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port-vendres

Souvenirs halieutiques....

Publié le par gibirando

Ce diaporama est agrémenté de 4 chansons qui ont pour titre et interprétes : 1- "Il tape sur des bambous" et 3-"Elle préfère l'amour en mer" par Philippe Lavil, 2-"Messageries maritimes " et   4- "Capoeira" par Bernard Lavilliers 

L’été et le mois d’août en particulier ont toujours été pour moi synonymes de pêches en mer. J’ai toujours été un « tueur de poissons », mais sans vouloir en faire une excuse, comment aurait-il pu en être autrement alors que j’ai toujours vécu au bord de l’eau et que de tous côtés, ma famille a baigné dans les « choses de la mer ». Toutes mes vacances se sont déroulées au bord de la Grande Bleue. Pêche sous-marine que je pratique depuis que je sais nager ; un peu moins aujourd’hui à 66 ans ; diverses pêches en bateau (palangrotte, rusclets, traîne, palangres, etc…) auxquelles mon grand-père puis mon père m’ont initié depuis ma plus tendre enfance et enfin pêche du bord à la canne dont j’ai attrapé le virus grâce à mon beau-père. Cette dernière façon de pêcher, je me souviens de la toute première fois, comme si c’était hier. C’était en 1976 et je venais d’acheter une magnifique canne télescopique réglable de 4m50 que j’étrennais pour la toute première fois. A l’époque, mon beau-père habitait encore dans les Pyrénées-Atlantiques et nous étions partis pêcher sur la digue de Socoa. Cette nuit-là, et selon mon beau-père, la pêche avait été mauvaise car nous avions attrapé un seul poisson. Enfin, j’avais attrapé un seul poisson ! Mais quel poisson, j’avais réussi à sortir de l’eau ! Un Sar royal de 2,5 kg encore appelé Sar tambour et en latin Diplodus cervinus. Dieu sait s’il m’avait fait bataillé le gaillard !

