que tourner en rond autour de cette parcelle en friches. Mon téléphone sonne. C'est Dany. Elle demande de mes nouvelles. Je ne peux que lui dire bof ! Mais elle veut en savoir plus. Alors sans trop l'inquiéter, je lui raconte très brièvement mes mésaventures et lui explique que je ne suis plus sur le Tour du Vallespir, que je galère pour descendre sur Prats-de-Mollo et qu'il est primordial que je regarde très attentivement ma carte IGN. Je coupe en lui promettant de la rappeler dès que j'arrive à l'hôtel. Je redéploie ma carte et essaie de me situer par rapport au paysage que j'ai en face de moi. Je comprends que je ne suis pas au Col de Cavanelles mais près d'un endroit qui sur la carte s'appelle " La Segnora ". Il y a légèrement sur ma gauche le Puig Fabre (1.147 m), petit monticule débonnaire qui me rappelle étrangement ces petits volcans arrondis que l'on rencontre en Auvergne dans la chaîne des Puys.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.OSur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

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Avec une chance inouie, j'ai retrouvé mon appareil-photo, le plus gros de ma galère est terminé, mais je descends très anxieux vers Prats-de-Mollo par le col de Cavanelles car je ne suis pas certain du chemin. Finalement, de ce col, j'aperçois le bourg et un chemin désormais très praticable y descend. Ma grosse boule au creux de l'estomac disparaît.

C'est par là qu'il me faut aller, car le chemin passe au pied de ce Puig, et là je comprends qu'en bas du champ en friches, il me faut partir complètement à gauche par une piste qui est parfaitement indiquée sur la carte. Je redescends, contourne à nouveau le petit lopin de terre jusqu'à un portail que je n'avais pas aperçu la première fois. Il y a bien une trace jaune sur ce portail et une piste qui démarre derrière. Je l'emprunte. Un peu plus loin, il y a un raccourci toujours balisé en jaune qui part à droite dans de hauts genêts, mais je le néglige car même si mon itinéraire est plus long, la piste me semble très empruntée par des véhicules, car il y a de nombreuses empreintes de pneus sur le sable. Et surtout, je sais que cette piste va me mener là où je veux. J'ai trop erré aujourd'hui pour prendre le moindre risque de me retrouver une nouvelle fois face à des arbres morts et couchés. Toujours cette boule à l'estomac ! La piste fait maintenant une grande boucle et descend j'en suis certain vers le Col de Cavanelles. Dans cette descente, j'ai le bonheur de tomber sur une baignoire qui sert d'abreuvoir aux animaux et de mare improvisée aux têtards. D'un gros tuyau en PVC, il y coule une eau fraîche et claire et je peux ainsi me rafraîchir et surtout nettoyer toutes ces plaies et égratignures d'où des écoulements de sang ont ruisselé mais ont séché depuis. Au fond de moi, je me dis que sans toutes ces traces d'hémoglobine sur la peau, je serais un peu plus présentable pour arriver à l'hôtel ! Mais si après ce nettoyage, j'ai retrouvé un peu de mon " prestige ", cette eau glacée a l'effet désastreux de réveiller toutes ces brûlures d'orties. Elles n'étaient pas tout à fait endormies mais elles sommeillaient et les douleurs s'étaient bien atténuées. D'ailleurs, quand je regarde mes bras et mes jambes, mais mes jambes surtout, elles sont recouvertes presque intégralement de petites boursouflures rouges. Je sais que dans ma pharmacie, je n'ai aucun médicament, aucune pommade, pour tempérer cet urticaire. Je repars et cinq minutes plus tard, j'arrive au Col de Cavanelles. Il est 19h15. Ici la piste continue mais un panonceau indique une sente qui part à droite : " Col de Cavanelles - 1.050 m- PR6- Prats-de-Mollo par le Fort Lagarde 40mn ". Je compulse à nouveau ma carte car je me méfie désormais de tous les raccourcis. Mais celui-là est bon quand je constate qu'il ne descend que dans un environnement rocheux. Je sais que c'est gagné et la boule au creux de mon estomac disparaît comme par enchantement.

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Du col de Cavanelles, je distingue la Tour de Mir, une autre difficulté de ce Tour du Vallespir, le Pic de Costabonne, le Roc Colom où le Tech prend sa source et le château Lagarde que je rejoins 40 minutes plus tard. Du château, j'ai une belle vue sur la vallée du Tech, sur Prats-de-Mollo et son riche patrimoine historique. 

Dans cette descente rocailleuse, je me remets à faire quelques photos : de Prats-de-Mollo bien sûr, la cité est encore loin mais je sais qu'elle se rapproche à chacun de mes pas, de la citadelle du Fort Lagarde construite par Vauban en surplomb de la ville et de la Tour de Mir juchée sur un piton rocheux au milieu d'une ténébreuse forêt qui me fait face. Cette tour, je la connais pour y être monter à de multiples reprises. Je la prends en photo, mais à vrai dire je ne veux pas trop la regarder car il va me falloir la gravir demain. Et pourquoi le cacher, j'appréhende déjà car la forêt constituera l'essentiel de cette étape. J'ai mis 30 minutes pour arriver au Fort Lagarde au lieu des 40 qu'annonçait le dernier panneau indicatif. Je prends des photos du fort et de la ville dont le clocher carré qui domine l'église Sainte-Juste et Sainte-Ruffine perfore le panorama. Mais ce ne sont que de simples clichés, juste des souvenirs. Il est 20 heures 15 quand j'entre dans la cité. Voilà 12 heures que je suis sur les chemins. Pour combien de kilomètres parcourus ? Je suis incapable de le dire ! Alors faut-il que je l'avoue, sur la fin, la vigueur m'a manqué pour apprécier tout ce patrimoine historique à sa juste valeur ! Cette étape qui était la plus  courte est en fin de compte devenue la plus difficile depuis mon départ. 

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13 heures sur les chemins, quand j'entre dans Prats-de-Mollo, je suis fatigué et meurtri par cette très longue journée de marche éprouvante et mémorable. C'est au pas de course que j'ai traversé le fort Lagarde construit par Vauban. Je n'en ai pris simplement que quelques photos sans aucune conviction mais pour le simple plaisir de les inscrire dans mon souvenir et surtout pour le réel bonheur d'avoir retrouvé mon appareil photo dans la forêt du Miracle. Cette forêt porte-t-elle bien son nom ? Moi, en tout cas, je reste indécis entre la galère que j'ai vécue pendant 4 heures et le fait d'en être sorti à peu près indemne et pour terminer avec mon appareil photo dans la poche ! Un rescapé lui aussi !

Alors, ce qui m'importe maintenant, c'est de me retrouver au plus vite à l'hôtel. Aussi quand j'arrive sur la place du Foirail, je m'empresse de demander à une dame la direction de l'hôtel Ausseil et gentiment elle m'indique du doigt une grande porte fortifiée au milieu des remparts et me précise que l'hôtel est situé juste une rue après. Je passe sous le porche, arrive sur une autre place et comme je me souviens du nom de cette place " Josep de la Trinxeria ", je sais que l'hôtel est là. Mais la place est bondée de touristes et occupée par les deux restaurants qui y ont largement installés leurs tables et leurs chaises. La place Josep de la Trinxeria est en réalité une immense terrasse pour les deux restaurants mitoyens et quand je demande l'hôtel Ausseil à un garçon de table, il me réponds simplement : vous y êtes ! Au milieu des tables et devant des clients certainement interloqués par mon " look " de randonneur anéanti, je tente en vain de m'expliquer dans un brouhaha inextricable. On ne s'entend pas ici me dit-il. Suivez-moi ! La salle intérieure du restaurant est vide et je peux enfin m'exprimer :

- Je suis Monsieur Jullien, j'ai réservé une chambre. Montrez-la moi que je puisse au plus vite prendre une douche.

- Oui, je crois que vous en avez besoin, me réponds-il avec un petit sourire narquois et en me tendant une clé et en rajoutant : c'est la chambre 7 au deuxième étage.

- Puis-je manger après ? lui dis-je.

- Oui, mais ça ne sera peut-être pas en terrasse car tout est plein me réponds-il.

- Peu m'importe !

Malgré les escaliers qu'il me faut encore escalader, je m'empresse de monter dans la chambre. Avant toute chose, je me déshabille et me jette sous une douche chaude. J'ai bien essayé d'abord l'eau froide mais ce fut un supplice insupportable. Je n'ai pas insisté car à nouveau les brûlures se sont réveillées de manière presque insoutenable. J'ai appelé Dany pour la rassurer et l'embrasser mais sans trop m'étendre sur tous les déboires que j'avais endurés au court de cette mémorable journée. Les hauteurs du Vallespir ont été sacrément âpres aujourd'hui. Encore plus âpres que je ne l'avais imaginé ! C'est sûr maintenant, le titre de mon aventure " Sur les hauteurs d'une vallée âpre " ne sera pas galvaudé.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.oSur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Une ruelle à Prats-de-Mollo et le clocher de l'église Saintes Juste et Ruffine.

ÂPRE EST CE VALLESPIR…… 

 

Âpre est ce Vallespir que je veux cheminer.

Dure est la Tour de Mir quand il faut y grimper.

Je ne fais que grandir sur ces crêtes boisées,

Les sources ont à jaillir pour combler les fossés.

 

Âpre est ce Vallespir que je veux affronter.

Dur est le déplaisir lorsque l'on veut marcher.

Et si mes pas délirent, rien ne peut m'arrêter,

Sauf les pins, ces martyrs que le vent a couché.

 

Âpre est ce Vallespir, je veux le proclamer.

Dur mon sang à tarir, je ne suis que touché.

Et ce pourpre élixir, il ne fait que couler,

Mon corps prêt à bondir sur les chemins dallés.

 

Âpre est ce Vallespir que j'ai pourtant aimé.

Dures ces lloses, ces porphyres où j'ai pourtant chuté.

Et si ma tête chavire, je n'vais pas m'écrouler,

Sur ces frêles sentiers, dans ces prés parfumés.

 

Âpre est ce Vallespir où il faut s'arrêter.

Dur est le point de mire où il faut arriver.

Et si mon cœur soupire alors qu'il est blessé,

Mon amour viens vers moi , toi seul peut l'apaiser.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Le lendemain matin, la Tour de Mir me nargue de ces 1.540 mètres d'altitude. Elle se trouve sur le tracé du Tour du Vallespir. Vais-je l'affronter ?

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Cliquez sur la forêt ravagée par la tempête Klaus pour passer à l'étape suivante

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Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo 15 kms.

Publié le par gibirando

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.3eme étape : Mercredi 19 août 2009.

Saint-Guillem (1.287 m)-Prats-de-Mollo (753 m) 15 kms.

(La plupart des photos de ce Tour du Vallespir peuvent être agrandies en cliquant dessus. 2 fois, la photo occupe parfois le plein écran).

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Cliquez sur la carte pour l'agrandir. 2 fois pour un plein écran.

Nous nous aventurâmes jusqu'au village de Prats-de-Mollo. J'avoue que je préférai les bocages de la plaine à ces grandes montagnes couvertes de chênes verts et qui semblent plus faites pour abriter des bandits, que pour assurer le couvert à des honnêtes gens. Extrait de l'essai " Voyage en France en 1787, 1788, 1789 ". Arthur Young (1741-1820) agriculteur, agronome et écrivain britannique.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.LA FAUTE A KLAUS :

Malgré cette anxiété que j'ai eu hier soir, j'ai fini par m'assoupir. Quand j'y repense, je constate que c'était plutôt une appréhension momentanée qu'une vraie obsession. Puis vers minuit, j'ai été réveillé par un bruit. C'était comme le bruit d'un grattement. Mais une fois éveillé, je me suis aperçu qu'un autre bruit venait du volet d'un petit vasistas qui était resté ouvert et qui grinçait sous une légère brise nocturne. A la faible clarté de ma lampe frontale, je n'ai rien observé qui correspondait au grattement qui m'avait réveillé. Par contre, le rayon plus large que ma lampe projetait contre le mur du refuge me fit remarquer qu'il manquait une grosse pierre à 15 centimètres de ma paillasse. Au fond de ce trou ainsi constitué, il y avait un nid de souris fait d'une bourre blanche, de poils et de fibres diverses. Mais de souris, il n'y en avait point ! Est-ce elle qui grattait avant que je ne me réveille ? Avait-elle eu le temps de décamper avant que je n'éclaire la lampe ? Pour ne plus être embêté par ce grincement lugubre et ces grattements désagréables, je pris les sages résolutions de fermer le vasistas et de déménager ma litière à l'autre bout du bat-flanc. Puis, j'ai profité de ce réveil fortuit pour partir uriner dehors. Le ciel tout entier était étoilé et une belle voie lactée blanchissait le firmament au dessus de la chapelle de l'ermitage. La nuit était douce et quasi silencieuse. Seule une petite brise, frissonnant les feuilles, tentait sans succès de rompre cette quiétude. Comme j'appréciais pleinement l'instant présent, cette sérénité, cette paix secrète et intime, loin du monde bruyant et trop insociable que j'avais quitté, je suis resté de longues minutes sur le pas de la porte, les yeux levés vers le ciel et l'ermitage qui se découpait, à écouter ce silence avant de partir me recoucher. Une fois encore, cette nuit-là fut bénéfique et, à mon grand étonnement, je n'ai ressenti à mon réveil aucune contracture musculaire, ni aucune douleur, malgré les deux longues étapes déjà accomplies et la rusticité du couchage qui ne m'avait pas empêché de dormir profondément.

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Quand je quitte Saint-Guillem, vers le sud, le jour est déjà levé mais le hameau est encore dans la pénombre. Ici les panneaux sont on ne peut plus clairs mais mal placés et je vais me tromper avant de me raviser et de reprendre le bon chemin.

Il est 7 heures. Vers le sud, le jour est déjà levé mais Saint-Guillem de Combret, blotti au fond du vallon de Coumelade, est encore dans une obscure nébulosité. Bloqués par les hauts monts environnants, les rayons du soleil mettront encore plus d'une heure avant d'éclairer complètement le minuscule hameau. Je déjeune de deux gâteaux de riz vite expédiés et d'une grande gorgée d'eau et range tranquillement mes affaires et mon sac à dos en prêtant attention à ne rien oublier dans le refuge. Il est 8 heures quand je démarre avec ma trousse de toilettes, mon gant et ma serviette à la main. Je sais qu'il y a dans le hameau, non loin d'ici, une auge ou plutôt un vieux lavoir dans lequel, par un tuyau de PVC, s'écoule une eau de source cristalline. J'ai bien l'intention de me raser et de faire un brin de toilettes car j'ai la désagréable sensation de me sentir sale et poussiéreux. Je mets un quart d'heure pour me laver et tenter de parfaire ma présentation. Mais j'ai le sentiment que l'eau glacée a eu un seul effet non négligeable sur mon organisme, celui de lui assener un " claquant " coup de fouet qui me permet de démarrer cette étape dans d'excellentes conditions. Je profite pour remplir mes deux gourdes et mon camelback d'une eau fraîche et renouvelée.

La large piste s'élève rapidement au dessus de l'ermitage. Sur ma droite, là même où hier après-midi j'ai galéré, la tempête Klaus a laissé un immense chantier de désolation dans cette forêt qui était pourtant magnifique. Par contre, en face de moi, les flancs du Puig dels Sarraïs (1.830 m) et du col de Serre-Vernet (1.808m) que je dois cheminer semblent moins meurtris. Il y a bien deci delà, quelques cicatrices, quelques sillons d'immenses résineux couchés, mais rien de bien inquiétant, en tous cas vu d'ici.

Quelques minutes plus tard, et alors que je m'apprête à poursuivre la piste, je remarque inopinément sur ma droite un panonceau qui semble m'indiquer Prats-de-Mollo et le col de Serre-Vernet par un autre chemin qui s'enfonce dans la forêt. Et je commets là une nouvelle erreur en ne sortant pas immédiatement mon GPS. Quand je le sors, c'est bien trop tard, car mon GPS ne capte plus aucun satellite masqué qu'il est au fond de ce sous-bois touffu. Deuxième erreur, je ne sors pas ma carte non plus, tranquillisé, il est vrai, par ce rassurant panneau. Et quand je sors ma carte, c'est encore beaucoup trop tard car j'ai marché ainsi une " bonne " demi-heure jusqu'à m'inquiéter de ne plus rencontrer le balisage jaune et rouge qui était pourtant bien visible jusqu'à présent. Au regard de la carte, je me rends à l'évidence, je me suis trompé, une fois de plus. Quitte à avoir perdu une heure, je décide de faire demi-tour car ce chemin qui zigzague toujours en forêt sans aucun balisage apparent me trouble et ne m'amènera nulle part et en tous cas pas où je dois aller.

Quand je retrouve la piste et le panonceau, selon moi, très mal placé à cet endroit, j'ai effectivement perdu une heure. Je m'avance sur la piste et quelques dizaines de mètres plus loin, j'aperçois effectivement les marques de peinture jaune et rouge propres au GRP du Vallespir. Je poursuis la piste et enjambe le fougueux torrent de Coumelade par un large pont bétonné. Peu après, la piste se sépare en deux, mais le balisage est ici parfait et m'oriente vers la droite. Plutôt plane au début, maintenant la piste monte allégrement, effectue deux larges courbes, avant d'atteindre le col Baxo à 1.473 mètres. Au fond de ce petit col herbeux, un nouveau panneau sollicite un départ à gauche. Ici une minuscule sente, encadrée d'une clôture, est barrée d'un petit portail qui est là pour empêcher les bovins de passer mais pas les randonneurs. Sans trop m'en apercevoir, et malgré l'heure perdue, j'ai déjà fait 190 mètres de dénivelé sur les 521 que je dois accomplir pour atteindre les 1.808 mètres du Col de Serre-Vernet. C'est bien sûr encourageant, mais j'évite de trop penser aux 331 mètres restant sur les trois kilomètres d'ascension qui doivent m'amener au pinacle de ce tour du Vallespir.

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J'ai quitté Saint-Guillem par un chemin qui enjambe la rivière Coumelade. Parfaitement balisé, il s'élève rapidement par le col Baxo, file à travers des bois touffus où coulent quelques petits ruisseaux. Mais parfois le chemin se transforme en balcon et j'ai le bonheur d'être en surplomb de superbes paysages. Saint-Guillem est déjà très loin.

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Ce chemin parfois en balcon me laisse entrevoir Saint-Guillem que j'ai quitté ce matin. On aperçoit les bois saccagés par la tempête Klaus. Celui au dessus du hameau où j'ai galéré hier lors de mon arrivée et celui en dessous du refuge où se trouve un bel arboretum avec notamment quelques séquioas.

 Malgré le dénivelé, le petit chemin est changeant et agréable. Cheminant le plus souvent en sous-bois et recouvert d'un épais tapis de feuilles mortes, il coupe quelques ruisseaux, affluents de la Coumelade et monte rectiligne offrant quelquefois de magnifiques vues vers le sud mais surtout sur Saint-Guillem et tout le Bassin de Coumelade. Puis soudain, il bifurque dans le sens opposé en direction du Col de Serre-Vernet dans un bois de petits pins chétifs. Il n'est pas tout à fait midi quand j'arrive au col, point culminant de ce périple avec ses 1.808 mètres

Vaste pré herbeux entouré de pins et de sapins, il semble être le paradis pour nombre de génisses et de vaches blanches indolentes. La plupart sont affalées sur la verte prairie et même mon passage laisse indifférent tous ces bovins, qui repus, ne tournent même pas la tête quand je m'approche d'eux. Ici, les panoramas à 360° sont splendides de tous côtés. De nombreux hauts sommets et de nouveaux pics apparaissent, de nombreuses crêtes composent l'horizon : la Crête des Sept Hommes (2.651m), le Pla Guillem (2.301m), les Roques Blanches (2.252m), les Esquerdes de Rotja (2.316m), le Roc Colom (2.507m) et le Pic de Costabonne (2.465m) pour ne citer que les crêtes les plus connues et les plus attractives. Mais il y aussi de profonds ravins et surtout cette immense et épaisse forêt domaniale qui n'en finit plus de s'étendre sur ce magnifique Haut-Vallespir. Ici, il y a aussi un panneau, mais il ne sert plus à rien car il gît à terre et n'indique plus aucune direction. Je le redresse et essaie en vain de retrouver son emplacement originel. De dépit, je le pose contre un petit pin dans la position qui me semble la plus appropriée avec St Guillem dans la direction d'où je viens. A l'aide d'un bout de ficelle que j'ai trouvé sur la pelouse, j'ai beau l'attacher avec bons sens à une branche du pin, je ne suis guère plus avancé quand à la direction à prendre pour me rendre à Prats-de-Mollo.

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J'arrive au col de Serre Vernet. A 1.808 mètres, c'est le point culminant de mon périple. Les paysages sur le très Haut-Vallespir sont superbes de tous côtés. Ce col est aussi le paradis de vaches et des génisses. Le panonceau indicatif gît à terre, je le redresse et l'attache à un pin mais je ne suis pas plus avançé quant à la direction à prendre pour aller à Prats. Heureusement j'ai mon GPS !

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J'effraie un petit veau puis je m'arrête pour déjeuner dans cet éboulis qui descend très raide du Puig dels Sarraïs vers la vallée de la Parcigoule. Je ne peux trouver plus beau spectacle ! Mais la descente est loin d'être finie, je dois encore atteindre deux cols, celui de la Collade d'En Mandoulé et le col de Coumeille, petit pré verdâtre que j'aperçois tout en bas.

