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saint laurent

Le Circuit pédestre de la Capoulade près de Gruissan

Publié le par gibirando

Ce diaporama est agrémenté de le très jolie musique "Planet" du pianiste virtuose Sofiane PamartLa Capoulade près de Gruissan

La Capoulade près de Gruissan

Cliquez sur les photos pour les agrandir. 2 fois pour un plein écran.

 


 

En ce 18 octobre 2019, je dois aller récupérer ma petite-fille Eulalie chez ses parents qui habitent Gruissan. Mais comme elle sort de l’école à 17 heures et que rien ne presse, j’ai plusieurs heures à tuer. J’ai donc décidé de partir beaucoup plus tôt vers l’Aude et Gruissan et de combler la majeure partie de l’après-midi en effectuant une boucle qui s’intitule « La Capoulade ». Pour moi, cette petite randonnée pédestre présente de très nombreux avantages : Elle est très proche de Gruissan, elle est donnée pour une modeste distance de 6 km et le temps de 1h45 et surtout elle côtoie l’étang de Gruissan sur une belle portion, ce qui me permet d’espérer la vision de très nombreux oiseaux. Quand je dis « vision », il faut entendre « photos ornithologiques » et donc passion à assouvir en plus de celle de marcher. Il y a 2 ans, en septembre 2017, j’avais réalisé « le Sentier thématique tour de l’étang de Gruissan » et malgré un temps exécrable, j’avais été ravi des oiseaux aperçus. D’ailleurs, ce jour-là, c’est la mauvaise météo avec un petit crachin intermittent mais très désagréable qui m’avait empêché d’enchaîner le tour de l’étang et la Capoulade. J’avais remis à plus tard cette dernière et courte boucle, espérant un temps plus clément. Aujourd’hui, j’y suis et  malgré quelques nuages gris passagers, le temps est bien meilleur. Ce n’est pas un grand soleil mais la température est douce et idéale pour marcher. Seule une luminosité imparfaite me fait redouter un reportage photos imparfait lui aussi. Venant de l’écluse de Mandirac et juste après le pont éponyme, il est 14h15 quand je gare ma voiture sur un terre-plein à l’intersection de la D.32 et d’un chemin menant aux Pujols, lieu-dit situé sur l’île Saint-Martin. Je connais un peu l’endroit pour y avoir déjà randonné. En face, j’aperçois déjà le pont métallique qui enjambe le Canal de Sainte-Marie et je sais que le départ est juste après. Alors que je traverse la route, quelle n’est pas surprise d’apercevoir deux cigognes dans un fossé contigu. Elles sont un peu loin de moi mais tant pis je m’essaie à quelques photos.  En zoomant sur elles et en les observant, j’ai comme le sentiment qu’elles sont affamées et cherchent pitance. D’ailleurs, j’en vois une se saisir d’une grenouille. J’essaie de m’approcher mais elles m’ont vu et s’envolent aussitôt au dessus des roselières. Je traverse la route puis le pont métallique et le panonceau « Capoulade » est là, sans autre mention que la distance qui m’attends : 6.000 mètres. Ce dernier matérialise à la fois le départ et l’arrivée du circuit. Sur ma droite, la Capoulade, petit massif calcaire et boisé culminant à des hauteurs d’une cinquantaine de mètres et de l’autre des marais envahi par un végétation impénétrable de joncs et de rares plantes essentiellement maritimes. Si mon départ est d’emblée ponctué par quelques photos de fleurs et d’insectes ; papillons et libellules presque essentiellement ; quelle n’est pas ma surprise d’enchaîner un bel oiseau posé sur un jonc mais surtout, au bout d’une centaine de mètres de me faire attaquer par une magnifique couleuvre de Montpellier d’un bon mètre vingt de longueur. Je la surprends sur ma droite entrain de sortir d’une petite cavité de calcaire. Mais comme elle me surprend autant que j’ai pu la surprendre, alors que je fais un pas en arrière, elle détale dans l’herbe et dans mon dos. Dans ces conditions, pas facile de la photographier malgré la dextérité dont je pense faire preuve. Appareil-photo enclenché, je m’avance alors vers elle mais cette fois-ci au lieu de détaler, elle s’avance vers moi, dressée sur sa queue, la gueule grande ouverte et en émettant des petits « pffi » très saccadés et rapides mais suffisamment dissuasifs pour que je recule une seconde fois mais de 2 ou 3 pas cette fois-ci. Malgré cette reculade, j’ai conscience d’avoir appuyé plusieurs fois sur le déclencheur. La couleuvre, elle, consciente de l’effet qu’elle a eu, file dans les roselières où elle disparaît. Ma première réaction est de m’éloigner de quelques mètres car si j’ai déjà aperçu des couleuvres de Montpellier à 4 ou 5 reprises lors de mes sorties, c’est bien la toute première fois que j’en vois une se dresser tel un cobra et faire preuve d’autant d’aplomb. Ma deuxième réaction est de regarder sur l’écran de mon appareil si j’ai des photos réussies. La plupart sont troubles car l’excès de mouvements leur a été