La Serre de Vingrau (576m) en boucle depuis Vingrau (retour par le chemin du Mas Llansou)
Ce diaporama est agrémenté de plusieurs musiques extraites d'une compilation YouTube intitulée "Nostalgic French Music & Stunning France Travel Scenery Travel"
En ce 5 juin 2024, j’avais décidé d’aller marcher dans les pas de Charles Flahault, Georges Rouy, Odon Debeaux, Léonce Marty, Julien Foucaud, Gaston Gautier, Edmond-Gustave Camus et Edouard Timbal-Lagrave, des noms qui ne diront rien à la plupart d’entre vous mais qui ont marqué l’Histoire de la botanique française et parfois même mondiale, et bien sûr celle de notre beau département des P.O. En tous cas, tous ces botanistes nés au 19eme siècle sont venus un jour à Vingrau voire au pire dans les Corbières catalanes et ont laissé l’empreinte de leur passage dans leurs bouquins. En une belle journée de printemps, sont-ils montés sur les crêtes de La Serre de Vingrau pour découvrir des fleurs comme je vais le faire moi-même? Certains d'entre eux probablement ! Alors bien sûr, loin de moi l’idée de leur faire la moindre concurrence en botanique, je n’en ai pas les connaissances et encore moins les compétences, mais j’aime les fleurs et les recenser en les photographiant suffit à mon bonheur. C’est devenu une passion ! Et puis il y a toujours dans cette quête, cette petite idée derrière la tête de se dire que l’on peut tomber sur une fleur ou une plante nouvelle, voire pourquoi pas, carrément rare ou presque inédite. En cette magnifique journée, il est 8h du mat quand je range ma voiture devant la cave vinicole de Vingrau direction la Serre. Sur la façade, une immense inscription semble annoncer ce qui m’attend lors de cette randonnée : « Vingt marches ». Connaissant bien cette Serre de Vingrau pour l’avoir cheminer quelquefois, je sais qu’il y en aura même beaucoup plus. Ces fameuses 20 marches correspondent à la toponymie de Vingrau ou « Vingt Grades » puis « Vingt Graus ». Je la connais tellement bien que je démarre direction le Pas de l’Escale ou Pas de l’Echelle sans carte et sans GPS, ce dernier dormant dans une poche de mon sac à dos. Il n’est là qu’en cas d’accident car le parcours que j’ai prévu est bien balisé et surtout cairné dans sa partie la plus calcaire et donc la plus difficile. D’emblée, de nombreuses fleurs sauvages se présentent mais sans réelle surprise. Il me faut attendre la montée la plus raide à l’approche du Pas de l’Escale pour découvrir des Lavatères ou Mauves maritimes magnifiquement fleuries, fleurs jamais photographiées jusqu’à présent. Par mon ami, le botaniste Olivier Escuder, j’apprendrais qu’elles sont protégées sur la plan national. Entre le départ et le Pas de l’Escale ,outre des fleurs, plusieurs papillons, quelques criquets, des oiseaux et un lézard Psammodrome se sont gentiment laissés immortaliser. Après la traversée de la D.9, un vrai sentier se présente et ici commencent « les choses » sérieuses. Choses sérieuses sur tous les plans, car si le sentier est automatiquement plus caillouteux, moins visible parfois, et donc plus difficile, le nombre de fleurs sauvages est tel que j’en oublie presque naturellement les difficultés qui se présentent. Somme toute, j’en oublie presque que je marche sur un terrain qui peut s’avérer accidentel et que ça peut me jouer de mauvais tours. Enfin tout se passe pour le mieux car cette marche pédestre n’est finalement qu’une longue flânerie avec pour but principal de photographier une Nature qui décide ou pas de s’offrir à moi. Je ne m’écarte du sentier qu’avec prudence car les panoramas sont souvent assez exceptionnels. Il en sera ainsi tout au long de la crête sommitale même si le ciel oscille entre un bleu pur vers le nord mais laiteux partout ailleurs, gênant de ce fait les visions des paysages les plus lointains, Méditerranée et Canigou notamment. Dans cette paisible déambulation, un petit troupeau de chèvres montant direct depuis le Ravin dels Collets m’offre un joli moment de répit et un agréable spectacle. Alors que je les vois monter droit vers moi dans un couloir d’éboulis, quelle n’est pas ma surprise de les voir partir sur la gauche, alors qu’à cet endroit-là, elles n’ont face à elles qu’une falaise des plus abruptes. M’ont-elles aperçu et ont-elles décidé de changer de cap ? J’en suis convaincu. Alors je les observe dans leur cheminement, évitant les obstacles impossibles et se frayant néanmoins un chemin dans des passages malgré tout très vertigineux. Sautillant d’un rocher à un autre, elles grimpent avec une facilité déconcertante et avec une vitesse phénoménale. En un court laps de temps, incroyable pour tout humain, les voilà déjà sur ma gauche au sommet de la crête. Elles m’observent quelques minutes puis disparaissent de ma vue me donnant cette fausse et atroce impression d’un saut dans le vide. Une seule semblant plus juvénile m’observe plus longuement puis elle s’en va elle aussi, la crête retrouvant sa sérénité. Quelques minutes plus tard, me voilà sauf erreur de ma part au point culminant de cette randonnée (576m), à l’endroit même