Mais heureusement, ma carte IGN est là et mon GPS aussi et à force d'avancer dans différentes directions vers le sud, je finis par trouver le bon itinéraire qui file sur le pré puis contourne quelques rochers. Il est midi et j'ai faim, mais comme la suite de l'étape est essentiellement faite de descentes, je prends la décision de continuer un peu pour m'offrir comme hors d'oeuvre un splendide panorama dégagé. Cette sente allie pelouses, petits bois de pins et de feuillus mais aussi rocailles et rochers plus ou moins gros. Mais il y aussi de nombreux et bas genévriers derrière lesquels quelques veaux ruminent leur fourrage. L'un d'entre eux peut se vanter de m'avoir fait une belle frayeur et tressaillir quand il a débouché devant moi alors que je marchai dans un silence de cathédrale. Mais je suppose que lui aussi, il a du avoir une peur " bleue " ! En contournant maintenant le rocailleux Puig dels Sarraïs, le chemin n'est désormais plus qu'amoncellement de blocs déchiquetés et gros pierriers escarpés. Je redouble de vigilance pour éviter toute chute qui, ici, serait catastrophique pour de pas dire fatale. Il est temps que je m'arrête pour déjeuner car je ne trouverai pas meilleur belvédère que ces éboulis, bien exposés au soleil, qui descendent raides vers le vallon de la Parcigoule. Il n'y a plus aucun obstacle devant moi et je déguste à la fois ma salade et ce magnifique spectacle. Assis sur une grosse pierre plate bien chaude et adossé à une autre, j'ai trouvé, dans de ce fauteuil improvisé mais un peu dur il est vrai, une terrasse peu confortable pour mes fesses mais idéale pour mes yeux.

D'ici, je jouis d'un panorama exceptionnel sur le Bassin de la Parcigoule mais aussi sur une immense partie de ce Haut-Vallespir que je suis venu découvrir. C'est d'ailleurs en mangeant dans ce gros pierrier que j'ai imaginé le titre de mon voyage et de ce récit : " Sur les hauteurs d'une vallée âpre ".

Après trois jours de marche, et à cet instant précis, il me semblait qu'aucun autre endroit traversé ne méritait plus ce terme de " âpre " que cet immense magma rocheux. Dans cet éboulis, les aspérités ne manquent pas et l'âpreté, je la touche à chaque instant. Le déroulement imminent de ce Tour du Vallespir me montra malheureusement et très vite que je n'avais pas encore tout connu de cette légendaire âpreté. Quand je repars, la sente, où du moins ce que j'en devine grâce à un balisage abondant et précis, se complique sacrément en étant toujours très rocheuse mais en devenant encore plus abrupte. Pour éviter toute chute, je m'applique à poser mes pieds sur des pierres stables et quand les marches sont trop hautes à descendre, je m'aide autant de mes mains que de mes pieds.

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J'en ai fini avec la longue descente le long du flanc pierreux du Puig dels Sarraïs. Au col de Coumeille, une étrange croix gravée dans la pierre et le pic de Granarols que le chemin contourne au milieu d'une jolie pelouse jonchée de carlines blanches pour se diriger vers un autre puig , celui des Lloses. Ce puig, je vais m'en souvenir très longtemps !

Après un premier petit col herbeux, la Collade d'En Mandoulé sur la carte, la descente abrupte continue mais la sente moins rocailleuse mais plus terreuse devient plus facile jusqu'au Col de Coumeille (1.566m). Ce collet, petite prairie vert clair, encadrée par le Puig dels Sarraïs et le Pic de Granarols (1.690m) je l'ai entrevu dès le début de la descente du col de Serre-Vernet et depuis je languis de l'atteindre tant mon appréhension d'une mauvaise chute dans ce champ de pierres est ancrée dans ma tête. Aussi, je suis si soulagé en l'atteignant que la première chose est de déposer mon sac à dos et de m'allonger les bras en croix sur ce vert herbage. Mais, à cet endroit, je ne suis pas le seul à avoir fait une croix, un autre chemineau a cru utile d'en graver une dans la pierre, moins éphémère que la mienne. Au regard de son usure générale, des vieilles mousses et de l'érosion de petits conglomérats dans son cadre, cette croix me paraît très ancienne. Depuis quand était-elle là ? Je ne suis pas un spécialiste ni de l'archéologie ni de la géologie mais pour l'avoir lu, je sais que le Vallespir a été occupé bien avant le néolithique, époque où l'homme a vraiment commencé à maîtriser le polissage et la sculpture de la pierre. Alors cette croix, est-ce vraiment une croix ancienne ou une cupule comme celles que les hommes préhistoriques ont laissés gravés un peu partout dans le département ? Quelle âge a-t-elle cette gravure ? 5000 ans, 8000 ans, 10000 ans ? Est-elle plus récente et liée au christianisme ? Ou bien a-t-elle été sculpté par un preux et inventif chevalier en partance pour une croisade ? Comme toujours en pareil cas, j'en prends une photo avec l'idée de l'exposer dans mon futur récit à la fois pour l'agrémenter mais aussi avec le secret espoir que cette photo pourra être vue par de vrais spécialistes qui pourront ainsi et sans doute répondre à nombre de mes interrogations.

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L'étrange croix photographiée au col de Coumeille. Je suis preneur, si quelqu'un a des réponses aux questions que je me pose au sujet de cette croix ?

Au col de Coumeille, le chemin contourne le Pic de Granarols pour arriver au Puig des Lloses (1.413m). Ici, le sentier tout en pente douce et très praticable est un réel plaisir. Atteindre ce nouvel objectif n'est cette fois qu'une simple formalité. Il est 14 heures tapantes quand j'arrive au Puig des Lloses. Les panneaux directionnels y sont au nombre de trois : " 1- Le Tour du Vallespir vers Saint-Guillem, à savoir l'itinéraire que je viens de parcourir, 2-Prats-de-Mollo par le Col de Cavanelles, col situé à 30 minutes et bien sûr, 3 Prats-de-Mollo par le GRP Tour du Vallespir que je dois suivre pour respecter le tracé de mon GPS et celui de topo-guide de Georges Véron. Le Puig des Lloses ressemble plutôt à un petit collet avec un replat d'où l'on a une vue plongeante sur Prats-de-Mollo. Ici, je retrouve une flore que j'avais perdue de vue depuis le col de Formentere, faite de sorbiers des oiseleurs, de maigres genêts, de rachitiques genévriers et toujours ces bas massifs de bruyères roses que je côtoie depuis mon départ. Mais une chose me surprend sans trop m'inquiéter sur l'instant, ce sont ces petits amoncellements de branchages cassés dont on voit très bien qu'ils ont été laissés là en l'état depuis la tempête Klaus. Quand à Prats-de-Mollo, d'ici, la cité n'est visible que parce qu'une multitude de grands sapins ont été étêtés ou fracassés sur un vaste périmètre. Mais quand je poursuis la sente du Tour du Vallespir en direction du Col du Miracle, je ne suis pas vraiment inquiet. Il y a bien, dés le départ, un pin en travers du sentier mais je l'enjambe très facilement. 50 mètres plus loin, il y en a deux autres mais ceux-là je ne peux pas les enjamber et suis obligé de les contourner, assez facilement il est vrai. Puis, les pins et les sapins renversés en travers se succèdent. J'enjambe, contourne, passe parfois en dessous et quand je ne peux pas, par dessus. Je commence vraiment à galérer et mes membres sont déjà bien égratignés. Mais en y prêtant attention, je remarque que je ne suis pas le seul à être passer par là. Je vois parfaitement que les bas-côtés du sentier ont été piétinés car la terre est meuble aux endroits où un contournement était la seule alternative. Randonneurs, chasseurs, animaux ? Puis, d'un coup plus rien, plus d'arbres couchés sur plusieurs centaines de mètres. J'arrive au ravin du Pas des Vaques qui n'est ici qu'un petit ru où coule un mince filet d'eau sur un fond boueux. Avec un mouchoir en papier que je mouille au préalable, j'éponge toutes mes égratignures. Je traverse le ruisseau sans problème et poursuis mon chemin dans un sombre sous-bois, ce qui me convient très bien, car ça signifie que tous les arbres sont encore debout. Mais ça ne dure malheureusement pas et là, un peu plus loin, ça se complique car il n'y a pas de réel passage, et en tous cas aucune trace d'un franchissement antérieur. Quand je le peux, j'enjambe, mais quand les troncs sont trop hauts, je tente de passer dessous, mais parfois en vain car le problème avec les sapins, c'est qu'ils sont parfois partiellement déracinés et ont encore toutes leurs épaisses ramures. Et quand ils n'ont plus leurs ramilles, c'est encore pire car leurs branches sèches sont autant de poignards qu'il me faut éviter. Alors, je contourne, je descends, je monte tout en essayant de ne pas trop m'éloigner du chemin. Souvent, je suis contraint d'ôter mon sac à dos, qui, dans ce dédale, est un terrible handicap. Ouf ! J'ai réussi à franchir ce nouvel obstacle mais voilà que 150 mètres plus loin, il en apparaît une autre, aussi difficile que le précédent sinon plus.

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Au Puig des Lloses, les panonceaux sont nombreux et j'aperçois Prats-de-Mollo tout en bas, pourtant je vais me fourvoyer pendant plus de quatre heures dans cette forêt du Miracle ravagée par la terrible tempête Klaus. En vain. De cette forêt, je vais en ressortir meurtri, égratigné, ensanglanté et surtout brûlé des épaules aux chevilles pour être tombé dans de hautes orties ! De surcroît, je vais perdre mon appareil-photo, ce qui va m'obliger à retourner dans ce fatras pour le retrouver. 

Je suis fatigué et sanguinolent mais dans ma tête, je me dis que si j'en ai passé un, je peux en franchir d'autres. Je me dis aussi que les forestiers du coin doivent bien être conscients que le Tour du Vallespir est barré par tous ces arbres abattus et je suppose qu'ils ont commencé à déboiser en partant de Prats-de-Mollo et en remontant le sentier. Ce n'est pas possible, ce traquenard va bien finir par s'arrêter ! Je passe plus facilement ce nouveau barrage et arrive à un endroit où le sentier fait un angle droit près d'un piton rocheux en surplomb de Prats-de-Mollo. Ici, je prends conscience des dégâts considérables que la tempête Klaus a provoqué dans ce secteur mais j'arrive néanmoins à parcourir encore 500 mètres sans trop de difficultés avant de tomber sur une autre empreinte d'une forêt complètement ravagée. J'enjambe, je contourne, remonte et redescend sans trop me préoccuper du chemin qui a définitivement disparu dans cet amas incommensurable d'arbres brisés, de troncs fracassés, de branches amoncelées et de branchages empilés. Dans ma tête, j'espère surtout que ce nouveau sillon dévasté ne sera pas trop large et qu'une nouvelle fois, je pourrai le franchir. Par moment, j'arrive dans des impasses. Il m'est impossible de contourner, de passer dessous et malgré la hauteur où se trouvent les troncs, souvent à plus d'un mètre du sol, la seule solution reste de les enjamber. Je n'en suis pas à ma première enjambée mais cette fois, le tronc est-il un peu plus haut où est-ce la fatigue, toujours est-il, que droit sur le rondin, je me sens partir en arrière entraîné par le poids de mon sac. Un coup de reins pour me rétablir, mais ce coup de reins est bien trop puissant et voilà que je pars en avant ! J'ai beau mouliner l'espace avec mes bras pour tenter de tenir en équilibre mais c'est trop tard, mes mains ne rencontrent que le vide et en tous cas, rien où s'accrocher. Je pars en avant, je vais tomber et me rompre le cou dans ce monstrueux chaos, mais une dernière inspiration me donne l'intuition et le sursaut que plutôt que de tomber n'importe où et n'importe comment, il faut mieux que je me jette à un endroit choisi. Voilà, j'ai réussi, si je puis dire ! Je me retrouve planté au milieu d'un gros massif de ronces et de hautes orties. Mon genou gauche a malgré tout cogné fortement une grosse branche et je saigne abondamment. Mais ce n'est pas ça le plus douloureux, mais toutes ces petites brûlures d'orties qui, peu à peu, en partant des chevilles, semblent monter tout le long de mon corps, enflammant surtout mes jambes mais également mes bras. J'ai l'impression de flamber debout et malgré la douleur, je reste planté là au milieu de cette désolation, de ce néant. Je suis tout à coup comme tétanisé par l'angoisse. Mais je perçois que cette angoisse est arrivée de manière soudaine car jusqu'à présent, j'étais trop occupé à m'en sortir. Une fraction de quelques secondes, il me vient à l'esprit de sortir mon portable et d'appeler des secours. Mais en me retournant, et malgré cette complète désolation, je constate que ce n'est pas le néant absolu : à vol d'oiseau, je ne suis pas très loin d'une piste blanche et sableuse que je distingue en contrebas à quatre ou cinq cent mètres. Je discerne des voitures qui y circulent et aussi un mas. Et même si à cet instant précis, je voudrais être un oiseau, je n'en suis pas un ! Je me suis foutu tout seul dans cette " mouise " et il faut que j'en sorte tout seul aussi ! Mais faire cinq cent mètres dans cette dévastation, je sais à l'avance que c'est une impossible gageure.

La faute à Klaus Schümann

 

Il y a 220 ans, Gavroche chantait :

Je suis tombé par terre c'est la faute à Voltaire.

Le nez dans le ruisseau, c'est la faute à Rousseau.

 

Il y a 220 secondes exactement, j'ai hurlé :

Je suis tombé sur un os, c'est bien la faute à Klaus.

Le nez dans les gentianes, c'est la faute à Schümann.

 

Il y a 220 ans, Gavroche chantait :

Je ne suis pas notaire, c'est la faute à Voltaire.

Je suis petit oiseau, c'est la faute à Rousseau.

 

Il y a 220 secondes, j'ai crié :

J'ai chuté sur les lloses, c'est bien la faute à Klaus

J'ai brisé mes organes, c'est la faute à Schümann

 

Je voudrais faire un saut et atterrir à Prats-de-Mollo,

Je ne suis pas petit oiseau, c'est la faute à mon père !

Alors il me faut être costaud et que j'ai un sursaut !

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Le 24 janvier 2009, la tempête Klaus a provoqué de considérables dégâts dans le Haut-Vallespir. En août, les plaies sont loin d'être toutes cicatrisées.

C'est donc décidé, je vais rebrousser chemin jusqu'au Puig des Lloses et descendre à Prats-de-Mollo par le col de Cavanelles. La première chose à faire, c'est retrouver le sentier mais où peut-il bien être dans ce " labyrinthe " végétal trop urticant à mon goût. Seul mon GPS peut me le dire et il faut d'abord que je sorte de ce roncier qui m'enveloppe comme une toile d'araignée. D'ailleurs des araignées, il y en a pas mal ici et comme elles n'apprécient pas trop mon intrusion dans leur domaine réservé, elles me piquent elles aussi. Mais bon, je n'en suis plus à une piqûre près ! Seule solution, sortir par là où je suis arrivé, c'est-à-dire par le haut. Cette fois, j'ôte mon sac à dos, dont je vérifie au préalable toutes les fermetures et je l'envoie valdinguer par-dessus le tronc dont je viens de choir. Je me hisse sur le tronc et me mets carrément à cheval sur lui. Un point GPS me situe à une cinquantaine de mètres du chemin qui est vers le nord et pour moi vers le haut. Je récupère mon sac et poursuit ainsi mes divagations. Je jette mon sac, me hisse à nouveau, le récupère et ainsi de suite. Parfois, je jette mon sac un peu plus loin car j'arrive à jouer les équilibristes sur plusieurs troncs couchés de concert et ma progression s'accélère. Je vais mettre un gros quart d'heures pour retrouver le sentier et encore plus d'une heure pour rejoindre le Puig des Lloses. Quand je regarde ma montre, j'ai du mal à le croire : il est déjà 17 heures et voilà trois heures que je me fourvoie dans cette forêt du Miracle, la mal nommée. Il faut absolument que j'appelle l'hôtelier pour le prévenir que j'aurai du retard. De ce côté-là au moins je serais tranquille et quand je l'ai au bout du fil, effectivement il me rassure. J'ai réservé, j'ai payé et la chambre à l'hôtel Ausseil m'est complètement allouée quoi qu'il m'arrive. Mais s'il savait ce brave homme ce qu'il vient de m'arriver ! Mais n'en parlons plus, j'en suis sorti, même si c'est fourbu, écorché, entaillé, égratigné, brûlé et ensanglanté de la tête aux chevilles. Maintenant, le sentier qui descend vers le Col de Cavanelles au milieu des genêts et des hautes fougères est plutôt agréable et les panoramas sont suffisamment beaux pour que je me remette à prendre des photos. Mais où est mon appareil ? Il n'est pas dans une de mes poches et je ne me souviens pas l'avoir rangé dans mon sac ! Non, il était dans sa housse accrochée à ma ceinture et à ma ceinture, je n'ai plus rien désormais ! Le bouton-pression a dû s'ouvrir et je l'ai perdu ! Je suis désespéré car perdre mon appareil photo c'est comme si j'avais perdu la mémoire de ces trois premiers jours depuis Amélie-les-Bains. Pour moi, c'est inimaginable et il faut que je le retrouve. Sans trop réfléchir, je sors ma dernière gourde d'eau de mon sac à dos et je jette ce dernier dans les hauts genêts en m'assurant qu'on ne le voit pas depuis le chemin. Deux petites branches en forme de croix que je place au bord du sentier pour retrouver cet endroit et me voilà entrain de remonter le sentier, presque en courant, vers cet " enfer vert " où j'ai sans aucun doute perdu mon appareil. Où se trouvera-t-il ? Loin, près ? L'ai-je perdu quand je suis tombé de ce tronc plus haut que les autres ? S'est-il décroché dans le roncier ? Ou bien sous un tronc que j'ai franchi comme un tunnel ? Voilà les questions et bien d'autres qui grouillent dans ma tête alors que je me jette dans cette " impossible " quête. Vu l'heure et le temps que j'ai mis la première fois, il faut à la fois que je fasse vite mais sans pour autant négliger mes recherches. Ce serait idiot de passer à côté sans voir l'appareil par précipitation. L'absence du sac à dos m'aide considérablement mais au fond de moi, je sais que selon l'endroit où la housse est tombée de ma ceinture, c'est comme rechercher une minuscule aiguille dans une énorme botte de foin. Sans le sac mais avec une gourde à la main, je passe néanmoins tous les petits obstacles plus aisément, je traverse le ru du Pas des Vaques, je franchis le premier couloir de sapins anéantis avant que le sentier fasse un angle droit. Rien ! Il me reste encore un barrage à franchir avant ce virage et comme pour le précèdent, j'essaie de me souvenir par où je suis passé à l'aller mais aussi au retour. Et là, au moment où je me baisse pour passer sous les branches encore vertes d'un immense sapin déraciné, le miracle survient ! La petite housse avec mon numérique à l'intérieur est là au milieu du sentier sous la verte ramure. Ouf ! Ouf ! Ouf ! Je respire à pleins poumons. Quel soulagement. Je vérifie mon appareil que j'enfonce au plus profond de la poche de mon short et par sécurité supplémentaire, je referme celle-ci avec le Velcro consacré. Une fois encore, il ne me reste plus qu'à rebrousser chemin. Ce ne sera que la quatrième fois que j'emprunte cet itinéraire et si ça continue, je vais finir par en connaître le moindre recoin par coeur ! D'ailleurs, c'est le cas, car dans ma précipitation et alors que je me suis arrêté pour boire un coup, j'ai posé machinalement mon bob sur un rocher et je l'ai oublié. Mais je ne suis pas inquiet car je sais parfaitement où il se trouve.

Il est 18 heures quand je passe une nouvelle fois devant la panonceau " Puig des Lloses - 1.413 m - PR6B - Prats-de-Mollo par le Col de Cavanelles - 30 mn ".

A cet instant précis, je ne sais pas pourquoi, il me vient une abominable anxiété : Et si ce chemin, lui aussi, était impraticable, barré par une forêt saccagée ? Après tout, il n'y a pas d'autre chemin et le peu que j'en ai parcouru avant de retourner chercher mon appareil photo ne me laisse aucune certitude et ne me permet pas d'être rassuré. Après tout, Prats-de-Mollo que j'aperçois en bas est au moins à trois kilomètres à vol d'oiseau et il faut au bas mot compter au minimum le double par le chemin. Tout est encore possible ! Cette terrible angoisse, elle va soudain se transformer en une grosse boule au creux de mon estomac et elle va rester là, encore blotti pendant une heure et demie. Autant, j'ai été longtemps serein cet après-midi même au plus fort de mes élucubrations, autant maintenant je prends conscience que je peux ne pas arriver au bout de cette étape, en tous cas aujourd'hui. Mais je sais aussi que je n'ai pas le choix dans la direction à prendre et je continue. Je récupère mon sac. Les photos que j'avais voulu prendre tout à l'heure, je les prends maintenant. Mais j'avoue que je n'ai plus le cœur à ça ! J'ai toujours cette appréhension et ces questions qui fourmillent dans ma tête et je ne pense plus qu'à une chose : descendre, descendre, et descendre encore au plus vite vers Prats-de-Mollo. Comme prévu et sans problème, j'arrive au bout de 30 minutes à ce que je crois être le col de Cavanelles. A gauche, un grand champ en pente avec un large chemin qui le contourne, un autre chemin qui part droit devant moi et un autre qui part complètement à gauche. Je n'ai plus de tracé sur mon GPS et je ne vois plus le balisage jaune que j'ai entr'aperçu dans la descente. Je suis contraint de stopper pour regarder ma carte IGN. J'en profite pour manger et absorber un peu d'énergisant car je suis exténué. Le chemin qui part droit devant moi n'existe pas sur la carte. Ça m'étonne mais je l'oublie. Celui qui part à droite se termine dans un cul de sac. Je l'oublie aussi. Reste celui qui part à gauche et qui semble être le bon à la lecture de la carte. Je redémarre, c'est bon, j'aperçois un coup de peinture jaune sur le piquet d'une clôture. Je contourne ce lopin de terre que je voyais d'en haut. Le chemin continue de tourner, puis à mon étonnement, il se remet à nouveau à monter. Je suis éreinté et je n'en crois pas yeux quand je retrouve le petit pin sous lequel je viens de manger, il y a un instant. Je n'ai fait que tourner en rond autour de cette parcelle en friches. Mon téléphone sonne. C'est Dany. Elle demande de mes nouvelles. Je ne peux que lui dire bof ! Mais elle veut en savoir plus. Alors sans trop l'inquiéter, je lui raconte très brièvement mes mésaventures et lui explique que je ne suis plus sur le Tour du Vallespir, que je galère pour descendre sur Prats-de-Mollo et qu'il est primordial que je regarde très attentivement ma carte IGN. Je coupe en lui promettant de la rappeler dès que j'arrive à l'hôtel. Je redéploie ma carte et essaie de me situer par rapport au paysage que j'ai en face de moi. Je comprends que je ne suis pas au Col de Cavanelles mais près d'un endroit qui sur la carte s'appelle " La Segnora ". Il y a légèrement sur ma gauche le Puig Fabre (1.147 m), petit monticule débonnaire qui me rappelle étrangement ces petits volcans arrondis que l'on rencontre en Auvergne dans la chaîne des Puys.