fatal. Une seule semble à peu près correcte. Je repars en redoublant de vigilance et en me disant « je verrais bien à la maison ! ». Par bonheur, le chemin s’élargit, entre dans une pinède habitait par des pinsons, longe une vigne, s’éloignant ainsi pour quelques temps des marais. Dès lors que le chemin retrouve la proximité des joncs, je me remets presque automatiquement en mode « surveillance » et ce d’autant que le calcaire de la colline, avec ses nombreuses petites cavités karstiques, le côtoie lui aussi. Mais ce mode « surveillance » ne dure pas longtemps d’abord parce que ma curiosité reprend le dessus et puis surtout parce que de temps à autres des paysages s’entrouvrent ressemblant comme deux gouttes d’eau à des aquarelles de Turner. Alors je profite au maximum de cette douceur de vivre. Un mirador m’offre l’occasion de voir plus loin au dessus des marécages et j’ai la chance avec moi car des oiseaux les occupent. Un soleil liquoreux, quelques nuages entre des gris et des bleus dans un ciel opalescent, quelques rares couleurs plus chaudes, des ruines, une maison ocre aux volets bleus se cachant dans une végétation pas encore automnale, les perspectives et les mouvements sont là, mais je serais bien incapable d’en expliquer les raisons car je suis seul au monde et tout paraît immobile. Après avoir constater que les pins d’Alep avaient amplement remplacé les cultures en terrasses de jadis, je suis arrivé au lieu-dit Les Cabanes de Gruissan. En grandes parties ruinées, les maisons ne m’attirent que parce que j’y aperçois de nombreux passereaux. Des rouges-queues noirs sont bien présents sur les toitures et les murs mais bien d’autres oiseaux aussi occupent des arbres complètement dénudés ou bien de grands cyprès. Même de loin, je les aperçois super bien ! Je tente de les photographier puis je me dis que j’ai un peu de temps devant moi pour me mettre en planque, utiliser mes appeaux et voir si quelques photos moins lointaines de tous ces volatiles sont possibles. Je trouve presque le coin idéal dans une ruine sans toiture au dessus de laquelle quelques arbres sont complètement desséchés. Guère plus loin, un grand cyprès a des airs de sentinelle. J’utilisent deux appeaux presque simultanément et attends. Un appeau est dédié aux pinsons et aux chardonnerets et l’autre un peu passe-partout est plutôt fait pour les « petits oiseaux ». Enfin, ça c’est ce qui est marqué sur les emballages. En tous cas, les effets sont si spontanés que j’en suis même à me demander si les appeaux y sont pour quelque chose ou bien si plus simplement les oiseaux se complaisent ici ? Je ne vais pratiquement plus les utiliser et pourtant les passereaux vont et viennent sur les lieux et parfois même en de grandes nuées. C’est le cas des chardonnerets notamment. Mais serins, verdiers, linottes et pouillots sont de passage aussi. A mon grand plaisir, je reste presque une heure à photographier de nombreuses espèces mais malheureusement un groupe de randonneurs bruyants arrive faisant fuir cette avifaune si diverse. Me voilà contraint de sortir de ma cachette mais malgré tout très satisfait de cet arrêt aux Cabanes de Gruissan, même si pendant ce laps de temps quelques moustiques se sont évertués, mais en vain, à tenter de me faire déguerpir. Comme on le dit chez moi à Marseille, je repars content mais avec quelques grosses « bouffigues ». Les randonneurs toujours bruyants, eux, partent dans le sens opposé et ça me convient aussi, bien que je comprenne aisément que la convivialité et le partage soient présents dans une sortie en groupe.  Ici, le sentier se redresse et quitte la proximité des marais en entrant dans une pineraie. Par la force des choses et parce que cet entracte ornithologique si fabuleux était inespéré, la suite du parcours devient plus monotone. Cette monotonie se transforme même en consternation quand au loin, du côté de Capitoul et de son château viticole, j’aperçois les vignobles et les pinèdes saignés à blanc par des bulldozers et des camions de chantier. En zoomant avec mon numérique, je constate que le chantier en question consiste en la construction d’un vaste lotissement de petites maisons qui seront probablement  réservé à une clientèle touristique. En regardant ce désastre environnemental, je me dis « est-ce bien utile et raisonnable pour le plaisir de quelques uns et l’appétit financier de quelques autres de construire de pareils centres de vacances au sein même d’un site protégé, celui des Auzils, et d’un parc régional de la Narbonnaise auxquels les pouvoirs publics ont eu le culot d’ajouter le qualificatif de naturel ? » « Pourquoi laissent-ils faire ça ? » « Que deviendra la Nature quand inexorablement ces zones touristiques s’étendront sans vergogne parce que le but recherché sera de gagner de plus en plus