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Tour du Capcir - Etape 2 Refuge de la Font de la Perdrix - Gîte Le Moulin à Rieutort

Publié le par gibirando

Ce diaporama est agrémenté de 5 musiques d'Ennio Morricone extraites d'une complilation intitulée "Relaxing Moment". Elles ont pour titre : "C'era Una Volta Il West", "Il Colore Dei Suoi Occhi", "Nuovo Cinema Paradiso", "Irene Gli Intoccabili""Tema Di Ada"

Tour du Capcir - Etape 2 Refuge de la Font de la Perdrix - Gîte Le Moulin à Rieutort

Tour du Capcir - Etape 2 Refuge de la Font de la Perdrix - Gîte Le Moulin à Rieutort

Tour du Capcir - Etape 2 Refuge de la Font de la Perdrix - Gîte Le Moulin à Rieutort

Pour agrandir les photos, cliquez dessus. 2 fois pour un plein écran.

 


 

2eme étape – 12 septembre 2013 : du Refuge de la Perdrix (2.312  au gite Le Moulin à Rieutort (1.517 m) soit 17,600 km pour un dénivelé de 1.080 m et des montées cumulées de 790 m. Point culminant : Le Madres (2.469 m) – Point le plus bas : Le pont de la Farga (1.400 m)

 