Tous mes étés ont donc été bercés par les flots de la Grande Bleue et si j’en parle maintenant c’est parce que ce n’est plus vraiment le cas aujourd’hui. La montagne a pris le relais. Il faut dire que la pêche du bord à la canne que m’avait inculquée mon beau-père était surtout nocturne et j’avoue qu’en prenant de l’âge, l’envie de dormir à même les rochers du Cap Béar ou bien sur ceux du Cap des Trois Frères à Leucate a quelque peu disparue. Dieu sait si j’en ai passé des nuits à pêcher dans les endroits les plus divers et étonnants mais aussi à dormir quand les poissons avaient décidé eux aussi de disparaître dans les bras de Morphée. J’essayais toujours de trouver des coins de pêche peu fréquentés des autres pêcheurs. Pour cela, j’avais une méthode : lors de mes parties de chasse sous-marine, j’essayais de me souvenir des meilleurs coins, c'est-à-dire de ceux où j’avais vu beaucoup de poissons au plus près du bord. Cette méthode avait néanmoins un inconvénient car parfois les postes accessibles en chasse sous-marine ne l’étaient pas du bord. Alors, il m’arrivait de me retrouver en pleine nuit dans des lieux où personne d’autre n’aurait jamais eu l’idée de venir pêcher. Je me souviens de ce petit matin, où me réveillant au bord de l’eau, quelle ne fut pas ma surprise de constater qu’une mère renard et ses quatre petits renardeaux m’observaient depuis un éperon rocheux se trouvant juste au dessus de ma tête, à quelques mètres seulement. Ils devaient sans doute se demander ce que je faisais là, à dormir, sur leur territoire de prédilection. Parfois, quand je me réveillais, j’avais la surprise d’une belle prise qui s’était accrochée toute seule pendant mon sommeil. Lors d’autres réveils, je constatais parfois avec désarroi que des rats ou bien des goélands étaient venus me chiper quelques sardines me servant d’appâts. Avec mon beau-père, nous passions des nuits entières à pêcher presque sans dormir, il faut dire qu’il avait un véritable don pour la pêche de nuit. Rares étaient les fois où nous revenions bredouilles et les principales prises avaient pour noms : loup, sar, muge, oblade, dorade, congre, murène, mustelle, pageots, rascasses, etc…. Il avait même acquis une certaine « science » de la mer. Selon l’état de la mer, sa température, sa couleur, la hauteur de ses vagues, la puissance de ses rouleaux, les phases de la lune, il était capable de prédire quel serait le résultat final d’une nuit à la pêche. Parfois, quand il arrivait sur le poste de pêche, il disait « ce soir, on va faire du loup ! » ou bien «  cette nuit ne va pas être folichonne ! ». Mon beau-père a pratiquement pêché de nuit jusqu’à son dernier souffle, souffle qui d’ailleurs lui a fait défaut et qui finalement l’a emporté à l’âge de 75 ans à cause de la cigarette dont il avait toujours usé avec excès. Il était capable de fumer deux à trois paquets de Gauloises dans une seule nuit ! Une nuit, il a même fait un petit infarctus sur les roches de Collioure où nous nous trouvions. Cette nuit-là, il avait dû son salut, à sa robustesse et à la réactivité que j’avais eue pour le ramener le plus rapidement possible aux urgences de l’hôpital de Perpignan. Puis, il y avait eu d’autres alertes, alors je me cachais pour aller pêcher car malgré ses gros problèmes de santé, l’envie était toujours là et il tenait absolument à pratiquer sa passion malgré la fatigue qu’une nuit à la pêche pouvait engendrer. Des souvenirs de pêches, il y en eu des bons et des moins bons, des solitaires ou non, mais quand j’y repense aujourd’hui, seules les parties les plus « fabuleuses » et les plus « croustillantes » restent dans ma mémoire. Bien sûr, le plus souvent, ces souvenirs sont relatifs à des parties de pêche du bord à la canne ou bien en bateau car il faut bien admettre que la pêche sous-marine, elle, n’a rien de vraiment convivial. La chasse sous-marine est individualiste et même quand on pêche à deux, on pêche seul car l’autre est uniquement là pour surveiller ce que fait le premier ! Alors les bons moments de chasse sous-marine sont ceux que j’ai passés à former mon fils Jérôme puis ensuite ceux au cours desquels je partais pêcher avec lui.  Enfin, « former » est un bien grand mot car il s’est formé tout seul comme je l’avais fait moi-même. Je n’ai fait que lui enseigner quelques rudiments et des consignes de sécurité quand on chasse seul. La pêche du bord à la canne, elle, est une vraie activité sociale et présente l’avantage de pouvoir durer dans le temps. On sait quand on part mais parfois, on ne sait pas quand on va revenir car le plus souvent c’est le poisson qui nous dicte la conduite à tenir. Si ça mord, on reste, si ça ne mord pas, il faut être patient. On y part avec un ou plusieurs amis, avec un ou plusieurs membres de la famille, tout le monde pêche et c’est l’occasion de blaguer un peu ou parfois beaucoup, c’est selon le cas, car le plus souvent là aussi on est tributaire du bon vouloir du poisson. Si ça mord, le silence doit être de mise. On en profite pour faire un bon pique-nique. Parfois l’ami est là, pour épuiseter la grosse pièce tant désirée. Je me souviens par exemple de cet après-midi d’avril 1991, passée à la pointe du Cap Béar, avec mon ami Emile Lara. En quelques minutes, j’avais pêché quatre poissons mais pour un poids total « phénoménal » de 9,9 kg : un loup ou bar de 6,9 kg et trois sars de respectivement 1,3 kg, 1 kg et 700 grammes. Une pêche mémorable et record que je garde comme un de mes plus beaux souvenirs halieutiques. Je me souviens que ce « fantastique » loup avait, par trois fois, brisé le manche de mon épuisette télescopique alors que mon ami Emile s’évertuait à vouloir le faire rentrer dans le filet. Je me souviens que je lui criais des consignes de délicatesse alors que je m’efforçais de ramener au bord ce loup « gigantesque » que je n’avais même pas osé imaginer dans mes rêves de pêche les plus fous.  