d’argent ? ». Voilà quelles sont mes pensées. Je continue. Le sentier alternant pins, garrigues et vignobles, il devient moins uniforme et donc moins rébarbatif, et ce d’autant que quelques fleurs, papillons, criquets et oiseaux aiguisent une fois encore ma curiosité. Il est encore moins ennuyeux dès lors que des panoramas aériens s’entrouvrent vers l’île Saint-Martin et l’étang de Campignol. Près d’un poste de chasse en pierres sèches donnant sur ces magnifiques paysages, j’ai le sentiment d’être au point culminant de cette courte boucle. Au loin, j’aperçois ma voiture que j’ai garée sur le terre-plein mais comme une autre véhicule est désormais garé juste à côté, je ne suis qu’à moitié rassuré. Je pensais que l’endroit choisi était plutôt isolé et ce n’est pas le cas. Je repars, éliminant immédiatement cette mauvaise pensée irraisonnée. Peu de temps après, le regard surplombe l’étang de Gruissan avec en toile de fond, la vieille cité dominée par la Tour Barberousse. Là, un mauvais layon très raviné descend vers une intersection. Le hameau de la Capoulade est là et je vois que je peux l’atteindre par un étroit sentier filant à droite. J’y file et l’atteins très rapidement. Entourée de grotesques clôtures, car si facile à enjamber, je n’y découvre rien de vraiment folichon : deux caravanes, des matériels agricoles, une serre et puis surtout plantées sur une petite butte, quelques vieilles bâtisses ramassées sur elle-même entouré de vignobles et de champs labourés. Sans doute, une ferme dont je n’ose pas m’approcher. Primo parce que je n'y ai pas été invité, secundo car je ne vois personne et que règne un étrange silence, et tertio parce que malgré le silence ambiant, j’ai toujours peur qu’un molosse ne déboule sur moi comme cela m’est déjà arrivé à plusieurs reprises. Seuls quelques moineaux sympas se laissent tirer le portrait.  La clôture, aussi ridicule soit-elle, me semble électrifiée et signifie sans doute « vous n’êtes pas le bienvenu ». Alors je fais le choix de repartir par le même sentier sans m’éterniser. Je retrouve l’intersection dont quelques cyprès qui l’occupent en son centre sont les terrains de jeu de nombreuses mésanges bleues. Après un quart d’heures passé à tenter d’en immortaliser au moins une, force est de reconnaître que  le seul « bleu » ici c’est moi. « Bleu » de la photographie ! Dans le ciel, des oiseaux passant en « V » me font vite oublier cette vicissitude.  Ici une large piste m’entraîne vers le lieu-dit Saint-Laurent. A partir de là et jusqu’au bord de l’étang de Gruissan, or mis une mésange bleue que je réussis enfin à surprendre photographiquement parlant, le cheminement devient plus ennuyeux, d’abord parce que le ciel s’ennuage de plus en plus, colorant complémentent de gris l’infime partie qu’il restait du ciel bleu, et puis surtout parce que je n’y réalise que peu de découvertes intéressantes. La flore présente a déjà été vue, quand à la faune, elle se résume à une instable fauvette et à des tariers qui ne le sont pas moins, tous, ayant décidé de me « faire tourner en bourrique ». Quelques pinsons espiègles s’éloignent de moi en jouant « à saute-amandiers » et « à saute-oliviers ». « Je ne vais quand même pas refaire le chemin en sens inverse parce que quelques passereaux sont fantasques ! » me dis-je. Après avoir traversé un vignoble, je retrouve le bord de l’étang. Ce que j’y découvre me rappelle pour beaucoup « le Sentier thématique tour de l’étang de Gruissan » réalisé en 2017. Même flamants, hérons, aigrettes, goélands, et mêmes cormorans. J’y ajoute en sus les mêmes tariers-pâtres que je réussis enfin à immortaliser. Dans ce bestiaire ornithologique quasiment identique, seuls quelques foulques macroules, un surprenant huîtrier-pie et un cisticole des joncs viennent m’offrir un peu de nouveautés. C’est sur toutes ces photos que va se terminer ma balade ? Il n’est que 17 h mais comme le soleil s’engloutit dans un brume opaque, le ciel paraît crépusculaire.  J’enjambe la passerelle métallique et file vers ma voiture. Sur le terre-plein faisant office de parking, huppe dressée, un cochevis semble me dire « et moi, tu ne me prends pas en photo ? ». En me voyant, il se met à courir vers le marais mais s’arrête juste avant dans les salicornes. Je l’ajuste, appui sur le déclencheur mais sa huppe est déjà tombée. Il s’envole. Plus loin, dans l’étang de Campignol, un Grand héron est absorbé dans sa partie de pêche. Même en me voyant, il hésite à s’envoler. Sans doute que la pêche est trop bonne ? Je tente une dernière approche. Il s’envole. J’ai fait le vide dans le secteur. Il ne me reste plus qu’à aller chercher Eulalie chez ses parents. Telle que décrite ici, cette balade a été longue de 7,1km pour des montées cumulées très modestes de 154 m. Carte IGN 2546 OT Narbonne Top 25.