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Avec une chance inouie, j'ai retrouvé mon appareil-photo, le plus gros de ma galère est terminé, mais je descends très anxieux vers Prats-de-Mollo par le col de Cavanelles car je ne suis pas certain du chemin. Finalement, de ce col, j'aperçois le bourg et un chemin désormais très praticable y descend. Ma grosse boule au creux de l'estomac disparaît.

C'est par là qu'il me faut aller, car le chemin passe au pied de ce Puig, et là je comprends qu'en bas du champ en friches, il me faut partir complètement à gauche par une piste qui est parfaitement indiquée sur la carte. Je redescends, contourne à nouveau le petit lopin de terre jusqu'à un portail que je n'avais pas aperçu la première fois. Il y a bien une trace jaune sur ce portail et une piste qui démarre derrière. Je l'emprunte. Un peu plus loin, il y a un raccourci toujours balisé en jaune qui part à droite dans de hauts genêts, mais je le néglige car même si mon itinéraire est plus long, la piste me semble très empruntée par des véhicules, car il y a de nombreuses empreintes de pneus sur le sable. Et surtout, je sais que cette piste va me mener là où je veux. J'ai trop erré aujourd'hui pour prendre le moindre risque de me retrouver une nouvelle fois face à des arbres morts et couchés. Toujours cette boule à l'estomac ! La piste fait maintenant une grande boucle et descend j'en suis certain vers le Col de Cavanelles. Dans cette descente, j'ai le bonheur de tomber sur une baignoire qui sert d'abreuvoir aux animaux et de mare improvisée aux têtards. D'un gros tuyau en PVC, il y coule une eau fraîche et claire et je peux ainsi me rafraîchir et surtout nettoyer toutes ces plaies et égratignures d'où des écoulements de sang ont ruisselé mais ont séché depuis. Au fond de moi, je me dis que sans toutes ces traces d'hémoglobine sur la peau, je serais un peu plus présentable pour arriver à l'hôtel ! Mais si après ce nettoyage, j'ai retrouvé un peu de mon " prestige ", cette eau glacée a l'effet désastreux de réveiller toutes ces brûlures d'orties. Elles n'étaient pas tout à fait endormies mais elles sommeillaient et les douleurs s'étaient bien atténuées. D'ailleurs, quand je regarde mes bras et mes jambes, mais mes jambes surtout, elles sont recouvertes presque intégralement de petites boursouflures rouges. Je sais que dans ma pharmacie, je n'ai aucun médicament, aucune pommade, pour tempérer cet urticaire. Je repars et cinq minutes plus tard, j'arrive au Col de Cavanelles. Il est 19h15. Ici la piste continue mais un panonceau indique une sente qui part à droite : " Col de Cavanelles - 1.050 m- PR6- Prats-de-Mollo par le Fort Lagarde 40mn ". Je compulse à nouveau ma carte car je me méfie désormais de tous les raccourcis. Mais celui-là est bon quand je constate qu'il ne descend que dans un environnement rocheux. Je sais que c'est gagné et la boule au creux de mon estomac disparaît comme par enchantement.

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Du col de Cavanelles, je distingue la Tour de Mir, une autre difficulté de ce Tour du Vallespir, le Pic de Costabonne, le Roc Colom où le Tech prend sa source et le château Lagarde que je rejoins 40 minutes plus tard. Du château, j'ai une belle vue sur la vallée du Tech, sur Prats-de-Mollo et son riche patrimoine historique. 

Dans cette descente rocailleuse, je me remets à faire quelques photos : de Prats-de-Mollo bien sûr, la cité est encore loin mais je sais qu'elle se rapproche à chacun de mes pas, de la citadelle du Fort Lagarde construite par Vauban en surplomb de la ville et de la Tour de Mir juchée sur un piton rocheux au milieu d'une ténébreuse forêt qui me fait face. Cette tour, je la connais pour y être monter à de multiples reprises. Je la prends en photo, mais à vrai dire je ne veux pas trop la regarder car il va me falloir la gravir demain. Et pourquoi le cacher, j'appréhende déjà car la forêt constituera l'essentiel de cette étape. J'ai mis 30 minutes pour arriver au Fort Lagarde au lieu des 40 qu'annonçait le dernier panneau indicatif. Je prends des photos du fort et de la ville dont le clocher carré qui domine l'église Sainte-Juste et Sainte-Ruffine perfore le panorama. Mais ce ne sont que de simples clichés, juste des souvenirs. Il est 20 heures 15 quand j'entre dans la cité. Voilà 12 heures que je suis sur les chemins. Pour combien de kilomètres parcourus ? Je suis incapable de le dire ! Alors faut-il que je l'avoue, sur la fin, la vigueur m'a manqué pour apprécier tout ce patrimoine historique à sa juste valeur ! Cette étape qui était la plus  courte est en fin de compte devenue la plus difficile depuis mon départ. 

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13 heures sur les chemins, quand j'entre dans Prats-de-Mollo, je suis fatigué et meurtri par cette très longue journée de marche éprouvante et mémorable. C'est au pas de course que j'ai traversé le fort Lagarde construit par Vauban. Je n'en ai pris simplement que quelques photos sans aucune conviction mais pour le simple plaisir de les inscrire dans mon souvenir et surtout pour le réel bonheur d'avoir retrouvé mon appareil photo dans la forêt du Miracle. Cette forêt porte-t-elle bien son nom ? Moi, en tout cas, je reste indécis entre la galère que j'ai vécue pendant 4 heures et le fait d'en être sorti à peu près indemne et pour terminer avec mon appareil photo dans la poche ! Un rescapé lui aussi !

Alors, ce qui m'importe maintenant, c'est de me retrouver au plus vite à l'hôtel. Aussi quand j'arrive sur la place du Foirail, je m'empresse de demander à une dame la direction de l'hôtel Ausseil et gentiment elle m'indique du doigt une grande porte fortifiée au milieu des remparts et me précise que l'hôtel est situé juste une rue après. Je passe sous le porche, arrive sur une autre place et comme je me souviens du nom de cette place " Josep de la Trinxeria ", je sais que l'hôtel est là. Mais la place est bondée de touristes et occupée par les deux restaurants qui y ont largement installés leurs tables et leurs chaises. La place Josep de la Trinxeria est en réalité une immense terrasse pour les deux restaurants mitoyens et quand je demande l'hôtel Ausseil à un garçon de table, il me réponds simplement : vous y êtes ! Au milieu des tables et devant des clients certainement interloqués par mon " look " de randonneur anéanti, je tente en vain de m'expliquer dans un brouhaha inextricable. On ne s'entend pas ici me dit-il. Suivez-moi ! La salle intérieure du restaurant est vide et je peux enfin m'exprimer :

- Je suis Monsieur Jullien, j'ai réservé une chambre. Montrez-la moi que je puisse au plus vite prendre une douche.

- Oui, je crois que vous en avez besoin, me réponds-il avec un petit sourire narquois et en me tendant une clé et en rajoutant : c'est la chambre 7 au deuxième étage.

- Puis-je manger après ? lui dis-je.

- Oui, mais ça ne sera peut-être pas en terrasse car tout est plein me réponds-il.

- Peu m'importe !

Malgré les escaliers qu'il me faut encore escalader, je m'empresse de monter dans la chambre. Avant toute chose, je me déshabille et me jette sous une douche chaude. J'ai bien essayé d'abord l'eau froide mais ce fut un supplice insupportable. Je n'ai pas insisté car à nouveau les brûlures se sont réveillées de manière presque insoutenable. J'ai appelé Dany pour la rassurer et l'embrasser mais sans trop m'étendre sur tous les déboires que j'avais endurés au court de cette mémorable journée. Les hauteurs du Vallespir ont été sacrément âpres aujourd'hui. Encore plus âpres que je ne l'avais imaginé ! C'est sûr maintenant, le titre de mon aventure " Sur les hauteurs d'une vallée âpre " ne sera pas galvaudé.

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Une ruelle à Prats-de-Mollo et le clocher de l'église Saintes Juste et Ruffine.

ÂPRE EST CE VALLESPIR…… 

 

Âpre est ce Vallespir que je veux cheminer.

Dure est la Tour de Mir quand il faut y grimper.

Je ne fais que grandir sur ces crêtes boisées,

Les sources ont à jaillir pour combler les fossés.

 

Âpre est ce Vallespir que je veux affronter.

Dur est le déplaisir lorsque l'on veut marcher.

Et si mes pas délirent, rien ne peut m'arrêter,

Sauf les pins, ces martyrs que le vent a couché.

 

Âpre est ce Vallespir, je veux le proclamer.

Dur mon sang à tarir, je ne suis que touché.

Et ce pourpre élixir, il ne fait que couler,

Mon corps prêt à bondir sur les chemins dallés.

 

Âpre est ce Vallespir que j'ai pourtant aimé.

Dures ces lloses, ces porphyres où j'ai pourtant chuté.

Et si ma tête chavire, je n'vais pas m'écrouler,

Sur ces frêles sentiers, dans ces prés parfumés.

 

Âpre est ce Vallespir où il faut s'arrêter.

Dur est le point de mire où il faut arriver.

Et si mon cœur soupire alors qu'il est blessé,

Mon amour viens vers moi , toi seul peut l'apaiser.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Le lendemain matin, la Tour de Mir me nargue de ces 1.540 mètres d'altitude. Elle se trouve sur le tracé du Tour du Vallespir. Vais-je l'affronter ?

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Cliquez sur la forêt ravagée par la tempête Klaus pour passer à l'étape suivante

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Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo 15 kms.

Publié le par gibirando

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.3eme étape : Mercredi 19 août 2009.

Saint-Guillem (1.287 m)-Prats-de-Mollo (753 m) 15 kms.

(La plupart des photos de ce Tour du Vallespir peuvent être agrandies en cliquant dessus. 2 fois, la photo occupe parfois le plein écran).

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Cliquez sur la carte pour l'agrandir. 2 fois pour un plein écran.

Nous nous aventurâmes jusqu'au village de Prats-de-Mollo. J'avoue que je préférai les bocages de la plaine à ces grandes montagnes couvertes de chênes verts et qui semblent plus faites pour abriter des bandits, que pour assurer le couvert à des honnêtes gens. Extrait de l'essai " Voyage en France en 1787, 1788, 1789 ". Arthur Young (1741-1820) agriculteur, agronome et écrivain britannique.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.LA FAUTE A KLAUS :

Malgré cette anxiété que j'ai eu hier soir, j'ai fini par m'assoupir. Quand j'y repense, je constate que c'était plutôt une appréhension momentanée qu'une vraie obsession. Puis vers minuit, j'ai été réveillé par un bruit. C'était comme le bruit d'un grattement. Mais une fois éveillé, je me suis aperçu qu'un autre bruit venait du volet d'un petit vasistas qui était resté ouvert et qui grinçait sous une légère brise nocturne. A la faible clarté de ma lampe frontale, je n'ai rien observé qui correspondait au grattement qui m'avait réveillé. Par contre, le rayon plus large que ma lampe projetait contre le mur du refuge me fit remarquer qu'il manquait une grosse pierre à 15 centimètres de ma paillasse. Au fond de ce trou ainsi constitué, il y avait un nid de souris fait d'une bourre blanche, de poils et de fibres diverses. Mais de souris, il n'y en avait point ! Est-ce elle qui grattait avant que je ne me réveille ? Avait-elle eu le temps de décamper avant que je n'éclaire la lampe ? Pour ne plus être embêté par ce grincement lugubre et ces grattements désagréables, je pris les sages résolutions de fermer le vasistas et de déménager ma litière à l'autre bout du bat-flanc. Puis, j'ai profité de ce réveil fortuit pour partir uriner dehors. Le ciel tout entier était étoilé et une belle voie lactée blanchissait le firmament au dessus de la chapelle de l'ermitage. La nuit était douce et quasi silencieuse. Seule une petite brise, frissonnant les feuilles, tentait sans succès de rompre cette quiétude. Comme j'appréciais pleinement l'instant présent, cette sérénité, cette paix secrète et intime, loin du monde bruyant et trop insociable que j'avais quitté, je suis resté de longues minutes sur le pas de la porte, les yeux levés vers le ciel et l'ermitage qui se découpait, à écouter ce silence avant de partir me recoucher. Une fois encore, cette nuit-là fut bénéfique et, à mon grand étonnement, je n'ai ressenti à mon réveil aucune contracture musculaire, ni aucune douleur, malgré les deux longues étapes déjà accomplies et la rusticité du couchage qui ne m'avait pas empêché de dormir profondément.

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Quand je quitte Saint-Guillem, vers le sud, le jour est déjà levé mais le hameau est encore dans la pénombre. Ici les panneaux sont on ne peut plus clairs mais mal placés et je vais me tromper avant de me raviser et de reprendre le bon chemin.

Il est 7 heures. Vers le sud, le jour est déjà levé mais Saint-Guillem de Combret, blotti au fond du vallon de Coumelade, est encore dans une obscure nébulosité. Bloqués par les hauts monts environnants, les rayons du soleil mettront encore plus d'une heure avant d'éclairer complètement le minuscule hameau. Je déjeune de deux gâteaux de riz vite expédiés et d'une grande gorgée d'eau et range tranquillement mes affaires et mon sac à dos en prêtant attention à ne rien oublier dans le refuge. Il est 8 heures quand je démarre avec ma trousse de toilettes, mon gant et ma serviette à la main. Je sais qu'il y a dans le hameau, non loin d'ici, une auge ou plutôt un vieux lavoir dans lequel, par un tuyau de PVC, s'écoule une eau de source cristalline. J'ai bien l'intention de me raser et de faire un brin de toilettes car j'ai la désagréable sensation de me sentir sale et poussiéreux. Je mets un quart d'heure pour me laver et tenter de parfaire ma présentation. Mais j'ai le sentiment que l'eau glacée a eu un seul effet non négligeable sur mon organisme, celui de lui assener un " claquant " coup de fouet qui me permet de démarrer cette étape dans d'excellentes conditions. Je profite pour remplir mes deux gourdes et mon camelback d'une eau fraîche et renouvelée.

La large piste s'élève rapidement au dessus de l'ermitage. Sur ma droite, là même où hier après-midi j'ai galéré, la tempête Klaus a laissé un immense chantier de désolation dans cette forêt qui était pourtant magnifique. Par contre, en face de moi, les flancs du Puig dels Sarraïs (1.830 m) et du col de Serre-Vernet (1.808m) que je dois cheminer semblent moins meurtris. Il y a bien deci delà, quelques cicatrices, quelques sillons d'immenses résineux couchés, mais rien de bien inquiétant, en tous cas vu d'ici.

Quelques minutes plus tard, et alors que je m'apprête à poursuivre la piste, je remarque inopinément sur ma droite un panonceau qui semble m'indiquer Prats-de-Mollo et le col de Serre-Vernet par un autre chemin qui s'enfonce dans la forêt. Et je commets là une nouvelle erreur en ne sortant pas immédiatement mon GPS. Quand je le sors, c'est bien trop tard, car mon GPS ne capte plus aucun satellite masqué qu'il est au fond de ce sous-bois touffu. Deuxième erreur, je ne sors pas ma carte non plus, tranquillisé, il est vrai, par ce rassurant panneau. Et quand je sors ma carte, c'est encore beaucoup trop tard car j'ai marché ainsi une " bonne " demi-heure jusqu'à m'inquiéter de ne plus rencontrer le balisage jaune et rouge qui était pourtant bien visible jusqu'à présent. Au regard de la carte, je me rends à l'évidence, je me suis trompé, une fois de plus. Quitte à avoir perdu une heure, je décide de faire demi-tour car ce chemin qui zigzague toujours en forêt sans aucun balisage apparent me trouble et ne m'amènera nulle part et en tous cas pas où je dois aller.

Quand je retrouve la piste et le panonceau, selon moi, très mal placé à cet endroit, j'ai effectivement perdu une heure. Je m'avance sur la piste et quelques dizaines de mètres plus loin, j'aperçois effectivement les marques de peinture jaune et rouge propres au GRP du Vallespir. Je poursuis la piste et enjambe le fougueux torrent de Coumelade par un large pont bétonné. Peu après, la piste se sépare en deux, mais le balisage est ici parfait et m'oriente vers la droite. Plutôt plane au début, maintenant la piste monte allégrement, effectue deux larges courbes, avant d'atteindre le col Baxo à 1.473 mètres. Au fond de ce petit col herbeux, un nouveau panneau sollicite un départ à gauche. Ici une minuscule sente, encadrée d'une clôture, est barrée d'un petit portail qui est là pour empêcher les bovins de passer mais pas les randonneurs. Sans trop m'en apercevoir, et malgré l'heure perdue, j'ai déjà fait 190 mètres de dénivelé sur les 521 que je dois accomplir pour atteindre les 1.808 mètres du Col de Serre-Vernet. C'est bien sûr encourageant, mais j'évite de trop penser aux 331 mètres restant sur les trois kilomètres d'ascension qui doivent m'amener au pinacle de ce tour du Vallespir.

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J'ai quitté Saint-Guillem par un chemin qui enjambe la rivière Coumelade. Parfaitement balisé, il s'élève rapidement par le col Baxo, file à travers des bois touffus où coulent quelques petits ruisseaux. Mais parfois le chemin se transforme en balcon et j'ai le bonheur d'être en surplomb de superbes paysages. Saint-Guillem est déjà très loin.

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Ce chemin parfois en balcon me laisse entrevoir Saint-Guillem que j'ai quitté ce matin. On aperçoit les bois saccagés par la tempête Klaus. Celui au dessus du hameau où j'ai galéré hier lors de mon arrivée et celui en dessous du refuge où se trouve un bel arboretum avec notamment quelques séquioas.

 Malgré le dénivelé, le petit chemin est changeant et agréable. Cheminant le plus souvent en sous-bois et recouvert d'un épais tapis de feuilles mortes, il coupe quelques ruisseaux, affluents de la Coumelade et monte rectiligne offrant quelquefois de magnifiques vues vers le sud mais surtout sur Saint-Guillem et tout le Bassin de Coumelade. Puis soudain, il bifurque dans le sens opposé en direction du Col de Serre-Vernet dans un bois de petits pins chétifs. Il n'est pas tout à fait midi quand j'arrive au col, point culminant de ce périple avec ses 1.808 mètres

Vaste pré herbeux entouré de pins et de sapins, il semble être le paradis pour nombre de génisses et de vaches blanches indolentes. La plupart sont affalées sur la verte prairie et même mon passage laisse indifférent tous ces bovins, qui repus, ne tournent même pas la tête quand je m'approche d'eux. Ici, les panoramas à 360° sont splendides de tous côtés. De nombreux hauts sommets et de nouveaux pics apparaissent, de nombreuses crêtes composent l'horizon : la Crête des Sept Hommes (2.651m), le Pla Guillem (2.301m), les Roques Blanches (2.252m), les Esquerdes de Rotja (2.316m), le Roc Colom (2.507m) et le Pic de Costabonne (2.465m) pour ne citer que les crêtes les plus connues et les plus attractives. Mais il y aussi de profonds ravins et surtout cette immense et épaisse forêt domaniale qui n'en finit plus de s'étendre sur ce magnifique Haut-Vallespir. Ici, il y a aussi un panneau, mais il ne sert plus à rien car il gît à terre et n'indique plus aucune direction. Je le redresse et essaie en vain de retrouver son emplacement originel. De dépit, je le pose contre un petit pin dans la position qui me semble la plus appropriée avec St Guillem dans la direction d'où je viens. A l'aide d'un bout de ficelle que j'ai trouvé sur la pelouse, j'ai beau l'attacher avec bons sens à une branche du pin, je ne suis guère plus avancé quand à la direction à prendre pour me rendre à Prats-de-Mollo.

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J'arrive au col de Serre Vernet. A 1.808 mètres, c'est le point culminant de mon périple. Les paysages sur le très Haut-Vallespir sont superbes de tous côtés. Ce col est aussi le paradis de vaches et des génisses. Le panonceau indicatif gît à terre, je le redresse et l'attache à un pin mais je ne suis pas plus avançé quant à la direction à prendre pour aller à Prats. Heureusement j'ai mon GPS !