Bien que Fred et Jérôme aient alimenté le poêle au maximum et le plus longtemps possible, dès lors que l’on a cessé de l’entretenir, la température a rapidement chuté. La nuit est glaciale mais heureusement nous avions prévu cette éventualité. Les sacs de couchage plus des vêtements chauds sont suffisants pour ne pas avoir trop froid. En tous cas, je ne grelotte pas et seules les extrémités de mes mains et de mes pieds réclament plus de chaleur malgré deux paires de gants, deux paires de chaussettes et des petites bouillottes portatives mais malheureusement éphémères dans la durée. Mais connaissant bien cet inconvénient circulatoire sanguin qu’on appelle « froideur des extrémités », je sais qu’il n’y a pas grand-chose à faire de plus, si ce n’est juste à surveiller dans le cas de nouveaux symptômes ou si les anciens s’amplifient. J’ose espérer que mes compagnons n’ont pas ce problème. En pleine nuit, un besoin urgent m’envoie hors du refuge et je suis assez surpris de constater qu’il ne fait guère plus froid dehors qu’à l’intérieur du refuge. Le vent est presque complètement tombé et seule une brise légère balaie la crête. Le panorama est incroyable et si ce n’était pas la faiblesse de la température, je resterais sans doute bien plus longtemps à observer cette grandiose et merveilleuse splendeur. Eclairée par un croissant de lune, une longue chape nuageuse rougeâtre s’étend devant moi, si ce n’est à perte de vue au moins jusqu’à la Méditerranée que j’aperçois comme une tache bien plus claire par rapport au reste de l’horizon bien plus sombre. Ce reste d’horizon, j’imagine qu’il s’agit sans doute des Albères et de la Plaine du Roussillon. Sous cette longue ouate nébuleuse, le ciel est très clair dévoilant la silhouette des principales montagnes que je connais et qui paraissent bien plus proches : Canigou et Coronat au premier chef. De toute la Plaine du Roussillon et venant du sol, en tous cas de sa partie visible, des millions de scintillements jaunâtres semblent s’ajouter à cette clarté céleste.  C’est très beau et pendant un instant, l’éventualité d’aller chercher mon appareil photo pour figer ce spectacle me vient à l’esprit. Mais non, je préfère rester là à contempler et surtout je ne veux pas réveiller mes amis et je zappe aussitôt cette idée. En contrebas, le lac d’Evol me démontre que sa réputation de « Gorg Negre » n’est pas usurpée.  Seul un faible croissant de lune se reflète dans ses eaux noires. Quand un nuage cache cette tranche de lune, plus rien ne luit à sa surface et tel un puits sans fond, seul le contour de ses rives boisées encore plus sombres que lui reste visible. Pour quelqu’un croyant à toutes les sornettes que l’on raconte à son propos, cette vision ténébreuse et plutôt sinistre rajouterait sans doute encore un peu plus de phobie. Moi pas. Si j’ai toujours aimé les légendes pour leurs côtés mystérieux, leurs aspects trop souvent mystiques me font plutôt rigoler. C’est le cas ici où les fables les plus farfelues, sources de profondes terreurs auprès des gens du pays sont paraît-il légions : « jeter un pierre dans ses eaux engendrerait une tempête…., les truites pêchées seraient des démons qui s’enfuiraient par les cheminées dès lors qu’on tenterait de les faire cuire…., d’incroyables trésors y seraient enfouis et tenter de les récupérer serait synonyme d’orages funestes….., ses fonds lugubres seraient le palais des diables…..des fées et des sorcières seraient à l’origine de la création des trois lacs, etc….. ». Voilà en résumé ce qu’il se raconte du « Gorg Negre » et parfois des deux autres lacs que sont le Gorg Estelat et le Gorg Bleu. Ce n’est donc pas l’appréhension qui me fait réintégrer le refuge mais seulement le froid que je trouve bien trop cinglant. Cette froidure me rappelle qu’un chaud duvet m’attend à l’intérieur. J’oublie très vite cette vision lugubre du lac et Morphée m’entraîne vers elle avec essentiellement ces superbes et étranges tableaux enluminés que j’ai eus devant les yeux. Le plus grand des bonheurs est d’avoir pu observer un panorama aussi lointain et dégagé, chose que nous n’avons jamais pu avoir depuis notre arrivée sur cette crête des Gourgs. En effet, l’horizon a été désespérément bouché par du brouillard ou des nuages qui passaient tels de longs chapelets sans fin.  Dans ma tête, je me dis que c’est peut-être les premiers indices d’une météo bien plus clémente que celle que nous avons connue hier et je m’endors avec cette bienheureuse espérance. Vers 8 heures du matin, le froid bien plus vif encore que dans la nuit me réveille. Personne n’est encore debout,  alors je reste longtemps blotti dans mon duvet à chercher en vain un peu de tiédeur. Le pire est toujours au bout de mes membres et j’ai l’impression que je ne sens plus leurs extrémités. J’attends que mes compagnons se réveillent complètement car j’en entends certains se tourner et se retourner dans leurs sacs de couchage cherchant sans doute eux aussi un peu de chaleur.  Avec le bout de tous mes doigts aussi réfrigérés et n’y tenant plus, je me lève le premier et je vois que Fred est réveillé lui aussi. La tête complètement dissimulée sous le capuchon de son sac, seul son visage apparaît et dans cet accoutrement, il ressemble à un papillon voulant s’extraire de sa chrysalide. Je sors du refuge car pour réveiller mes pieds endoloris par le froid, il faut nécessairement que je marche un peu. J’emporte mon appareil photo avec moi car j’espère que le spectacle sera aussi beau que celui aperçu cette nuit. Mais si les vues sont presque aussi lointaines toutes les couleurs ont disparu. La chape nocturne rougeâtre est désormais d’un bleu grisâtre plutôt terne et peu de lumières scintillent au loin. Seul l’horizon a de jolies nuances hésitant entre le rose et le gris. Mais je continue à trouver ça beau car dans ce jour naissant, mon regard est désormais attiré par la surface du Gorg Negre qui commence à miroiter sous les premières lueurs de l’aube. Il n’a plus rien de semblable avec le lac noir et mystérieux que j’ai observé cette nuit. Il est devenu le lac d’Evol. Tout comme hier matin à Matemale, le ciel est scindé en deux, mais cette fois les rôles sont inversés. Devant le refuge, le Conflent est chapeauté de nombreux nuages, certains très longs, gris ou blancs et d’autres plus petits et épars selon la direction dans laquelle je regarde. Derrière, c'est-à-dire vers le Capcir, un ciel encourageant semble hésiter entre un bleu dur très prometteur et un blanc laiteux que les premiers rayons du soleil ont du mal à colorer. Une fois encore, la direction à prendre est celle du beau temps et c’est encourageant même si hier je m’étais fait la même réflexion mais sans la réussite escomptée. En entrant dans le refuge, je suis néanmoins ravi d’annoncer cette excellente nouvelle à tout le monde. Fred a pris la peine de rallumer le poêle et une agréable chaleur commence à envahir la pièce. Jérôme est réveillé mais il est toujours perché sur son bat-flanc supérieur, déjà occupé à ranger son couchage.  Cathy est attablée et a entamé son petit déjeuner. Grâce à des petites boîtes de lait sucré, quelques galettes moelleuses et un jus de fruit, le mien est vite expédié et aussitôt après je me met à ranger mes affaires et mon sac à dos. Tout le monde fait de même et après un peu de ménage vite bâclé, nous sortons du refuge en file indienne, direction le pic du Madres. Un petit vent glacial s’est levé et avant de démarrer, nous jugeons utile d’enfiler nos gants et de nous encapuchonner dans nos vestes. Pendant un instant, nous longeons le bord du cirque au fond duquel nous apercevons le petit Gorg Blau (Lac Bleu) et celui plus vaste et en forme de haricot du Gorg Estelat que l’on appelle plus communément le lac de Nohèdes ou Lac Etoilé.  Ces décors ne me laissent pas indifférent. Je m’arrête un instant. En regardant ce dernier lac et ses rives, les souvenirs de ma deuxième étape sur le Tour du Coronat de 2007 émergent de ma mémoire : mon arrivée avec un groupe de vététistes espagnols, masculins et féminins. Ils avaient galéré dans les tourbières pour trouver le lac et je leur avais dit de me suivre pour accomplir les derniers mètres. Ils m’avaient demandé de les photographier avec vue sur le lac. Puis nous étions partis dans des directions opposées. Eux avaient pris la direction de l’ancien canal de Jujols alors que moi, j’avais décidé de faire le tour du lac pour partir à sa découverte. Avec mon gros sac à dos, je me souviens avoir galéré comme jamais dans les énormes pierriers de sa rive nord. Je me souviens aussi des couleurs extraordinaires que les rhododendrons roses et les flamboyants genêts composaient en se reflétant dans les eaux calmes du lac bleuté. Bleu, rose et jaune, cette incroyable palette de couleurs est toujours restée dans ma tête comme une des plus belles images de ce Tour du Coronat. Sur la rive ouest, là même où les eaux du Gorg Blau se déversent, j’avais trouvé une petite grève de sable fin avec une eau si limpide que je n’avais pas pu résister à y faire un peu de toilette. La toilette s’était rapidement transformée en une baignade dans le plus simple appareil. Un bain ô combien glacial mais nécessaire et qui m’avait définitivement revigoré et mis en forme pour le restant de la journée. Cette deuxième journée s’était poursuivie vers le lac d’Evol, le col du Portus et retour à Jujols, d’où j’étais parti la veille au matin. C’était mes deux premières étapes de ce Tour du Coronat qui allait en compter six et que j’avais intitulé « Des Merveilles au pays d’Alysse » à cause de l’ « Alyssum pyrenaicum » ou Alysson des Pyrénées, cette fleur relictuelle que l’on ne trouve que dans les falaises du Mont Coronat et nulle part ailleurs dans le monde. Les botanistes qui adorent le latin et les mots compliqués lui ont donné le nom de « Hormathophylla pyrenaica ». Voilà ce que ces deux lacs me rappellent à cet instant : des moments d’une randonnée solitaire mais merveilleuse et de surcroît avec quelques rencontres qui l’avaient rendu inoubliable. Des moments à la fois de joie et de solitude où l’on peut se remettre en question ? Qu’ai-je fait de bien et de mal ? Je me remets en route. Le lac disparaît soudain de mon regard et avec lui mes vieux souvenirs. Mes compagnons ont déjà pris pas mal d’avance. Sur la crête caillouteuse, le Madres fait son apparition avec encore un beau névé accroché à son flanc sud. Je connais bien cet itinéraire pour l’avoir déjà accompli depuis le col de Sansa et en boucle par la Coume de Ponteils et le Serrat de l’Ours. A partir d’ici, la déclivité est plutôt modeste mais dans ma tête, je me souviens de cette belle difficulté rocheuse qu’il y a entre le Roc Nègre (2.459 m) et le Madres (2.469 m) que les montagnards du cru appelle le « Malpas », c’est à dire le « mauvais passage ». Sur la carte I.G.N, elle apparaît sous la dénomination de « Clos Tort », que l’on traduit du catalan en « enclos tortueux ».  Ici, les randonneurs sujets au vertige sont priés d’oublier leur indisposition tant le sentier est étroit, abrupt et en équilibre au dessus d’un vide assez impressionnant. Je l’appréhende. J’ai déjà prévenu mes amis mais ça n’a pas eu l’air de les impressionner plus que ça. A l’approche du Clot Rodon, un isard s’enfuit devant nous et prend la même direction que celle que nous allons prendre. Il disparaît dans les rochers. Cathy, Fred et Jérôme amorcent la pente plutôt douce à cet endroit à une bonne cadence alors que mon cœur s’emballe. Mon vieux moteur diesel a un mal fou à trouver la bonne carburation. Il faut dire que la température sans doute proche de zéro ne fait rien pour m’aider et je suis vraiment frigorifié et comme toujours un maximum de froideur au bout de mes mains, de mes pieds mais de mon nez aussi. Telles de fines bougies accrochées à un sapin de Noël, de longs glaçons pendent aux branches de petits pins chétifs, c’est dire si la nuit a été froide par ici.  Je suis rapidement largué mais Jérôme s’arrête souvent pour m’attendre mais quand j’arrive à sa hauteur, le voilà qui repart et moi inévitablement, je m’arrête un peu plus longtemps pour calmer mes palpitations. Je monte à mon rythme et ce rythme-là me convient. En outre, je sais qu’après cette ascension du Madres, les descentes prendront le relais sinon jusqu’à l’arrivée au moins jusqu’à Puyvalador. Avant le sommet du Roc Nègre, Cathy et Fred sont là à m’attendre et je m’en veux un peu de savoir qu’ils m’ont attendus dans ce froid et avec ce vent polaire qui nous glacent le corps. Depuis la crête, les vues s’entrouvrent magnifiquement sur une immense partie de l’Aude et de l’Ariège. Depuis notre démarrage, un épais matelas nuageux est monté du fin fond des vallées du Bas-Conflent et c’est soudain immobilisé créant ainsi une véritable mer de nuages. Le plus épais recouvre la Vallée de la Castellane. C’est marrant car en 2007, lors de mon Tour du Coronat, j’avais connu les mêmes phénomènes climatiques lors des deux premiers jours. La première fois à Jujols et la seconde fois au campement de l’Estany del Clot, au bord duquel j’avais passé la nuit sous ma tente. J’étais très longtemps resté scotché à regarder les lents mouvements de cet extraordinaire moutonnement nuageux ressemblant aux flots déchaînés d’un océan mais qu’on aurait cru comme filmé au ralenti. Peu après ce joli spectacle, le fameux passage difficile du Clos Tort se présente. Par bonheur, il s’effectue sans problème et une fois encore, en s’engageant la première, alors qu’elle n’a aucune connaissance des obstacles qui l’attendent, Cathy démontre toute son agilité et la facilité qu’elle a à gravir les passages les plus périlleux sans aucune appréhension.  Jérôme passe en second et tout au long de l'hésitante escalade, je le suis quasiment comme son ombre. J’avoue qu’avec mon gros sac, je ne suis pas vraiment rassuré mais en tous cas, je n’ai pas le vertige.  Il faut dire que j’évite de m’arrêter pour regarder derrière moi. Fred ferme la marche et une fois les difficultés franchies, il reconnaît lui aussi que ce couloir étroit et très abrupt avec le vide sous les pieds n’est pas si commode que ça. L’arrivée de Fred au sommet est pour moi un vrai soulagement car je sais que nous en avons terminé avec les difficultés, au moins pour aujourd’hui. Pour avoir étudié la totalité du parcours du Tour du Capcir, je n’ai pas connaissance qu’il y en ait d’autres même si à proximité du lac d’Aude, un autre lieu-dit a également pour nom « Malpas ». Du coup, la suite bien plus praticable vers le Madres et son fameux orri est pour moi une quasi promenade. Ce tronçon est d’autant plus agréable qu’en contrebas, côté Vallon de la Balmette et Salt del Bourro, de nombreux isards paissent tranquillement sur les pelouses d’altitude. Voir des animaux sauvages est suffisamment rare pour que l’on passe un long moment à les observer même si le carcanet est toujours là, violent et froid. A cause de ce vent et de la distance, j’éprouve les pires difficultés à les photographier convenablement et ce, malgré la puissance du zoom de mon appareil photo. Il faut dire que la violence du vent ne me facilite pas la tâche car j’ai un mal fou à garder l’équilibre et à ne pas trembler dans mes prises de vues. En arrivant au sommet du Madres et devant l’orri qui le matérialise, je suis surpris d’apprendre que deux hommes, qui bivouaquent encore devant l’entrée, y ont passé la nuit. Sur le moment, je pense qu’avec notre « bon » poêle, nous avons été bien mieux lotis dans notre minuscule refuge. On échange quelques banalités avec eux en grignotant des fruits secs et des barres de céréales puis on immortalise notre arrivée à ce remarquable sommet par une photo de notre petit groupe. Emmitouflés comme nous le sommes, nous ressemblons à des alpinistes au sommet de l’Everest et pourtant nous ne sommes qu’à 2.469 mètres d’altitude. Il faut dire que le Madres, c’est déjà le point culminant de ce Tour du Capcir, alors c’est sans doute un peu notre Himalaya à nous. Il ne manque que la neige. Ce début de matinée venteuse et froide n’est pas étrangère à cette vision des choses mais la journée s’annonce assez magique et en tous cas conforme aux prévisions météo. Le soleil et le ciel bleu semble vouloir s’installer durablement et j’en suis le premier ravi. Les bonnes prévisions ont eu un jour de retard, voilà tout. A aucun moment, je n’ai imaginé qu’un orage puisse survenir. Les mois de juillet et d’août sont déjà derrière nous et pour moi, la saison des orages violents et fugitifs qu’il y a souvent sur ce massif est passée. Il y a quelques années, j’y ai vu tomber des flocons, de manière éphémère il est vrai, mais en plein mois d’août.  Les paysages à 360 degrés sont époustouflants même si deci delà quelques nuages épars restent accrochés à des reliefs. En contrebas, sur la Jasse de Guissotte, là même où le Ponteils prend sa source dans les nombreuses tourbières, Jérôme aperçoit d’autres cervidés. On en distingue également sur les crêtes du côté du Col des Gavaches mais avec la distance qui nous en sépare, il est impossible de discerner de quels cervidés il s’agit. Ici, il y a des isards, des cerfs, des mouflons de Corse réintroduits ou bien encore des chevreuils, encore que les chevreuils en troupeau soient assez rarissimes. Tous sont très présents dans ce massif et j’ai même lu dans un récent « Pyrénées Magazine », que le Massif du Madres est le lieu des Pyrénées où les spécialistes en ont recensé le plus : 4.000 cervidés sont présents dans le Capcir selon la revue. Quand au bouquetin des Pyrénées, il y a déjà longtemps qu’il a disparu de nos montagnes, sa chasse ayant eu raison de sa robustesse légendaire. Les bouquetins que l’on pourrait voir ont été réintroduits eux aussi comme les mouflons et les marmottes, celles visibles étant d’origine alpine et réintroduite en 1948. Oui, le Massif du Madres est un haut-lieu de la faune sauvage et il n’est donc pas étonnant qu’on y ait aperçu des ours, des loups et que les chats sauvages y soient bien présents sans compter bien sûr les sangliers et les renards roux. Nous quittons le sommet du Madres et prenons la direction de son flanc nord-ouest que l’on appelle le Serrat des Clotes. Le sentier tout en descente est très bon et file agréablement au milieu d’une végétation rase faite de minuscules bruyères et de graminées naines. Ici, les seuls arbres sont quelques pins rabougris très disséminés. Malgré la qualité du sentier peu caillouteux et tout en descente, une fois encore je suis décroché, d’abord parce que Cathy marche à un rythme incroyablement rapide mais surtout parce que le petit vent glacial qui balaie la montagne me fait constamment pleurer. Mes yeux larmoient sans cesse et de ce fait, je suis dans l’incapacité de voir où je mets mes pieds.  Jérôme qui s’arrête régulièrement pour m’attendre ne comprend pas pourquoi je marche si lentement et je suis contraint de lui demander de s’arrêter pour lui expliquer. Après les avoir freinés dans les montées, voilà que maintenant je les retarde aussi dans les descentes. Je m’en veux. A la fin d’un dôme herbeux, le grand « V » bleu du lac de Puyvalador fait son apparition au fond de la verdoyante vallée de l’Aude. Au dessus de cette profonde vallée, les forêts domaniales étalent leur longue toison olivâtre. Un peu plus haut encore, tout n’est que minéralité. Devant nos yeux contemplatifs et dans une succession sans fin de sommets plus ou moins hauts, la chaîne pyrénéenne forme l’horizon. Parmi les quelques sommets que j’ai eu l’occasion de gravir, seule la pyramide du Carlit est vraiment reconnaissable. L’été est passé et a fait disparaître la quasi totalement des névés et seules quelques neiges éternelles subsistent anarchiquement sur les parties les plus élevées et les plus ombragées sans doute. Après être entrés dans une zone d’estives où quelques vaches somnolent, nous coupons une piste. Ici, les prairies essentiellement herbeuses laissent un peu de place à de petits bosquets plantés de pins. Un panonceau indicatif mentionnant Espousouille à 3h20 nous donne une petite idée du temps de marche approximatif restant. A cette altitude, quelques plantes fleuries font de la résistance. Après la grisaille d’hier, c’est un plaisir de découvrir quelques touches de couleurs : le rose des épilobes et de quelques gros chardons, la blanc ou le mauve d’œillets de Montpellier magnifiquement dentelés, le jaune et le bleu des aconits. Le sentier est plus caillouteux mais paradoxalement il file dans des décors plus charmants car moins monotones. Cathy vient d’arriver la première au petit abri du Refuge Oller (1.630 m) et elle semble bien décidée à poursuivre quand Jérôme et Fred l’arrêtent dans son élan car il est déjà 12h30 et leurs estomacs doivent certainement crier famine. Le mien aussi. Nous décidons de stopper là pour pique-niquer et pour moi c’est une vraie délivrance car en arrêtant de marcher mes yeux s’arrêtent aussitôt de larmoyer. L’endroit est agréable, herbeux à souhait et en plus les vues en balcon sur la vallée sont superbes.  Nous y restons environ une heure, la plupart du temps couchés, car l’herbe est tendre, le ciel est bleu et les rayons du soleil sont suffisamment chauds pour envisager un semblant de sieste. En quittant le refuge Oller, le sentier tout en descente entre immédiatement dans un sombre sous-bois et pour moi, l’aspect agréable est que mes yeux ne pleurent plus. Ici, aux Planches d’en Jaquet, on voit clairement qu’un palier végétatif vient d’être atteint. C’est d’ailleurs l’impression générale que l’on a car tout autour de nous, la forêt est omniprésente. Les bois où nous marchons sont plus denses, les arbres plus hauts avec de nombreux grands résineux mais aussi quelques hauts feuillus. Peu après, on entend le bruit d’un petit ruisseau qui s’écoule et depuis la Font de la Perdrix, c’est le premier « rec » actif que l’on rencontre. Un coup d'oeil sur mon bout de carte et c'est bien le Rec du Roc Mari, escarpement rocheux isolé en forme de protubérance et entourée de pierriers que nous avons longtemps aperçu sur notre gauche.  L’étroit sentier s’élargit soudain se transformant en un chemin bien plus praticable lequel devient très rapidement une large piste forestière. Là, nous sommes arrivés en surplomb de la cabane du Bécet (1.560 m). En observant la carte I.G.N, il est évident que quel que soit l’itinéraire que l’on va choisir pour rejoindre Puyvalador,  seules des pistes forestières nous attendent et parmi les deux possibles, toutes les deux se terminent sur la digue du barrage. Il y a celle filant vers Odello Réal et celle dite de Serrallongua que Jérôme a enregistrée dans son G.P.S et qui arrive directement au bord de l’Aude au lieu-dit le Pont de la Fargua.  C’est cette dernière que nous choisissons et bien que ne connaissant pas l’autre, autant dire que celle de Serrallongua porte parfaitement son nom. Je la trouve très longue et fastidieuse cette piste et sans doute que je ne suis pas le seul dans ce cas. Comme souvent et pour passer le temps, je photographe tous et n’importe quoi : vaches, fleurs, insectes et papillons, tout y passe. L’arrivée au barrage de Puyvalador réveille quelques récents souvenirs car il y a moins de 15 jours, j’y suis venu avec Dany pour une randonnée consistant à faire le tour de son lac. C’est donc tout frais et je n’ai plus rien à découvrir que je ne connaisse déjà. Seule la météo est plus favorable et le lac un peu plus plein que lors de notre récente venue. Je prends quelques photos. On traverse la digue du barrage, toujours occupée par une ribambelle de martinets puis l’on monte vers le village de Puyvalador que l’on rejoint très rapidement. Ici, pour l’avoir accompli en voiture, je connais la distance qu’ils nous restent à parcourir : 3 kilomètres mais essentiellement sur de l’asphalte et tous les quatre, nous avons horreur de ça. On quitte Puyvalador et sa charmante église en empruntant la petite D.32g se dirigeant vers le hameau de Rieutort. Nous y sommes attendus au gîte Le Moulin. Au travers de grandes prairies et des paysages très amples eux aussi, la petite route est moins lassante que je ne l’avais imaginée. Il faut dire que quelques petits rapaces planant dans le ciel attirent sans cesse l’objectif de mon numérique. Par chance, un d’entre eux se pose sur un pin.  15h50, en entrant dans Rieutort, j’ai le sentiment de pénétrer dans un village qui a été déserté de tous ses habitants. Personne. Tout est silencieux, Seuls le bruit du ruisseau de Cirerol et la gazouillis de quelques passereaux se font entendre. Heureusement, Alex et Sia, les propriétaires du gîte sont bien présents. Ils sont chaleureux et formidables avec nous. Le lieu est charmant et reposant, les chambres sont parfaites et le grand calme que j’avais observé à mon arrivée s’avère être un atout indéniable pour trouver le repos auquel certains d’entre nous aspirent, moi le premier. Après les douches indispensables, Cathy se repose dans sa chambre pendant que Jérôme et Fred profitent des chaises longues du jardin fleuri et ensoleillé. De mon côté, appareil photo en bandoulière, je pars à la découverte du village qui s’avère bien plus grand que je ne l’avais supposé. Il faut dire que si le hameau a vécu un exode rural au milieu du siècle précédent, il n’en a pas toujours été ainsi. La taille de certains bâtiments, école et mairie par exemples, sont là pour prouver que Rieutort a eu ses heures de gloire et un nombre d’habitants bien plus important que de nos jours. La soirée, ponctuée d’un succulent repas avec formule table d’hôtes est des plus agréables. Alex et Sia se mettent en quatre pour nous satisfaire. Alex, en plus de son labeur d'aubergiste, est un fou de nature, moniteur de ski et guide de randonnées à ses heures. C’était un fana de pêche en mer et en rivière et il aime beaucoup la photo. Sur les murs du gîte, on peut découvrir de nombreuses photos relatant ses exploits et ses trophées halieutiques. De ce fait, nous avons de nombreux atomes crochus pour nous entendre et aucun problème pour trouver facilement des sujets de conversation. Sia est plus timide, excellente cuisinière et très captivante également quand elle parle de gastronomie et de la vie au gîte qu’elle semble affectionner.  En plus des charmants propriétaires, un couple sympathique s’est joint à nous lors du repas. La femme écrit des romans et de ce fait, les causeries s’en trouvent facilitées. La fin de la soirée tire agréablement en longueur mais pour la plupart d’entre nous, la nuit précédente a été peu réparatrice et l’envie d’aller nous coucher arrive bien plus vite que nous le souhaiterions. Nous pensons déjà à la très longue étape de demain. Ajoutons à cela les 17 kilomètres de l’étape d’aujourd’hui, le bon air du Madres et du Capcir, un bon et vrai lit qui nous attend et tout est en place pour une nuit qui s’annonce bien plus douce et régénératrice que la précédente. 11 heures, la raison l’emporte et nous partons nous coucher car dès le lendemain, la plus longue et plus difficile étape de ce Tour du Capcir nous attend. 28 kilomètres pour atteindre les Bouillouses et surtout une très longue montée par la Vallée du Galbe jusqu’au Camporells. Adorant l’Histoire, la toponymie et n’aimant pas « marcher idiot », autant qu’il est possible, j’ai appris que Les Camporells étaient les « champs des rois ». Ces rois, c’était ceux d’Aragon et de Majorque qui avaient fait du Capcir leur lieu de villégiature et de Formiguères leur résidence d’été. En réalité, le village a surtout servi à soigner l’asthme dont souffrait le roi Sanche 1er, roi de Majorque de 1299 à 1324. Quant aux Camporells, c’était son lieu de prédilection pour venir y chasser les isards, les cerfs et autres chevreuils. Il est mort ici à Formiguères à l’âge de 48 ans. En 1920, le prince Albert 1er de Monaco a, à sa manière, perpétué cette tradition puisqu’il était également un habitué des lieux appréciant le secteur des Camporells qu’il avait loué pour venir y chasser et y pêcher. Avant de m’endormir, je me remets à penser à cette révélation que j’ai eu avec Blek le Roc. A ma mère bien sûr, puisque c’est elle qui m’a permis de lire ces bandes dessinées. Mes pensées s’enchainent les unes aux autres. Ma mère, mon enfance, Blek le Roc. Ma mère est dans un service spécialisé Alzheimer d’une maison de retraite depuis 5 ans déjà et c’est bien rare que lors d’une randonnée sur plusieurs jours, je ne pense pas à elle plusieurs fois. Plusieurs fois et le plus souvent avec tristesse,  tant je trouve la fin de sa vie si injuste. L’aspect solitaire de la randonnée et les efforts à accomplir me font souvent sortir de mes pensées habituelles et quotidiennes, et de ce fait, il m’arrive très souvent de songer au temps passé et aux êtres chers qui ne sont plus de ce monde. Ce monde, ma mère n’en fait déjà plus partie. Avec la maladie d’Alzheimer, elle a basculé dans un autre univers.  Grâce à elle et depuis hier, le nom de Blek le Roc est revenu à la surface de mes souvenirs. S’il n’est pas revenu dans la journée, c’est probablement parce que l’étape d’aujourd’hui ne présentait aucune difficulté. Désormais, je n’ai plus aucun doute, ce personnage de bande dessinée est définitivement lié à mon amour pour la randonnée pédestre. Je ne sais pas pourquoi, je n’y avais jamais pensé auparavant. Me remémorer tout ça et mon enfance me rend triste car bien sûr ça me renvoie à ma mère et pourtant je suis super heureux d’être là et de marcher avec Jérôme et ses amis Cathy et Fred. Alors j’essaie de penser à autre chose mais les souvenirs bons et mauvais reviennent sans cesse et parfois se chevauchent. Avant de m’endormir, me viennent à l’esprit des questions parfois stupides.  Je me demande par exemple si Blek le Roc aurait pu s’entendre avec les rois de Majorque, eux, dont le quotidien était les guerres pour conserver leurs pouvoirs, pour étendre leur immense royaume.  Je n’ai pas la réponse. Blek, c’était d’abord un héros au grand cœur, un Robin des Bois à la sauce américaine, un être épris de justice et de liberté dont le seul objectif était de vaincre les Anglais. Les « homards rouges » comme il les appelait à cause de leurs uniformes. Il se battait pour que les Etats-Unis accèdent à leur Indépendance et non pas pour étendre un royaume voire un empire. Suis-je encore éveillé ? Suis-je déjà dans un rêve ? Les pensées concernant mon enfance se mélangent au temps présent. Elles oscillent entre la chance que j’ai d’être là et les êtres qui m’étaient chers et dont j’aurais tant aimé qu’ils soient avec moi. Je voudrais bien n’être que positif mais Blek le Roc me ramène parfois à des souvenirs plus tragiques. Ma mère encore et toujours, mais mon frère aîné Daniel aussi. En pensant à Blek le Roc, je me souviens qu’il cachait mes bandes dessinées uniquement pour me taquiner. Il est décédé à l’âge de 46 ans et dieu sait si l’avoir avec moi au cours de cette randonnée aurait été merveilleux.