 

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Le Circuit de la Soulsoure depuis Saint-Hippolyte-de-la Salanque

Publié le par gibirando


Diaporama sur la chanson "La Mer" de Charles Trenet, jouée par Biréli Lagrène (extrait de son album Gipsy Project)

Le Circuit de la Soulsoure depuis Saint-Hippolyte-de-la Salanque

 Le Circuit de la Soulsoure depuis Saint-Hippolyte-de-la Salanque

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A l’origine, la Soulsoure, Solsora (*) sur les cartes était le nom d’une modeste agouille (carte cadastrale) et celui d’une petite zone marécageuse située entre la cité de Saint-Hippolyte et l’étang de Salses-Leucate. L’agouille traversait le site et de ce fait, l’appellation était commune. L’agouille a été aménagée en canal et a pris le nom de son célèbre concepteur Pierre-Paul Riquet. C’est une vieille histoire dont l’origine date de 1686 (**). Aujourd’hui la Soulsoure, c’est surtout le nom d’une bande littorale de 49 ha protégée par un plan de gestion dans lequel un grand nombre d’institutions et d’acteurs sont parties prenantes. Plus simplement, il s’agit d’une vaste zone humide ayant un intérêt écologique et environnemental primordial. Le circuit pédestre que je vous propose ici est bien connu des marcheurs, promeneurs et coureurs hippolytains mais si vous devez y aller aussi, sachez qu’il nécessite un respect capital du milieu dans lequel vous aurez à circuler. Eux le savent mais les visiteurs pas toujours. Si ça vous chante, vous pourrez l'allonger à votre guise car les chemins sont nombreux tant vers l’intérieur des terres que vers l’étang de Salses. Vers l’étang, vous pourrez l’agrandir en partant vers le nord-ouest et vers Salses en direction du hameau de Garrieux par exemple. Vers le nord-est, vous serez un peu plus limité à cause de la presqu’île de La Coudalère. Dans cette dernière direction, le terrain militaire dit de Saint-Laurent-de-la Salanque constituera une contrainte qu’il vous faudra impérativement contourner ou précéder (comme nous l’avons fait) pour revenir vers la ligne de départ. La deuxième contrainte est bien évidemment l’Etang de Salses lui-même mais ça je suppose que dès lors que vous aurez regardé le tracé sur la carte I.G.N, vous aurez compris qu’aller au-delà de cette limite, c’est la garantie d’une baignade certaine ! Si l’été, ça ne pose pas ou peu de problème, en janvier, l’idée même d’un simple bain de pieds peut être mal perçu. C’est pourtant ce que nous avons failli connaître au cours de cette balade. Oui, vous l’aurez  compris, l’objectif principal de cette balade est de longer une belle partie de la bordure de cet étang et autant que possible de profiter de cet environnement insolite et sauvage. Flore et faune vous y attendent  mais les deux sont fragiles. Nous, en raison du temps que nous voulions y consacrer, on s’est cantonné à une partie somme toute modeste mais suffisante pour avoir un très bel aperçu de ce que peut être cette Soulsoure. Il y a donc eu le plaisir de marcher avec comme horizon, un horizon changeant et parfois même une absence d’horizon car ici quand il est fait beau mais un peu brumeux, le ciel et l’eau se confondent assez souvent et seuls d’étroits rubans plus sombres encadrent ce paysage tout bleu. Ces rubans sont la terre, avec sur la gauche quelques collines du côté de Salses, les Corbières maritimes, et sur la droite, cette longue et fine langue que constitue la presqu’île lagunaire sableuse de Barcarès-Leucate. Plus près, c’est le blanc qui prédomine avec les barres d’immeubles et les marinas du Barcarès.  