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J'effraie un petit veau puis je m'arrête pour déjeuner dans cet éboulis qui descend très raide du Puig dels Sarraïs vers la vallée de la Parcigoule. Je ne peux trouver plus beau spectacle ! Mais la descente est loin d'être finie, je dois encore atteindre deux cols, celui de la Collade d'En Mandoulé et le col de Coumeille, petit pré verdâtre que j'aperçois tout en bas.

Mais heureusement, ma carte IGN est là et mon GPS aussi et à force d'avancer dans différentes directions vers le sud, je finis par trouver le bon itinéraire qui file sur le pré puis contourne quelques rochers. Il est midi et j'ai faim, mais comme la suite de l'étape est essentiellement faite de descentes, je prends la décision de continuer un peu pour m'offrir comme hors d'oeuvre un splendide panorama dégagé. Cette sente allie pelouses, petits bois de pins et de feuillus mais aussi rocailles et rochers plus ou moins gros. Mais il y aussi de nombreux et bas genévriers derrière lesquels quelques veaux ruminent leur fourrage. L'un d'entre eux peut se vanter de m'avoir fait une belle frayeur et tressaillir quand il a débouché devant moi alors que je marchai dans un silence de cathédrale. Mais je suppose que lui aussi, il a du avoir une peur " bleue " ! En contournant maintenant le rocailleux Puig dels Sarraïs, le chemin n'est désormais plus qu'amoncellement de blocs déchiquetés et gros pierriers escarpés. Je redouble de vigilance pour éviter toute chute qui, ici, serait catastrophique pour de pas dire fatale. Il est temps que je m'arrête pour déjeuner car je ne trouverai pas meilleur belvédère que ces éboulis, bien exposés au soleil, qui descendent raides vers le vallon de la Parcigoule. Il n'y a plus aucun obstacle devant moi et je déguste à la fois ma salade et ce magnifique spectacle. Assis sur une grosse pierre plate bien chaude et adossé à une autre, j'ai trouvé, dans de ce fauteuil improvisé mais un peu dur il est vrai, une terrasse peu confortable pour mes fesses mais idéale pour mes yeux.

D'ici, je jouis d'un panorama exceptionnel sur le Bassin de la Parcigoule mais aussi sur une immense partie de ce Haut-Vallespir que je suis venu découvrir. C'est d'ailleurs en mangeant dans ce gros pierrier que j'ai imaginé le titre de mon voyage et de ce récit : " Sur les hauteurs d'une vallée âpre ".

Après trois jours de marche, et à cet instant précis, il me semblait qu'aucun autre endroit traversé ne méritait plus ce terme de " âpre " que cet immense magma rocheux. Dans cet éboulis, les aspérités ne manquent pas et l'âpreté, je la touche à chaque instant. Le déroulement imminent de ce Tour du Vallespir me montra malheureusement et très vite que je n'avais pas encore tout connu de cette légendaire âpreté. Quand je repars, la sente, où du moins ce que j'en devine grâce à un balisage abondant et précis, se complique sacrément en étant toujours très rocheuse mais en devenant encore plus abrupte. Pour éviter toute chute, je m'applique à poser mes pieds sur des pierres stables et quand les marches sont trop hautes à descendre, je m'aide autant de mes mains que de mes pieds.

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J'en ai fini avec la longue descente le long du flanc pierreux du Puig dels Sarraïs. Au col de Coumeille, une étrange croix gravée dans la pierre et le pic de Granarols que le chemin contourne au milieu d'une jolie pelouse jonchée de carlines blanches pour se diriger vers un autre puig , celui des Lloses. Ce puig, je vais m'en souvenir très longtemps !

Après un premier petit col herbeux, la Collade d'En Mandoulé sur la carte, la descente abrupte continue mais la sente moins rocailleuse mais plus terreuse devient plus facile jusqu'au Col de Coumeille (1.566m). Ce collet, petite prairie vert clair, encadrée par le Puig dels Sarraïs et le Pic de Granarols (1.690m) je l'ai entrevu dès le début de la descente du col de Serre-Vernet et depuis je languis de l'atteindre tant mon appréhension d'une mauvaise chute dans ce champ de pierres est ancrée dans ma tête. Aussi, je suis si soulagé en l'atteignant que la première chose est de déposer mon sac à dos et de m'allonger les bras en croix sur ce vert herbage. Mais, à cet endroit, je ne suis pas le seul à avoir fait une croix, un autre chemineau a cru utile d'en graver une dans la pierre, moins éphémère que la mienne. Au regard de son usure générale, des vieilles mousses et de l'érosion de petits conglomérats dans son cadre, cette croix me paraît très ancienne. Depuis quand était-elle là ? Je ne suis pas un spécialiste ni de l'archéologie ni de la géologie mais pour l'avoir lu, je sais que le Vallespir a été occupé bien avant le néolithique, époque où l'homme a vraiment commencé à maîtriser le polissage et la sculpture de la pierre. Alors cette croix, est-ce vraiment une croix ancienne ou une cupule comme celles que les hommes préhistoriques ont laissés gravés un peu partout dans le département ? Quelle âge a-t-elle cette gravure ? 5000 ans, 8000 ans, 10000 ans ? Est-elle plus récente et liée au christianisme ? Ou bien a-t-elle été sculpté par un preux et inventif chevalier en partance pour une croisade ? Comme toujours en pareil cas, j'en prends une photo avec l'idée de l'exposer dans mon futur récit à la fois pour l'agrémenter mais aussi avec le secret espoir que cette photo pourra être vue par de vrais spécialistes qui pourront ainsi et sans doute répondre à nombre de mes interrogations.

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L'étrange croix photographiée au col de Coumeille. Je suis preneur, si quelqu'un a des réponses aux questions que je me pose au sujet de cette croix ?

Au col de Coumeille, le chemin contourne le Pic de Granarols pour arriver au Puig des Lloses (1.413m). Ici, le sentier tout en pente douce et très praticable est un réel plaisir. Atteindre ce nouvel objectif n'est cette fois qu'une simple formalité. Il est 14 heures tapantes quand j'arrive au Puig des Lloses. Les panneaux directionnels y sont au nombre de trois : " 1- Le Tour du Vallespir vers Saint-Guillem, à savoir l'itinéraire que je viens de parcourir, 2-Prats-de-Mollo par le Col de Cavanelles, col situé à 30 minutes et bien sûr, 3 Prats-de-Mollo par le GRP Tour du Vallespir que je dois suivre pour respecter le tracé de mon GPS et celui de topo-guide de Georges Véron. Le Puig des Lloses ressemble plutôt à un petit collet avec un replat d'où l'on a une vue plongeante sur Prats-de-Mollo. Ici, je retrouve une flore que j'avais perdue de vue depuis le col de Formentere, faite de sorbiers des oiseleurs, de maigres genêts, de rachitiques genévriers et toujours ces bas massifs de bruyères roses que je côtoie depuis mon départ. Mais une chose me surprend sans trop m'inquiéter sur l'instant, ce sont ces petits amoncellements de branchages cassés dont on voit très bien qu'ils ont été laissés là en l'état depuis la tempête Klaus. Quand à Prats-de-Mollo, d'ici, la cité n'est visible que parce qu'une multitude de grands sapins ont été étêtés ou fracassés sur un vaste périmètre. Mais quand je poursuis la sente du Tour du Vallespir en direction du Col du Miracle, je ne suis pas vraiment inquiet. Il y a bien, dés le départ, un pin en travers du sentier mais je l'enjambe très facilement. 50 mètres plus loin, il y en a deux autres mais ceux-là je ne peux pas les enjamber et suis obligé de les contourner, assez facilement il est vrai. Puis, les pins et les sapins renversés en travers se succèdent. J'enjambe, contourne, passe parfois en dessous et quand je ne peux pas, par dessus. Je commence vraiment à galérer et mes membres sont déjà bien égratignés. Mais en y prêtant attention, je remarque que je ne suis pas le seul à être passer par là. Je vois parfaitement que les bas-côtés du sentier ont été piétinés car la terre est meuble aux endroits où un contournement était la seule alternative. Randonneurs, chasseurs, animaux ? Puis, d'un coup plus rien, plus d'arbres couchés sur plusieurs centaines de mètres. J'arrive au ravin du Pas des Vaques qui n'est ici qu'un petit ru où coule un mince filet d'eau sur un fond boueux. Avec un mouchoir en papier que je mouille au préalable, j'éponge toutes mes égratignures. Je traverse le ruisseau sans problème et poursuis mon chemin dans un sombre sous-bois, ce qui me convient très bien, car ça signifie que tous les arbres sont encore debout. Mais ça ne dure malheureusement pas et là, un peu plus loin, ça se complique car il n'y a pas de réel passage, et en tous cas aucune trace d'un franchissement antérieur. Quand je le peux, j'enjambe, mais quand les troncs sont trop hauts, je tente de passer dessous, mais parfois en vain car le problème avec les sapins, c'est qu'ils sont parfois partiellement déracinés et ont encore toutes leurs épaisses ramures. Et quand ils n'ont plus leurs ramilles, c'est encore pire car leurs branches sèches sont autant de poignards qu'il me faut éviter. Alors, je contourne, je descends, je monte tout en essayant de ne pas trop m'éloigner du chemin. Souvent, je suis contraint d'ôter mon sac à dos, qui, dans ce dédale, est un terrible handicap. Ouf ! J'ai réussi à franchir ce nouvel obstacle mais voilà que 150 mètres plus loin, il en apparaît une autre, aussi difficile que le précédent sinon plus.

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Au Puig des Lloses, les panonceaux sont nombreux et j'aperçois Prats-de-Mollo tout en bas, pourtant je vais me fourvoyer pendant plus de quatre heures dans cette forêt du Miracle ravagée par la terrible tempête Klaus. En vain. De cette forêt, je vais en ressortir meurtri, égratigné, ensanglanté et surtout brûlé des épaules aux chevilles pour être tombé dans de hautes orties ! De surcroît, je vais perdre mon appareil-photo, ce qui va m'obliger à retourner dans ce fatras pour le retrouver. 

Je suis fatigué et sanguinolent mais dans ma tête, je me dis que si j'en ai passé un, je peux en franchir d'autres. Je me dis aussi que les forestiers du coin doivent bien être conscients que le Tour du Vallespir est barré par tous ces arbres abattus et je suppose qu'ils ont commencé à déboiser en partant de Prats-de-Mollo et en remontant le sentier. Ce n'est pas possible, ce traquenard va bien finir par s'arrêter ! Je passe plus facilement ce nouveau barrage et arrive à un endroit où le sentier fait un angle droit près d'un piton rocheux en surplomb de Prats-de-Mollo. Ici, je prends conscience des dégâts considérables que la tempête Klaus a provoqué dans ce secteur mais j'arrive néanmoins à parcourir encore 500 mètres sans trop de difficultés avant de tomber sur une autre empreinte d'une forêt complètement ravagée. J'enjambe, je contourne, remonte et redescend sans trop me préoccuper du chemin qui a définitivement disparu dans cet amas incommensurable d'arbres brisés, de troncs fracassés, de branches amoncelées et de branchages empilés. Dans ma tête, j'espère surtout que ce nouveau sillon dévasté ne sera pas trop large et qu'une nouvelle fois, je pourrai le franchir. Par moment, j'arrive dans des impasses. Il m'est impossible de contourner, de passer dessous et malgré la hauteur où se trouvent les troncs, souvent à plus d'un mètre du sol, la seule solution reste de les enjamber. Je n'en suis pas à ma première enjambée mais cette fois, le tronc est-il un peu plus haut où est-ce la fatigue, toujours est-il, que droit sur le rondin, je me sens partir en arrière entraîné par le poids de mon sac. Un coup de reins pour me rétablir, mais ce coup de reins est bien trop puissant et voilà que je pars en avant ! J'ai beau mouliner l'espace avec mes bras pour tenter de tenir en équilibre mais c'est trop tard, mes mains ne rencontrent que le vide et en tous cas, rien où s'accrocher. Je pars en avant, je vais tomber et me rompre le cou dans ce monstrueux chaos, mais une dernière inspiration me donne l'intuition et le sursaut que plutôt que de tomber n'importe où et n'importe comment, il faut mieux que je me jette à un endroit choisi. Voilà, j'ai réussi, si je puis dire ! Je me retrouve planté au milieu d'un gros massif de ronces et de hautes orties. Mon genou gauche a malgré tout cogné fortement une grosse branche et je saigne abondamment. Mais ce n'est pas ça le plus douloureux, mais toutes ces petites brûlures d'orties qui, peu à peu, en partant des chevilles, semblent monter tout le long de mon corps, enflammant surtout mes jambes mais également mes bras. J'ai l'impression de flamber debout et malgré la douleur, je reste planté là au milieu de cette désolation, de ce néant. Je suis tout à coup comme tétanisé par l'angoisse. Mais je perçois que cette angoisse est arrivée de manière soudaine car jusqu'à présent, j'étais trop occupé à m'en sortir. Une fraction de quelques secondes, il me vient à l'esprit de sortir mon portable et d'appeler des secours. Mais en me retournant, et malgré cette complète désolation, je constate que ce n'est pas le néant absolu : à vol d'oiseau, je ne suis pas très loin d'une piste blanche et sableuse que je distingue en contrebas à quatre ou cinq cent mètres. Je discerne des voitures qui y circulent et aussi un mas. Et même si à cet instant précis, je voudrais être un oiseau, je n'en suis pas un ! Je me suis foutu tout seul dans cette " mouise " et il faut que j'en sorte tout seul aussi ! Mais faire cinq cent mètres dans cette dévastation, je sais à l'avance que c'est une impossible gageure.

La faute à Klaus Schümann

 

Il y a 220 ans, Gavroche chantait :

Je suis tombé par terre c'est la faute à Voltaire.

Le nez dans le ruisseau, c'est la faute à Rousseau.

 

Il y a 220 secondes exactement, j'ai hurlé :

Je suis tombé sur un os, c'est bien la faute à Klaus.

Le nez dans les gentianes, c'est la faute à Schümann.

 

Il y a 220 ans, Gavroche chantait :

Je ne suis pas notaire, c'est la faute à Voltaire.

Je suis petit oiseau, c'est la faute à Rousseau.

 

Il y a 220 secondes, j'ai crié :

J'ai chuté sur les lloses, c'est bien la faute à Klaus

J'ai brisé mes organes, c'est la faute à Schümann

 

Je voudrais faire un saut et atterrir à Prats-de-Mollo,

Je ne suis pas petit oiseau, c'est la faute à mon père !

Alors il me faut être costaud et que j'ai un sursaut !

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Le 24 janvier 2009, la tempête Klaus a provoqué de considérables dégâts dans le Haut-Vallespir. En août, les plaies sont loin d'être toutes cicatrisées.

C'est donc décidé, je vais rebrousser chemin jusqu'au Puig des Lloses et descendre à Prats-de-Mollo par le col de Cavanelles. La première chose à faire, c'est retrouver le sentier mais où peut-il bien être dans ce " labyrinthe " végétal trop urticant à mon goût. Seul mon GPS peut me le dire et il faut d'abord que je sorte de ce roncier qui m'enveloppe comme une toile d'araignée. D'ailleurs des araignées, il y en a pas mal ici et comme elles n'apprécient pas trop mon intrusion dans leur domaine réservé, elles me piquent elles aussi. Mais bon, je n'en suis plus à une piqûre près ! Seule solution, sortir par là où je suis arrivé, c'est-à-dire par le haut. Cette fois, j'ôte mon sac à dos, dont je vérifie au préalable toutes les fermetures et je l'envoie valdinguer par-dessus le tronc dont je viens de choir. Je me hisse sur le tronc et me mets carrément à cheval sur lui. Un point GPS me situe à une cinquantaine de mètres du chemin qui est vers le nord et pour moi vers le haut. Je récupère mon sac et poursuit ainsi mes divagations. Je jette mon sac, me hisse à nouveau, le récupère et ainsi de suite. Parfois, je jette mon sac un peu plus loin car j'arrive à jouer les équilibristes sur plusieurs troncs couchés de concert et ma progression s'accélère. Je vais mettre un gros quart d'heures pour retrouver le sentier et encore plus d'une heure pour rejoindre le Puig des Lloses. Quand je regarde ma montre, j'ai du mal à le croire : il est déjà 17 heures et voilà trois heures que je me fourvoie dans cette forêt du Miracle, la mal nommée. Il faut absolument que j'appelle l'hôtelier pour le prévenir que j'aurai du retard. De ce côté-là au moins je serais tranquille et quand je l'ai au bout du fil, effectivement il me rassure. J'ai réservé, j'ai payé et la chambre à l'hôtel Ausseil m'est complètement allouée quoi qu'il m'arrive. Mais s'il savait ce brave homme ce qu'il vient de m'arriver ! Mais n'en parlons plus, j'en suis sorti, même si c'est fourbu, écorché, entaillé, égratigné, brûlé et ensanglanté de la tête aux chevilles. Maintenant, le sentier qui descend vers le Col de Cavanelles au milieu des genêts et des hautes fougères est plutôt agréable et les panoramas sont suffisamment beaux pour que je me remette à prendre des photos. Mais où est mon appareil ? Il n'est pas dans une de mes poches et je ne me souviens pas l'avoir rangé dans mon sac ! Non, il était dans sa housse accrochée à ma ceinture et à ma ceinture, je n'ai plus rien désormais ! Le bouton-pression a dû s'ouvrir et je l'ai perdu ! Je suis désespéré car perdre mon appareil photo c'est comme si j'avais perdu la mémoire de ces trois premiers jours depuis Amélie-les-Bains. Pour moi, c'est inimaginable et il faut que je le retrouve. Sans trop réfléchir, je sors ma dernière gourde d'eau de mon sac à dos et je jette ce dernier dans les hauts genêts en m'assurant qu'on ne le voit pas depuis le chemin. Deux petites branches en forme de croix que je place au bord du sentier pour retrouver cet endroit et me voilà entrain de remonter le sentier, presque en courant, vers cet " enfer vert " où j'ai sans aucun doute perdu mon appareil. Où se trouvera-t-il ? Loin, près ? L'ai-je perdu quand je suis tombé de ce tronc plus haut que les autres ? S'est-il décroché dans le roncier ? Ou bien sous un tronc que j'ai franchi comme un tunnel ? Voilà les questions et bien d'autres qui grouillent dans ma tête alors que je me jette dans cette " impossible " quête. Vu l'heure et le temps que j'ai mis la première fois, il faut à la fois que je fasse vite mais sans pour autant négliger mes recherches. Ce serait idiot de passer à côté sans voir l'appareil par précipitation. L'absence du sac à dos m'aide considérablement mais au fond de moi, je sais que selon l'endroit où la housse est tombée de ma ceinture, c'est comme rechercher une minuscule aiguille dans une énorme botte de foin. Sans le sac mais avec une gourde à la main, je passe néanmoins tous les petits obstacles plus aisément, je traverse le ru du Pas des Vaques, je franchis le premier couloir de sapins anéantis avant que le sentier fasse un angle droit. Rien ! Il me reste encore un barrage à franchir avant ce virage et comme pour le précèdent, j'essaie de me souvenir par où je suis passé à l'aller mais aussi au retour. Et là, au moment où je me baisse pour passer sous les branches encore vertes d'un immense sapin déraciné, le miracle survient ! La petite housse avec mon numérique à l'intérieur est là au milieu du sentier sous la verte ramure. Ouf ! Ouf ! Ouf ! Je respire à pleins poumons. Quel soulagement. Je vérifie mon appareil que j'enfonce au plus profond de la poche de mon short et par sécurité supplémentaire, je referme celle-ci avec le Velcro consacré. Une fois encore, il ne me reste plus qu'à rebrousser chemin. Ce ne sera que la quatrième fois que j'emprunte cet itinéraire et si ça continue, je vais finir par en connaître le moindre recoin par coeur ! D'ailleurs, c'est le cas, car dans ma précipitation et alors que je me suis arrêté pour boire un coup, j'ai posé machinalement mon bob sur un rocher et je l'ai oublié. Mais je ne suis pas inquiet car je sais parfaitement où il se trouve.

Il est 18 heures quand je passe une nouvelle fois devant la panonceau " Puig des Lloses - 1.413 m - PR6B - Prats-de-Mollo par le Col de Cavanelles - 30 mn ".