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Tour du Capcir - Etape 2 Refuge de la Font de la Perdrix - Gîte Le Moulin à Rieutort

Publié le par gibirando

Ce diaporama est agrémenté de 5 musiques d'Ennio Morricone extraites d'une complilation intitulée "Relaxing Moment". Elles ont pour titre : "C'era Una Volta Il West", "Il Colore Dei Suoi Occhi", "Nuovo Cinema Paradiso", "Irene Gli Intoccabili""Tema Di Ada"

Tour du Capcir - Etape 2 Refuge de la Font de la Perdrix - Gîte Le Moulin à Rieutort

Tour du Capcir - Etape 2 Refuge de la Font de la Perdrix - Gîte Le Moulin à Rieutort

Tour du Capcir - Etape 2 Refuge de la Font de la Perdrix - Gîte Le Moulin à Rieutort

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2eme étape – 12 septembre 2013 : du Refuge de la Perdrix (2.312  au gite Le Moulin à Rieutort (1.517 m) soit 17,600 km pour un dénivelé de 1.080 m et des montées cumulées de 790 m. Point culminant : Le Madres (2.469 m) – Point le plus bas : Le pont de la Farga (1.400 m)

 

Bien que Fred et Jérôme aient alimenté le poêle au maximum et le plus longtemps possible, dès lors que l’on a cessé de l’entretenir, la température a rapidement chuté. La nuit est glaciale mais heureusement nous avions prévu cette éventualité. Les sacs de couchage plus des vêtements chauds sont suffisants pour ne pas avoir trop froid. En tous cas, je ne grelotte pas et seules les extrémités de mes mains et de mes pieds réclament plus de chaleur malgré deux paires de gants, deux paires de chaussettes et des petites bouillottes portatives mais malheureusement éphémères dans la durée. Mais connaissant bien cet inconvénient circulatoire sanguin qu’on appelle « froideur des extrémités », je sais qu’il n’y a pas grand-chose à faire de plus, si ce n’est juste à surveiller dans le cas de nouveaux symptômes ou si les anciens s’amplifient. J’ose espérer que mes compagnons n’ont pas ce problème. En pleine nuit, un besoin urgent m’envoie hors du refuge et je suis assez surpris de constater qu’il ne fait guère plus froid dehors qu’à l’intérieur du refuge. Le vent est presque complètement tombé et seule une brise légère balaie la crête. Le panorama est incroyable et si ce n’était pas la faiblesse de la température, je resterais sans doute bien plus longtemps à observer cette grandiose et merveilleuse splendeur. Eclairée par un croissant de lune, une longue chape nuageuse rougeâtre s’étend devant moi, si ce n’est à perte de vue au moins jusqu’à la Méditerranée que j’aperçois comme une tache bien plus claire par rapport au reste de l’horizon bien plus sombre. Ce reste d’horizon, j’imagine qu’il s’agit sans doute des Albères et de la Plaine du Roussillon. Sous cette longue ouate nébuleuse, le ciel est très clair dévoilant la silhouette des principales montagnes que je connais et qui paraissent bien plus proches : Canigou et Coronat au premier chef. De toute la Plaine du Roussillon et venant du sol, en tous cas de sa partie visible, des millions de scintillements jaunâtres semblent s’ajouter à cette clarté céleste.  C’est très beau et pendant un instant, l’éventualité d’aller chercher mon appareil photo pour figer ce spectacle me vient à l’esprit. Mais non, je préfère rester là à contempler et surtout je ne veux pas réveiller mes amis et je zappe aussitôt cette idée. En contrebas, le lac d’Evol me démontre que sa réputation de « Gorg Negre » n’est pas usurpée.  Seul un faible croissant de lune se reflète dans ses eaux noires. Quand un nuage cache cette tranche de lune, plus rien ne luit à sa surface et tel un puits sans fond, seul le contour de ses rives boisées encore plus sombres que lui reste visible. Pour quelqu’un croyant à toutes les sornettes que l’on raconte à son propos, cette vision ténébreuse et plutôt sinistre rajouterait sans doute encore un peu plus de phobie. Moi pas. Si j’ai toujours aimé les légendes pour leurs côtés mystérieux, leurs aspects trop souvent mystiques me font plutôt rigoler. C’est le cas ici où les fables les plus farfelues, sources de profondes terreurs auprès des gens du pays sont paraît-il légions : « jeter un pierre dans ses eaux engendrerait une tempête…., les truites pêchées seraient des démons qui s’enfuiraient par les cheminées dès lors qu’on tenterait de les faire cuire…., d’incroyables trésors y seraient enfouis et tenter de les récupérer serait synonyme d’orages funestes….., ses fonds lugubres seraient le palais des diables…..des fées et des sorcières seraient à l’origine de la création des trois lacs, etc….. ». Voilà en résumé ce qu’il se raconte du « Gorg Negre » et parfois des deux autres lacs que sont le Gorg Estelat et le Gorg Bleu. Ce n’est donc pas l’appréhension qui me fait réintégrer le refuge mais seulement le froid que je trouve bien trop cinglant. Cette froidure me rappelle qu’un chaud duvet m’attend à l’intérieur. J’oublie très vite cette vision lugubre du lac et Morphée m’entraîne vers elle avec essentiellement ces superbes et étranges tableaux enluminés que j’ai eus devant les yeux. Le plus grand des bonheurs est d’avoir pu observer un panorama aussi lointain et dégagé, chose que nous n’avons jamais pu avoir depuis notre arrivée sur cette crête des Gourgs. En effet, l’horizon a été désespérément bouché par du brouillard ou des nuages qui passaient tels de longs chapelets sans fin.  Dans ma tête, je me dis que c’est peut-être les premiers indices d’une météo bien plus clémente que celle que nous avons connue hier et je m’endors avec cette bienheureuse espérance. Vers 8 heures du matin, le froid bien plus vif encore que dans la nuit me réveille. Personne n’est encore debout,  alors je reste longtemps blotti dans mon duvet à chercher en vain un peu de tiédeur. Le pire est toujours au bout de mes membres et j’ai l’impression que je ne sens plus leurs extrémités. J’attends que mes compagnons se réveillent complètement car j’en entends certains se tourner et se retourner dans leurs sacs de couchage cherchant sans doute eux aussi un peu de chaleur.  Avec le bout de tous mes doigts aussi réfrigérés et n’y tenant plus, je me lève le premier et je vois que Fred est réveillé lui aussi. La tête complètement dissimulée sous le capuchon de son sac, seul son visage apparaît et dans cet accoutrement, il ressemble à un papillon voulant s’extraire de sa chrysalide. Je sors du refuge car pour réveiller mes pieds endoloris par le froid, il faut nécessairement que je marche un peu. J’emporte mon appareil photo avec moi car j’espère que le spectacle sera aussi beau que celui aperçu cette nuit. Mais si les vues sont presque aussi lointaines toutes les couleurs ont disparu. La chape nocturne rougeâtre est désormais d’un bleu grisâtre plutôt terne et peu de lumières scintillent au loin. Seul l’horizon a de jolies nuances hésitant entre le rose et le gris. Mais je continue à trouver ça beau car dans ce jour naissant, mon regard est désormais attiré par la surface du Gorg Negre qui commence à miroiter sous les premières lueurs de l’aube. Il n’a plus rien de semblable avec le lac noir et mystérieux que j’ai observé cette nuit. Il est devenu le lac d’Evol. Tout comme hier matin à Matemale, le ciel est scindé en deux, mais cette fois les rôles sont inversés. Devant le refuge, le Conflent est chapeauté de nombreux nuages, certains très longs, gris ou blancs et d’autres plus petits et épars selon la direction dans laquelle je regarde. Derrière, c'est-à-dire vers le Capcir, un ciel encourageant semble hésiter entre un bleu dur très prometteur et un blanc laiteux que les premiers rayons du soleil ont du mal à colorer. Une fois encore, la direction à prendre est celle du beau temps et c’est encourageant même si hier je m’étais fait la même réflexion mais sans la réussite escomptée. En entrant dans le refuge, je suis néanmoins ravi d’annoncer cette excellente nouvelle à tout le monde. Fred a pris la peine de rallumer le poêle et une agréable chaleur commence à envahir la pièce. Jérôme est réveillé mais il est toujours perché sur son bat-flanc supérieur, déjà occupé à ranger son couchage.  Cathy est attablée et a entamé son petit déjeuner. Grâce à des petites boîtes de lait sucré, quelques galettes moelleuses et un jus de fruit, le mien est vite expédié et aussitôt après je me met à ranger mes affaires et mon sac à dos. Tout le monde fait de même et après un peu de ménage vite bâclé, nous sortons du refuge en file indienne, direction le pic du Madres. Un petit vent glacial s’est levé et avant de démarrer, nous jugeons utile d’enfiler nos gants et de nous encapuchonner dans nos vestes. Pendant un instant, nous longeons le bord du cirque au fond duquel nous apercevons le petit Gorg Blau (Lac Bleu) et celui plus vaste et en forme de haricot du Gorg Estelat que l’on appelle plus communément le lac de Nohèdes ou Lac Etoilé.  Ces décors ne me laissent pas indifférent. Je m’arrête un instant. En regardant ce dernier lac et ses rives, les souvenirs de ma deuxième étape sur le Tour du Coronat de 2007 émergent de ma mémoire : mon arrivée avec un groupe de vététistes espagnols, masculins et féminins. Ils avaient galéré dans les tourbières pour trouver le lac et je leur avais dit de me suivre pour accomplir les derniers mètres. Ils m’avaient demandé de les photographier avec vue sur le lac. Puis nous étions partis dans des directions opposées. Eux avaient pris la direction de l’ancien canal de Jujols alors que moi, j’avais décidé de faire le tour du lac pour partir à sa découverte. Avec mon gros sac à dos, je me souviens avoir galéré comme jamais dans les énormes pierriers de sa rive nord. Je me souviens aussi des couleurs extraordinaires que les rhododendrons roses et les flamboyants genêts composaient en se reflétant dans les eaux calmes du lac bleuté. Bleu, rose et jaune, cette incroyable palette de couleurs est toujours restée dans ma tête comme une des plus belles images de ce Tour du Coronat. Sur la rive ouest, là même où les eaux du Gorg Blau se déversent, j’avais trouvé une petite grève de sable fin avec une eau si limpide que je n’avais pas pu résister à y faire un peu de toilette. La toilette s’était rapidement transformée en une baignade dans le plus simple appareil. Un bain ô combien glacial mais nécessaire et qui m’avait définitivement revigoré et mis en forme pour le restant de la journée. Cette deuxième journée s’était poursuivie vers le lac d’Evol, le col du Portus et retour à Jujols, d’où j’étais parti la veille au matin. C’était mes deux premières étapes de ce Tour du Coronat qui allait en compter six et que j’avais intitulé « Des Merveilles au pays d’Alysse » à cause de l’ « Alyssum pyrenaicum » ou Alysson des Pyrénées, cette fleur relictuelle que l’on ne trouve que dans les falaises du Mont Coronat et nulle part ailleurs dans le monde. Les botanistes qui adorent le latin et les mots compliqués lui ont donné le nom de « Hormathophylla pyrenaica ». Voilà ce que ces deux lacs me rappellent à cet instant : des moments d’une randonnée solitaire mais merveilleuse et de surcroît avec quelques rencontres qui l’avaient rendu inoubliable. Des moments à la fois de joie et de solitude où l’on peut se remettre en question ? Qu’ai-je fait de bien et de mal ? Je me remets en route. Le lac disparaît soudain de mon regard et avec lui mes vieux souvenirs. Mes compagnons ont déjà pris pas mal d’avance. Sur la crête caillouteuse, le Madres fait son apparition avec encore un beau névé accroché à son flanc sud. Je connais bien cet itinéraire pour l’avoir déjà accompli depuis le col de Sansa et en boucle par la Coume de Ponteils et le Serrat de l’Ours. A partir d’ici, la déclivité est plutôt modeste mais dans ma tête, je me souviens de cette belle difficulté rocheuse qu’il y a entre le Roc Nègre (2.459 m) et le Madres (2.469 m) que les montagnards du cru appelle le « Malpas », c’est à dire le « mauvais passage ». Sur la carte I.G.N, elle apparaît sous la dénomination de « Clos Tort », que l’on traduit du catalan en « enclos tortueux ».  Ici, les randonneurs sujets au vertige sont priés d’oublier leur indisposition tant le sentier est étroit, abrupt et en équilibre au dessus d’un vide assez impressionnant. Je l’appréhende. J’ai déjà prévenu mes amis mais ça n’a pas eu l’air de les impressionner plus que ça. A l’approche du Clot Rodon, un isard s’enfuit devant nous et prend la même direction que celle que nous allons prendre. Il disparaît dans les rochers. Cathy, Fred et Jérôme amorcent la pente plutôt douce à cet endroit à une bonne cadence alors que mon cœur s’emballe. Mon vieux moteur diesel a un mal fou à trouver la bonne carburation. Il faut dire que la température sans doute proche de zéro ne fait rien pour m’aider et je suis vraiment frigorifié et comme toujours un maximum de froideur au bout de mes mains, de mes pieds mais de mon nez aussi. Telles de fines bougies accrochées à un sapin de Noël, de longs glaçons pendent aux branches de petits pins chétifs, c’est dire si la nuit a été froide par ici.  Je suis rapidement largué mais Jérôme s’arrête souvent pour m’attendre mais quand j’arrive à sa hauteur, le voilà qui repart et moi inévitablement, je m’arrête un peu plus longtemps pour calmer mes palpitations. Je monte à mon rythme et ce rythme-là me convient. En outre, je sais qu’après cette ascension du Madres, les descentes prendront le relais sinon jusqu’à l’arrivée au moins jusqu’à Puyvalador. Avant le sommet du Roc Nègre, Cathy et Fred sont là à m’attendre et je m’en veux un peu de savoir qu’ils m’ont attendus dans ce froid et avec ce vent polaire qui nous glacent le corps. Depuis la crête, les vues s’entrouvrent magnifiquement sur une immense partie de l’Aude et de l’Ariège. Depuis notre démarrage, un épais matelas nuageux est monté du fin fond des vallées du Bas-Conflent et c’est soudain immobilisé créant ainsi une véritable mer de nuages. Le plus épais recouvre la Vallée de la Castellane. C’est marrant car en 2007, lors de mon Tour du Coronat, j’avais connu les mêmes phénomènes climatiques lors des deux premiers jours. La première fois à Jujols et la seconde fois au campement de l’Estany del Clot, au bord duquel j’avais passé la nuit sous ma tente. J’étais très longtemps resté scotché à regarder les lents mouvements de cet extraordinaire moutonnement nuageux ressemblant aux flots déchaînés d’un océan mais qu’on aurait cru comme filmé au ralenti. Peu après ce joli spectacle, le fameux passage difficile du Clos Tort se présente. Par bonheur, il s’effectue sans problème et une fois encore, en s’engageant la première, alors qu’elle n’a aucune connaissance des obstacles qui l’attendent, Cathy démontre toute son agilité et la facilité qu’elle a à gravir les passages les plus périlleux sans aucune appréhension.  Jérôme passe en second et tout au long de l'hésitante escalade, je le suis quasiment comme son ombre. J’avoue qu’avec mon gros sac, je ne suis pas vraiment rassuré mais en tous cas, je n’ai pas le vertige.  