Marcher est un agréable plaisir mais le faire en y insérant quelques découvertes, c’est bien mieux. Tel était notre deuxième objectif : découvrir ! En la matière, il y a bien sûr les décors, les paysages,  l’occupation et l’activité humaine, plus globalement la vie du lieu, sa flore et sa faune mais je ne vais pas vous raconter d’histoires car je suppose que vous commencez à me connaître et parmi ces découvertes il y en a une qui justifie notre présence ici : l’avifaune ! En effet, cette zone comme la plupart de tous les étangs méditerranéens est un haut-lieu de l’ornithologie. Certains oiseaux ne font qu’y passer le temps de s’alimenter et de prendre un peu de repos, d’autres y sont sédentaires et enfin, il y a ceux  qui y restent le temps de la reproduction. Venir ici sans pouvoir assouvir ma passion de la photo ornithologique en particulier et animalière en général aurait donc été un sacrilège !  Le départ de la balade s’effectue depuis Saint-Hippolyte. Nous trouvons une place où nous garer à proximité de la très imposante église Saint-Michel avec son superbe clocher et nous remontons le boulevard de la Marine, nous passons devant le tout autant imposant « castell » médiéval qui fait l’angle avec la rue Jeanne d’Arc. Marine, Jeanne d’Arc, j’en suis à me demander de quel bord politique est  la commune ? Enfin, peu importe, aujourd’hui le seul front à retenir est le front de mer, enfin celui de l’étang et nous en sommes encore à chercher la cave vinicole qui est la vraie ligne de départ de cette boucle. Nous n’avons pas prévu de visiter le village, qui mérite sans doute un détour plus conséquent au regard de l’Histoire que j’ai pu en lire sur le Net. Voilà l’avenue Paul Riquet que nous recherchons. La cave est là. Nous poursuivons tout droit. Le canal est déjà là. Tout droit lui aussi. Droit comme un « I ». Nous le longeons sur sa berge gauche. Sur sa berge droite, de grands cyprès servent de miradors à une palanquée de grandes Aigrettes tandis que de nombreux étourneaux et tourterelles ont trouvé refuge sur les câbles électriques. Les moineaux semblent avoir une nette préférence pour les tamaris où ils se cachent. Des occasions presque inespérées d’engranger les premières photos ornithologiques. Si la présence des aigrettes s’explique par l’abondance de petits poissons dans le canal, des mulets apparemment, celle des autres volatiles reste plus mystérieuse. Nous poursuivons. Un gros ragondin fait sa toilette. Une première passerelle se présente mais nous en faisons l’impasse car mon bout de carte m’en indique une deuxième un peu plus loin. Les cyprès ont quasiment disparu et ont laissé la place à de grands peupliers blancs et à quelques pins. Les premiers sont effeuillés et quelques oiseaux ont élu domicile au plus haut de leur faîte. En raison des branchages faisant obstacle, ils sont impossibles à photographier. Les Grandes Aigrettes au bec jaune laissent la place à quelques aigrettes garzettes au bec noir et à une multitude de petits passereaux : serins, rouges-queues, gobe-mouches, verdiers, chardonnerets, bruants.  Un grand bonheur pour moi de voir tous ces oiseaux alors que nous en sommes à peine à la partie que j’imaginais comme la moins intéressante du parcours. Je ne peux malheureusement pas les photographier tous convenablement. Voilà la deuxième passerelle. Elle fait office d’écluse. Cette fois, il faut traverser et longer la berge opposée. Les grands peupliers disparaissent et laissent la place à une plus grande variété arbustive avec des cannes, des peupliers plus modestes dans leur taille et quelques autres essences. Dans le canal, les roselières se font plus présentes. Elles servent de repères aux gallinules poules d’eau. Une étrange créature vient crever la surface, je la prends en photo mais très vite elle replonge dans les profondeurs du canal. Tortue ? Poisson carnassier ? Serpent ? Je ne saurais jamais ! La photo reste incertaine mais je parierais bien pour un poisson carnassier ou une grosse tortue d’eau. L’étang approche et avec lui, apparaissent les premiers cabanons et les premières barques de la Fount del Port. Très étonnant, ces quelques pieds de vignes au milieu même du canal.  