où un vieux pylône rouillé est couché sur son flanc. Je m’y arrête pour un premier pique-nique, remarquant par la même occasion que de très nombreux avions passent au-dessus de ma tête mais à des altitudes bien différentes. La plupart très haut mais un peu plus loin un autre passera carrément très bas, et même avec le train d’atterrissage sorti, ce qui tend à prouver qu’ils va atterrir à l’aéroport de Perpignan-Rivesaltes. Pas de doute, la Serre de Vingrau est pile-poil sous un couloir aérien. Beaucoup plus bas que les avions, et ici comme nulle part ailleurs jusqu’à présent, des papillons virevoltent en tous sens. Il y a plusieurs espèces bien différentes mais la plupart ayant déjà été photographiées, je me cantonne le plus souvent à les observer dans leurs circonvolutions. Il est vrai qu’ici les fleurs sauvages bien différentes sont légions : Oeillets piquants, linaires à feuilles d’origan, lasers de France, immortelles, centranthes, laitue vivace, choux de montagne, voilà les plus visibles mais il y en a bien d’autres. Je repars et dans la descente croise un couple d’allemands accompagné d’un chien. Ce dernier venant me faire des fêtes, la conversation s’installe. Si je ne parle pas l’allemand, eux se débrouillent plutôt bien en français, alors nous papotons quelques minutes. Je finis par comprendre qu’eux aussi aime la marche pédestre et les fleurs sauvages. Ils marchent depuis longtemps, viennent de l’Aude et aujourd’hui de Tuchan. Pour des marcheurs « au long cours », ils me paraissent peu équipés. Lui a un sac à dos plutôt plat et elle pas de sac du tout. Et si lui est vêtu normalement, en short comme je le suis moi-même, elle est carrément en maillot de bain pour le haut et mini-short blanc pour le bas. Quant au chien, la truffe constamment au ras du sol, il zigzague dans la garrigue, effectuant sans doute 100 fois plus de distances que ses maîtres. Alors que nous venons de nous quitter, je note la présence de plusieurs petits plants de Genêt de Lobel mais aucun n’est vraiment fleuri. Or, si je ne suis pas là spécialement pour lui, le trouver fleuri faisait partie de mes desseins les plus escomptés. Je suis donc forcément déçu car cette fleur ne vit qu’ici dans la Serre de Vingrau mais est bien plus présente dans les massifs calcaires provençaux et corses. J’ai beau chercher un Genêt de Lobel fleuri, mais je n’en trouve pas. J’arrive apparemment avec un brin de retard mais comme mon cheminement m’offre parfois de nouvelles fleurs (lamiers, crapaudines, férules, paronyques, etc..) j’oublie assez vite cette déception. Après de véritables petites « montagnes russes », l’approche vers le Trauc del Cavall se fait plus compliquée. Beaucoup plus rocheux, beaucoup plus de pierriers, le sentier disparaît le plus souvent. Je finis carrément par perdre les cairns et tombe même deux fois à cause de cailloux roulant sous mes chaussures. Heureusement sans trop de gravité et surtout sans plaies profondes et donc sans trop de longs saignements. Moi qui prends chaque jour des anticoagulants, les saignements sont toujours une hantise, même si j’ai constamment sur moi une pommade hémostatique. Après avoir cherché en vain les Iris de Reichenbach et les Campanules des Corbières photographiées en 2012, fleurs endémiques du secteur, l’arrivée au Trauc del Cavall arrive comme une délivrance. La plaine, les vignobles dans leurs petits vallons sont là et je sais que les difficultés vont carrément disparaître. D’ailleurs, une fois passé le Mas Llansou, un joli chemin herbeux prend le relais du sentier terreux. Il ne dure pas. Les fleurs sauvages encore bien présentes ici m’obligent encore à une flânerie non choisie mais appropriée à mon état de forme. Au lieu-dit la Jasse del Didot, deux options se présentent, soit poursuivre le chemin rectiligne dit du Mas Llansou soit descendre dans le Correc de la Millera où un autre chemin est possible. Je choisis la première solution plus aérienne en terme de paysages. Longue de 4km pour parvenir à Vingrau, la fin de cette randonnée pourrait être monotone mais la Nature est encore bien là et je ne m’en lasse pas. Il est 16h tapantes quand je retrouve le village et voilà 8h que je gambade comme un jeune homme sauf que mes jambes me rappellent de plus en plus mon âge. Voilà déjà quelquefois que je viens à Vingrau (*) et je continue de faire des découvertes nouvelles. Si « la valeur n’attend pas le nombre des années » comme l’a dit Corneille, « les années permettent d’acquérir un nombre de valeurs » et cela me convient. Telle qu’expliquée ici, cette randonnée a été longue de 11 à 12km (tracé GPS 11,7km). Les montées et les descentes cumulées ont été de 638m. Le dénivelé entre le point le plus bas à Vingrau à 147m et le plus haut sur la Serre à 576m est par différence de 429m. Carte 2547OT Durban-Corbières – Leucate – Plages du Roussillon Top25.
(*) Autres balades faites à Vingrau : Le Pas de l’Escale au départ de Vingrau (05/01/2023), Du Moulin de Vingrau aux Gorges de Gouleyrous (26/05/2013), Le Trau del Cavall (Falaises et Contrebandiers-25/05/2012).