Il faut dire que j’évite de m’arrêter pour regarder derrière moi. Fred ferme la marche et une fois les difficultés franchies, il reconnaît lui aussi que ce couloir étroit et très abrupt avec le vide sous les pieds n’est pas si commode que ça. L’arrivée de Fred au sommet est pour moi un vrai soulagement car je sais que nous en avons terminé avec les difficultés, au moins pour aujourd’hui. Pour avoir étudié la totalité du parcours du Tour du Capcir, je n’ai pas connaissance qu’il y en ait d’autres même si à proximité du lac d’Aude, un autre lieu-dit a également pour nom « Malpas ». Du coup, la suite bien plus praticable vers le Madres et son fameux orri est pour moi une quasi promenade. Ce tronçon est d’autant plus agréable qu’en contrebas, côté Vallon de la Balmette et Salt del Bourro, de nombreux isards paissent tranquillement sur les pelouses d’altitude. Voir des animaux sauvages est suffisamment rare pour que l’on passe un long moment à les observer même si le carcanet est toujours là, violent et froid. A cause de ce vent et de la distance, j’éprouve les pires difficultés à les photographier convenablement et ce, malgré la puissance du zoom de mon appareil photo. Il faut dire que la violence du vent ne me facilite pas la tâche car j’ai un mal fou à garder l’équilibre et à ne pas trembler dans mes prises de vues. En arrivant au sommet du Madres et devant l’orri qui le matérialise, je suis surpris d’apprendre que deux hommes, qui bivouaquent encore devant l’entrée, y ont passé la nuit. Sur le moment, je pense qu’avec notre « bon » poêle, nous avons été bien mieux lotis dans notre minuscule refuge. On échange quelques banalités avec eux en grignotant des fruits secs et des barres de céréales puis on immortalise notre arrivée à ce remarquable sommet par une photo de notre petit groupe. Emmitouflés comme nous le sommes, nous ressemblons à des alpinistes au sommet de l’Everest et pourtant nous ne sommes qu’à 2.469 mètres d’altitude. Il faut dire que le Madres, c’est déjà le point culminant de ce Tour du Capcir, alors c’est sans doute un peu notre Himalaya à nous. Il ne manque que la neige. Ce début de matinée venteuse et froide n’est pas étrangère à cette vision des choses mais la journée s’annonce assez magique et en tous cas conforme aux prévisions météo. Le soleil et le ciel bleu semble vouloir s’installer durablement et j’en suis le premier ravi. Les bonnes prévisions ont eu un jour de retard, voilà tout. A aucun moment, je n’ai imaginé qu’un orage puisse survenir. Les mois de juillet et d’août sont déjà derrière nous et pour moi, la saison des orages violents et fugitifs qu’il y a souvent sur ce massif est passée. Il y a quelques années, j’y ai vu tomber des flocons, de manière éphémère il est vrai, mais en plein mois d’août.  Les paysages à 360 degrés sont époustouflants même si deci delà quelques nuages épars restent accrochés à des reliefs. En contrebas, sur la Jasse de Guissotte, là même où le Ponteils prend sa source dans les nombreuses tourbières, Jérôme aperçoit d’autres cervidés. On en distingue également sur les crêtes du côté du Col des Gavaches mais avec la distance qui nous en sépare, il est impossible de discerner de quels cervidés il s’agit. Ici, il y a des isards, des cerfs, des mouflons de Corse réintroduits ou bien encore des chevreuils, encore que les chevreuils en troupeau soient assez rarissimes. Tous sont très présents dans ce massif et j’ai même lu dans un récent « Pyrénées Magazine », que le Massif du Madres est le lieu des Pyrénées où les spécialistes en ont recensé le plus : 4.000 cervidés sont présents dans le Capcir selon la revue. Quand au bouquetin des Pyrénées, il y a déjà longtemps qu’il a disparu de nos montagnes, sa chasse ayant eu raison de sa robustesse légendaire. Les bouquetins que l’on pourrait voir ont été réintroduits eux aussi comme les mouflons et les marmottes, celles visibles étant d’origine alpine et réintroduite en 1948. Oui, le Massif du Madres est un haut-lieu de la faune sauvage et il n’est donc pas étonnant qu’on y ait aperçu des ours, des loups et que les chats sauvages y soient bien présents sans compter bien sûr les sangliers et les renards roux. Nous quittons le sommet du Madres et prenons la direction de son flanc nord-ouest que l’on appelle le Serrat des Clotes. Le sentier tout en descente est très bon et file agréablement au milieu d’une végétation rase faite de minuscules bruyères et de graminées naines. Ici, les seuls arbres sont quelques pins rabougris très disséminés. Malgré la qualité du sentier peu caillouteux et tout en descente, une fois encore je suis décroché, d’abord parce que Cathy marche à un rythme incroyablement rapide mais surtout parce que le petit vent glacial qui balaie la montagne me fait constamment pleurer. Mes yeux larmoient sans cesse et de ce fait, je suis dans l’incapacité de voir où je mets mes pieds.  Jérôme qui s’arrête régulièrement pour m’attendre ne comprend pas pourquoi je marche si lentement et je suis contraint de lui demander de s’arrêter pour lui expliquer. Après les avoir freinés dans les montées, voilà que maintenant je les retarde aussi dans les descentes. Je m’en veux. A la fin d’un dôme herbeux, le grand « V » bleu du lac de Puyvalador fait son apparition au fond de la verdoyante vallée de l’Aude. Au dessus de cette profonde vallée, les forêts domaniales étalent leur longue toison olivâtre. Un peu plus haut encore, tout n’est que minéralité. Devant nos yeux contemplatifs et dans une succession sans fin de sommets plus ou moins hauts, la chaîne pyrénéenne forme l’horizon. Parmi les quelques sommets que j’ai eu l’occasion de gravir, seule la pyramide du Carlit est vraiment reconnaissable. L’été est passé et a fait disparaître la quasi totalement des névés et seules quelques neiges éternelles subsistent anarchiquement sur les parties les plus élevées et les plus ombragées sans doute. Après être entrés dans une zone d’estives où quelques vaches somnolent, nous coupons une piste. Ici, les prairies essentiellement herbeuses laissent un peu de place à de petits bosquets plantés de pins. Un panonceau indicatif mentionnant Espousouille à 3h20 nous donne une petite idée du temps de marche approximatif restant. A cette altitude, quelques plantes fleuries font de la résistance. Après la grisaille d’hier, c’est un plaisir de découvrir quelques touches de couleurs : le rose des épilobes et de quelques gros chardons, la blanc ou le mauve d’œillets de Montpellier magnifiquement dentelés, le jaune et le bleu des aconits. Le sentier est plus caillouteux mais paradoxalement il file dans des décors plus charmants car moins monotones. Cathy vient d’arriver la première au petit abri du Refuge Oller (1.630 m) et elle semble bien décidée à poursuivre quand Jérôme et Fred l’arrêtent dans son élan car il est déjà 12h30 et leurs estomacs doivent certainement crier famine. Le mien aussi. Nous décidons de stopper là pour pique-niquer et pour moi c’est une vraie délivrance car en arrêtant de marcher mes yeux s’arrêtent aussitôt de larmoyer. L’endroit est agréable, herbeux à souhait et en plus les vues en balcon sur la vallée sont superbes.  Nous y restons environ une heure, la plupart du temps couchés, car l’herbe est tendre, le ciel est bleu et les rayons du soleil sont suffisamment chauds pour envisager un semblant de sieste. En quittant le refuge Oller, le sentier tout en descente entre immédiatement dans un sombre sous-bois et pour moi, l’aspect agréable est que mes yeux ne pleurent plus. Ici, aux Planches d’en Jaquet, on voit clairement qu’un palier végétatif vient d’être atteint. C’est d’ailleurs l’impression générale que l’on a car tout autour de nous, la forêt est omniprésente. Les bois où nous marchons sont plus denses, les arbres plus hauts avec de nombreux grands résineux mais aussi quelques hauts feuillus. Peu après, on entend le bruit d’un petit ruisseau qui s’écoule et depuis la Font de la Perdrix, c’est le premier « rec » actif que l’on rencontre. Un coup d'oeil sur mon bout de carte et c'est bien le Rec du Roc Mari, escarpement rocheux isolé en forme de protubérance et entourée de pierriers que nous avons longtemps aperçu sur notre gauche.  L’étroit sentier s’élargit soudain se transformant en un chemin bien plus praticable lequel devient très rapidement une large piste forestière. Là, nous sommes arrivés en surplomb de la cabane du Bécet (1.560 m). En observant la carte I.G.N, il est évident que quel que soit l’itinéraire que l’on va choisir pour rejoindre Puyvalador,  seules des pistes forestières nous attendent et parmi les deux possibles, toutes les deux se terminent sur la digue du barrage. Il y a celle filant vers Odello Réal et celle dite de Serrallongua que Jérôme a enregistrée dans son G.P.S et qui arrive directement au bord de l’Aude au lieu-dit le Pont de la Fargua.  C’est cette dernière que nous choisissons et bien que ne connaissant pas l’autre, autant dire que celle de Serrallongua porte parfaitement son nom. Je la trouve très longue et fastidieuse cette piste et sans doute que je ne suis pas le seul dans ce cas. Comme souvent et pour passer le temps, je photographe tous et n’importe quoi : vaches, fleurs, insectes et papillons, tout y passe. L’arrivée au barrage de Puyvalador réveille quelques récents souvenirs car il y a moins de 15 jours, j’y suis venu avec Dany pour une randonnée consistant à faire le tour de son lac. C’est donc tout frais et je n’ai plus rien à découvrir que je ne connaisse déjà. Seule la météo est plus favorable et le lac un peu plus plein que lors de notre récente venue. Je prends quelques photos. On traverse la digue du barrage, toujours occupée par une ribambelle de martinets puis l’on monte vers le village de Puyvalador que l’on rejoint très rapidement. Ici, pour l’avoir accompli en voiture, je connais la distance qu’ils nous restent à parcourir : 3 kilomètres mais essentiellement sur de l’asphalte et tous les quatre, nous avons horreur de ça. On quitte Puyvalador et sa charmante église en empruntant la petite D.32g se dirigeant vers le hameau de Rieutort. Nous y sommes attendus au gîte Le Moulin. Au travers de grandes prairies et des paysages très amples eux aussi, la petite route est moins lassante que je ne l’avais imaginée. Il faut dire que quelques petits rapaces planant dans le ciel attirent sans cesse l’objectif de mon numérique. Par chance, un d’entre eux se pose sur un pin.  15h50, en entrant dans Rieutort, j’ai le sentiment de pénétrer dans un village qui a été déserté de tous ses habitants. Personne. Tout est silencieux, Seuls le bruit du ruisseau de Cirerol et la gazouillis de quelques passereaux se font entendre. Heureusement, Alex et Sia, les propriétaires du gîte sont bien présents. Ils sont chaleureux et formidables avec nous. Le lieu est charmant et reposant, les chambres sont parfaites et le grand calme que j’avais observé à mon arrivée s’avère être un atout indéniable pour trouver le repos auquel certains d’entre nous aspirent, moi le premier. Après les douches indispensables, Cathy se repose dans sa chambre pendant que Jérôme et Fred profitent des chaises longues du jardin fleuri et ensoleillé. De mon côté, appareil photo en bandoulière, je pars à la découverte du village qui s’avère bien plus grand que je ne l’avais supposé. Il faut dire que si le hameau a vécu un exode rural au milieu du siècle précédent, il n’en a pas toujours été ainsi. La taille de certains bâtiments, école et mairie par exemples, sont là pour prouver que Rieutort a eu ses heures de gloire et un nombre d’habitants bien plus important que de nos jours. La soirée, ponctuée d’un succulent repas avec formule table d’hôtes est des plus agréables. Alex et Sia se mettent en quatre pour nous satisfaire. Alex, en plus de son labeur d'aubergiste, est un fou de nature, moniteur de ski et guide de randonnées à ses heures. C’était un fana de pêche en mer et en rivière et il aime beaucoup la photo. Sur les murs du gîte, on peut découvrir de nombreuses photos relatant ses exploits et ses trophées halieutiques. De ce fait, nous avons de nombreux atomes crochus pour nous entendre et aucun problème pour trouver facilement des sujets de conversation. Sia est plus timide, excellente cuisinière et très captivante également quand elle parle de gastronomie et de la vie au gîte qu’elle semble affectionner.  En plus des charmants propriétaires, un couple sympathique s’est joint à nous lors du repas. La femme écrit des romans et de ce fait, les causeries s’en trouvent facilitées. La fin de la soirée tire agréablement en longueur mais pour la plupart d’entre nous, la nuit précédente a été peu réparatrice et l’envie d’aller nous coucher arrive bien plus vite que nous le souhaiterions. Nous pensons déjà à la très longue étape de demain. Ajoutons à cela les 17 kilomètres de l’étape d’aujourd’hui, le bon air du Madres et du Capcir, un bon et vrai lit qui nous attend et tout est en place pour une nuit qui s’annonce bien plus douce et régénératrice que la précédente. 11 heures, la raison l’emporte et nous partons nous coucher car dès le lendemain, la plus longue et plus difficile étape de ce Tour du Capcir nous attend. 28 kilomètres pour atteindre les Bouillouses et surtout une très longue montée par la Vallée du Galbe jusqu’au Camporells. Adorant l’Histoire, la toponymie et n’aimant pas « marcher idiot », autant qu’il est possible, j’ai appris que Les Camporells étaient les « champs des rois ». Ces rois, c’était ceux d’Aragon et de Majorque qui avaient fait du Capcir leur lieu de villégiature et de Formiguères leur résidence d’été. En réalité, le village a surtout servi à soigner l’asthme dont souffrait le roi Sanche 1er, roi de Majorque de 1299 à 1324. Quant aux Camporells, c’était son lieu de prédilection pour venir y chasser les isards, les cerfs et autres chevreuils. Il est mort ici à Formiguères à l’âge de 48 ans. En 1920, le prince Albert 1er de Monaco a, à sa manière, perpétué cette tradition puisqu’il était également un habitué des lieux appréciant le secteur des Camporells qu’il avait loué pour venir y chasser et y pêcher. Avant de m’endormir, je me remets à penser à cette révélation que j’ai eu avec Blek le Roc. A ma mère bien sûr, puisque c’est elle qui m’a permis de lire ces bandes dessinées. Mes pensées s’enchainent les unes aux autres. Ma mère, mon enfance, Blek le Roc. Ma mère est dans un service spécialisé Alzheimer d’une maison de retraite depuis 5 ans déjà et c’est bien rare que lors d’une randonnée sur plusieurs jours, je ne pense pas à elle plusieurs fois. Plusieurs fois et le plus souvent avec tristesse,  tant je trouve la fin de sa vie si injuste. L’aspect solitaire de la randonnée et les efforts à accomplir me font souvent sortir de mes pensées habituelles et quotidiennes, et de ce fait, il m’arrive très souvent de songer au temps passé et aux êtres chers qui ne sont plus de ce monde. Ce monde, ma mère n’en fait déjà plus partie. Avec la maladie d’Alzheimer, elle a basculé dans un autre univers.  Grâce à elle et depuis hier, le nom de Blek le Roc est revenu à la surface de mes souvenirs. S’il n’est pas revenu dans la journée, c’est probablement parce que l’étape d’aujourd’hui ne présentait aucune difficulté. Désormais, je n’ai plus aucun doute, ce personnage de bande dessinée est définitivement lié à mon amour pour la randonnée pédestre. Je ne sais pas pourquoi, je n’y avais jamais pensé auparavant. Me remémorer tout ça et mon enfance me rend triste car bien sûr ça me renvoie à ma mère et pourtant je suis super heureux d’être là et de marcher avec Jérôme et ses amis Cathy et Fred. Alors j’essaie de penser à autre chose mais les souvenirs bons et mauvais reviennent sans cesse et parfois se chevauchent. Avant de m’endormir, me viennent à l’esprit des questions parfois stupides.  Je me demande par exemple si Blek le Roc aurait pu s’entendre avec les rois de Majorque, eux, dont le quotidien était les guerres pour conserver leurs pouvoirs, pour étendre leur immense royaume.  Je n’ai pas la réponse. Blek, c’était d’abord un héros au grand cœur, un Robin des Bois à la sauce américaine, un être épris de justice et de liberté dont le seul objectif était de vaincre les Anglais. Les « homards rouges » comme il les appelait à cause de leurs uniformes. Il se battait pour que les Etats-Unis accèdent à leur Indépendance et non pas pour étendre un royaume voire un empire. Suis-je encore éveillé ? Suis-je déjà dans un rêve ? Les pensées concernant mon enfance se mélangent au temps présent. Elles oscillent entre la chance que j’ai d’être là et les êtres qui m’étaient chers et dont j’aurais tant aimé qu’ils soient avec moi. Je voudrais bien n’être que positif mais Blek le Roc me ramène parfois à des souvenirs plus tragiques. Ma mère encore et toujours, mais mon frère aîné Daniel aussi. En pensant à Blek le Roc, je me souviens qu’il cachait mes bandes dessinées uniquement pour me taquiner. Il est décédé à l’âge de 46 ans et dieu sait si l’avoir avec moi au cours de cette randonnée aurait été merveilleux.