Ce loup avait fini au four et farci pour l’anniversaire de mes 42 ans. C’était il y a 24 ans. Des pêches surprenantes, il y en a eu bien d’autres, avec mon beau-père François bien sûr mais aussi avec mon regretté frère Daniel, avec mon beau-frère Jean-Claude quand nous allions pêcher dans la Calanque de Sormiou ou bien sur les îles au large de Marseille. Cette pêche que l’on appelle plus communément « à la pelote », j’ai toujours essayé de la faire connaître à mes meilleurs amis comme Emile ou Gilou de Montferrer, tous deux disparus aujourd’hui malgré la différence d’âge de plus de 30 années qui les séparait. Je me souviens de cette première nuit que j’avais passée avec mon ami Gilou au Cap Béar, au pied du sémaphore, une nuit que moi, j’avais considérée pour lui comme un apprentissage mais au cours de laquelle, il m’avait largement « battu » dans le nombre et la qualité des prises : gros loup de plus de 3 kg, énorme mustelle de plus de 2kg et plusieurs sars et oblades étaient amplement venus remplir sa petite bourriche qui habituellement ne recevait que quelques modestes truites du Vallespir. Je me souviens que Gilou s’était bagarré pendant de longues minutes avec deux congres monstrueux qui finalement avaient cassé son fil en atteignant la surface. Il n’avait jamais eu, au bout de sa ligne, des poissons aussi grands et aussi puissants. Une nuit qui est longtemps restée inoubliable pour nous deux car à chacune de nos rencontres, nous l’évoquions avec un immense bonheur. Le bonheur de deux copains ayant la même passion pour les « choses de la nature ». C’était en 1988. Des souvenirs de pêche, je pourrais presque en remplir un livre tant j’en ai plein la tête. Je me souviens par exemple de ces trois ou quatre nuits où depuis la calanque de Sormiou, nous étions partis en bateau par aller pêcher aux Impériaux ou bien du côté du Cap de Morgiou. Nous avions débarqué et avions mouillé le bateau à quelques mètres du rivage. En pleine nuit, l’ancre n’avait pas tenu et le bateau s’en était allé au gré du vent et vers le large sans que nous nous en apercevions immédiatement. J’avais été obligé de me déshabiller, de plonger dans l’eau noire et de nager parfois très longuement pour le récupérer. A chaque fois, j’y étais parvenu mais je me souviens d’une fois ou tout en nageant, j’avais eu une grosse boule au ventre quand je m’étais mis à penser au film « les Dents de la mer ». Il y a aussi cette tempête qui s’était levée au petit matin alors que nous avions pêché toute la nuit sur l’île de Riou au large de Marseille. Trois quart d’heures de navigation pour rejoindre Sormiou dans une mer devenant de plus en plus agitée au fil du parcours. Nous étions quatre sur notre « coque de noix » qui se remplissait à chaque grosse vague. Moi, je tenais la barre pendant que les trois autres écopaient. Tant bien que mal, nous étions arrivés à la calanque de Sormiou alors que des creux de trois ou quatre mètres formés par un fort vent d’est se dressaient derrière nous. Nous n’en menions pas large car la mer avait ce jour-là quelque chose d’absolument effrayant. Une fois sur la terrasse du cabanon, nous avions pris conscience des risques encourus pour une simple partie de pêche, mais l’année suivante nous avions remis ça car la pêche était devenue une vraie passion. Une passion qui était appréciait de tout le monde car chacun pouvait se régaler d’un bon loup au four, d’une bonne friture, d’un muge au court-bouillon ou bien de quelques sars en papillotes cuits sur le barbecue. Il n’y avait jamais trop de poissons car toute la famille et parfois même les amis en profitaient. Il y a également des souvenirs croustillants comme cette nuit que j’avais passée à la falaise de Leucate. Cette nuit-là, ça ne mordait pas et j’étais revenu bredouille de poissons mais avec un lapin qui s’était jeté sous les roues de ma voiture. Le lapin avait fini à la poubelle car il était hors de question de le manger. En chasse sous-marine, je me rappelle d’un matin où j’étais parti très tôt pêcher dans l’anse de Paulilles et au Cap Oullestreil. Vers 9 h ou 10 heures, et alors que j’avais déjà magnifiquement pêché, un Zodiac s’est approché de moi. C’était les organisateurs du Championnat de France. Derrière moi, j’ai constaté qu’il y avait des dizaines d’équipes et sans le vouloir, je les avais devancé. Les organisateurs pensaient que j’étais un concurrent et quand ils ont vu les beaux poissons que j’avais à la ceinture, l’un d’entre-eux s’est exclamé : « si tu continue, aujourd’hui, c’est toi le champion de France ! ». Je suis sorti immédiatement de l’eau pour ne pas les ennuyer. Ce matin-là, j’avais pêché un congre de plus de 6 kg, un loup de 2,1 kg, une grosse mustelle et plusieurs beaux sars.