A cet instant précis, je ne sais pas pourquoi, il me vient une abominable anxiété : Et si ce chemin, lui aussi, était impraticable, barré par une forêt saccagée ? Après tout, il n'y a pas d'autre chemin et le peu que j'en ai parcouru avant de retourner chercher mon appareil photo ne me laisse aucune certitude et ne me permet pas d'être rassuré. Après tout, Prats-de-Mollo que j'aperçois en bas est au moins à trois kilomètres à vol d'oiseau et il faut au bas mot compter au minimum le double par le chemin. Tout est encore possible ! Cette terrible angoisse, elle va soudain se transformer en une grosse boule au creux de mon estomac et elle va rester là, encore blotti pendant une heure et demie. Autant, j'ai été longtemps serein cet après-midi même au plus fort de mes élucubrations, autant maintenant je prends conscience que je peux ne pas arriver au bout de cette étape, en tous cas aujourd'hui. Mais je sais aussi que je n'ai pas le choix dans la direction à prendre et je continue. Je récupère mon sac. Les photos que j'avais voulu prendre tout à l'heure, je les prends maintenant. Mais j'avoue que je n'ai plus le cœur à ça ! J'ai toujours cette appréhension et ces questions qui fourmillent dans ma tête et je ne pense plus qu'à une chose : descendre, descendre, et descendre encore au plus vite vers Prats-de-Mollo. Comme prévu et sans problème, j'arrive au bout de 30 minutes à ce que je crois être le col de Cavanelles. A gauche, un grand champ en pente avec un large chemin qui le contourne, un autre chemin qui part droit devant moi et un autre qui part complètement à gauche. Je n'ai plus de tracé sur mon GPS et je ne vois plus le balisage jaune que j'ai entr'aperçu dans la descente. Je suis contraint de stopper pour regarder ma carte IGN. J'en profite pour manger et absorber un peu d'énergisant car je suis exténué. Le chemin qui part droit devant moi n'existe pas sur la carte. Ça m'étonne mais je l'oublie. Celui qui part à droite se termine dans un cul de sac. Je l'oublie aussi. Reste celui qui part à gauche et qui semble être le bon à la lecture de la carte. Je redémarre, c'est bon, j'aperçois un coup de peinture jaune sur le piquet d'une clôture. Je contourne ce lopin de terre que je voyais d'en haut. Le chemin continue de tourner, puis à mon étonnement, il se remet à nouveau à monter. Je suis éreinté et je n'en crois pas yeux quand je retrouve le petit pin sous lequel je viens de manger, il y a un instant. Je n'ai fait que tourner en rond autour de cette parcelle en friches. Mon téléphone sonne. C'est Dany. Elle demande de mes nouvelles. Je ne peux que lui dire bof ! Mais elle veut en savoir plus. Alors sans trop l'inquiéter, je lui raconte très brièvement mes mésaventures et lui explique que je ne suis plus sur le Tour du Vallespir, que je galère pour descendre sur Prats-de-Mollo et qu'il est primordial que je regarde très attentivement ma carte IGN. Je coupe en lui promettant de la rappeler dès que j'arrive à l'hôtel. Je redéploie ma carte et essaie de me situer par rapport au paysage que j'ai en face de moi. Je comprends que je ne suis pas au Col de Cavanelles mais près d'un endroit qui sur la carte s'appelle " La Segnora ". Il y a légèrement sur ma gauche le Puig Fabre (1.147 m), petit monticule débonnaire qui me rappelle étrangement ces petits volcans arrondis que l'on rencontre en Auvergne dans la chaîne des Puys.

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Avec une chance inouie, j'ai retrouvé mon appareil-photo, le plus gros de ma galère est terminé, mais je descends très anxieux vers Prats-de-Mollo par le col de Cavanelles car je ne suis pas certain du chemin. Finalement, de ce col, j'aperçois le bourg et un chemin désormais très praticable y descend. Ma grosse boule au creux de l'estomac disparaît.

C'est par là qu'il me faut aller, car le chemin passe au pied de ce Puig, et là je comprends qu'en bas du champ en friches, il me faut partir complètement à gauche par une piste qui est parfaitement indiquée sur la carte. Je redescends, contourne à nouveau le petit lopin de terre jusqu'à un portail que je n'avais pas aperçu la première fois. Il y a bien une trace jaune sur ce portail et une piste qui démarre derrière. Je l'emprunte. Un peu plus loin, il y a un raccourci toujours balisé en jaune qui part à droite dans de hauts genêts, mais je le néglige car même si mon itinéraire est plus long, la piste me semble très empruntée par des véhicules, car il y a de nombreuses empreintes de pneus sur le sable. Et surtout, je sais que cette piste va me mener là où je veux. J'ai trop erré aujourd'hui pour prendre le moindre risque de me retrouver une nouvelle fois face à des arbres morts et couchés. Toujours cette boule à l'estomac ! La piste fait maintenant une grande boucle et descend j'en suis certain vers le Col de Cavanelles. Dans cette descente, j'ai le bonheur de tomber sur une baignoire qui sert d'abreuvoir aux animaux et de mare improvisée aux têtards. D'un gros tuyau en PVC, il y coule une eau fraîche et claire et je peux ainsi me rafraîchir et surtout nettoyer toutes ces plaies et égratignures d'où des écoulements de sang ont ruisselé mais ont séché depuis. Au fond de moi, je me dis que sans toutes ces traces d'hémoglobine sur la peau, je serais un peu plus présentable pour arriver à l'hôtel ! Mais si après ce nettoyage, j'ai retrouvé un peu de mon " prestige ", cette eau glacée a l'effet désastreux de réveiller toutes ces brûlures d'orties. Elles n'étaient pas tout à fait endormies mais elles sommeillaient et les douleurs s'étaient bien atténuées. D'ailleurs, quand je regarde mes bras et mes jambes, mais mes jambes surtout, elles sont recouvertes presque intégralement de petites boursouflures rouges. Je sais que dans ma pharmacie, je n'ai aucun médicament, aucune pommade, pour tempérer cet urticaire. Je repars et cinq minutes plus tard, j'arrive au Col de Cavanelles. Il est 19h15. Ici la piste continue mais un panonceau indique une sente qui part à droite : " Col de Cavanelles - 1.050 m- PR6- Prats-de-Mollo par le Fort Lagarde 40mn ". Je compulse à nouveau ma carte car je me méfie désormais de tous les raccourcis. Mais celui-là est bon quand je constate qu'il ne descend que dans un environnement rocheux. Je sais que c'est gagné et la boule au creux de mon estomac disparaît comme par enchantement.

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Du col de Cavanelles, je distingue la Tour de Mir, une autre difficulté de ce Tour du Vallespir, le Pic de Costabonne, le Roc Colom où le Tech prend sa source et le château Lagarde que je rejoins 40 minutes plus tard. Du château, j'ai une belle vue sur la vallée du Tech, sur Prats-de-Mollo et son riche patrimoine historique. 

Dans cette descente rocailleuse, je me remets à faire quelques photos : de Prats-de-Mollo bien sûr, la cité est encore loin mais je sais qu'elle se rapproche à chacun de mes pas, de la citadelle du Fort Lagarde construite par Vauban en surplomb de la ville et de la Tour de Mir juchée sur un piton rocheux au milieu d'une ténébreuse forêt qui me fait face. Cette tour, je la connais pour y être monter à de multiples reprises. Je la prends en photo, mais à vrai dire je ne veux pas trop la regarder car il va me falloir la gravir demain. Et pourquoi le cacher, j'appréhende déjà car la forêt constituera l'essentiel de cette étape. J'ai mis 30 minutes pour arriver au Fort Lagarde au lieu des 40 qu'annonçait le dernier panneau indicatif. Je prends des photos du fort et de la ville dont le clocher carré qui domine l'église Sainte-Juste et Sainte-Ruffine perfore le panorama. Mais ce ne sont que de simples clichés, juste des souvenirs. Il est 20 heures 15 quand j'entre dans la cité. Voilà 12 heures que je suis sur les chemins. Pour combien de kilomètres parcourus ? Je suis incapable de le dire ! Alors faut-il que je l'avoue, sur la fin, la vigueur m'a manqué pour apprécier tout ce patrimoine historique à sa juste valeur ! Cette étape qui était la plus  courte est en fin de compte devenue la plus difficile depuis mon départ. 

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13 heures sur les chemins, quand j'entre dans Prats-de-Mollo, je suis fatigué et meurtri par cette très longue journée de marche éprouvante et mémorable. C'est au pas de course que j'ai traversé le fort Lagarde construit par Vauban. Je n'en ai pris simplement que quelques photos sans aucune conviction mais pour le simple plaisir de les inscrire dans mon souvenir et surtout pour le réel bonheur d'avoir retrouvé mon appareil photo dans la forêt du Miracle. Cette forêt porte-t-elle bien son nom ? Moi, en tout cas, je reste indécis entre la galère que j'ai vécue pendant 4 heures et le fait d'en être sorti à peu près indemne et pour terminer avec mon appareil photo dans la poche ! Un rescapé lui aussi !

Alors, ce qui m'importe maintenant, c'est de me retrouver au plus vite à l'hôtel. Aussi quand j'arrive sur la place du Foirail, je m'empresse de demander à une dame la direction de l'hôtel Ausseil et gentiment elle m'indique du doigt une grande porte fortifiée au milieu des remparts et me précise que l'hôtel est situé juste une rue après. Je passe sous le porche, arrive sur une autre place et comme je me souviens du nom de cette place " Josep de la Trinxeria ", je sais que l'hôtel est là. Mais la place est bondée de touristes et occupée par les deux restaurants qui y ont largement installés leurs tables et leurs chaises. La place Josep de la Trinxeria est en réalité une immense terrasse pour les deux restaurants mitoyens et quand je demande l'hôtel Ausseil à un garçon de table, il me réponds simplement : vous y êtes ! Au milieu des tables et devant des clients certainement interloqués par mon " look " de randonneur anéanti, je tente en vain de m'expliquer dans un brouhaha inextricable. On ne s'entend pas ici me dit-il. Suivez-moi ! La salle intérieure du restaurant est vide et je peux enfin m'exprimer :

- Je suis Monsieur Jullien, j'ai réservé une chambre. Montrez-la moi que je puisse au plus vite prendre une douche.

- Oui, je crois que vous en avez besoin, me réponds-il avec un petit sourire narquois et en me tendant une clé et en rajoutant : c'est la chambre 7 au deuxième étage.

- Puis-je manger après ? lui dis-je.

- Oui, mais ça ne sera peut-être pas en terrasse car tout est plein me réponds-il.

- Peu m'importe !

Malgré les escaliers qu'il me faut encore escalader, je m'empresse de monter dans la chambre. Avant toute chose, je me déshabille et me jette sous une douche chaude. J'ai bien essayé d'abord l'eau froide mais ce fut un supplice insupportable. Je n'ai pas insisté car à nouveau les brûlures se sont réveillées de manière presque insoutenable. J'ai appelé Dany pour la rassurer et l'embrasser mais sans trop m'étendre sur tous les déboires que j'avais endurés au court de cette mémorable journée. Les hauteurs du Vallespir ont été sacrément âpres aujourd'hui. Encore plus âpres que je ne l'avais imaginé ! C'est sûr maintenant, le titre de mon aventure " Sur les hauteurs d'une vallée âpre " ne sera pas galvaudé.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.oSur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Une ruelle à Prats-de-Mollo et le clocher de l'église Saintes Juste et Ruffine.

ÂPRE EST CE VALLESPIR…… 

 

Âpre est ce Vallespir que je veux cheminer.

Dure est la Tour de Mir quand il faut y grimper.

Je ne fais que grandir sur ces crêtes boisées,

Les sources ont à jaillir pour combler les fossés.

 

Âpre est ce Vallespir que je veux affronter.

Dur est le déplaisir lorsque l'on veut marcher.

Et si mes pas délirent, rien ne peut m'arrêter,

Sauf les pins, ces martyrs que le vent a couché.

 

Âpre est ce Vallespir, je veux le proclamer.

Dur mon sang à tarir, je ne suis que touché.

Et ce pourpre élixir, il ne fait que couler,

Mon corps prêt à bondir sur les chemins dallés.

 

Âpre est ce Vallespir que j'ai pourtant aimé.

Dures ces lloses, ces porphyres où j'ai pourtant chuté.

Et si ma tête chavire, je n'vais pas m'écrouler,

Sur ces frêles sentiers, dans ces prés parfumés.

 

Âpre est ce Vallespir où il faut s'arrêter.

Dur est le point de mire où il faut arriver.

Et si mon cœur soupire alors qu'il est blessé,

Mon amour viens vers moi , toi seul peut l'apaiser.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Le lendemain matin, la Tour de Mir me nargue de ces 1.540 mètres d'altitude. Elle se trouve sur le tracé du Tour du Vallespir. Vais-je l'affronter ?

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 3 : Saint-Guillem - Prats-de-Mollo  15 kms.

Cliquez sur la forêt ravagée par la tempête Klaus pour passer à l'étape suivante

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Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 1 : Amélie-les-Bains - Batère - 21,3 kms.

Publié le par gibirando

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 1 : Amélie-les-Bains (232 m)-Batère (1.460 m) 21,3 kms.1ere étape : Lundi 17 août 2009.

Amélie-les-Bains (232 m)-Batère (1.460 m) 21,3 kms.

(La plupart des photos de ce Tour du Vallespir peuvent être agrandies en cliquant dessus. 2 fois, la photo occupe parfois le plein écran).

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 1 : Amélie-les-Bains (232 m)-Batère (1.460 m) 21,3 kms.

Cliquez sur la carte pour l'agrandir et 2 fois pour un plein écran.

"Vous ne connaissez pas la dernière bergère Qui règne encore ici sur ces antiques lieux Où les Romains, en conquérants industrieux Fondaient le fer avant le premier millénaire ; En menant son troupeau vers la Tour de Batera A ses pieds, chaque jour, surgit devant ses yeux Ce grand pays de bois et de vallons herbeux Qui va de Saint-Marsal au col de Palomera." Extrait du recueil de poèmes " Ballades catalanes ". André Taurinya (1914-2004) poète français.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 1 : Amélie-les-Bains (232 m)-Batère (1.460 m) 21,3 kms.LA MONTRE ET LE PAPILLON :

 

7h30, me voilà sur le parking des Thermes d'Amélie. J'ignore pourquoi je regarde ma montre, après tout, je ne pars pas sur ce Tour du Vallespir avec l'idée de faire une course contre la montre. Une ridicule habitude sans doute ! Ou alors la crainte d'avoir un ennui et d'arriver au gite à une heure déraisonnable ? Bien au contraire, je démarre plutôt avec l'idée de flâner autant que je le pourrais car dans la marche pédestre, c'est bien ce rythme-là que me plaît. Je viens de passer sans problème devant le vigile, lequel enfermé dans sa guérite, m'a regardé béat et m'a fait signe d'avancer. Il a du me prendre pour un curiste mais, de peur qu'il ne m'arrête, j'ai machinalement accéléré dans la rampe qui accède à la toiture du centre de cure où se trouve le parking. Il y a peu de voitures. Je gare la mienne. Je n'ai pas grand-chose à faire pour être prêt à démarrer : changer mes tennis par mes chaussures de marche, prendre mon bâton et mon bob et harnacher mon sac à dos. Une fois encore avec ses 21 kilos, ce maudit sac est bien trop lourd à mon goût. J'ai eu beau le remplir, le vider, le remplir à nouveau, le revider, le trier, faire la part des choses utiles ou inutiles, indispensables ou superflues, tous les objets qu'il contient ont été mûrement réfléchis et ont pour ambition de me servir au moins une fois. Outre, le poids élevé du sac à dos, l'arrêt total du tabac m'a fait prendre quelques kilos plus que superflus, kilos que j'ai toujours eu un mal fou à éliminer. C'est donc avec deux surcharges pondérales que je m'apprête à démarrer : le sac à dos et mon "bedon". Malgré ça, je suis confiant car je prépare ce Tour du Vallespir depuis plusieurs semaines voire plusieurs mois et j'ai parfaitement ordonnancé ce départ.  De tous ces objets que contient mon sac à dos, j'en ai fait 4 grandes catégories :

a) Les aliments tout d'abord, avec il est vrai un gros surplus en prévision d'un jour et demi sans aucune possibilité de ravitaillement à Saint-Guillem de Combret. Je dispose pour cela de 4 coupelles de salades diverses achetées toutes prêtes, 4 boites de gâteaux de riz et un gros taboulé. A ces repas prévisionnels quotidiens, il faut ajouter le repas de ce midi et l'encas de l'après-midi avec une grosse salade composée, 3 sandwichs, 2 oranges, 1 banane, 1 compote et les 4 litres d'eau que j'ai cru utile d'emporter dans 2 gourdes d'un litre et une poche à eau de 2 litres, style Camelback. A tous ces aliments s'ajoutent une grosse boîte de fruits secs, 6 barres de céréales et des compléments énergétiques avec pour l'endurance une boite de poudre à diluer dans l'eau et pour l'énergie six compotes gélifiées, une par jour, pour palier aux " coups de mou " qui ne manqueront pas de survenir.

b) Viennent ensuite les vêtements que j'ai tenté de réduire au minimum avec un short et un tee-shirt de rechange, 2 paires de chaussettes, un slip, un coupe-vent et un poncho. A cette panoplie du randonneur du dimanche s'ajoute une paire de tongs pour reposer des pieds qui pourraient être endoloris par les longues distances qui m'attendent. J'ai également un sac de couchage de 900 grammes (je n'ai pas trouvé plus léger !) qui, si tout se passe bien, devrait me servir demain soir et pour une seule nuit au refuge non gardé de Saint-Guillem de Combret.

c) Ce modeste ensemble vestimentaire est complété par une petite mais indispensable boite à pharmacie et par une trousse de toilettes avec gant, serviette, savonnette, rasoir, bombe de rasage, eau de toilette, crème solaire, enfin tout ce qu'il faut pour éviter de ressembler trop vite à un vagabond.

d) Enfin, il y a tous les autres objets indispensables à une randonnée de 6 jours en solitaire : GPS, deux cartes IGN, descriptifs et certaines copies du topo-guide, téléphone portable, appareil photo, piles de rechange, boussole, sifflet, jumelles, couteau suisse, petite cuillère, lampe frontale, stylo, bouts de ficelle, carnet pour prendre des notes et numéros de téléphone utiles, etc.….

Voilà les 70 litres de mon sac à dos sont parfaitement remplis et difficile d'y glisser une épingle ou des choses inutiles. Ah oui, j'oubliais ! J'emporte aussi deux objets pas vraiment indispensables : un minuscule lecteur MP3 que mes enfants m'ont offert pour mon anniversaire, très agréable pour écouter un peu de musique et surtout très utile pour oublier que l'on souffre dans les gros dénivelés et un petit livre de poche " Dalva de Jim Harrison " que je vais essayer de lire, si je trouve le temps où, si le soir harassé de fatigue, Morphée ne m'engloutit pas trop vite dans ses bras. 

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 1 : Amélie-les-Bains (232 m)-Batère (1.460 m) 21,3 kms.

Amélie-les-Bains est encore endormie. Vue depuis le parking des Thermes où je viens de ranger ma voiture.

Avant de quitter le parking des Thermes, la première chose qui me vient à l'esprit, c'est de prendre une photo de la ville d'Amélie encore un peu endormie avec à mes pieds la rivière Mondony. Il faut savoir que ce petit ruisseau insignifiant et tranquille est sans doute à l'origine de la création de cette jolie ville thermale qui doit son nom au roi Louis-Philippe qui, en 1840, ne trouva rien de mieux que de donner à la cité, le prénom de son épouse, la reine Marie Amélie de Bourbon. Antérieurement, ce sont les romains, qui les premiers, surent exploiter les résurgences de ses nombreuses sources d'eaux chaudes, " Aquae Calidae ", qui surgissent de ses jolies et très étroites gorges, dont la fin du défilé se trouve juste derrière moi. Mais comme il faut bien que je démarre, la deuxième chose à laquelle je pense, c'est d'éviter le vigile qui m'a vu passé en voiture et qui ne comprendrait pas comment j'ai pu aussi rapidement me métamorphoser de banal curiste en un authentique randonneur. Heureusement, grâce aux cures de Dany, je connais bien les lieux et pour contourner le vigile, j'emprunte l'ascenseur qui aboutit en bas à l'accueil des Thermes du Soleil. Je traverse le hall et sort du centre de cure sous le regard interloqué des curistes. Ils se demandent sans doute ce que je fais ici dans cet accoutrement du " parfait " randonneur avec mon énorme sac à dos, mon bob biscornu vissé sur la tête et mon bâton de marche. Je salue tout ce joli monde, sort du centre en prenant un air le plus naturel possible, et descend la rue des Thermes. A la hauteur du square de l'Espoir avec sa jolie mairie au style colonial et ses palmiers, je m'arrête un instant pour prendre une photo. Il faut dire qu'au moment de partir la vision de ce mot " espoir " sur cette plaque commémorative suscite en moi quelques réflexions. Pour moi, ce mot est bourré de symboles. En effet, j'ai placé beaucoup d'espoirs dans ce Tour du Vallespir, mais avec ses 6 étapes, ses 120 kilomètres à parcourir et ses 11 kilomètres de dénivelés positifs, il n'en demeure pas moins de nombreuses inconnues. Par expérience, je sais qu'il ne peut pas en être autrement mais j'ai bon espoir de terminer ce périple et surtout de le terminer dans les meilleures conditions possibles. Je place aussi de grands espoirs dans tout ce que je vais découvrir : en bout de course, serais-je déçu ou satisfait ? Espoir de réussir à faire un point sur moi-même car je vis mal ma retraite. Je l'avais sans doute trop idéalisée et je suis déçu et, par mon attitude, je déçois, par là même occasion, mon entourage. J'ai l'indicible espoir que la solitude pourra aussi m'aider à ça !

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 1 : Amélie-les-Bains (232 m)-Batère (1.460 m) 21,3 kms.oSur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 1 : Amélie-les-Bains (232 m)-Batère (1.460 m) 21,3 kms.

Le square de l'Espoir, un mot plein de symboles, comme ces pigeons qui dorment paisiblement.

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Le Tech. Sans lui le Vallespir n'existerait pas et je ne serais pas là ! me dis-je.

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Je suis prêt à démarrer ce nouveau périple, mais sur mon visage, ne lit-on pas une certaine appréhension ?