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Tour du Capcir - Etape 2 Refuge de la Font de la Perdrix - Gîte Le Moulin à Rieutort

Publié le par gibirando

Ce diaporama est agrémenté de 5 musiques d'Ennio Morricone extraites d'une complilation intitulée "Relaxing Moment". Elles ont pour titre : "C'era Una Volta Il West", "Il Colore Dei Suoi Occhi", "Nuovo Cinema Paradiso", "Irene Gli Intoccabili""Tema Di Ada"

Tour du Capcir - Etape 2 Refuge de la Font de la Perdrix - Gîte Le Moulin à Rieutort

Tour du Capcir - Etape 2 Refuge de la Font de la Perdrix - Gîte Le Moulin à Rieutort

Tour du Capcir - Etape 2 Refuge de la Font de la Perdrix - Gîte Le Moulin à Rieutort

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2eme étape – 12 septembre 2013 : du Refuge de la Perdrix (2.312  au gite Le Moulin à Rieutort (1.517 m) soit 17,600 km pour un dénivelé de 1.080 m et des montées cumulées de 790 m. Point culminant : Le Madres (2.469 m) – Point le plus bas : Le pont de la Farga (1.400 m)

 

Bien que Fred et Jérôme aient alimenté le poêle au maximum et le plus longtemps possible, dès lors que l’on a cessé de l’entretenir, la température a rapidement chuté. La nuit est glaciale mais heureusement nous avions prévu cette éventualité. Les sacs de couchage plus des vêtements chauds sont suffisants pour ne pas avoir trop froid. En tous cas, je ne grelotte pas et seules les extrémités de mes mains et de mes pieds réclament plus de chaleur malgré deux paires de gants, deux paires de chaussettes et des petites bouillottes portatives mais malheureusement éphémères dans la durée. Mais connaissant bien cet inconvénient circulatoire sanguin qu’on appelle « froideur des extrémités », je sais qu’il n’y a pas grand-chose à faire de plus, si ce n’est juste à surveiller dans le cas de nouveaux symptômes ou si les anciens s’amplifient. J’ose espérer que mes compagnons n’ont pas ce problème. En pleine nuit, un besoin urgent m’envoie hors du refuge et je suis assez surpris de constater qu’il ne fait guère plus froid dehors qu’à l’intérieur du refuge. Le vent est presque complètement tombé et seule une brise légère balaie la crête. Le panorama est incroyable et si ce n’était pas la faiblesse de la température, je resterais sans doute bien plus longtemps à observer cette grandiose et merveilleuse splendeur. Eclairée par un croissant de lune, une longue chape nuageuse rougeâtre s’étend devant moi, si ce n’est à perte de vue au moins jusqu’à la Méditerranée que j’aperçois comme une tache bien plus claire par rapport au reste de l’horizon bien plus sombre. Ce reste d’horizon, j’imagine qu’il s’agit sans doute des Albères et de la Plaine du Roussillon. Sous cette longue ouate nébuleuse, le ciel est très clair dévoilant la silhouette des principales montagnes que je connais et qui paraissent bien plus proches : Canigou et Coronat au premier chef. De toute la Plaine du Roussillon et venant du sol, en tous cas de sa partie visible, des millions de scintillements jaunâtres semblent s’ajouter à cette clarté céleste.  C’est très beau et pendant un instant, l’éventualité d’aller chercher mon appareil photo pour figer ce spectacle me vient à l’esprit. Mais non, je préfère rester là à contempler et surtout je ne veux pas réveiller mes amis et je zappe aussitôt cette idée. En contrebas, le lac d’Evol me démontre que sa réputation de « Gorg Negre » n’est pas usurpée.  Seul un faible croissant de lune se reflète dans ses eaux noires. Quand un nuage cache cette tranche de lune, plus rien ne luit à sa surface et tel un puits sans fond, seul le contour de ses rives boisées encore plus sombres que lui reste visible. Pour quelqu’un croyant à toutes les sornettes que l’on raconte à son propos, cette vision ténébreuse et plutôt sinistre rajouterait sans doute encore un peu plus de phobie. Moi pas. Si j’ai toujours aimé les légendes pour leurs côtés mystérieux, leurs aspects trop souvent mystiques me font plutôt rigoler. C’est le cas ici où les fables les plus farfelues, sources de profondes terreurs auprès des gens du pays sont paraît-il légions : « jeter un pierre dans ses eaux engendrerait une tempête…., les truites pêchées seraient des démons qui s’enfuiraient par les cheminées dès lors qu’on tenterait de les faire cuire…., d’incroyables trésors y seraient enfouis et tenter de les récupérer serait synonyme d’orages funestes….., ses fonds lugubres seraient le palais des diables…..des fées et des sorcières seraient à l’origine de la création des trois lacs, etc….. ». Voilà en résumé ce qu’il se raconte du « Gorg Negre » et parfois des deux autres lacs que sont le Gorg Estelat et le Gorg Bleu. Ce n’est donc pas l’appréhension qui me fait réintégrer le refuge mais seulement le froid que je trouve bien trop cinglant. Cette froidure me rappelle qu’un chaud duvet m’attend à l’intérieur. J’oublie très vite cette vision lugubre du lac et Morphée m’entraîne vers elle avec essentiellement ces superbes et étranges tableaux enluminés que j’ai eus devant les yeux. Le plus grand des bonheurs est d’avoir pu observer un panorama aussi lointain et dégagé, chose que nous n’avons jamais pu avoir depuis notre arrivée sur cette crête des Gourgs. En effet, l’horizon a été désespérément bouché par du brouillard ou des nuages qui passaient tels de longs chapelets sans fin.  Dans ma tête, je me dis que c’est peut-être les premiers indices d’une météo bien plus clémente que celle que nous avons connue hier et je m’endors avec cette bienheureuse espérance. Vers 8 heures du matin, le froid bien plus vif encore que dans la nuit me réveille. Personne n’est encore debout,  alors je reste longtemps blotti dans mon duvet à chercher en vain un peu de tiédeur. Le pire est toujours au bout de mes membres et j’ai l’impression que je ne sens plus leurs extrémités. J’attends que mes compagnons se réveillent complètement car j’en entends certains se tourner et se retourner dans leurs sacs de couchage cherchant sans doute eux aussi un peu de chaleur.  Avec le bout de tous mes doigts aussi réfrigérés et n’y tenant plus, je me lève le premier et je vois que Fred est réveillé lui aussi. La tête complètement dissimulée sous le capuchon de son sac, seul son visage apparaît et dans cet accoutrement, il ressemble à un papillon voulant s’extraire de sa chrysalide. Je sors du refuge car pour réveiller mes pieds endoloris par le froid, il faut nécessairement que je marche un peu. J’emporte mon appareil photo avec moi car j’espère que le spectacle sera aussi beau que celui aperçu cette nuit. Mais si les vues sont presque aussi lointaines toutes les couleurs ont disparu. La chape nocturne rougeâtre est désormais d’un bleu grisâtre plutôt terne et peu de lumières scintillent au loin. Seul l’horizon a de jolies nuances hésitant entre le rose et le gris. Mais je continue à trouver ça beau car dans ce jour naissant, mon regard est désormais attiré par la surface du Gorg Negre qui commence à miroiter sous les premières lueurs de l’aube. Il n’a plus rien de semblable avec le lac noir et mystérieux que j’ai observé cette nuit. Il est devenu le lac d’Evol. Tout comme hier matin à Matemale, le ciel est scindé en deux, mais cette fois les rôles sont inversés. Devant le refuge, le Conflent est chapeauté de nombreux nuages, certains très longs, gris ou blancs et d’autres plus petits et épars selon la direction dans laquelle je regarde. Derrière, c'est-à-dire vers le Capcir, un ciel encourageant semble hésiter entre un bleu dur très prometteur et un blanc laiteux que les premiers rayons du soleil ont du mal à colorer. Une fois encore, la direction à prendre est celle du beau temps et c’est encourageant même si hier je m’étais fait la même réflexion mais sans la réussite escomptée. En entrant dans le refuge, je suis néanmoins ravi d’annoncer cette excellente nouvelle à tout le monde. Fred a pris la peine de rallumer le poêle et une agréable chaleur commence à envahir la pièce. Jérôme est réveillé mais il est toujours perché sur son bat-flanc supérieur, déjà occupé à ranger son couchage.  Cathy est attablée et a entamé son petit déjeuner. Grâce à des petites boîtes de lait sucré, quelques galettes moelleuses et un jus de fruit, le mien est vite expédié et aussitôt après je me met à ranger mes affaires et mon sac à dos. Tout le monde fait de même et après un peu de ménage vite bâclé, nous sortons du refuge en file indienne, direction le pic du Madres. Un petit vent glacial s’est levé et avant de démarrer, nous jugeons utile d’enfiler nos gants et de nous encapuchonner dans nos vestes. Pendant un instant, nous longeons le bord du cirque au fond duquel nous apercevons le petit Gorg Blau (Lac Bleu) et celui plus vaste et en forme de haricot du Gorg Estelat que l’on appelle plus communément le lac de Nohèdes ou Lac Etoilé.  Ces décors ne me laissent pas indifférent. Je m’arrête un instant. En regardant ce dernier lac et ses rives, les souvenirs de ma deuxième étape sur le Tour du Coronat de 2007 émergent de ma mémoire : mon arrivée avec un groupe de vététistes espagnols, masculins et féminins. Ils avaient galéré dans les tourbières pour trouver le lac et je leur avais dit de me suivre pour accomplir les derniers mètres. Ils m’avaient demandé de les photographier avec vue sur le lac. Puis nous étions partis dans des directions opposées. Eux avaient pris la direction de l’ancien canal de Jujols alors que moi, j’avais décidé de faire le tour du lac pour partir à sa découverte. Avec mon gros sac à dos, je me souviens avoir galéré comme jamais dans les énormes pierriers de sa rive nord. Je me souviens aussi des couleurs extraordinaires que les rhododendrons roses et les flamboyants genêts composaient en se reflétant dans les eaux calmes du lac bleuté. Bleu, rose et jaune, cette incroyable palette de couleurs est toujours restée dans ma tête comme une des plus belles images de ce Tour du Coronat. Sur la rive ouest, là même où les eaux du Gorg Blau se déversent, j’avais trouvé une petite grève de sable fin avec une eau si limpide que je n’avais pas pu résister à y faire un peu de toilette. La toilette s’était rapidement transformée en une baignade dans le plus simple appareil. Un bain ô combien glacial mais nécessaire et qui m’avait définitivement revigoré et mis en forme pour le restant de la journée. Cette deuxième journée s’était poursuivie vers le lac d’Evol, le col du Portus et retour à Jujols, d’où j’étais parti la veille au matin. C’était mes deux premières étapes de ce Tour du Coronat qui allait en compter six et que j’avais intitulé « Des Merveilles au pays d’Alysse » à cause de l’ « Alyssum pyrenaicum » ou Alysson des Pyrénées, cette fleur relictuelle que l’on ne trouve que dans les falaises du Mont Coronat et nulle part ailleurs dans le monde. Les botanistes qui adorent le latin et les mots compliqués lui ont donné le nom de « Hormathophylla pyrenaica ». Voilà ce que ces deux lacs me rappellent à cet instant : des moments d’une randonnée solitaire mais merveilleuse et de surcroît avec quelques rencontres qui l’avaient rendu inoubliable. Des moments à la fois de joie et de solitude où l’on peut se remettre en question ? Qu’ai-je fait de bien et de mal ? Je me remets en route. Le lac disparaît soudain de mon regard et avec lui mes vieux souvenirs. Mes compagnons ont déjà pris pas mal d’avance. Sur la crête caillouteuse, le Madres fait son apparition avec encore un beau névé accroché à son flanc sud. Je connais bien cet itinéraire pour l’avoir déjà accompli depuis le col de Sansa et en boucle par la Coume de Ponteils et le Serrat de l’Ours. A partir d’ici, la déclivité est plutôt modeste mais dans ma tête, je me souviens de cette belle difficulté rocheuse qu’il y a entre le Roc Nègre (2.459 m) et le Madres (2.469 m) que les montagnards du cru appelle le « Malpas », c’est à dire le « mauvais passage ». Sur la carte I.G.N, elle apparaît sous la dénomination de « Clos Tort », que l’on traduit du catalan en « enclos tortueux ».  Ici, les randonneurs sujets au vertige sont priés d’oublier leur indisposition tant le sentier est étroit, abrupt et en équilibre au dessus d’un vide assez impressionnant. Je l’appréhende. J’ai déjà prévenu mes amis mais ça n’a pas eu l’air de les impressionner plus que ça. A l’approche du Clot Rodon, un isard s’enfuit devant nous et prend la même direction que celle que nous allons prendre. Il disparaît dans les rochers. Cathy, Fred et Jérôme amorcent la pente plutôt douce à cet endroit à une bonne cadence alors que mon cœur s’emballe. Mon vieux moteur diesel a un mal fou à trouver la bonne carburation. Il faut dire que la température sans doute proche de zéro ne fait rien pour m’aider et je suis vraiment frigorifié et comme toujours un maximum de froideur au bout de mes mains, de mes pieds mais de mon nez aussi. Telles de fines bougies accrochées à un sapin de Noël, de longs glaçons pendent aux branches de petits pins chétifs, c’est dire si la nuit a été froide par ici.  Je suis rapidement largué mais Jérôme s’arrête souvent pour m’attendre mais quand j’arrive à sa hauteur, le voilà qui repart et moi inévitablement, je m’arrête un peu plus longtemps pour calmer mes palpitations. Je monte à mon rythme et ce rythme-là me convient. En outre, je sais qu’après cette ascension du Madres, les descentes prendront le relais sinon jusqu’à l’arrivée au moins jusqu’à Puyvalador. Avant le sommet du Roc Nègre, Cathy et Fred sont là à m’attendre et je m’en veux un peu de savoir qu’ils m’ont attendus dans ce froid et avec ce vent polaire qui nous glacent le corps. Depuis la crête, les vues s’entrouvrent magnifiquement sur une immense partie de l’Aude et de l’Ariège. Depuis notre démarrage, un épais matelas nuageux est monté du fin fond des vallées du Bas-Conflent et c’est soudain immobilisé créant ainsi une véritable mer de nuages. Le plus épais recouvre la Vallée de la Castellane. C’est marrant car en 2007, lors de mon Tour du Coronat, j’avais connu les mêmes phénomènes climatiques lors des deux premiers jours. La première fois à Jujols et la seconde fois au campement de l’Estany del Clot, au bord duquel j’avais passé la nuit sous ma tente. J’étais très longtemps resté scotché à regarder les lents mouvements de cet extraordinaire moutonnement nuageux ressemblant aux flots déchaînés d’un océan mais qu’on aurait cru comme filmé au ralenti. Peu après ce joli spectacle, le fameux passage difficile du Clos Tort se présente. Par bonheur, il s’effectue sans problème et une fois encore, en s’engageant la première, alors qu’elle n’a aucune connaissance des obstacles qui l’attendent, Cathy démontre toute son agilité et la facilité qu’elle a à gravir les passages les plus périlleux sans aucune appréhension.  Jérôme passe en second et tout au long de l'hésitante escalade, je le suis quasiment comme son ombre. J’avoue qu’avec mon gros sac, je ne suis pas vraiment rassuré mais en tous cas, je n’ai pas le vertige.  