Aujourd’hui, il me reste tous ces beaux souvenirs et surtout quelques superbes photos de ces mémorables instants. Quand le mois d’août arrive, j’ai un peu la nostalgie de tous ces moments-là et j’aime bien regarder mes photos. Je les regarde comme un champion regarderait ses trophées.  Les prises et les « tableaux » les plus fabuleux, j’en ai fait un album photos que j’ai utilisé pour réaliser le diaporama que je présente ici avec cet article. Même si de temps à autres, je vais encore pêcher au Cap Béar, au Cap Oullestreil ou bien du côté des falaises de Leucate, je n’ai plus cette passion chevillée au corps comme je l’avais encore il y a quelques années. J’ai le sentiment que les bredouilles se font plus nombreuses et que le poisson se raréfie. En plus, ma vision de l’animal qu’est le poisson a quelque peu changée et le voir mourir hors de l’eau par manque d’air ne me laisse plus indifférent comme cela a été longtemps le cas. Aujourd’hui, quand je pêche un poisson, je prends soin de réduire au maximum sa souffrance et s’il est trop petit, je le remets à l’eau. Enfin, il faut ajouter à tout ça, le fait que pratiquement toutes les personnes avec lesquelles j’aimais aller pêcher ont quitté ce monde….et aller pêcher tout seul ce n’est pas vraiment rigolo…..Aujourd’hui, et même si j’adore marcher, les souvenirs de mes randonnées pédestres ne remplacent pas les souvenirs des jours et surtout des nuits passées à la pêche. J’ai passé des nuits à rêver : je rêvais de gros poissons parfois éveillé mais le plus souvent en dormant sur les rochers. Parfois la chance a voulu que mes rêves deviennent réalités. Aujourd’hui, quand je marche, il m’arrive aussi de rêver…..alors c’est kif-kif mais je fais quand même mienne cette citation de Saint-Augustin : “Celui qui se perd dans sa passion perd moins que celui qui perd sa passion.”  J’ai beaucoup perdu en allant moins à la pêche !