J'arrive sur le pont qui traverse le Tech, un autre symbole que je m'apprête à prendre en photo. Sans ce fleuve, je ne serais pas là et il n'y aurait pas de Tour du Vallespir car c'est bien lui qui a façonné toute cette magnifique région. A cet instant précis, mon regard est attiré par des centaines de pigeons qui dorment la tête enfouie dans leur plumage sur un grand arbre dénudé. Un autre symbole que tous ces pigeons, souvent synonymes de paix et de longs voyages. Pourquoi ne prennent-ils pas leur envol ? Sont-ils lassés de voyager ? Le serais-je un jour moi aussi ? Est-il plus fatiguant de voler que de marcher ? Je les regarde en réfléchissant à tout ça. En tout cas, eux ils dorment encore et moi je suis bien éveillé et à pied d'oeuvre pour un long voyage que j'espère paisible mais dont je ne doute déjà pas qu'il sera certainement difficile.

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Le vrai tour commence avec ce petit panneau Montbolo où la sente s'élève vite.

Il est temps de me mettre en route si je ne veux pas arriver trop tardivement au Refuge de Batère, terme de cette première et très longue étape de 21 kilomètres et de plus de 1.200 mètres de dénivelé. Je remonte et longe le Tech en direction de la place de la Sardane que je traverse pour retrouver sans difficulté la rue Héliopolis et la vraie ligne de départ que Georges Véron décrit dans son guide. J'avoue une certaine surprise à la vision d'un unique vieux panonceau indiquant " Montbolo " et d'une seule trace jaune car je m'attendais à trouver un panneau mentionnant le Tour du Vallespir et comme il devrait être un balisage jaune et rouge propre à tous les G.R. de pays. Mais bon, je sais aussi qu'Amélie constitue une possibilité de départ mais que selon le topo-guide, elle n'est pas la seule et qu'il en existe une autre à Arles-sur-Tech. De toute manière, Montbolo est la bonne direction à prendre et je me lance dans cette étroite allée cimentée de lauzes et bordée de vignes vierges qui monte au travers de quelques belles villas jusqu'à l'orée d'une forêt.

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Ce chemin que j'emprunte en direction de Montbolo est-il le bon ?

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 Mais les panoramas sont déjà beaux, vers Amélie et le Pilon de Belmatx notamment !

Premier dénivelé et premiers essoufflements. J'atteins le bois péniblement. Mon sac à dos semble peser une tonne. Les traces jaunes ont disparu où en tous cas je ne les vois plus ! Je prends logiquement à droite car à gauche le chemin redescend. Je monte sur quelques mètres et tourne maintenant à gauche toujours en montant. Je fais un premier point sur mon GPS et refais lecture de la page du topo-guide que j'ai photocopiée : il n'y a pas de problème ! Le chemin se fait plus large, parfois plus plane et semble suivre de grands pylônes électriques. Au début, je garde mon GPS allumé qui me situe parfaitement sur le tracé enregistré. Ce tracé, je l'ai réalisé sur mon ordinateur à l'aide du très efficace logiciel de cartographie " CartoExploreur ". Le large chemin me paraît si évident et comme je n'en observe pas d'autres, je finis par éteindre le GPS pour économiser ses piles. Je continue. Amélie s'éloigne petit à petit et je surplombe désormais la ville dont j'ai une magnifique vue d'ensemble. Je suis déjà étonné de l'altitude que j'ai gravie après ces premières foulées. Mon coeur bat moins vite, j'ai retrouvé un souffle à peu près normal et je marche d'un pas plutôt régulier. Je progresse toujours sous les câbles électriques sur ce large chemin qui me paraît emprunté. Aussi me voilà très étonné quand au bout d'une vingtaine de minutes celui-ci débouche dans un cul de sac.

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Après un court égarement, je retrouve avec satisfaction un cairn et un panneau Montbolo. La vallée du Tech apparaît ainsi qu'Arles-dur-Tech.

Il y a bien un chemin qui redescend abrupt vers la vallée mais je connais suffisamment le tracé cartographique pour savoir qu'il faut continuer à grimper. Un nouveau point GPS me situe bien entendu hors du tracé. Le véritable chemin semble plus haut, et sur la carte IGN les pylônes sont légèrement en dessous du chemin que j'aurais dû emprunter. J'ai beau analysé ma carte IGN, je ne vois pas avec suffisamment de précision où j'ai pu me tromper. Il y a bien sur la carte quelques petits pointillés mais sur le terrain, je n'ai pas observé d'autre sentier, ni remarqué d'autre balisage, trace de peinture ou cairn par exemple. J'avoue que ça m'ennuie un peu de rebrousser chemin car cela m'obligerait à redescendre puis à remonter, aussi je prends de suite la décision de couper au jugé à travers un petit bois de chênes verts qui, par bonheur, est suffisamment clairsemé et débroussaillé pour être praticable. Le dénivelé plus accentué et le poids terrible du sac à dos mettent de nouveau mon cœur "dans tous ses états ". Je garde mon GPS allumé et le point que je représente se rapprochant peu à peu du tracé me conforte dans l'idée que je marche dans la bonne direction. Les ruines d'une ancienne bergerie au sommet d'un enrochement constituent un élément réconfortant et supplémentaire que le sentier de Montbolo n'est plus très loin. Après 15 minutes d'efforts et de montées incessantes, je coupe enfin la sente de Montbolo et retrouve le balisage jaune aperçu au départ. Au dessus de moi, je reconnais avec soulagement la grande antenne du relais T.V. qui domine Montbolo et que j'avais croisé cet hiver lors d'une sortie en raquettes au hameau oublié de Formentere. Elle est à 712 mètres d'altitude. Un homme et son chien qui font du footing me dépassent mais nous arrivons quasiment ensemble sur un replat à la croisée de plusieurs chemins. L'homme file vers Montbolo que j'aperçois légèrement en contrebas sur ma droite, mais comme le chien vient vers moi pour se faire caresser, l'homme s'arrête et me demande ma destination. Je lui indique le refuge de Batère, mais compte tenu des nombreux kilomètres restant à parcourir, je vois à sa mine qu'il semble très étonné. Du doigt, il me fait néanmoins remarqué un raccourci pentu qui entre dans un bois. Il m'explique que ce sentier coupe le bois et rejoint plus haut la route goudronnée.

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Voilà la bonne sente qui monte et m'amène au dessus de Montbolo

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J'ai déjà accompli un gros dénivelé, en galérant un peu il est vrai,  et j'atterris dans cette belle clairière ombragée

Je le remercie et je pars dans cet étroit sentier toujours balisé en jaune qui, à mon étonnement, débouche rapidement dans une vaste clairière ombragée où les panoramas sur Montbolo, Amélie et la vallée du Tech vers Céret sont superbes. J'aperçois la route asphaltée juste au dessus. Au fond de la clairière, une jolie maison en pierres semble inhabitée et je profite de cette cache tranquille et fraîche pour me reposer et me restaurer un peu. Une demi-heure plus tard avec une barre de céréales, quelques fruits secs et une énorme lampée d'eau dans l'estomac, je suis fin prêt à reprendre mon itinéraire. Ici mon GPS m'indique 700 mètres d'altitude et c'est avec satisfaction que je prends note de la dénivellation déjà accomplie. C'est d'autant plus encourageant que je connais désormais, par cœur, l'itinéraire à suivre, en tout cas jusqu'à Formentere : Une portion de route goudronnée, puis une longue piste forestière à la déclivité régulière, mais somme toute modeste, où je vais pouvoir marcher d'un bon pas et avec un rythme soutenu au moins jusque là. Quand à la suite, je ne la connais pas, mais le tracé sur ma carte IGN me laisse à penser que même en flânant, je devrais atteindre Batère sans problème vers le milieu de l'après-midi. En effet, après le hameau de Formentere, la piste continue sans aucune complication, et même si après le col de Formentere et jusqu'à la Tour de Batère, l'inclinaison se fait plus sévère, je connais mes possibilités et seule la chaleur torride qui règne aujourd'hui combinée à la longue distance pourraient, le cas échéant, me poser des difficultés. Mais je n'ai pas vraiment d'inquiétude et de toute manière, mon bob, les litres d'eau emportés, les aliments en nombre et les compléments énergisants seront là pour pallier à toute défaillance !

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Dans cette jolie clairière près d'un beau mas, je vais m'alimenter un peu, faire une courte pause et prendre quelques photos car les vues vers la Vallée du Tech sont superbes !

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Les chemins sont fleuris de nombreuses chicorées sauvages.

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Les beaux panoramas se dévoilent : Pilon de Belmatx, pics Canigou et de La Souque, j'entre dans la forêt du Haut-Vallespir et arrive au Col de la Réducta. Un panneau "Formantere" m'indique la direction à suivre.

Et effectivement ma journée va se dérouler comme je l'ai imaginé :

-10h20, je quitte le bitume pour la magnifique forêt domaniale du Haut-Vallespir non sans avoir jeté au préalable un regard et quelques photos sur le majestueux massif du Canigou et sur la verte vallée du Tech vers Arles. Seuls les Tabacs d'Espagne, ces magnifiques papillons oranges et une fouine qui traverse la piste devant moi me ralentissent dans ma progression.

-10h50, j'arrive au col de la Réducta avec son extraordinaire panorama sur tout le Roussillon, des Albères jusqu'à la Méditerranée. Je suis accueilli par un troupeau de vaches nonchalantes trop occupées à ruminer à l'ombre des grands sapins pour faire cas du randonneur solitaire que je suis. Un peu plus haut, je fais quelques photos près d'une stèle en hommage à un certain Jean-Marie et d'une belle croix blanche évocatrice d'un débarquement en Norvège en avril 1940 à Namsos et Narvik. J'ai entendu parlé de la bataille de Narvik ou bien j'ai du voir un film de guerre mais j'avoue qu'il m'est difficile de donner une juste signification à tous ces messages. Assis devant ces épitaphes, je suis néanmoins attendri car ces témoignages prouvent que des hommes aimaient d'autres hommes qui, comme moi, aimaient cette belle montagne du Vallespir. Et l'aimer, au point de vouloir laisser à cet endroit-là, leurs souvenirs éternels, il n'y a guère plus belle preuve d'amour ! Et dieu sait, si en cette magnifique journée d'été, moi aussi, je l'apprécie à sa juste valeur cette belle montagne avec ses superbes forêts, ses plaines et ses vallons, ses bruyères empourprées et ses chemins fleuris. Avec raison, Trenet revient à mes oreilles …….

Mes jeunes années

Courent dans la montagne

Courent dans les sentiers

Pleins d'oiseaux et de fleurs

Et les Pyrénées

Chantent au vent d'Espagne…

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Après le col, j'arrive au milieu des bruyères roses près d'une croix en souvenir du débarquement de Narvik et d'une jolie stèle en hommage à un certain Jean-Marie.

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 Croix en " souvenir d'une promesse - Débarquement en Norvège NAMSOS-NARVIK Avril 1940 FORCA Eugène-Mas Canes "

Si je ne peux pas donner une juste signification au message de cette croix et à celui de la stèle en hommage à Jean-Marie, je sais seulement que d'autres hommes ont, tout comme moi, aimé intensément cette belle montagne du Vallespir.

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Que de chemins parcourus, des beaux chemins en balcon fleuris de bruyères roses et bordés de sapinières. Dans la montée, j'aperçois Formentere et le Pic du Canigou.

-11h30, je flâne peut-être exagérément et je n'ai pas encore atteint Formentere. Mais comme j'ai faim, je suis déjà en quête d'un joli endroit ombragé pour déjeuner, et si possible avec vue sur tous ces beaux paysages du Vallespir qui jalonnent la piste. En face, la longue crête transfrontalière avec l'Espagne et le Pilon du Belmatx (1.280 m) dominent le panorama. Je sais que j'aurais à le gravir le dernier jour. Aïe ! Aïe ! Aïe ! Je le redoute déjà. Tout en bas au fin fond de la vallée, j'aperçois Arles sur Tech, cité toute blanche d'ici. Puis en remontant le ravin du Riuferrer, je devine Corsavy et Montferrer puis c'est le Pic de la Souque. Puis encore au dessus, défilent quelques hauts sommets qui composent le versant sud du Canigou. Tout en observant ces splendides paysages, je ne peux m'empêcher de me dire : si tout se passe bien, demain c'est par là-bas que je marcherai ! Le chemin fleuri de hautes bruyères roses et bordé de petites sapinettes est agréable mais à cette heure de la journée, il présente un gros inconvénient, celui d'être sans ombre et investi par un cagnard brûlant. J'avoue que cette chaleur caniculaire m'inquiète un peu car je suis encore très loin de l'arrivée, je n'ai pas encore déjeuné mais j'ai déjà consommé trois litres d'eau sur les quatre que j'avais au départ. Comme je me refuse à manger en plein soleil et sous cette forte canicule, je prends la sage décision de poursuivre et heureusement dans les premiers lacets avant Formentere, j'entre enfin dans une zone ombragée et fraîche, propice à un pique-nique.

-12h, même si j'ai la vue bouchée par d'immenses sapins, je profite de cette fraîcheur et d'un tapis de ramilles pour m'allonger et souffler un peu. J'ôte mon tee-shirt et mon bob trempés de sueur que j'expose sur un rocher à un seul rayon de soleil qui, non loin de moi, réussit à transpercer l'espace. Les efforts accomplis depuis 7h30 ce matin ont décuplé mon appétit. Presque tout y passe ! La grosse salade préparée par Dany, deux sandwichs sur trois, la compote et la banane. J'ai encore faim, mais je me dis qu'il faut que je me raisonne car je n'en ai pas fini avec les montées, et un estomac trop lourd, ce n'est pas bien bon pour avancer ! Je reste une heure à me reposer, à écouter un peu de musique et à bailler aux corneilles au sens propre comme au figuré. Car même si je ne les vois pas, j'entends les croassements de quelques-unes d'entre-elles qui semblent venir des ruines du hameau abandonné de Formentere. Ces cris détonnent dans le silence ambiant qui n'est ici qu'entrecoupé par le gentil gazouillis de petits passereaux.

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Après le déjeuner, je finis par arriver à Formentere, ancien hameau minier. D'ici j'aperçois Amélie-les-Bains, déjà très loin et une grande partie du Bas-Vallespir.

-13h, je reprends ma marche en avant. Après quelques derniers lacets, je finis par atteindre le hameau oublié. Comme je l'avais déjà fait cet hiver dans le feutre de la neige, au milieu de ces ruines silencieuses et devant ce panorama à couper le souffle sur tout le Vallespir, j'essaie de m'imaginer le tumulte que cette gare minière devait connaître au temps de sa splendeur. C'était au temps où tout autour du Canigou, de Batère à Formentera et de La Pinouse à Rapaloum en passant par les Manerots, on exploitait les mines de fer : bruits métalliques des câbles et des chariots sur les rails, souffles bruissants des fours et des chaudières, cris des hommes, hennissements des mulets et des ânes que l'on forçait à tirer de lourdes charges, bruits sourds des cognées et bruits stridents des scies sur les troncs des arbres que l'on abattait pour alimenter les fourneaux, etc.….Aujourd'hui, il ne reste plus rien de tout cela et si le silence prédomine, il n'est plus absolu comme il pouvait l'être cet hiver. Au printemps et en été, la nature reprend quelques droits et si je prête bien l'oreille, je peux entendre le bourdonnement des abeilles butinant les bruyères, le crissement soutenu de quelques grillons champêtres et toujours le croassement de ces deux corneilles que j'aperçois maintenant tournoyant dans un ciel bleu immaculé. J'avais longuement visité les ruines cet hiver et j'y avais trouvé un certain attrait pour tenter d'y discerner cette vie minière antérieure. Aujourd'hui, sans la neige, le hameau ressemble plutôt à ces " pueblos " désertés du Far-West saccagés par les Indiens, que l'on voit dans les westerns. Il faut dire que le hameau n'est plus, comme il l'était cet hiver, l'objectif privilégié et, après deux ou trois photos, je le quitte, cette fois, très rapidement en continuant la piste rectiligne et ombragée qui se faufile dans une forêt de sapins. Malheureusement pour moi, cette ombre n'est qu'éphémère et soudain les sapins laissent la place à un maquis plus ras, clairsemé de quelques jeunes pins et de petits feuillus. Sur cette large piste, ancienne voie ferrée minière qui file jusqu'aux mines de fer de La Pinouse, je marche à nouveau sous une canicule étouffante commençant à économiser l'eau dont je sais avec certitude que je n'en trouverai pas de sitôt. Il faut dire que ce versant du Vallespir, ensoleillé du matin au soir, ici on l'appelle " solana " et ce n'est pas pour rien ! Pour l'instant, le moindre arbre jetant une ombre sur le chemin est un prétexte à un arrêt ponctué d'une petite gorgée d'eau et parfois d'une noisette de gel survitaminé. Est-ce le soleil qui les attire ? Où est-ce moi, qui, moins distrait par d'autres pôles d'intérêts, y prête plus d'attention ? Toujours est-il que les petites sauterelles et les papillons multicolores me semblent désormais plus nombreux et je dirais même grouillant par endroit. Tous ces insectes sautillent, bondissent, planent, volètent, virevoltent, à un point tel que ça en devient presque étourdissant ! Ils semblent m'accompagner sur ce chemin de croix, qui heureusement doit se terminer avec mon arrivée au Col de Formentere. Mais pour l'instant, ils sont là et il faut que je fasse avec. Quand je marche, ils ne me dérangent pas trop mais dès que je m'arrête, il y a toujours quelques papillons qui se posent sur moi. J'ignore si je pense juste mais j'ai le vague sentiment qu'ils viennent s'abreuver à ma transpiration. Et si je m'arrête vraiment pour faire une pause plus longue, c'est une véritable nuée de papillons chamarrés qui tourne autour de moi ! J'en profite bien sûr pour les prendre en photos et c'est à cette occasion qu'intervient cette image magnifique et inoubliable de ce joli papillon qui est venu se poser sur ma montre et dont j'ai tiré une petite affabulation et le titre de cette première étape : " La montre et le papillon ".

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 La montre et le papillon 

Moi : Que fais-tu sur ma montre, joli papillon ?

Le papillon : Je regarde le temps qu'il me reste à vivre.

Et toi homme, sous ces brûlants rayons ?

Moi : Je marche et j'ai l'impression de revivre.

Vole, vole, ne te pose pas de questions.

Le papillon : Mais homme, ne vois-tu pas que j'expire !

Mais à toi, à quoi te sert cette excursion ?

Moi : Moi, je me promène seul autour du Vallespir.

Vole, profite de tes ailes et de ta situation.

Le papillon : Mais la vie me fuit car elle n'est que guivre.

A toi, l'existence ne te fuit pas compagnon ?

Moi : Si, et je marche au point d'en être ivre,

Car la vie, c'est la plus belle des missions.

Le papillon : Je crois que tu mens comme tu respires,

Et tout ce que tu dis n'est que pure invention.

Moi : Il faut me croire, vole et arrête de maudire.

Il sera vite trop tard si tu ne fais pas attention.

Le papillon : Ce que tu dis est plus difficile à faire qu'à dire,

Car la mort est proche et c'est une vraie obsession

Moi : Alors si tu dis vrai, vole, ne regarde plus l'avenir,

Oublie la mort et jouis de la vie avec passion.

Le papillon s'envola et partit butiner la grosse fleur mauve d'un chardon. Je l'observais. Il butinait, butinait, butinait. Au point d'en être ivre ? Je ne sais pas. Mais quant il s'envola de nouveau au dessus de la vallée, ce fut en zigzaguant. M'avait-il entendu ? Je me remis en marche vers d'autres horizons. Lui aussi, me semblait-il.

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Le moindre arbre jetant une ombre sur le chemin est un prétexte à un arrêt mais les papillons viennent me butiner. Dans ma tête, les mots "montre et papillon" deviennent déjà le titre d'une fable qu'il me faudra imaginer. Les beaux panoramas vers le Haut-Vallespir et sur des lieux à voir les jours prochains se dévoilent.

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Quand j'arrive au col de Formentere, la vision bascule de l'autre côté de la montagne vers les Aspres et la plaine du Roussillon

-13h40, Au Col de Formentere, le regard bascule sur un nouveau versant. C'est celui des Aspres. Les paysages changent. Ils sont un peu plus arides et avec tout au loin, les Corbières, la plaine du Roussillon et la Méditerranée. L'horizon est soudain plus distant qu'il ne l'était jusqu'à présent. D'ici, la terre et la mer se confondent. L'horizon est imprécis, voilé par une longue barre de brume grisâtre. Plus près, un minuscule village blanc aux tuiles rouges se dresse sur un mamelon au dessus de larges ravins. Ces couleurs contrastent au milieu de cette dense et rase végétation, parfois rousse et parfois olivâtre : je reconnais La Bastide. Le col, croisée de multiples chemins est très fréquenté par d'autres randonneurs. Certains profitent d'un grand pré bien vert pour pique-niquer, d'autres se sont installés en plein soleil devant ces beaux et vastes panoramas pour faire un peu de " bronzette ", d'autres ont choisi l'orée ombragée du bois pour se prélasser, d'autres, comme moi, ne font que passer mais eux redescendent déjà vers les vallons et moi je dois continuer à monter. Ce col est vraiment une invitation à un arrêt systématique. Grillé par le soleil, je fais moi aussi le choix d'une ombre bienfaitrice et file vers la lisière du bois pour un arrêt salutaire. Allongé sur l'herbe, je mange quelques fruits secs mais un gros bourdon et une jolie araignée aux pattes zébrées ne l'entendent de cette oreille. Pour le bourdon, je suis sans doute bien trop près du gros chardon mauve sur lequel il a jeté son dévolu de butineur. Quant à l'araignée, elle vient vers moi et semble mécontente que j'aie rompu le fil qu'elle avait tendu entre deux petits églantiers. De dépit et devant cette nature indocile, je remballe mes affaires et poursuit tout droit la piste qui s'élève maintenant plus hardiment vers Batère. Comme je le fais souvent quand la fatigue se fait sentir, je photographie tout et rien : des fleurs, des papillons, des insectes, des paysages….Tout devient prétexte à une photo, et les photos, prétexte à un bref arrêt profitable.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 1 : Amélie-les-Bains - Batère - 21,3 kms.oSur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 1 : Amélie-les-Bains - Batère - 21,3 kms.