Quelle jolie manière de mettre de l’eau dans son vin  ou l’inverse !  Une pancarte Natura 2000 présente et explique ce qu’est le « complexe lagunaire de Salses-Leucate » et rajoute qu’il est un « site européen majeur pour la conservation de la biodiversité ». Un grand cormoran dort sur un piquet planté à plusieurs mètres du rivage mais mon insistance à vouloir le photographier semble le réveiller. Il bat lourdement des ailes comme quelqu’un qui étire ses bras après un profond sommeil puis il s’envole en rasant la surface. Désormais, nous longeons le bord même de l’étang en marchant sur un épais tapis d’algues sèches mais fortement imbibées par les pluies des jours précédents. Nous pataugeons et de ce fait, nous sommes contraints de rallier le chemin principal. A regret car quelques échasses occupent les portions sableuses. Le chemin est encadré de ganivelles, ces palissades dont l’utilité est double : freiner les vents de sable et encadrer les déplacements humains. Mais là aussi, les orages de la veille ont créée quelques grandes flaques d'eau pas toujours facile à franchir. Seul privilège à cette entorse obligée, la découverte d’un vraie « barraca », maison traditionnelle du pêcheur construite avec les roseaux du coin et le bois flotté. On continue tant bien que mal jusqu'à atteindre une passerelle sur l’agouille Ventouse. Mais les choses se compliquent car des employés qui travaillent au débroussaillage nous indiquent que nous ne pourrons pas aller plus loin, les eaux de l’agouille ont débordé et ont envahi les chemins adjacents. Nous faisons demi-tour avec dans la tête la quasi certitude que la balade est déjà terminée. On retourne au bord de l’étang et continuons au plus près de l’eau en suivant un jeune homme qui promène son chien. Eux sont carrément dans l’eau ; le chien jusqu’au poitrail et l’homme jusqu’aux mollets, et nous sur la berge mais sans le vouloir, ils nous montrent un itinéraire que nous n’aurions jamais découvert. En effet, nous arrivons à l’embouchure de l’agouille Ventouse où un amoncellement de branchages, de roseaux et d’algues a créé un pont si épais et si solide que nous le chevauchons sans trop de crainte. En tous cas, nous réussissons à franchir l’agouille large de presque 3 mètres sans nous mouiller les pieds. On continue en alternant, les passages sur le rivage ou entre les ganivelles au gré de leur praticabilité. D’autres oiseaux apparaissent : passereaux des roseaux mais aussi des goélands, des mouettes rieuses et quelques autres limicoles. Un petit régal pour moi. La marche devient plus simple même si pour éviter une zone vraiment inondée, elle nous oblige à entrer dans une propriété privée sur quelques dizaines de mètres. Après cette courte infraction, nous voilà désormais sur une portion littorale bien plus praticable. Petits ou grands, les oiseaux de étangs se succèdent : hérons, chevaliers, passereaux. Nous passons devant une villa et quelques minutes plus tard débouchons sur une grande esplanade. Devant nous, le fameux terrain militaire, à droite une route asphaltée et à gauche un immense ponton en ciment donnant sur les flots. J'apprendrais plus tard que ce ponton construit en 1924 et mis en service en 1927 servit de base pour les hydravions du célèbre ingénieur Pierre-Georges Latécoère. Carte  à l’appui, j’explique à Dany que l’heure est arrivée de faire un choix : soit prolonger la balade en continuant le littoral puis en faisant le tour du terrain militaire soit prendre la route qui part à droite et qui doit nous