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Le Sentier du Cap Béar depuis Port-Vendres (Anse de l'Espelugas)

Publié le par gibirando


Ce diaporama est agrémenté de la musique de John Barry, bande originale du film "Out Of Africa" de Sydney Pollack.
LE-CAP-BEAR
CAPBEARIGN
Pour agrandir les photos, cliquez dessus. 2 fois pour un plein écran.

Quand j'ai voulu écrire le récit de ce "Sentier du Cap Béar depuis Port-Vendres"  en me documentant à son propos, j’ai appris que ce lieu était un véritable champion. Un champion de vitesse ou tout du moins un recordman. En effet, lors de la fameuse et terrible tempête Klaus de janvier 2009, les vents ont soufflé au Cap Béar à la vitesse phénoménale de 191 km/h et dans le département des Pyrénées-Orientales, ce n’est que d’un cheveu qu’il a été battu par une rafale de 193 km/h ayant été enregistrée le même jour du côté de Formiguères. On est loin bien sûr du record national de 320 km/h détenu par le Mont Ventoux depuis 1967 et du record mondial de 484 km/h enregistré en 1999 au sein d’une tornade du côté de Bridge Creek en Oklahoma, mais au niveau de la mer, le Cap Béar est systématiquement sur le podium et s’y complait à chaque tempête. Les vents de 160 à 180 km/h ne sont pas rares et de ce fait, certains marins effectuant du cabotage en Méditerranée l’appréhendent et l’appellent même le « Cap Horn catalan ».  Le jour de notre balade, rien de tel et c’est sous un soleil radieux et accompagnés par une petite brise marine que nous avons démarré depuis l’anse de l’Espelugas, non loin de la jetée du port de Port-Vendres. Autant l’avouer, ce jour-là, nous n’avons battu aucun record et d’ailleurs ce n’était pas le but. Si l’on arrive de Perpignan depuis la route côtière D.114, il faut, pour rejoindre la jetée et le point de départ de la balade, faire le tour du port en se dirigeant vers la capitainerie. Là, on poursuit sur les quais puis une fois la D.86b atteinte, on suit les indications « Cap Béar » puis on continue en empruntant deux tunnels pour atteindre la jetée. Par la Nationale 114, on prend directement la D.86b filant vers le cap et la suite est la même.  La ligne de départ est là, à quelques mètres du restaurant le Gibraltar que j’ai connu dans le passé en bien meilleur état qu’aujourd’hui. Un poteau paré d’un panonceau de randonnées indique qu’il s’agit du Sentier du Littoral offrant diverses balades plus ou moins longues. La nôtre est mentionnée sous l’intitulé « Phare de Béar – 45 mn- 2km » et comme il s’agit d’un simple aller-retour autant dire que c’est une promenade plutôt facile pour tous les amoureux de la marche. Quand au point le plus haut du sentier, il est situé à 110 mètres d’altitude environ et de ce fait, inutile d’être très fort en maths pour calculer le dénivelé par rapport au niveau de la mer. Bien sûr, si ça vous chante, vous pourrez poursuivre votre balade bien après le Cap Béar en vous dirigeant vers les plages de Paulilles ou bien vers Banyuls-sur-Mer comme indiquait sur le panonceau. Dès le départ, un sentier caillouteux et schisteux très raide s’élève dans la garrigue. Il est d’ailleurs si raide qu’une rambarde et quelques escaliers faits de rondins de bois ont été aménagés pour faciliter l’ascension. De ce fait, on s’élève très vite et les jolies vues sur Port-Vendres et ses alentours apparaissent immédiatement. Dès que le sentier se stabilise, on profite de superbes panoramas bien plus lointains vers les Albères qui s’étirent et ondulent depuis la Madeloc jusqu’au Néoulous en passant par la Massane et le pic des Quatre Termes, le regard se posant finalement sur l’inévitable Canigou magnifiquement enneigé à cette époque de l’année. Le fort Saint-Elme tout proche constitue dans l’immédiat le repère final de ce tour d’horizon. Un peu plus haut, les vues sur les stations balnéaires et leurs interminables plages sableuses apparaissent. Très rapidement, on rejoint la petite route bitumée faisant le lien entre Port-Vendres et Béar. Il s’agit du bien nommé chemin du Cap Béar. Connaissant bien les lieux pour y être venu pêcher à de très nombreuses reprises, de jour comme de nuit, du bord et à la canne ou en chasse sous-marine (voir Mes Souvenirs halieutiques), j’emprunte le petit sentier de terre, qui sur la gauche, part en direction de la haute falaise rocheuse et de quelques maisons. Là, cachés dans la végétation et en surplomb d’impressionnantes criques déchiquetées, se trouvent quelques ruines aux formes arrondies, sans doute celles d’une vieille tour ou d’un ancestral fanal ayant servi bien avant la construction du présent phare.  Grâce à un nouveau panonceau, notre balade se poursuit et s’élève sur le côté droit de la route. La végétation se fait plus dense et si la garrigue reste essentiellement de type méditerranéen avec les cistes, les genêts, les romarins et les bruyères, on y remarque une incroyable diversité d’autres plantes que l’on a peu l’habitude de voir plus à l’intérieur des terres : armérias, camphorines, cristes, immortelles, passerines, soudes pour n’en citer que quelques unes parmi les plus communes. Bien évidemment, les plantes fleuries sont rares en cette saison. Quand à la faune, à cette époque de l’année, elle est essentiellement ornithologique avec l’emblématique goéland leucophée tournoyant dans un ciel azur mais on peut y voir aussi le grand cormoran raser la surface puis la crever pour d’incroyables apnées car leur régime alimentaire est essentiellement piscivore. La mouette rieuse, elle,  est plutôt présente à proximité du port. Dans les catégories plus légères, on peut avoir la chance d’apercevoir de nombreux passereaux plus ou moins