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Au col de Formentere, je veux me reposer, mais si la nature est souvent jolie avec d'innombrables papillons et de très jolies fleurs, elle est parfois hostile et en la circonstance, je suis contraint de continuer. La chaleur a eu raison de mes forces et comme je suis fatigué, je m'arrête souvent et tout devient prétexte à faire des photos.

J'ai aussi l'exécrable impression de m'éloigner de cette magnifique nature que je suis venu chercher. Heureusement quand le tintamarre des pots d'échappement cesse, il suffit de lever la tête pour observer la magnificence de cette généreuse nature. Forêts, montagnes, ravins, prairies, ici tout est beau et grandiose.

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Ici dans le bois de la Fajosa, j'entrevois mes premières carlines mais, avec ces amoncellements d'arbres coupés, les premiers signes de la tempête Klaus aussi. La vision porte loin sur tout le Roussillon jusqu'à la Méditerranée. Les Tabacs d'Espagne butinent les origans. Le col de Formentere avec son pylône électrique qui le domine est déjà dans le lointain.Je grimpe vers la tour de Batère.

-15h, après une très longue montée à travers le bois de la Fajosa et la forêt domaniale de Saint-Marsal, j'arrive en vue de la Tour de Batère. Ici pour y avoir également fait des raquettes cet hiver, je connais bien ces chemins et je sais que je n'en ai pas encore fini avec les virages. D'ailleurs, de ce premier grand virage, la tour paraît bien petite et encore bien loin, mais l'important pour moi c'est qu'elle soit là ! Car même si ça peut paraître idiot, dans " Tour de Batère " il y a Batère, dans " Batère " il y a refuge de Batère, et le " refuge de Batère " pour moi ça signifie " arrivée " !

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Après maints virages, j'aperçois enfin la Tour de Batère et pour moi, c'est le symbole d'une proche fin d'étape. Un dernier coup d'œil vers chez moi et cette jolie plaine du Roussillon que je vais quitter pour quelques jours.

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Photos prises à la Tour de Batère et sur le chemin en direction du Col de la Descarga. Sur la dernière photo, on aperçoit un terril, relique de l'exploitation des mines de fer.

-15h20, je suis au pied de la tour et suis très surpris du nombre de voitures qui sont garées là. D'ailleurs d'autres viennent à ma rencontre et sillonnent bruyamment la piste soulevant un gros nuage de poussière. Bien au-delà de cette pollution, j'avoue qu'ici tous ces touristes qui circulent me dérangent bougrement. J'ai le vilain désagréable sentiment de retrouver plus rapidement que je l'avais imaginé cette civilisation du progrès que j'ai voulu quitter en faisant cette randonnée.

J'ai aussi l'exécrable impression de m'éloigner de cette magnifique nature que je suis venu chercher. Heureusement quand le tintamarre des pots d'échappement cesse, il suffit de lever la tête pour observer la magnificence de cette généreuse nature. Forêts, montagnes, ravins, prairies, ici tout est beau et grandiose.

Mais en levant souvent la tête, je m'aperçois aussi que vers le Canigou la couleur du ciel a bien changé. Depuis ce matin que je marche, ce changement de couleur a été progressif et je l'ai surtout remarqué depuis le début de l'après-midi : le ciel est passé d'un bleu outremer à un bleu ciel puis à un bleu très pâle presque blanc, puis ce blanc est devenu gris clair et il est maintenant carrément gris foncé au dessus de ma tête. Par contre, je n'avais pas encore observé ces gros nuages noirs qui semblent stagner sur les hauts pics environnants. Mais stagnent-ils vraiment ?

Comme au dessus de moi, le ciel n'est encore vraiment menaçant, je décide de faire une pause pour finir mon dernier sandwich et manger une orange devant ce merveilleux Vallespir que je suis venu découvrir. Deux randonneurs descendent du Puig de l'Estelle en courant et me saluent en me voyant. Ont-ils peur de l'orage ? Sans doute !

-15h50, je me remets en route en direction du Col de la Descarga. J'ai fait quelques centaines de mètres quand une voiture arrive et s'arrête à ma hauteur. Ce sont les deux randonneurs qui couraient et qui me proposent de monter. Je refuse gentiment et ils repartent avec un air désappointé. Je sais que cette invitation partait d'un bon sentiment mais il est hors de question pour moi de faire le moindre mètre autrement qu'à pied sur ce Tour du Vallespir ! Dans la descente vers le col, je coupe mon premier vrai ruisseau de la journée. C'est le Correc de l'Abeurador, c'est-à-dire le ruisseau de l'Abreuvoir. Il porte très bien son nom car il coule vraiment à flots et comme je n'ai plus d'eau depuis plus d'une heure, je remplis une gourde de cette eau glacée qui descend de la montagne. J'y ajoute néanmoins une pastille purificatrice, non sans avoir au préalable, étanchée ma soif en prenant le risque d'en avaler une énorme rasade.

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Le ciel s'assombrit alors que je me dirige vers la Col de la Descarga. Au col, la pluie fait son apparition, la tour de Batère s'éloigne mais le refuge de Batère, ancien vestige minier est bientôt là.

-16h05, c'est sous quelques grosses gouttes de pluie très éparses que j'atteins le Col de la Descarga où je retrouve l'asphalte. Dans ce virage, un petit panonceau m'indique le refuge de Batère à un quart d'heure de marche. Je sors avec empressement mon poncho et recouvre mon sac à dos de son revêtement imperméable. Mais le temps de réharnacher mon sac à dos, la pluie a cessé et je garde le poncho à la main. Le ciel s'est terriblement assombri et je presse désormais le pas pour arriver au refuge au plus vite. Le bitume m'aidant dans cette course contre l'orage qui s'annonce, j'aperçois déjà le refuge qui est là à droite au bout de la route. En arrivant sur la terrasse du refuge, j'ai la fâcheuse conviction qu'ici je suis le seul à " speeder ". En effet, les nombreux clients sont attablés, ils sirotent leurs boissons respectives en papotant et semblent " tranquilles comme Baptiste " et en tous cas, indifférents au ciel noir qui est au dessus de leur tête. Moi, je rentre dans le refuge en me précipitant vers le comptoir.

-16h15, il n'y a personne, ni dans la salle, ni ailleurs et j'attends sagement devant le comptoir. Au moment où une charmante jeune femme arrive et s'approche de moi, un éclair aveuglant zèbre le ciel d'ébène et illumine la sombre salle du restaurant. Cet éclair est aussitôt suivi d'un énorme coup de tonnerre qui fait vibrer tout le refuge dans un tintamarre métallique. Tout ce petit monde qui était agréablement installé dehors sur la terrasse se précipite comme un seul homme à l'intérieur du refuge. Au bas mot, ce sont une vingtaine de personnes qui, d'un seul coup, envahisse l'intérieur du refuge surpris par une pluie aussi soudaine que battante. Les grosses gouttes qui tombent bruyamment sur la toiture en zinc sont accompagnées de quelques beaux grêlons. Ouf ! Je me dis que j'ai eu beaucoup de chance et que je suis vraiment arrivé à temps. A cinq minutes près, je prenais sur la tête cette terrible saucée.

J'essaie de me présenter à la souriante barmaid mais il y a un tel brouhaha que j'ai un mal fou à me faire entendre. J'arrive néanmoins à comprendre qu'elle ne me retrouve pas inscrit sur son registre malgré la réservation téléphonique que j'ai faite la semaine dernière. Je lui rappelle avoir réservé, auprès d'une dame, une chambre en demi-pension pour ce soir et un panier-repas à emporter pour demain midi. Comme je viens sans doute de changer de tête, et avant même que je me mette en rogne, elle me dit : " Ne vous énervez pas Monsieur, il n'y a pas de problème, j'ai encore des places dans un dortoir et pour les repas ce n'est pas vraiment un souci ! ". Elle me voit rassuré et me demande de la suivre. Nous ressortons du refuge sous quelques gouttes de pluie mais le plus gros de l'orage semble passé. Elle me présente trois dortoirs, me quitte et me laisse ainsi choisir le lit que je souhaite occuper pour la nuit. La plus grande pièce, celle qui semble partiellement inoccupée, sert en réalité de gîte car il y a une immense table et un coin cuisine plutôt bien agencé avec évier, frigo, réchaud et micro-ondes. De chaque côté, il y a deux autres pièces, plus petites mais essentiellement équipées de lits gigognes. La première chambre semble entièrement occupée par des enfants qui jouent tapageusement aux cartes et dans la deuxième, les lits sont soit défaits ou bien, comme signe d'une occupation certaine, des sacs à dos y sont posés dessus bien en évidence. Je me rabats donc sur la grande salle où il y a encore trois lits. En m'approchant, je constate qu'un seul près du frigo semble vraiment libre puisque aux pieds des deux autres il y a aussi des sacs à dos. Je m'installe et commence à déballer mes affaires avec comme idée première de trouver au fond du sac ma trousse et mes effets de toilettes pour une douche opportune et réconfortante car j'ai l'impression d'être aussi poussiéreux que poisseux. A cet instant précis, deux femmes et deux hommes que j'avais aperçu sur la terrasse rentrent dans le dortoir. Ils mettent à sécher quelques vêtements et des chaussures sur le rebord de la fenêtre qu'ils laissent grande ouverte. De mon côté, et comme je n'ai pas l'intention de dévoiler mon anatomie devant cette gente féminine, je mets à profit cette présence, pour ranger mon sac à dos que j'ai largement mis en désordre et " sans dessus dessous " tout au long de la journée.

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Après avoir parcouru plus de 21 kms et 1.200 m de dénivelé sous un soleil torride et avec une charge de 21kg, j'apprécie le rudimentaire confort du refuge de Batère.

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J'occupe la soirée à discuter avec d'autres randonneurs et à quelques photos. Avec cette vue du Pic de la Souque, quelques très bons souvenirs reviennent, ceux d'une récente randonnée à ce sommet avec mon fiston Jérôme.

-17h15, mes colocataires repartent et je me déshabille prestement et me précipite sous la douche. Avant même de me frotter et de me savonner, je prends un réel plaisir à laisser couler cette eau fraîche sur ma tête. Avec cette eau brunâtre qui s'écoule le long de mon corps, j'ai l'impression que c'est toute la poussière du chemin qui s'échappe dans la bonde. Après plus de 8 heures passées sur les chemins, c'est un vrai bonheur que de se sentir propre, et comme il est tôt et que le souper sera servi à 19h30, je me jette dans le lit et sous la couverture pour un peu de lecture. Dans le dortoir d'à côté, les enfants semblent s'être assagis et le silence et la lassitude aidant, je m'endors avec " Dalva " dans les mains.

-18h15, donc une heure plus tard, c'est au bruit, entrant par la fenêtre ouverte, de quelques chevaux dont les sabots résonnent sur le bitume que je me réveille. Quand je sors de ma léthargie, je constate qu'une femme et deux hommes sont assis à la grande table qui trône au milieu de la pièce. Nous lions connaissance et un des hommes plus disert que l'autre commence à m'expliquer qu'ils sont neuf randonneurs, hommes et femmes, et qu'ils parcourent le G.R.10. Il me raconte même qu'au départ, il y avait deux groupes bien distincts, et admirable coïncidence, qu'ils sont tous originaires de la même région et que leur rencontre sur le G.R.10 est un pur hasard. En tous cas, voilà une histoire qui restera gravée en eux comme une célèbre image d'Epinal, ville dont il me dit être tous natifs. Il me dit aussi qu'ils traversent les Pyrénées depuis quatre années maintenant mais que leur périple se termine à Collioure dans quatre jours. La femme, elle, semble plus intéressée par mon livre " Dalva " de Jim Harrison que j'ai entre les mains et que je viens de commencer. Elle me dit avoir lu d'autres récits de cet écrivain qu'elle apprécie beaucoup mais pas celui-ci et quand elle se met à me poser des questions sur " Dalva ", elle semble assez frustrée que je ne puisse rien lui dire de ce roman dont je viens de lire trois pages avant de m'endormir. Les enfants ont quitté leur dortoir et ils sont maintenant sur le perron à regarder les chevaux de randonnée qui viennent d'arriver. Je me lève moi aussi et par la fenêtre, j'observe moi aussi les chevaux. Il y a d'ailleurs beaucoup de monde pour regarder ces quatre équidés et ces étranges randonneurs, pour moitié " squaws " et pour moitié " cow-boys ". Avant de s'occuper d'eux-mêmes, leur première tâche est de débâter leurs montures. Puis en deuxième, frottant leurs flancs avec de la paille avec de larges mouvements circulaires, chaque cavalier panse son propre cheval. De cette manière, ils éliminent très rapidement la sueur et les poussières collées sur le poitrail de leurs animaux. Comme la douche l'a été pour moi, ce nettoyage semble agréable aux chevaux. Ils se laissent faire sans broncher. En regardant ces amazones et ces écuyers, je me dis que ça doit être plaisant de randonner sans avoir à porter comme je l'ai fait toute la journée une lourde charge. En tous cas, ça doit être moins éprouvant, mais d'un autre côté avoir à s'occuper des chevaux tous le soirs comme ils le font, ce doit être aussi une sacrée contrainte !

-19h, la pluie a définitivement cessé et ce gros orage lors de mon arrivée n'a été qu'un grain violent mais passager. Les gros nuages noirs se sont enfuis vers la mer. Le ciel est encore gris mais d'un gris presque blanc qui est plutôt encourageant pour demain. Alors avant le repas, je pars flâner un peu, histoire de repérer la direction à prendre demain et de vérifier si le sentier est balisé à la prochaine étape. Je fais mes dernières photos de la journée. Je contemple aussi tous ces beaux panoramas qui sont là, juste devant le refuge, mais j'observe avec un peu plus d'insistance, ce pic qui au loin confisque l'essentiel du paysage. Ce pic, c'est celui de la Souque que j'ai gravi avec Jérôme, il y a trois semaines. Les bons souvenirs ressurgissent car il y avait tant d'années que je n'avais plus eu cette joie de randonner seul avec mon fils. Mais, cette pensée me rend triste aussi car je me dis : " Quel bonheur j'aurais éprouvé s'il avait pu parcourir ce Tour du Vallespir avec moi ! "

-19h30, l'heure du souper est arrivée et tous les clients sortent de leur chambre ou de leur dortoir pour rejoindre les deux grandes tables qui ont été dressées sur la terrasse. A mon tour, je m'installe. Je suis au bout d'une table près d'un jeune couple que je n'avais pas encore aperçu. A cette table, je retrouve aussi les neuf randonneurs d'Epinal ainsi qu'un couple d'allemands très sympathique qui effectue eux aussi le G.R.10. Les présentations sont rapides et les causeries bien évidemment tournent toutes autour de la randonnée. Chacun y va de ses propres expériences, de ses découvertes ou de ses espérances, mais dans toutes ces conversations, il y a un dénominateur commun c'est celui du plaisir que nous avons tous à marcher. Les propos sont si intéressants et si captivants qu'on en oublie même le plaisir que l'on prend aussi à manger. Et il faut l'avouer, le cuistot du refuge nous a concocté un excellent repas avec en entrée une très bonne salade bien craquante, puis de succulentes lasagnes et enfin un délicieux gâteau à la crème.

-22h, le temps est passé si vite. Certains sont déjà partis se coucher mais nous sommes encore quelques-uns à discuter autour de la table. D'autres, que le vin a rendus gais, chantent en tentant d'imiter l'accent allemand. Personnellement, pour rendre service au jeune couple assis à côté de moi, je tente de dessiner sur un petit bout de serviette en papier, et à l'aide de la carte IGN, un parcours de randonnée autour du refuge. En effet, ce sont les seuls clients à être venus ici en voiture mais ils souhaitent tout de même marcher et découvrir un peu la région.

Je leur propose une boucle très simple qui consiste à emprunter une portion du G.R.10 jusqu'au col de la Cirère pour monter ensuite au Puig de Saint-Pierre et au Puig de l'Estelle avec retour par la Tour de Batère. Ici, on ne peut pas faire plus simple et ce petit circuit a l'air de les satisfaire. Mais comme il est tard et que la fatigue se fait sentir, mes paupières ont un mal fou à rester ouvertes. Je pars me coucher. Mais pour les serveuses, c'est la bonne heure aussi, alors tout le monde en fait autant pour satisfaire à leur évidente requête !

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Quelques images de ma soirée au refuge de Batère. Devant le refuge, très belle vue sur le Vallée du Tech et une large portion du Vallespir.

Les nuages ont disparus. Allongé sur le lit, j'aperçois par la fenêtre restée ouverte, le ciel étoilé du Vallespir et dans ma tête, toujours ce " fou chantant " qui revient sans cesse…….

Mes jeunes années

Courent dans la montagne

Courent dans les sentiers

Pleins d'oiseaux et de fleurs

Et les Pyrénées

Chantent au vent d'Espagne…..

Il est 23 heures. Une fois encore, je regarde ma montre. Quelle sale habitude ! Je ne dors pas encore. Et quand la chanson s'enfuit de ma tête, il me revient à l'esprit l'image de ce joli papillon qui est venu se poser sur le cadran de ma montre cet après-midi. A-t-il survécu à cette journée torride ? Si oui, arrive-t-il à dormir sans penser au lendemain ? Demain matin, sera-t-il comme moi, prêt à s'envoler pour un nouvel épisode sur " les hauteurs d'une vallée âpre " ?

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Etape 1 : Amélie-les-Bains - Batère - 21,3 kms.

Cliquez sur la montre et le papillon pour passez à l'étape suivante

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Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Préambule

Publié le par gibirando


Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Préambule

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Préambule

Le parcours effectué et ses 6 étapes :

Cliquez sur les étapes pour voir chacune d'entre-elles.

-Amélie-les Bains (232 m) - Batère (1.460 m) 21,3 km.

-Batère (1.460 m) - St.Guillem de Combret (1.287m) 21,0 km.

-St.Guillem de Combret (1.287 m) - Prats-de-Mollo (753 m) 15 km.

(en réalité, avec mes égarements au départ de cette étape puis dans la forêt du Miracle puis pour la recherche de mon appareil photo que j'ai perdu dans cette même forêt, j'ai parcouru environ 25 km ce jour là)

-Prats-de-Mollo (753 m) - Notre Dame de Coral 1.081 m) 9 km.

- Notre Dame de Coral - St.Laurent-de-Cerdans (714 m) 27 km.

- St.Laurent-de-Cerdans (714 m) - Amélie-les-Bains (232 m) 21,5 km.

Bibliographie-Sites Internet-Lexique-Remerciements.

J'ai donc parcouru en 6 jours environ 125 kms pour 10,6 kilomètres de dénivelés positifs.

(La plupart des photos de ce Tour du Vallespir peuvent être agrandies en cliquant dessus. 2 fois, la photo occupe parfois le plein écran).

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MES JEUNES ANNÉES

Mes jeunes années

Courent dans la montagne

Courent dans les sentiers

Pleins d'oiseaux et de fleurs

Et les Pyrénées

Chantent au vent d'Espagne

Chantent la mélodie

Qui berça mon cœur

Chantent les souvenirs

De ma tendre enfance

Chantent tous les beaux jours

A jamais enfuis

Et comme les bergers

Des montagnes de France

Chantent la nostalgie

De mon beau pays

 

Loin d'elle loin des ruisseaux

Loin des sources vagabondes

Loin des fraîches chansons des eaux

Loin des cascades qui grondent

Je songe et c'est là ma chanson

Au jour béni des premières saisons

 

Mes jeunes années

Courent dans la montagne

Courent dans les sentiers

Pleins d'oiseaux et de fleurs

Et les Pyrénées

Chantent au vent d'Espagne

Chantent la mélodie

Qui berça mon cœur

Chantent les souvenirs

De ma tendre enfance

Chantent tous les beaux jours

A jamais enfuis

Et comme les bergers

Des montagnes de France

Chantent le ciel léger

De mon beau pays

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - PréambuleChanson de Charles Trenet 

Préambule :

"Où pouvait-on chercher dieu, si ce n'est sur ces montagnes ? Il se confondait, pour moi, avec la poésie de la terre, la découverte plongeante des plaines et des vallées, l'élévation, au sens physique du mot, le ravissement dans les nuées." Extrait du récit " Le chiffre de nos jours ". André Chamson (1900-1983) romancier et académicien français.

 

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - PréambuleMES JEUNES ANNEES

Cliquez sur la pochette du disque pour écouter la chanson et voir la vidéo

J'étais dans ma voiture en direction d'Amélie-les-Bains et je fredonnais une vieille chanson en écoutant une radio sur mon lecteur MP3. Ces vieilles paroles, ça faisait des années que je ne les avais plus entendues et là, juste au moment de partir marcher sur ce Tour du Vallespir, voilà qu'elles me revenaient dans la tête comme un boomerang. Cette chanson, c'était mes " Jeunes années " de Charles Trenet interprétée par Les Compagnons de la Chanson.:

Mes jeunes années

Courent dans la montagne

Courent dans les sentiers

Pleins d'oiseaux et de fleurs

Et les Pyrénées

Chantent au vent d'Espagne…..