ramener à Saint-Hippolyte. Plus pragmatique que moi, elle me réponds que c’est surtout l’heure du déjeuner qui est déjà arrivée et elle file aussi sec vers l’extrémité du ponton, seule « aire de pique-nique » digne de ce nom à ses yeux. Assise au bord du ponton, les pieds ballants au dessus de l’eau, la voilà qui s’installe et se met à manger sa salade face à l’immensité de l’étang. Je fais de même sous le regard inquiet d’un grèbe huppé qui lui aussi est entrain de déjeuner. Enfin, lui en est tout juste à tenter de le pêcher par des apnées successives, longues et de plus en plus éloignées de nous. Avec beaucoup de difficulté, je tente bien évidemment de le photographier. Face à nous l’étang bleuté et au loin sur notre gauche, un Massif du Canigou excessivement enneigé qui vient de surgir des nuages comme un diable à ressort jaillit de sa boîte. Enfoui qu’il était sous de gros cumulonimbus, nous ne l’avions pas remarqué. Après ce frugal déjeuner, je continue à m’adonner au plaisir de la photo pendant que Dany en profite pour un peu de repos sous un soleil suffisamment tiède pour tomber dans une agréable torpeur. Ici, de nombreux passereaux occupent les salicornes, les soudes et autres plantes halophiles poussant à profusion. Quelle n’est pas ma surprise de découvrir pour la toute première fois le si joli « Gorge bleue à miroir ». Il est temps de repartir. Dany a opté pour la formule la plus courte c'est-à-dire celle qui ne fait pas le tour du terrain militaire. Nous prenons la route bitumée D.11h jusqu’à l’entrée du dit terrain. Bien évidement, le fait même de quitter le bord de l’étang rend cette balade moins captivante. Les oiseaux y sont moins nombreux. Seuls quelques étranges tags sur un transfo électrique abandonné, le tableau d’une Vierge Marie jeté dans des décombres qui n'ont rien à faire là et quelques chèvres jouant sur les palettes d’un capharnaüm  retiennent l’attention de mon appareil photo. Voir les fossés transformés en dépotoirs et de jeunes cabris et leurs mères juchées sur des palettes et gambader au milieu de bouteilles de gaz me rend plutôt « furax ». Nous arrivons devant la grille du terrain militaire et il nous faut quitter l’asphalte. Ici, nous tournons à droite à hauteur d’une métairie au style résolument catalan, en pierres et « cayroux ». Un chemin y file derrière puis se poursuit de manière évidente tout en zigzaguant. Finalement l’itinéraire devient quasiment rectiligne. Si vous n’avez pas pris la précaution d’un tracé G.P.S, il vous faudra suivre le chemin le plus emprunté. Vous ne pouvez guère vous tromper car c’est à la fois celui qui dispose d’un maximum d’ornières et le plus bourbeux à la fois, les deux allant ensemble à cause de l’activité agricole permanente et des pluies des jours précédents sur un terrain argileux peu perméable. Il traverse des champs en friches, d’autres envahis d’immenses serres plus ou moins abandonnées mais surtout, il pénètre ce qui fait la richesse du pays salanquais, c'est-à-dire le maraîchage,  les vergers, les vignobles et l’élevage équin ou ovin. Tout au bout, ce chemin débouche sur la départementale D.11, laquelle à droite retourne vers le centre de Saint-Hippolyte. Nous retrouvons notre voiture après 3h30 sur ce « Circuit de la Soulsoure ». La balade se termine après une dizaine de kilomètres parcourus, le « trackback », c'est-à-dire le tracé de mon G.P.S enregistré en marchant, m’annonçant 10,099 km, pour un dénivelé quasiment nul de 3 mètres maxi. J’ai photographié une bonne vingtaine d’oiseaux d’espèces bien différentes mais ce chiffre, il faudrait le multiplier par trois pour obtenir un recensement fidèle des oiseaux réellement aperçus au cours de la balade. Carte I.G. N 2548 OT Perpignan – Plages du Roussillon Top 25.