craintifs et discrets comme le Monticole bleu, le Rouge-gorge, le Rougequeue noir et tous les petits oiseaux vivant embusqués dans les buissons comme le Tarier pâtre, les fauvettes ou le troglodyte mignon. Le sentier se poursuit sous le Fort Béar, construction militaire du 19eme siècle bâtie sur les fondations d’un édifice du maréchal Vauban. Cette forteresse avec vue imprenable sur la mer a toujours été au fil des siècles occupée par l’armée pour sa position hautement stratégique. A partir de là, la pointe du cap Béar s’avançant dans la mer apparaît plus nettement avec son sémaphore blanc et ocre et son phare de granit très légèrement en contrebas. La balade progresse d’ailleurs sur une crête laissant entrevoir les deux versants du cap. Sur la gauche, des petites criques dominées par de modestes falaises. Sur la droite et au premier plan, l’Anse de Paulilles et au loin, les Albères plongeant dans la « grande bleue » dans une succession d’autres pointes que sont les caps Oullestreil, Cerbère et plus loin Creus, visible à l’horizon dans une brume blanchâtre. Après un long muret de pierres sèches, dont on est en droit de se demander quelle fonction pouvait-il avoir, or mis celui de s’abriter des vents, le sentier descend tout droit vers le sémaphore, grande bâtisse de la Marine Nationale édifiée en 1861 et faisant à la fois office de surveillant local du trafic maritime et de station météo. Les visites n’étant pas autorisées, nous poursuivons vers le phare par un fugace raccourci. Un grand panneau en explique brièvement l’histoire et son fonctionnement. C’est ainsi que l’on apprend qu’il a été construit en 1905 dans du granit et du marbre rouge de Villefranche-de-Conflent mais qu’il n’est pas accessible au public lui non plus. Du coup, un peu déçus, nous prenons la décision de descendre vers la petite anse de Sainte-Catherine pour un agréable pique-nique. Nous allons y passer presque deux heures à flemmarder sous les étonnants rayons d’un soleil bien ardent pour un 14 janvier. A peine arrivés sur la grève, un majestueux goéland et un minuscule rouge-gorge ont immédiatement compris que les portes du « restaurant de la plage » venaient d’ouvrir. Bien à l’abri de la petite brise marine qui sévissait, nous sommes restés là à partager avec eux notre déjeuner au bord de l’eau. Si le rouge-gorge s’est régalé essentiellement de quelques grains de maïs extraits de nos salades, le goéland, lui, était moins difficile et il happait et ingurgitait tout ce que nous lui proposions.  Morceaux de pain, miettes de thon, blanc d’œufs et même des tomates cerises paraissaient à son goût. Mais pour eux comme pour nous, les bonnes choses ont malheureusement pris fin et dès le pique-nique terminé, les deux lascars avaient déjà compris qu’il était temps pour eux de filer sous d’autres cieux. Après ce merveilleux entracte que je n’ai pas manqué de photographier sous une myriade d’angles, c’est à regrets que nous avons jugé qu’il était temps pour nous aussi de lever l’ancre. Nous avons poursuivi le petit sentier qui file vers l’est et s’élève progressivement au dessus de la baie. Il remonte vers le phare, le rejoint et se poursuit ensuite vers la pointe extrême du cap. Là, après « les instants bonheur » que venaient de nous offrir les deux volatiles, nous eûmes droit « aux années malheur » avec la vision des innombrables et impressionnants vestiges de l’ancienne occupation allemande : blockhaus, bunkers, casemates d’observation, tranchées, batteries, casernements, baraques, abris, soutes à munition, etc…, toutes ces hideuses structures de béton, de ciment et de ferrailles étaient autant de preuves d’un passé que nous n’avions pas connu mais dont nos parents nous avaient raconté avec consternation l’horrible histoire. Il faut dire que 2.500 soldats germaniques ont séjourné là, tout autour de Port-Vendres, entre 1942 et 1944, dans l’attente d’un hypothétique débarquement qui n’a jamais eu lieu. Après ces découvertes martiales, il était temps cette fois de faire demi-tour pour revenir à notre point de départ. Nous fîmes le choix de l’asphalte de la route jusqu’à rejoindre le petit sentier initial descendant directement vers l’anse de l’Espelugas. Selon mon GPS, j’avais parcouru au total 5,4 km. Dany un peu moins préférant la « bronzette » sur la plage de Sainte-Catherine à la découverte des jolis cabanons. On regrettera que ni le sémaphore ni le phare ne soient visitables et ce d’autant que le phare est inscrit aux Monuments Historiques et que le Cap Béar, lui-même, est un site classé depuis 1978 et classé Natura 2000 depuis 2008. Ce site méritant attention et protection, nous avons été très étonnés de constater que la plage de l’Espelugas était jonchée de nombreux détritus et n’avait pas été nettoyée depuis très longtemps sans doute. Le parking était largement impraticable car envahi de galets, de gravas, de branchages et de déchets de toutes sortes, les poubelles étaient éventrées, les parapets fracassés et les restaurants sont dans de piteux états entre délabrement et abandon. Enfin tout ça est assez sordide et peu engageant et il faut bien admettre que rien n’est fait pour inciter les touristes à y venir et surtout à y rester. Heureusement la balade a été très belle et en plus, elle a été pour moi, l’occasion de me remémorer de très bons et multiples souvenirs. A coup sûr, il y en aura d’autres tant cette partie de la Côte Vermeille est pleine de merveilles. Allez messieurs les élus, quelques efforts sont à faire pour que tout soit parfait. Carte IGN 2549 OT Banyuls – Col du Perthus – Côte Vermeille  Top 25.

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