Et en écoutant cette chanson, je me mis à penser à ma mère. Sans doute à cause de l'époque, car j'étais encore enfant quand elle avait eu du succès. Puis en écoutant mieux les paroles que j'avais sans doute négligées jusqu'alors, je me mis soudain à penser : dans la vie, il y a de ces coïncidences ! Je pars dans les Pyrénées courir les sentiers du Vallespir à la lisière de la frontière avec l'Espagne et voilà une chanson on ne peut plus adaptée à cette circonstance ! Et je ne sais pas pourquoi, à partir de cet instant, cette magnifique chanson très appropriée à l'aventure que j'allais vivre fut un encouragement supplémentaire aux efforts que j'aurais à entreprendre. Seul bémol à ce texte, mes jeunes années étaient loin derrière moi car avec mes soixante printemps je n'étais plus tout jeune mais même si ça peut paraître idiot, cette chanson me rajeunissait ! Ce refrain, à la fois plein de nostalgie, de poésie mais aussi de gaieté et d'esprit de liberté, me revint dans la tête très souvent tout au long de ce Tour du Vallespir.

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - Préambule

Le Vallespir dans la carte des Pyrénées-Orientales.

LE TOUR DU VALLESPIR ? :

 

En lisant ce préambule, vous allez d'emblée vous demander pourquoi ce titre " Tour du Vallespir " se termine-t-il par un point d'interrogation ?

Il y a plusieurs raisons à cela, mais la principale est d'ordre culturel, car pour moi une aventure sans culture, ça n'a pas vraiment de sens. Mais avant de la raconter cette aventure, j'insiste sur ce mot, car pour moi, cela en est toujours une quand je pars ainsi marcher plusieurs jours, il m'a semblé indispensable de replacer mon récit dans son cadre géographique puis d'expliquer les motivations qui m'ont poussé à faire cette longue randonnée. Les raisons de ce point d'interrogation sont donc culturelles et personnelles. Voilà en quatre points, les principales réponses à ce point d'interrogation :

1)- Le Vallespir c'est quoi ? : Dès l'instant, où j'ai envisagé de faire ce voyage pédestre, voilà, la toute première question que je me suis posée et bien évidemment, je me suis immédiatement tourné vers Internet pour en obtenir la réponse que je tente de résumer ci-après :

Le Vallespir est une large région vallonnée et montagneuse du département des Pyrénées-Orientales qui s'étire sur une quarantaine de kilomètres le long de la vallée du Tech. Le Tech dont le bassin versant est le plus méridional de France est un fleuve qui prend sa source à une altitude de 2.450 m environ sous le Roc Colom (2.507 m) et qui après avoir parcouru 84,3 kilomètres, se jette dans la mer Méditerranée dans la réserve naturelle du Mas Larrieu, non loin d'Argelès-sur-Mer, où se trouve son embouchure que l'on appelle le Bocal du Tech. La première limite du Vallespir est donc le Tech, de sa source jusqu'à Céret pour ce qui est de la vallée. On peut préciser que dans cette vallée du Vallespir circule la D.115, route principale qui file quasi parallèlement au Tech du Col d'Arès jusqu'à la commune du Boulou. Puis les autres limites sont bien sûr les versants de cette vallée. Il y a le versant qui est ensoleillé et que l'on appelle solana en catalan, ou soulane et adret en français. Pour simplifier, ce versant s'étire des Esquerdes de Rotja jusqu'au contreforts des Albères en passant par les versants abrupts du Massif du Canigou. Le versant sud ou ubac, bac en catalan, est représenté par la frontière avec l'Espagne du Roc Colom (2.507 m) jusqu'au Col du Perthus. Sur ce versant sud, on trouve le pic de Costabonne (2.465 m), le col d'Arès, poste frontière sur la D.115, le Roc de France ou de la Frausa qui culmine à 1.450 mètres pour ne citer que quelques points significatifs. Si la vallée du Tech est le principal creuset du Vallespir, il n'en est pas l'unique et de nombreux affluents ont aidés à son épanouissement : la Lamanère (15,7 km), la Parcigoule (9 km), la Coumelade (15 km), le Riuferrer (17,7 km), le Mondony (9,4 km) et le Maureillas (16,1 km) pour ne citer que les plus importants mais il y en a bien d'autres. Le Tech dans sa partie Vallespir a une exceptionnelle déclivité puisque en une quarantaine de kilomètres son altitude passe de 2.450 mètres à 120 mètres à Céret, commune considérée comme la capitale du Bas-Vallespir, Prats-de-Mollo étant celle du Haut-Vallespir. Cette extraordinaire déclivité en fait un fleuve dangereux voire dévastateur car les fluctuations saisonnières de son débit peuvent être très importantes selon la pluviométrie. En octobre 1940, avec les pluies diluviennes qui s'abattirent sur tout le département, le Tech dévasta tout sur son passage et bâtit tous les records de débit en France : montée des eaux de trois mètres en une demi-heure à Amélie-les-Bains et de huit mètres en une heure à Arles-sur-Tech. Ces crues torrentielles, les catalans les appellent " Aiguat ". Enfin pour être à peu près complet, un brin d'histoire pour signaler que le Vallespir, longtemps espagnol, fut rattaché à la France par le Traité des Pyrénées en 1659. Le Vallespir est une région de Catalogne pleine de légendes et de mystères où les traditions ancestrales restent fortement implantées avec à titre d'exemples la Fête de l'Ours, les sardanes, les feux de la Saint-Jean ou les " castellers ", ces hommes dont l'objectif est de grimper les uns sur les autres pour faire des pyramides humaines les plus hautes possibles que l'on appellent " castells ". Je n'en cite que quelques-unes parmi les principales mais dans le folklore catalan, elles sont abondantes.

2)- Mais d'où vient le nom Vallespir ? : Ce sont les romains qui occupèrent la région qui l'appelèrent ainsi. Ce mot vient du latin " Vallis Asperi " qui signifie " vallée âpre " mais âpre au sens de difficile, rude, abrupt, coriace, rugueux, avec des aspérités. On peut supposer qu'une autre région celle des Aspres qui signifie " aride " a la même origine étymologique.

3) Qui a " inventé " le Tour du Vallespir ? : Comme très souvent dans notre beau département et dans les Pyrénées toutes entières, les contours de cette longue randonnée à faire en 6 jours ont été imaginés par le grand pyrénéiste Georges Véron (1933-2005). Dans sa jeunesse, Georges Véron a souvent arpenté les sentiers montagnards du Vallespir qu'il connaissait parfaitement mais c'est en 2001 que le tracé complet avec quelques variantes imaginables fut revu dans sa totalité. Avec l'appui du Conseil Général des P.O et de la Direction de l'Economie et du Territoire, Georges Véron fut à l'origine de l'impression d'un guide où l'on retrouve les étapes de ce tour et qui s'intitule " Canigou-Vallespir-Conflent " paru chez Rando Editions dans la collection " Le Guide RANDO ". Personnellement, j'avais remarqué au cours de mes sorties dominicales du côté de Lamanère ou de Batère, les petits panonceaux jaunes faisant référence à ce Tour du Vallespir mais, jusqu'à cette année 2009, je n'avais jamais pensé l'accomplir dans son intégralité. J'en ignorais d'ailleurs le tracé, la distance et les réelles difficultés. Il faut savoir que depuis l'édition de ce guide en 2002, ce Tour du Vallespir a quelque peu été délaissé au fil des ans par les différents acteurs départementaux. Mais, selon les informations que j'ai pu lire récemment, et qui m'ont été confirmé depuis la fin de " mon tour ", il devrait être réhabilité, au même titre que le Tour du Canigou, au cours des prochaines années. Ce rétablissement ne pourra avoir qu'un effet bénéfique pour le développement d'un tourisme rural dont les Pyrénées-Orientales ont bien besoin.

4) Pourquoi me suis-je lancé dans ce Tour du Vallespir ? : Depuis 2007 et mon merveilleux " Tour du Coronat " en solitaire, je n'avais plus marché plusieurs jours d'affilée et j'avoue que j'avais depuis quelques temps des " fourmis " dans les jambes ! Je ressentais en moi, cet appel de la montagne et de la Nature, ce désir de liberté absolue que l'on ressent quand on est en pleine montagne, sentiment qui se développe d'autant plus que l'on est seul et livré à soi-même, ce goût de l'effort que les non-sportifs appellent inutile, cette envie de découvrir d'autres horizons et de rencontrer d'autres personnes. A tout cela, se rajoutait le besoin de sortir de la routine quotidienne, routine dont bizarrement j'avais le sentiment qu'elle ne s'était pas interrompue, malgré mon départ à la retraite. Bien sûr, une fois encore, j'aurai préféré partir randonner avec Dany, mais l'âpreté bien réelle du circuit, la longueur et la dureté des étapes conjuguées à sa polyarthrite, nous fûmes contraints d'en décider autrement. Quelques jours avant de partir, je vis les choses sous un autre angle, sous d'autres aspects et je crois que mon départ, une fois encore en solitaire, fut bénéfique pour nous deux, tant sur le plan physique que psychologique. Mais comme toujours en pareil cas, il subsistait en moi un sentiment de frustration, celui de ne pas partager toutes ces jolies " choses " que je ne manquerai pas de voir. Mais j'avais ma petite idée et comme je l'avais fait très souvent après le Tour du Coronat, je l'emmènerai plus tard faire des étapes ou des tronçons d'étapes sur une journée. Ce serait ma façon à moi de me faire pardonner mon voyage en solitaire que de lui faire découvrir un Tour du Vallespir saucissonné.

Loin d'elle loin des ruisseaux

Loin des sources vagabondes

Loin des fraîches chansons des eaux

Loin des cascades qui grondent

Je songe et c'est là ma chanson

Au jour béni des premières saisons

Tous les gîtes, refuge, hôtel et autre chambre d'hôtes ayant été réservés, il ne me restait plus qu'à sangler mon sac à dos et à grimper sur les " hauteurs de cette vallée âpre ".

Sur les hauteurs d'une vallée âpre - Le Tour du Vallespir - PréambuleLe guide de Georges Véron

Cliquez sur le guide pour passer à la 1ere étape.

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La stature ?

Publié le par gibirando

La stature ?


 

Vous pourriez penser que l’extra-pédestre que je suis à une préférence pour Jacques  « Cheminade » voire pour le parti  «  En Marche»  d'Emmanuel Macron. Eh bien non, les mots «  marche et Cheminade » me plaisent beaucoup mais je ne vais pas voter uniquement parce qu’un candidat a un nom qui évoque le plaisir de cheminer ! Voter c’est un parcours bien plus tortueux qu’un simple itinéraire de randonnée et à vrai dire, moi je m’y égare bien plus facilement. Je m’y égare comme jamais !

 

A deux jours du premier tour de la présidentielle, je suis toujours aussi indécis quand au choix du bulletin que je vais mettre dans l’urne. Il y aurait selon les médias des petits candidats et des grands.  Alors bien sûr comme des millions de français, j’ai regardé ces fameux débats avec les 11 candidats et j’y ai vu 9 hommes et 2 femmes, rien de plus et rien de moins. Des candidats différents mais nous le sommes tous que je sache. Avant de m’installer dans mon fauteuil, je m’étais dit « voyons voir si un ou plusieurs candidat(e)s a ou ont la stature ! », sous-entendu la stature d’un président de la république. J’ai regardé les débats et selon la définition que je donnais à ce mot, trois heures plus tard, j’étais toujours aussi perplexe : selon moi aucun n’avait « l’envergure » ou la « carrure » pour résoudre les problèmes les plus graves de la France, pour discuter d’égal à égal avec « les grands » de ce monde, pour trouver la meilleure solution le jour où un désaccord éventuel surgira avec nos partenaires ou adversaires. Pour un président, je suppose que gérer des désaccords et tenter de les résoudre doit être « son pain quotidien ». Il doit être préparé à cela mais il doit le faire, c’est son job. Or, désolé mais aucun candidat ne m’avait vraiment convaincu.

 

J’en étais là à la fin de l’émission. Puis le lendemain, je ne sais pas pourquoi, j’ai réfléchi à ma position et j’étais même disposé à la remettre en cause et pour bien commencer, je me suis dit : « mais au fait ai-je une bonne définition du mot « stature » et surtout quelle est-elle exactement ? ». Dans « Google recherche », j’ai tapé « stature définition ». Autant l’avouer les définitions trop succinctes données par le Larousse ne m’ont rien apporté de plus : « hauteur de la taille de quelqu’un ou d’un animal », « caractère, importance de quelqu’un ». Je suis donc parti voir ce qu’en disait le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (C.N.R.T.L) et là, comme très souvent, les définitions sont beaucoup plus développées. Elles sont au nombre de trois :

 

-          « Hauteur que présente le corps d'un homme en position debout, d'un animal dressé, considérée dans           l'effet qu'elle produit. »

-          « Aptitude à se tenir debout ».

-          « Dimension, élévation, valeur que présente sur le plan moral une personne, une collectivité ».

 

Après avoir lu toutes ces définitions et leurs développements, je me suis dit que l’idéal serait un homme ou une femme qui réunirait ou se rapprocherait des trois définitions en même temps, car au fond ma propre définition en était un condensé. N’y a-t-il pas un proverbe qui dit « la taille engendre le respect même chez un imbécile » ?

 

Concernant les tailles des candidats les voici et j’y adjoins leur âge car on peut estimer que l’aptitude à se tenir debout longtemps peut éventuellement être lié à ce critère.

 

Nathalie Arthaud 1,64 m – 47 ans

Jacques Cheminade 1,67 m – 75 ans

Benoît Hamon 1,69 m – 49 ans

Philippe Poutou 1,71 m – 50 ans

Emmanuel Macron 1,73 m – 39 ans

Jean-Luc Mélenchon 1,74 m – 65 ans

Marine Le Pen 1,74 m – 48 ans

François Fillon 1,75 m – 63 ans

Nicolas Dupont-Aignan 1,81 m – 56 ans

Jean Lassalle 1,89 m – 61 ans.

François Asselineau 59 ans. Sa seule taille que j’ai trouvé sur le Net est 1,61 m ce qui bien entendu est faux puisqu’il suffit de regarder la photo prise lors du débat pour constater qu’il est un peu plus grand que Dupont-Aignan et presque aussi grand que Jean Lassalle, le plus grand d’entre tous avec son mètre quatre vingt neuf. Il peut y avoir un effet d’optique car il est devant mais on peut aisément penser que sa taille se situe autour de 1,85 m voire plus ce qui fait de lui le 2eme candidat en terme de stature.

 

La stature ?

 

 

La stature serait donc la « hauteur que présente le corps d'un homme en position debout, considérée dans l'effet qu'elle produit » .Je sais que les élections ne sont ni un jeu ni des statistiques mais amusons-nous à éliminer les candidats selon le critère moyen de la taille en France : 1,79 m pour un homme et 1,65 m pour une femme. Chez les hommes, il ne reste que 3 candidats : Dupont-Aignan, Asselineau et Lassalle. Chez les femmes, Arthaud est éliminée mais notons que Marine Le Pen est 10 cm au dessus de la moyenne. Sur le seul critère de la taille, il resterait donc 4 candidats sur 11 qui aurait une « stature » satisfaisante selon la première définition, celle qui engendrerait le respect de ceux qui les regardent sans même les connaître.

 

Deuxième définition : « aptitude à se tenir debout » que l’on peut sous entendre comme une « aptitude à rester debout ». Sauf erreur de ma part, tous les candidats disposaient d’un tabouret mais j’ai noté que seul Philippe Poutou en avait fait usage au cours du débat. Apparemment, il a été le seul à ne pas tenir la station debout très longtemps devant son pupitre, éprouvant la nécessité de s’asseoir et de rester ainsi jusqu’à la fin. Ça peut s’expliquer car il est le seul à être ouvrier et donc a avoir un travail pénible dans une usine, mais je considère néanmoins que c’est un mauvais point car ça fragilise bougrement sa façon d’être et donc sa stature. Il est doublement éliminé. Trop petit, peut-être trop fragile et donc pas suffisamment performant.

 

Il reste donc 4 candidats confrontés à la 3eme définition : « Dimension, élévation, valeur que présente sur le plan moral une personne, une collectivité ». Oublions les collectivités car tous les candidats ont leur parti voire leur mouvement et attachons nous à la hauteur morale de leur personne.

 

Marine Le Pen : Au regard des affaires et si on fait abstraction de la présomption d’innocence, il faudrait l’éliminer. Le 30 mars, le Monde n’écrivait-il pas « des documents trouvés au siège du Front national, et consultés par « Le Monde », font état de la volonté du parti d’extrême droite de se financer grâce au Parlement européen » or dans ce même article on note que le trésorier du parti Wallerand de Saint-Just avait prévenu Marine Le Pen de certaines difficultés que rencontrait le parti lui proposant une solution et lui écrivant la note suivante : « « Ma chère Marine, voici les comptes 2013 et une présentation un peu différente faite par moi-même. En 2013, les dépenses ont été mensuellement de 100 000 euros plus élevées que prévu »…… « Dans les années à venir et dans tous les cas de figure, nous ne nous en sortirons que si nous faisons des économies importantes grâce au Parlement européen et si nous obtenons des reversements supplémentaires. ». Attendons le verdict de la justice mais si c’est vrai, on serait loin de la moralité souhaitable ! Je me méfie des médias qui n’ont pas la même couleur politique car on est en droit de se demander comment ils ont eu des informations aussi précises et avant même la justice, alors qu’il devrait y avoir le secret de l’instruction ! Alors problème réel ou monté de toutes pièces pour fragiliser Marine Le Pen ? Le problème est qu’il faudra voter avant même le verdict. Faut-il prendre le risque ? Je vous laisse juge.

 

Jean Lassalle : Il présente la plus haute taille mais force est de reconnaître que quand il parle celle-ci devient quasiment inutile et sa haute stature est inversement proportionnelle à son pouvoir de conviction. C’est sans doute un mec gentil et intègre mais son fort accent béarnais l’handicape forcément quand il faut débattre. Rappelons-nous aussi qu’il a fait rire aux larmes l’Assemblée Nationale en disant qu’ayant passé des tests psychotechniques à l’âge de 8 ans, il avait révélé avoir « un QI juste au dessus, très légèrement, de zéro ». Il semblerait que depuis son QI est quelque peu grandi mais pas autant que sa taille. C’est un point de vue très personnel mais je juge que sa stature en terme de « largeur » n’est pas suffisante.

 

Nicolas Dupont-Aignan et François Asselineau : A priori, les deux candidats ne traînent pas de grosses « casseroles », leur seul défaut étant de posséder, au sein des 11, parmi les plus gros patrimoines immobiliers, ce qui n’est peut être pas un vrai défaut si l’on pense qu’ils ont su gérer leurs revenus mieux que certains autres. Ça mériterait une analyse plus approfondie. Les deux candidats ont des idées très proches l’un de l’autre puisqu’ils prônent une plus grande indépendance de la France et la défense de sa souveraineté avec tout de même quelques nuances sur l’Europe, Dupont-Aignan étant plutôt pour réformer alors qu’Asselineau prêche carrément un Frexit, c'est-à-dire une sortie immédiate de l’Union européenne. Le premier est considéré par les médias comme un eurosceptique alors que le second veut quasiment revenir au franc et traîne une réputation de conspirationniste anti-américain et anti-européen. Tous les candidats reconnaissent qu’il y a un problème avec la gouvernance européenne actuelle et les fameux traités. Nos précédents gouvernants n’ont jamais tenus compte du rejet de la Constitution européenne exprimé par les français en 2005. Quand à l’euro, tous les économistes ou presque s’accordent à dire qu’il est devenu un véritable « deutschemark ». Leurs positions sur ces sujets-là ne sont donc pas isolées. Les deux candidats présentent le gros inconvénient de n’être peu que représentatifs de l’opinion publique française et leurs résultats lors de la présidentielle de 2012 ne plaident guère en leur faveur : 1,79 % pour le premier au premier tour quand au second il n’avait obtenu à l’époque que 17 parrainages ! Il a fait beaucoup mieux cette fois-ci et l’on notera d’ailleurs que selon un sondage effectué par LCI auprès de 8000 personnes, il aurait été et de très loin le plus convaincant des 11 lors de ce fameux premier débat avec 31% des voix devant Mélenchon 24%, Fillon 13%, Macron 10%, Le Pen 7%. Dupont-Aignan en obtenant 3% seulement. Alors, le vote pour ces deux-là sera-t-il enfin un vote utile ? La question reste posée !

 

Si ce vote est inutile, me voilà revenu au point de départ de mon indécision…

 

5 ans plus tard, je me demande si l’élection de François Hollande a été vraiment utile ?

 

Bien évidemment mon raisonnement n’est que dérisions, encore que les critères qui le composent ne me paraissent pas si absurdes et si négligeables que cela. De nos jours, on sait l’importance des images. Elles nous arrivent à longueur de journée sous toutes les formes et sur tous les supports. L’aspect physique c'est-à-dire la « stature » que l’on a d’un être humain est égale à la force qu’il dégage, à la puissance de l’image qu’il renvoie.

 

Les candidats peuvent toujours mettre des talonnettes, leurs images demeurent. Sarkosy en mettait. Poutine le fait encore alors pourquoi les 7 candidats que j’ai immédiatement éliminés n’en mettraient-ils pas ? Retrouveraient-ils pour autant une stature ? Mettre des talonnettes n’est-ce pas déjà une manière de tromper celui qui les regarde ? Tromper est-ce une valeur morale ? Le chien se mord la queue !

 

La stature deviendrait une forfaiture ?

 

Ça rime mais ce n’est pas ma définition !

 

Je suis toujours aussi indécis mais je trouve mes réflexions rigolotes ! 

 

Les français riront-ils le dimanche 7 mai à 20h ?

 

 

 

 

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