 

(*) La Solsora : En français le Soulsoure est le nom de la « Soude commune », en latin « Salsola soda », le mot « salsona » ayant pour origine le nominatif « salsus » signifiant « salé ». Il s’agit d’une plante halophyte et succulente dont on tire depuis des siècles le fameux carbonate de soude ou carbonate de sodium par combustion de ses cendres, élément essentiel dans la fabrication du verre et du savon.

(**) Le canal Paul Riquet de Saint-Hippolyte : En 1666, sous le règne de Louis XIV et grâce à un édit de Colbert,  commencent les premiers travaux du « canal royal du Languedoc ». Sous la férule de Pierre-Paul Riquet, les travaux durent une quinzaine d’années et sont motivés par le souhait de faciliter le commerce, du blé notamment. En 1789, les révolutionnaires lui donnent le nom de « canal du Midi ». Bien plus tard, entre 1838 et 1858 et après le creusement définitif du « canal de la Garonne », l’ensemble devient le « canal des Deux-Mers ». Si l’idée de relier la Méditerranée à l’Atlantique date de l’antiquité mais a sans cesse été reprise au fil des différentes couronnes, on peut citer Auguste, Néron, Charlemagne, François 1er, Charles IX ou encore Henri IV, deux siècles auront presque été nécessaires pour parvenir réellement à concrétiser ce projet d’une voie navigable entre les deux mers. Entre ces deux dates, une multitude d’autres projets de canaux secondaires seront imaginées par divers ingénieurs au gré des intérêts commerciaux, des guerres à répétition, des signatures de traités, des périodes de paix, des nouveaux conflits, de nouveaux accords, etc, etc....Si certains verront le jour, l’insuffisance de finances et le désintérêt soudain pour un projet qui paraissait essentiel quelques années auparavant sont les principales causes de nombreux avortements. Il en est ainsi de ce qui devait être le canal du Roussillon dont Vauban était le promoteur. Quand on évoque Vauban, on pense inévitablement stratégie et systèmes de défense et bien évidemment l’idée de relier le Roussillon au canal royal du Languedoc par un autre canal est d’abord militaire. Nous sommes en 1686 et il faut se rappeler que le comté du Roussillon vient d’être annexé au royaume de France par le traité des Pyrénées de 1659, au même titre que d’autres régions pyrénéennes espagnoles comme le Vallespir, le Capcir, le Conflent et une partie du comté de la Cerdagne, pour ne citer que les plus proches de Saint-Hippolyte. Cette région essentiellement d’origine catalane est dans une période de grande instabilité et pour Vauban, les aspects sûreté et sécurité sont primordiaux. Il est important de réprimer le moindre antagonisme, la moindre opposition, de faire face à d’éventuelles représailles venant du royaume d’Espagne. C’est ainsi qu’en 1686 est creusé le canal de la Robine dont le prolongement après Port-la-Nouvelle doit rejoindre l’étang de La Palme puis celui de Salses-Leucate, lequel une fois traversé reliera Perpignan par un canal démarrant à proximité du village de Saint-Hippolyte. Les agouilles étant nombreuses dans le secteur, on peut supposer que les ingénieurs ont utilisé une petit cours d’eau voire une source existante débouchant au lieu-dit la Font del Port (la Fontaine ou la Source du Port en français) : la Solsora (*) sans doute. Il faut se souvenir que depuis toujours les salines étaient nombreuses à proximité de Saint-Hippolyte dont l’appellation Sant Hipolit de la Salanca, nous rappelle que les « salanques » c'est-à-dire les « Terres Salées » étaient habituelles dans ce secteur. Voilà donc le principal projet du canal dit du Roussillon tel qu’il est repris par l’ingénieur Antoine Niquet après la mort de Riquet en 1680 et même si d’autres ébauches (vers Rivesaltes et l’Agly, Canet et Port-Vendres, les Fenouillèdes et les Corbières) ont été un temps envisagées, la plupart restent soit trop peu rationnelles soit carrément utopiques. Les travaux de ce canal du Roussillon commencent un peu partout et le creusement du canal de Saint-Hippolyte débute en 1691 mais par absence de budgets et diverses autres raisons (risque de guerre devenu caduc avec l’Espagne, opposition des héritiers Riquet, désintérêts commerciaux dus aux progrès routiers et maritimes, etc…) la plupart de toutes ces entreprises ne seront jamais menées jusqu’à leur terme. Il faut noter que le canal de Saint-Hippolyte prendra le nom de Riquet alors que ce dernier est déjà mort depuis 1680 quand commencent les travaux en 1691. On peut donc supposer qu’il s’agit d’un hommage, d’un souhait ou d’une exigence des héritiers car il a été le premier à coucher sur le papier, l’idée même d’un canal reliant l’étang à la commune. Après deux ans de creusement, le projet est abandonné mais la liaison entre le village à l’étang est terminée. Ce tronçon de canal n’aura jamais l’usage initial qui était militaire ni commercial mais, puisqu’il court jusqu’à l’étang, il va permettre d’assainir l’intérieur des terres en proies aux marécages et aux inondations régulières diminuant ainsi les nombreux risques liés aux maladies infectieuses qui en découlent depuis toujours, tant pour l’homme que pour la faune. En effet, avec le canal et les autres agouilles Capdal, Ventouse, du Trial et leurs réseaux, les eaux de sources et de pluies peuvent désormais être drainées vers l’étang. L’Etat français cédera le canal à la commune qui diminuera sa taille, aménagera ses berges et sera chargée de son entretien et de sa protection. Voilà un condensé des différentes lectures que j’ai pu faire sur le sujet mais si vous voulez l’approfondir, je vous conseille la lecture du livre de Gilbert Larguier « Découvrir l’Histoire du Roussillon XIIe-XXe siècle » parue aux Presses Universitaires de Perpignan en 2010, on y évoque beaucoup le Canal du Roussillon et un peu ce tronçon hippolytain.

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