Il faut dire que j’évite de m’arrêter pour regarder derrière moi. Fred ferme la marche et une fois les difficultés franchies, il reconnaît lui aussi que ce couloir étroit et très abrupt avec le vide sous les pieds n’est pas si commode que ça. L’arrivée de Fred au sommet est pour moi un vrai soulagement car je sais que nous en avons terminé avec les difficultés, au moins pour aujourd’hui. Pour avoir étudié la totalité du parcours du Tour du Capcir, je n’ai pas connaissance qu’il y en ait d’autres même si à proximité du lac d’Aude, un autre lieu-dit a également pour nom « Malpas ». Du coup, la suite bien plus praticable vers le Madres et son fameux orri est pour moi une quasi promenade. Ce tronçon est d’autant plus agréable qu’en contrebas, côté Vallon de la Balmette et Salt del Bourro, de nombreux isards paissent tranquillement sur les pelouses d’altitude. Voir des animaux sauvages est suffisamment rare pour que l’on passe un long moment à les observer même si le carcanet est toujours là, violent et froid. A cause de ce vent et de la distance, j’éprouve les pires difficultés à les photographier convenablement et ce, malgré la puissance du zoom de mon appareil photo. Il faut dire que la violence du vent ne me facilite pas la tâche car j’ai un mal fou à garder l’équilibre et à ne pas trembler dans mes prises de vues. En arrivant au sommet du Madres et devant l’orri qui le matérialise, je suis surpris d’apprendre que deux hommes, qui bivouaquent encore devant l’entrée, y ont passé la nuit. Sur le moment, je pense qu’avec notre « bon » poêle, nous avons été bien mieux lotis dans notre minuscule refuge. On échange quelques banalités avec eux en grignotant des fruits secs et des barres de céréales puis on immortalise notre arrivée à ce remarquable sommet par une photo de notre petit groupe. Emmitouflés comme nous le sommes, nous ressemblons à des alpinistes au sommet de l’Everest et pourtant nous ne sommes qu’à 2.469 mètres d’altitude. Il faut dire que le Madres, c’est déjà le point culminant de ce Tour du Capcir, alors c’est sans doute un peu notre Himalaya à nous. Il ne manque que la neige. Ce début de matinée venteuse et froide n’est pas étrangère à cette vision des choses mais la journée s’annonce assez magique et en tous cas conforme aux prévisions météo. Le soleil et le ciel bleu semble vouloir s’installer durablement et j’en suis le premier ravi. Les bonnes prévisions ont eu un jour de retard, voilà tout. A aucun moment, je n’ai imaginé qu’un orage puisse survenir. Les mois de juillet et d’août sont déjà derrière nous et pour moi, la saison des orages violents et fugitifs qu’il y a souvent sur ce massif est passée. Il y a quelques années, j’y ai vu tomber des flocons, de manière éphémère il est vrai, mais en plein mois d’août.  Les paysages à 360 degrés sont époustouflants même si deci delà quelques nuages épars restent accrochés à des reliefs. En contrebas, sur la Jasse de Guissotte, là même où le Ponteils prend sa source dans les nombreuses tourbières, Jérôme aperçoit d’autres cervidés. On en distingue également sur les crêtes du côté du Col des Gavaches mais avec la distance qui nous en sépare, il est impossible de discerner de quels cervidés il s’agit. Ici, il y a des isards, des cerfs, des mouflons de Corse réintroduits ou bien encore des chevreuils, encore que les chevreuils en troupeau soient assez rarissimes. Tous sont très présents dans ce massif et j’ai même lu dans un récent « Pyrénées Magazine », que le Massif du Madres est le lieu des Pyrénées où les spécialistes en ont recensé le plus : 4.000 cervidés sont présents dans le Capcir selon la revue. Quand au bouquetin des Pyrénées, il y a déjà longtemps qu’il a disparu de nos montagnes, sa chasse ayant eu raison de sa robustesse légendaire. Les bouquetins que l’on pourrait voir ont été réintroduits eux aussi comme les mouflons et les marmottes, celles visibles étant d’origine alpine et réintroduite en 1948. Oui, le Massif du Madres est un haut-lieu de la faune sauvage et il n’est donc pas étonnant qu’on y ait aperçu des ours, des loups et que les chats sauvages y soient bien présents sans compter bien sûr les sangliers et les renards roux. Nous quittons le sommet du Madres et prenons la direction de son flanc nord-ouest que l’on appelle le Serrat des Clotes. Le sentier tout en descente est très bon et file agréablement au milieu d’une végétation rase faite de minuscules bruyères et de graminées naines. Ici, les seuls arbres sont quelques pins rabougris très disséminés. Malgré la qualité du sentier peu caillouteux et tout en descente, une fois encore je suis décroché, d’abord parce que Cathy marche à un rythme incroyablement rapide mais surtout parce que le petit vent glacial qui balaie la montagne me fait constamment pleurer. Mes yeux larmoient sans cesse et de ce fait, je suis dans l’incapacité de voir où je mets mes pieds.  Jérôme qui s’arrête régulièrement pour m’attendre ne comprend pas pourquoi je marche si lentement et je suis contraint de lui demander de s’arrêter pour lui expliquer. Après les avoir freinés dans les montées, voilà que maintenant je les retarde aussi dans les descentes. Je m’en veux. A la fin d’un dôme herbeux, le grand « V » bleu du lac de Puyvalador fait son apparition au fond de la verdoyante vallée de l’Aude. Au dessus de cette profonde vallée, les forêts domaniales étalent leur longue toison olivâtre. Un peu plus haut encore, tout n’est que minéralité. Devant nos yeux contemplatifs et dans une succession sans fin de sommets plus ou moins hauts, la chaîne pyrénéenne forme l’horizon. Parmi les quelques sommets que j’ai eu l’occasion de gravir, seule la pyramide du Carlit est vraiment reconnaissable. L’été est passé et a fait disparaître la quasi totalement des névés et seules quelques neiges éternelles subsistent anarchiquement sur les parties les plus élevées et les plus ombragées sans doute. Après être entrés dans une zone d’estives où quelques vaches somnolent, nous coupons une piste. Ici, les prairies essentiellement herbeuses laissent un peu de place à de petits bosquets plantés de pins. Un panonceau indicatif mentionnant Espousouille à 3h20 nous donne une petite idée du temps de marche approximatif restant. A cette altitude, quelques plantes fleuries font de la résistance. Après la grisaille d’hier, c’est un plaisir de découvrir quelques touches de couleurs : le rose des épilobes et de quelques gros chardons, la blanc ou le mauve d’œillets de Montpellier magnifiquement dentelés, le jaune et le bleu des aconits. Le sentier est plus caillouteux mais paradoxalement il file dans des décors plus charmants car moins monotones. Cathy vient d’arriver la première au petit abri du Refuge Oller (1.630 m) et elle semble bien décidée à poursuivre quand Jérôme et Fred l’arrêtent dans son élan car il est déjà 12h30 et leurs estomacs doivent certainement crier famine. Le mien aussi. Nous décidons de stopper là pour pique-niquer et pour moi c’est une vraie délivrance car en arrêtant de marcher mes yeux s’arrêtent aussitôt de larmoyer. L’endroit est agréable, herbeux à souhait et en plus les vues en balcon sur la vallée sont superbes.  Nous y restons environ une heure, la plupart du temps couchés, car l’herbe est tendre, le ciel est bleu et les rayons du soleil sont suffisamment chauds pour envisager un semblant de sieste. En quittant le refuge Oller, le sentier tout en descente entre immédiatement dans un sombre sous-bois et pour moi, l’aspect agréable est que mes yeux ne pleurent plus. Ici, aux Planches d’en Jaquet, on voit clairement qu’un palier végétatif vient d’être atteint. C’est d’ailleurs l’impression générale que l’on a car tout autour de nous, la forêt est omniprésente. Les bois où nous marchons sont plus denses, les arbres plus hauts avec de nombreux grands résineux mais aussi quelques hauts feuillus. Peu après, on entend le bruit d’un petit ruisseau qui s’écoule et depuis la Font de la Perdrix, c’est le premier « rec » actif que l’on rencontre. Un coup d'oeil sur mon bout de carte et c'est bien le Rec du Roc Mari, escarpement rocheux isolé en forme de protubérance et entourée de pierriers que nous avons longtemps aperçu sur notre gauche.  L’étroit sentier s’élargit soudain se transformant en un chemin bien plus praticable lequel devient très rapidement une large piste forestière. Là, nous sommes arrivés en surplomb de la cabane du Bécet (1.560 m). En observant la carte I.G.N, il est évident que quel que soit l’itinéraire que l’on va choisir pour rejoindre Puyvalador,  seules des pistes forestières nous attendent et parmi les deux possibles, toutes les deux se terminent sur la digue du barrage. Il y a celle filant vers Odello Réal et celle dite de Serrallongua que Jérôme a enregistrée dans son G.P.S et qui arrive directement au bord de l’Aude au lieu-dit le Pont de la Fargua.  C’est cette dernière que nous choisissons et bien que ne connaissant pas l’autre, autant dire que celle de Serrallongua porte parfaitement son nom. Je la trouve très longue et fastidieuse cette piste et sans doute que je ne suis pas le seul dans ce cas. Comme souvent et pour passer le temps, je photographe tous et n’importe quoi : vaches, fleurs, insectes et papillons, tout y passe. L’arrivée au barrage de Puyvalador réveille quelques récents souvenirs car il y a moins de 15 jours, j’y suis venu avec Dany pour une randonnée consistant à faire le tour de son lac. C’est donc tout frais et je n’ai plus rien à découvrir que je ne connaisse déjà. Seule la météo est plus favorable et le lac un peu plus plein que lors de notre récente venue. Je prends quelques photos. On traverse la digue du barrage, toujours occupée par une ribambelle de martinets puis l’on monte vers le village de Puyvalador que l’on rejoint très rapidement. Ici, pour l’avoir accompli en voiture, je connais la distance qu’ils nous restent à parcourir : 3 kilomètres mais essentiellement sur de l’asphalte et tous les quatre, nous avons horreur de ça. On quitte Puyvalador et sa charmante église en empruntant la petite D.32g se dirigeant vers le hameau de Rieutort. Nous y sommes attendus au gîte Le Moulin. Au travers de grandes prairies et des paysages très amples eux aussi, la petite route est moins lassante que je ne l’avais imaginée. Il faut dire que quelques petits rapaces planant dans le ciel attirent sans cesse l’objectif de mon numérique. Par chance, un d’entre eux se pose sur un pin.  15h50, en entrant dans Rieutort, j’ai le sentiment de pénétrer dans un village qui a été déserté de tous ses habitants. Personne. Tout est silencieux, Seuls le bruit du ruisseau de Cirerol et la gazouillis de quelques passereaux se font entendre. Heureusement, Alex et Sia, les propriétaires du gîte sont bien présents. Ils sont chaleureux et formidables avec nous. Le lieu est charmant et reposant, les chambres sont parfaites et le grand calme que j’avais observé à mon arrivée s’avère être un atout indéniable pour trouver le repos auquel certains d’entre nous aspirent, moi le premier. Après les douches indispensables, Cathy se repose dans sa chambre pendant que Jérôme et Fred profitent des chaises longues du jardin fleuri et ensoleillé. De mon côté, appareil photo en bandoulière, je pars à la découverte du village qui s’avère bien plus grand que je ne l’avais supposé. Il faut dire que si le hameau a vécu un exode rural au milieu du siècle précédent, il n’en a pas toujours été ainsi. La taille de certains bâtiments, école et mairie par exemples, sont là pour prouver que Rieutort a eu ses heures de gloire et un nombre d’habitants bien plus important que de nos jours. La soirée, ponctuée d’un succulent repas avec formule table d’hôtes est des plus agréables. Alex et Sia se mettent en quatre pour nous satisfaire. Alex, en plus de son labeur d'aubergiste, est un fou de nature, moniteur de ski et guide de randonnées à ses heures. C’était un fana de pêche en mer et en rivière et il aime beaucoup la photo. Sur les murs du gîte, on peut découvrir de nombreuses photos relatant ses exploits et ses trophées halieutiques. De ce fait, nous avons de nombreux atomes crochus pour nous entendre et aucun problème pour trouver facilement des sujets de conversation. Sia est plus timide, excellente cuisinière et très captivante également quand elle parle de gastronomie et de la vie au gîte qu’elle semble affectionner.  En plus des charmants propriétaires, un couple sympathique s’est joint à nous lors du repas. La femme écrit des romans et de ce fait, les causeries s’en trouvent facilitées. La fin de la soirée tire agréablement en longueur mais pour la plupart d’entre nous, la nuit précédente a été peu réparatrice et l’envie d’aller nous coucher arrive bien plus vite que nous le souhaiterions. Nous pensons déjà à la très longue étape de demain. Ajoutons à cela les 17 kilomètres de l’étape d’aujourd’hui, le bon air du Madres et du Capcir, un bon et vrai lit qui nous attend et tout est en place pour une nuit qui s’annonce bien plus douce et régénératrice que la précédente. 11 heures, la raison l’emporte et nous partons nous coucher car dès le lendemain, la plus longue et plus difficile étape de ce Tour du Capcir nous attend. 28 kilomètres pour atteindre les Bouillouses et surtout une très longue montée par la Vallée du Galbe jusqu’au Camporells. Adorant l’Histoire, la toponymie et n’aimant pas « marcher idiot », autant qu’il est possible, j’ai appris que Les Camporells étaient les « champs des rois ». Ces rois, c’était ceux d’Aragon et de Majorque qui avaient fait du Capcir leur lieu de villégiature et de Formiguères leur résidence d’été. En réalité, le village a surtout servi à soigner l’asthme dont souffrait le roi Sanche 1er, roi de Majorque de 1299 à 1324. Quant aux Camporells, c’était son lieu de prédilection pour venir y chasser les isards, les cerfs et autres chevreuils. Il est mort ici à Formiguères à l’âge de 48 ans. En 1920, le prince Albert 1er de Monaco a, à sa manière, perpétué cette tradition puisqu’il était également un habitué des lieux appréciant le secteur des Camporells qu’il avait loué pour venir y chasser et y pêcher. Avant de m’endormir, je me remets à penser à cette révélation que j’ai eu avec Blek le Roc. A ma mère bien sûr, puisque c’est elle qui m’a permis de lire ces bandes dessinées. Mes pensées s’enchainent les unes aux autres. Ma mère, mon enfance, Blek le Roc. Ma mère est dans un service spécialisé Alzheimer d’une maison de retraite depuis 5 ans déjà et c’est bien rare que lors d’une randonnée sur plusieurs jours, je ne pense pas à elle plusieurs fois. Plusieurs fois et le plus souvent avec tristesse,  tant je trouve la fin de sa vie si injuste. L’aspect solitaire de la randonnée et les efforts à accomplir me font souvent sortir de mes pensées habituelles et quotidiennes, et de ce fait, il m’arrive très souvent de songer au temps passé et aux êtres chers qui ne sont plus de ce monde. Ce monde, ma mère n’en fait déjà plus partie. Avec la maladie d’Alzheimer, elle a basculé dans un autre univers.  Grâce à elle et depuis hier, le nom de Blek le Roc est revenu à la surface de mes souvenirs. S’il n’est pas revenu dans la journée, c’est probablement parce que l’étape d’aujourd’hui ne présentait aucune difficulté. Désormais, je n’ai plus aucun doute, ce personnage de bande dessinée est définitivement lié à mon amour pour la randonnée pédestre. Je ne sais pas pourquoi, je n’y avais jamais pensé auparavant. Me remémorer tout ça et mon enfance me rend triste car bien sûr ça me renvoie à ma mère et pourtant je suis super heureux d’être là et de marcher avec Jérôme et ses amis Cathy et Fred. Alors j’essaie de penser à autre chose mais les souvenirs bons et mauvais reviennent sans cesse et parfois se chevauchent. Avant de m’endormir, me viennent à l’esprit des questions parfois stupides.  Je me demande par exemple si Blek le Roc aurait pu s’entendre avec les rois de Majorque, eux, dont le quotidien était les guerres pour conserver leurs pouvoirs, pour étendre leur immense royaume.  Je n’ai pas la réponse. Blek, c’était d’abord un héros au grand cœur, un Robin des Bois à la sauce américaine, un être épris de justice et de liberté dont le seul objectif était de vaincre les Anglais. Les « homards rouges » comme il les appelait à cause de leurs uniformes. Il se battait pour que les Etats-Unis accèdent à leur Indépendance et non pas pour étendre un royaume voire un empire. Suis-je encore éveillé ? Suis-je déjà dans un rêve ? Les pensées concernant mon enfance se mélangent au temps présent. Elles oscillent entre la chance que j’ai d’être là et les êtres qui m’étaient chers et dont j’aurais tant aimé qu’ils soient avec moi. Je voudrais bien n’être que positif mais Blek le Roc me ramène parfois à des souvenirs plus tragiques. Ma mère encore et toujours, mais mon frère aîné Daniel aussi. En pensant à Blek le Roc, je me souviens qu’il cachait mes bandes dessinées uniquement pour me taquiner. Il est décédé à l’âge de 46 ans et dieu sait si l’avoir avec moi au cours de cette randonnée aurait été merveilleux.

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Le Circuit des Hautes Garrotxes (1.917 m) depuis Sansa (1.410 m)

Publié le par gibirando


Diaporama sur la merveilleuse musique "Etude en E Mineur" de Francisco Tárrega jouée successivement par les guitaristes suivants :

Jurgen Schenk, Bernard Piris, Evgeniya Alaeva Kirilyuk, Manuela Grabsch, Miguel Mota Pinto, Peter Notfall, Samatha Muir,

la fin étant un mixage de ces différentes musiques toutes extraites du site "You Tube".

Le Circuit des Garrotxes (1.915 m) depuis Sansa (1.410 m)

Le Circuit des Garrotxes (1.915 m) depuis Sansa (1.410 m)

Pour agrandir les photos, cliquez dessus. 2 fois pour un plein écran.


 

Les personnes qui dans les topo-guides donnent des noms à des randonnées n’imaginent pas toujours l’importance que peut revêtir un simple intitulé. Exemple ici, pour cette randonnée, que j’ai intitulé «  le Circuit des Hautes Garrotxes (*) ». Il faut prononcer "garrotches". Elle existe, depuis très longtemps déjà, dans un petit fascicule intitulé « 32 randonnées pédestres en Capcir et Haut-Conflent » sous la dénomination « Du col de Sansa au col de Creu », et autant l’avouer cette désignation n’avait jamais aiguisé mon intérêt pour elle. De ce fait, je n’étais jamais allé plus loin que la simple lecture de son intitulé.  Pourquoi me direz-vous ? D’abord parce que je connaissais bien ces deux cols. Le premier pour y être passé à de nombreuses reprises lors de balades vers les sommets du Madres ou du pic de la Pelade puis encore lors d’un mémorable Tour du Capcir. Le second, je ne le connaissais que comme col routier, mais je l’avais toujours vu très fréquenté comme lieu de pique-nique dès les premiers beaux jours. Alors, j’avais imaginé cette randonnée comme une simple liaison de ces deux cols et de surcroît comme une rébarbatif aller et retour par des pistes forestières.  Rien de folichon en perspective. Force est de reconnaître que je me trompais sur toute la ligne ! Entre Haut-Conflent et Capcir, cette confidentielle et enclavée région des Hautes Garrotxes est un magnifique écrin naturel et ce « circuit » au départ de Sansa est un bijou de randonnée et voilà la raison pour laquelle, j’ai préféré lui donner un nom un peu plus attractif.  Enfin j’espère ? Tous les étages montagnards sont passés en revue et ce malgré des altitudes plutôt modestes oscillant entre 1.400 et 2.000 mètres. On y trouve bien évidemment tous les écosystèmes qui vont avec. Une couverture végétale et une biodiversité très variées et bien évidemment des paysages et des décors bien différents selon l’exposition au soleil. Et comme l’itinéraire passe d’un paysage à l’autre, d’un versant à l’autre, parfois au plus haut de la montagne, les panoramas y sont tout bonnement exceptionnels. Qui dit « confidentiel » dit « quiétude » et « solitude » et je vous garantis que sur ce parcours, ce n’est jamais la cohue. Comme déjà mentionné plus haut, le départ s’effectue du hameau de Sansa, direction le col éponyme par le Pla de l’Orri et les Estagnols. Le vallon qu’il faut remonter, c’est celui de la rivière de Cabrils,  alimentée ici par deux ruisseaux plus modestes que sont les recs de l’Oratori et des Manès. En réalité, sa vraie source s’écoule depuis le lieu-dit « Passeduc », à 2.284 m d’altitude, sur le flanc nord-ouest du pic de la Pelade et s’intitule le Rec de Pinouseil. Il rencontre un peu plus bas un bras du torrent « Coume de Ponteils ». Tous ses lieux, je les connais par cœur et font partie d’itinéraires vers le Massif du Madres ou le Pla des Gourgs., déjà expliqués dans mon blog. La rivière de Cabrils finit sa course dans la Têt à Olette. Au départ du hameau, deux alternatives se présentent : soit on emprunte immédiatement la piste qui monte vers le col de Sansa, soit on choisit le chemin qui se trouve sur la gauche en contrebas et qui est l’itinéraire proposé par le topo-guide évoqué plus haut. Nous avons fait ce dernier choix et malheureusement, nous nous sommes empêtrés dans les hautes herbes à la confluence des rivières évoquées plus haut. En me fiant à mon tracé G.P.S, nous sommes passés outre les hautes herbes et finalement nous avons atteint un premier panonceau mentionnant la bonne direction : « Col de Sansa 4,3 km – Pla de l’Orri 1,5 km ». Un coup d’œil sur la carte I.G.N pour constater qu’en prenant la piste, nous serions arrivés au même résultat sans galérer et sans détremper nos godillots. Désormais le chemin est bon et agréable car herbeux et fleuri à souhaits. Il s’élève tout doucement dans un décor étonnant où vieilles terrasses abandonnées se partagent l’espace avec de gros blocs de granite aux formes arrondies. Ici, le mot « garrotxe (*)» signifiant « terre rocailleuse et difficile » prend tout son sens (**). Le Pla de l’Orri est atteint et l’on y découvre l’étonnant cortal connu sous le nom de Delcasso et dont l’Histoire est contée dans l’encyclopédie Wikipédia au mot « cortal ». Ici, on peut poursuivre la piste directement vers le col de Sansa mais si vous ne connaissez pas le site des Estagnols, quel dommage d’y passer à côté sans apprécier ce petit endroit tellement charmant et blotti dans une clairière. Il est à 1,2 km seulement. Il faut suivre le panonceau directionnel et le chemin s’élève très vite en forêt. C’est le Bois de la Sourde. Une clairière plus vaste se présente et les Estagnols sont déjà là. Au loin, le Madres fait son cirque. Comme l’indique le patronyme « estagnols », il s’agit de deux petits étangs aux eaux bleutées. Un minuscule refuge les domine. On y trouve aussi un tipi où les enfants peuvent jouer aux Indiens. Pour y passer une nuit, il faut récupérer les clés à la Maison du Capcir à la Llagonne. Après cette jolie découverte, il faut rejoindre la piste commune avec la Tour pédestre du Capcir. On prend à gauche et le col de Sansa est à moins de 2 km. Les panoramas s’entrouvrent. Ils sont aériens sur le Vallon de Cabrils et si l’on se retourne, on peut découvrir le pic de la Pelade et ô combien sa  dénomination est si appropriée. Un vrai mont pelé !  Sa pelade serait assez ancienne car due à des coupes trop intensives des arbres pour la fabrication du charbon de bois. Mais le plus beau reste à venir. Au col de Sansa, on choisit la direction « Col de Creu 3,6 km – col des Agrellons 1,2 km » et même si elle est très bien mentionnée, attention aux étourderies car il y a tout de même six directions bien distinctes. La large piste forestière s’élève en deux lacets passant de l’ubac de Cabrils à l’adret de l’Aude, sans pour autant qu’une différence arbustive s’entrevoit. Ici, on chemine la belle et grandiose forêt domaniale de Cami Ramader surtout composée de pins à crochets, pins sylvestres et sapins mais aussi de quelques épicéas et mélèzes et de nombreux feuillus sur d’autres versants selon l’altitude, l’exposition et l’hygrométrie. Quand la piste devient plus rectiligne, il faut profiter des panoramas extraordinaires sur la Vallée de l’Aude et le Capcir. Ils sont très aériens et par temps clair, suffisamment lointains pour être époustouflants. Les bois, les prairies, les prés et les champs, ces derniers si renommés pour leurs patates, celles de Matemale, forment un patchwork chamarré. Le lac de Matemale apporte une touche de bleu dans toutes ces nuances olivâtres, rousses ou couleur paille. Les quelques villages ressemblent à des maquettes en modèles réduits et pour les plus petits d’entre-eux à des crèches.  Pour moi, de très nombreuses vues sont synonymes d’autres randonnées ou de lieux cheminés lors d’un Tour du Capcir, effectué en 2013 et en 4 jours. A hauteur du col des Agrellons (1.870 m) les panoramas disparaissent mais comme le chemin bascule très vite sur le versant opposé, on embrasse de nouveaux décors. C’est de nouveau le Vallon de Cabrils et les montagnes qui l’entourent mais sous d’autres angles, et beaucoup plus loin, ce sont les arides Garrotxes méridionales où les contrées creusées de multiples ravines forment l’essentiel du paysage. Encore plus loin, c’est le Massif du Canigou et les premiers hauts pics pyrénéens avec leurs têtes dépouillées et en dessous un long ruban de forêts émeraudes. Une fois encore, il faut profiter de ces vues incroyables car malheureusement, les fenêtres se referment très vite et l’itinéraire se dirigeant vers le col de Creu est essentiellement forestier. Comme les papillons sont légions, j’en profite pour prendre un peu plus de temps à les photographier. L’arrivée au Col de Creu (1.708 m) me confirme ce que je connaissais de lui : beaucoup de voitures et donc beaucoup de visiteurs. La plupart pique-niquent mais je suppose que ce n’est que la partie visible des activités pratiquées dans ce secteur. Rien de spécial ne nous retient alors on poursuit la boucle prévue. Elle file vers l’est en empruntant le D.4 sur 400 à 500 mètres puis à hauteur d’une table d’orientation et d’une croix, il faut quitter le bitume au profit d’un sentier qui longe un enclos se trouvant sur la gauche. Il s’agit de la piste DFCI C073. Ce chemin herbeux est très agréable car il nous change des pistes terreuses arpentées jusqu’à présent. Il l’est d’autant plus qu’il est souvent très bon, large et contrasté alternant des milieux bien différents, tout en offrant de jolies vues sur le Vallon du Rec de Railleu. Pour moi, cette portion du chemin présente un autre avantage qui est celui d’y maintenir une flore et une faune beaucoup plus concentrée que celles aperçues jusqu’à présent. A l’approche du col du Dragon, le chemin devient plus étroit et comme il se faufile au sein de hauts genêts et de quelques magmas rocheux, l’itinéraire devient plus alambiqué. Il reste praticable. Il faut prêter attention au balisage jaune encore présent mais pas toujours facile à repérer. Une échelle permet d’enjamber une clôture et peu de temps après le col du Dragon est atteint. Nous l’avions déjà découvert lors d’une autre balade intitulée « A la rencontre des cervidés ». Ici pas de dragon ni de cervidés mais la belle surprise d’y surprendre un sanglier solitaire. Une laie sans doute à cause de sa taille peu massive et de son groin très allongé presque similaire à celle d’un tapir, avec lequel j’y trouve une certaine ressemblance. Bien occupée à fouir la terre de son butoir, j’ai la quasi certitude qu’elle ne nous a pas vu et de ce fait, j’ai largement le temps de prendre plusieurs photos avant qu’enfin, elle devine notre présence et détale. Après le col, de superbes vues se dévoilent sur Sansa, magnifiquement dominé par la pic de la Pelade et le Puig d’Escoutou. On y distingue ses deux églises, étrange particularité pour un hameau qui n’a toujours compté qu’un nombre réduit d’habitants. La fin de la randonnée tout en sous bois et en descente nous paraît un peu longue et ce n’est qu’en atteignant la rivière de Cabrils que nous prenons conscience d’une arrivée imminente. Deux pancartes agrémentées de plans et incitant à se lancer à la recherche d’un passé évoquent la Molina Serradora, ingénieuse « scierie battante de Sansa » datant de 1826 et dont la fonction consistait à transformer en planches les arbres des Garrotxes. Il est presque 17h et le temps nous manque pour partir à la chasse aux trésors. On entre dans le village. Il nous semble désert. Alors on flâne dans ses ruelles pour en découvrir tous ces recoins, tous ses mystères jusqu’à tomber sur un vieux monsieur bien occupé à son jardin fleuri. La conversation porte sur ses magnifiques roses trémières aux couleurs si vives. Il nous invite à rentrer chez lui, histoire de nous offrir quelques graines des fameuses roses. Apparemment, il a envie de parler alors il enchaîne sur tous les travaux qu’il a été amené à réaliser dans sa maison, nous faisant visiter au passage l’ensemble des pièces.  De sa chambre à coucher jusqu’au salon, en passant par la cuisine, les toilettes et la salle de bains nous allons de manière assez surprenante entrer d’un côté de la maison et sortir de l’autre. Son épouse assise à la table du salon, bien occupée à « flécher des mots », ne semble pas plus surprise que ça de nous voir descendre tous les trois de la chambre à coucher. Son époux doit être coutumier du fait. Etrange, éphémère et si plaisante rencontre. Nous sommes entrés dans leur vie pendant quelques minutes et nous en sortons comme si nous nous étions toujours connus alors que l’on ne s’était jamais vu auparavant. Pourtant tout aurait pu être différent car Sansa est leur résidence secondaire et ô surprise, ils habitent la même commune que nous : Saint-Estève ! On se quitte en se promettant de se retrouver un jour ou l’autre en haut ou en bas de nos belles Pyrénées-Orientales. Le monde est petit mais les Hautes Garrotxes ont été grandes, suffisamment grandes pour que l’on ait pris plaisir à les cheminer tout au long de la journée. Suffisamment grandes pour qu’on ait envie d’y revenir pour une autre balade. Telle qu’expliquée ici, cette randonnée est longue de 14,5.km. Le dénivelé est de 507  mètres et les montées cumulées sont longues de 1.300 mètres environ. Carte I.G.N 2249 ET Font-Romeu – Capcir Top 25.

(*) Les Garrotxes, qu’il faut prononcer « garrotches », est une contrée très enclavée faisant partie de la région du Conflent. On peut dire qu’elle correspond en grande partie à la dépression géographique creusée par la rivière de Cabrils. En "Sciences de la Terre", on appelle cela un bassin versant. Comme toutes les vallées, elle est entourée de sommets plus ou moins hauts et de ravines secondaires séparées par des cols. Ses principales frontières naturelles sont d’autres vallées : au nord-ouest, la vallée de l’Aude dans la région du Capcir, à l’est, la vallée de la rivière d’Evol et au sud, la vallée de la Têt. 5 villages seulement y sont présents : Sansa, Railleu, Caudiès-de-ConflentAyguatébia-Talau et Oreilla. Les toponymistes semblent d’accord pour dire que le mot est formé  de la racine « gar » ou « car » signifiant « pierre » ou « rocher » et du suffixe « otxa » lequel ici doit être traduit en « terre ». Dans de très nombreuses langues ou dialectes et notamment pyrénéens, on retrouve ces suffixes (otx, otxa, ozt, ost, oust, os, oussa, osa, ossa, ousse, osse en français) qui ont sans doute une même origine et peuvent signifier au sens large, un « domaine »,  un « lieu », une « région » ou une « terre ». On les retrouve également comme suffixe dans des noms de familles mais c’est normal car très souvent aux temps anciens, on désignait une personne ou une fratrie par le nom du lieu où elle résidait. On note qu’en français, on trouve le verbe « garrocher » signifiant « jeter une pierre », lequel bien évidemment à sensiblement la même étymologie. Alors tous les toponymistes et géographes sont d’accord pour affirmer que "les « Garrotxes » désignent une terre rude, pauvre et rocailleuse, escarpée et difficile d’accès" (Joan Bécat 1984). «Les Garroches, chaos de pierrailles où l’on trébuche sur les galets granitiques, où l’on se coupe les pieds aux éclats de schiste : on ne peut rendre l’expression d’horreur avec laquelle ce nom est prononcé dans le haut Conflent » écrivait le géographe Maximilien Sorre dans « Les Pyrénées méditerranéennes ; étude de géographie biologique » en 1913. Je tiens également à préciser que c'est avec un grand intérêt et beaucoup de plaisir que j'ai lu le mémoire de Lenny Pol consacré aux Garrotxes, sans doute le document le plus complet consacré à cette superbe région sur le Net. Je l'en remercie.

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Si Cobazet m'était conté.......

Publié le par gibirando


Le récit que vous allez lire ci-après est l'histoire de Cobazet, domaine forestier situé dans la Haut-Conflent au pied du Massif du Madres entre la Vallée de la Castellane et celle d'Urbanya. Dans la Vallée de la Castellane, le village le plus emblématique est celui de Mosset,  inscrit parmi les plus beaux villages de France et ce récit est le résultat d'un magnifique travail de recherche et de rédaction effectué par un vrai mossétan. Ce mossétan, c'est Julien PUJOL, agriculteur, randonneur émérite, amoureux fou de son pays catalan et fervent adepte du yoga depuis de très longues années. C'est d'ailleurs par l'entremise d'une association de yoga que j'ai connu Julien, les randonnées pédestres nous ont bien évidemment naturellement rapprochés, nous avons appris à nous connaître et avec la gentillesse qui le caractérise, Julien m'a transmis ce récit et m'a autorisé à le publier dans mon blog "Mes Belles Randonnées Expliquées". Je ne peux bien évidemment que l'en remercier. D’abord parce que j’aime l’histoire mais surtout parce que tout comme lui je suis tombé éperdument amoureux de ce coin de montagne…….

Si Cobazet m’était conté…..
Je ne suis pas écrivain, je ne suis pas historien, je suis tout simplement un agriculteur qui a travaillé la terre pendant plus de 45 ans et étant toujours aussi amoureux de cette terre catalane qui m’a vu naître, je n’ai pas pu refuser à Amaury, notre ami ardéchois, le fait de coucher sur le papier quelques témoignages, quelque partage sur le vécu concernant le domaine de Cobazet, situé dans cette belle vallée de la Castellane, entre le Col de Jau et le si pittoresque village de Mosset, bien en face de notre Canigou. C’est pour cela que j’ai fait appel à la tradition orale avec les anciens qui ont sué sang et eau dans ces montagnes, avec tout ce que cela induit d’erreurs quant à des interprétations diverses pour le même évènement puisque la mémoire populaire n’a pas toujours la rigueur de l’histoire !!
Cobazet se prononce en catalan « coubazètt », ceci bien sûr en rapport avec la « cova » qui signifie « grotte », sous-entendant que sur les lieux, il y avait des avens qui ont été comblés par la suite et le « v »qui figure encore sur certaines cartes avec la dénomination « Covazet » devient « b » de par les mystères de la linguistique ! Le domaine de Cobazet, dont le propriétaire actuel est Groupama, décline bien en remontant le temps, l’économie agricole de cette vallée : c’était  de l’élevage et des cultures vivrières, puis l’exploitation de la forêt et enfin l’exploitation de la carrière de talc.
La première interrogation, à l’arrivée sur le corps de ferme du domaine se pose dès le seuil, à l’entrée du corps d’habitation : sur une pierre de granit sont gravés deux noms et une date : « PARES, LAVILA, 1862 ». Cette date permet de présumer que ce sont ceux qui ont été les constructeurs ou au moins les habitants de cet édifice (les métayers ?). Puisque cela portait le nom de « Métairie de Cobazet » et quelques recherches nous conduisent à Jean Parès, enfant de Mosset, qui nous donne la probable origine de cette pierre gravée : elle repose sur l’analyse des familles Lavila et Parès au 19ème siècle mais sans pouvoir remonter avec précision sur la date exacte de la construction de l’édifice : dans la suite du récit nous essayerons d’établir un lien entre ces familles et le propriétaire des lieux en 1862, Rémi Jacomy. La bâtisse était délabrée lors de son achat et il avait chargé un de ses commis, Louis Lavila, de procéder à sa rénovation. Celui-ci choisit un maçon marié à une de ses cousines Françoise Lavila, née Parès et nous pensons qu’il a voulu honorer ses beaux-parents en gravant leur nom dans le roc. Quant aux origines des habitants de la bâtisse, une voie sur laquelle je m’étais engagé s’est révélée être fausse : à savoir qu’un dénommé Jean-Baptiste Vila, marié en 1810 avec Anne-Marie Parès, possédait, au lieu dit Cobazet, une terre de 2 hectares (erreur suite confusion de noms entre Lavila en un seul mot et La Vila).
Revenons aux origines de propriété : une vaste propriété rurale dite « montagnes de Mosset » en nature de pacages, bois et forêt de pins, sapins, hêtres et chemins d’exploitation pour une superficie d’environ 1894 hectares ainsi que le domaine de Cobazet, composé d’une maison de maître, de granges et d’écuries, de champs, et de près pour un ensemble d’environ 91 hectares appartenait, entre autres propriétés, dont le site dit « le Caillau », jusqu’e 1861, aux descendants de la seigneurie du Marquis d’Aguilar. Cette famille, depuis 1675, régnait sur le territoire de Mosset jusqu’à la révolution de 1789.
Comme les descendants des d’Aguilar avaient émigré en Espagne en 1793, leurs biens ont été nationalisés et revendus aux enchères. Seuls la forêt et les vacants y ont échappé. Ils ont été attribués à Jean Gaspar d’Aguilar qui avait émigré bien avant la révolution. La commune de Mosset s’est opposée énergiquement à cette décision par voie de justice. Elle s’est ruinée en d’interminables procès jusqu’en 1811.
Localement, les délits forestiers sont de plus en plus fréquents. En 1806, les deux gardes forestiers de d’Aguilar sont assassinés au lieu dit Ladou. Leurs cadavres sont retrouvés deux semaines plus tard enfouis dans un four à chaux au Coll del Torn. Après enquête et jugements, le bilan est de sept inculpations : deux acquittements, quatre condamnations à 20 ans de fer à Rochefort et un fuyard.
A la suite des évènements qui s’ensuivirent, les héritiers revendirent ces biens précisés à celui qui fut un grand acteur du monde économique catalan dans les années 1860-1883, le maître des forges Rémi Jacomy qui était le gérant de la Société des Forges de Ria. C’était un véritable capitaine d’industrie qui fut le promoteur d’une dizaine de haut fourneaux à bois et ceci explique l’achat du domaine de Cobazet pour l’exploitation de ses forêts pour la fourniture du bois et du charbon de bois nécessaire à son industrie.
Le débardage se faisait alors par ce qu’on appelait « le chemin des Traginers » Le Caillau – Cobazet – le col d’el Torn – le col de las bigues – Estardé. Par la suite nous verrons que c’est toujours sur cette rive droite de la Castellane que fut construite la ligne de chemin de fer. C’est ce qui s’appelait alors « le trajet libre » entre le col de Jau et Prades, de par une convention passée entre Jacomy et la commune de Mosset : « Monsieur Jacomy autorise la commune de Mosset et ses habitants à passer à pied, à cheval et en voiture sur le chemin qu’il a tracé sous la condition, à moins d’autorisation spéciale, d’y passer avec des troupeaux, du minerai ou du charbon de bois » (concurrence oblige !).
Cette convention (Jugement du 16 Juillet 1861) met fin au conflit qui oppose la communauté de Mosset aux d’Aguilar depuis des siècles. On sait que les habitants pouvaient prélever du bois de chauffage et de construction et défricher les vacants sur tout le territoire de la baronnie. Ce droit global sur tout le territoire est transformé par cantonnement : Jacomy est affranchi de toute servitude sur la partie haute de la forêt (sauf le droit de passage indiqué ci-dessus). La commune devient propriétaire des vacants et de la partie basse de la forêt, c’est-à-dire, grosso modo, de tout ce qui est au-dessous d’une ligne qui va du col de Jau à Estardé.
Ensuite l’évolution technique et économique fait que les sociétés de Rémi Jacomy sont en faillite en 1882 et tous ses biens sont finalement vendus aux enchères en 1883.
Commence alors une autre aventure pour les habitants de la vallée de la Castellane : précédemment, c’était l’exploitation du bois de ses forêts qui primait. Avec l’achat, le 4 juin 1883 par le Baron de Chefdebien c’est la grande aventure de l’exploitation de la carrière de talc qui commence. Le talc, tiré de cette roche tendre appelée « stéatite » servait aux usines de Chefdebien pour élaborer, en tant que matériau de charge, la fameuse poudre cuprique CCD (carbonate de cuivre déployé) utilisée pour combattre le mildiou. Plus tard l’arrivée des fongicides de synthèse fit tomber celle-ci dans l’oubli, mais pendant des décennies ce furent, avec le soufre pour combattre l’oïdium, les produits vedette de la pharmacopée viticole !
Commence alors l’éreintant travail de la mine : dans le journal des Mossétans, nous suivons l’évolution de ce chantier. Qui étaient ces travailleurs de la carrière de talc, ces mineurs qui provenaient de Mosset de Campôme mais aussi des Italiens et des Espagnols ? De 4 à 7  ouvriers en 1887, ils sont de 14 à 20 en 1900 et une quinzaine en 1937. Voici rapidement esquissées leurs conditions de travail. Ils travaillaient du lundi matin 6 heures jusqu’au samedi soir 18 heures. Ils passaient donc le dimanche à Mosset qu’ils quittaient à pied le lundi vers 2-3 heures du matin pour arriver à Cobazet. Là, une petite locomotive à vapeur dont nous reparlerons les amenait au Caillau qui servait alors de dortoir et de cantine, par conséquent, le Caillau portait le nom de « maison des mineurs » (à l’inverse des bâtiments de Cobazet, dont on ne trouve pas l’année de construction, cette « maison des mineurs », fut construite en 1870). Ces mineurs étaient soumis à de conditions de travail draconiennes, un quart d’heures de retard à l’arrivée sur le chantier et c’était la perte d’une demie journée de salaire.
Ils extrayaient ce minerai, la stéatite, et le chargeaient sur des wagonnets tirés par les vaches, sur la voie ferrée à voie étroite qui l’amenaient au Caillau, ensuite c’étaient les chevaux ou  des mulets qui prenaient le relais pour l’amener à Estardé. Par la suite, le Baron s’équipa de cette petite locomotive à vapeur fabriquée par Decauville et qui fut pompeusement baptisée « stéatite ». En 1950 la carrière fut fermée et elle fut rapatriée aux établissements de Chefdebien à Perpignan puis vendue à la ville de Perpignan en 1954.
Le talc était transporté à Prades par la route sur les chariots tirés par des bœufs. Le baron de Chefdebien a expérimenté plusieurs autres moyens de transport, sans succès, par plan incliné au-dessus de Campôme, puis par câble entre Cobazet et la Forge haute jusqu’en 1950 environ.
Etienne Margaill, ancien mineur, mémoire vivante de ce qui fut la grande aventure de la carrière de talc, a les yeux qui brillent lorsqu’il évoque la descente vers l’Estardé, juché sur la cargaison de ces wagonnets tirés par un mulet et dont on pensait qu’ils allaient verser d’un moment à l’autre dans le ravin, car les déraillements étaient monnaie courante, ainsi que le relate un rapport de la gendarmerie de Prades lorsqu’un ouvrier fut blessé après une chute alors que le préposé au serre-frein n’était pas intervenu assez tôt !!!
Les mineurs de cette carrière de talc vécurent des moments très forts au cours de la guerre 39-45. Pour échapper au STO (service travail obligatoire) beaucoup de jeunes gens s’embauchaient comme mineurs, ce qui les dispensait de partir en Allemagne, et ipso facto beaucoup faisaient partie du maquis. Plusieurs de ces maquis cohabitaient dans la région du col de Jau, et le 12 août 1944 il y eut une rencontre, au Caillau, entre les différentes sensibilités des mouvements de la Résistance pour mettre au point le programme de la Libération. Y étaient, entre autres, les guérilleros FT¨P (Francs-tireurs et partisans) qui vivaient à la Moulinasse, en bas du col de Jau, après leur départ de Valmanya à la suite de l’attaque du village par les Allemands et c’étaient des combattants redoutables qui s’étaient endurcis au combat pendant la guerre d’Espagne.
Ici, il convient de relater le drame arrivé au curé de Mosset, Isidore Pailler. Ce prêtre, d’origine espagnole, et soupçonné de sympathies franquistes, fut abattu à la Moulinasse et non au Caillau comme la vox populi le relate parfois : quelles en sont les raisons ? Des Mossetans livraient des vivres aux maquisards, ce prêtre, embusqué derrière la moustiquaire, prenait les noms, pour cela il fut arrêté et amené à la Moulinasse. Là, les avis divergent, certains disent qu’il fut jugé sommairement et fusillé et d’autres parlent « d’accident » !! Il aurait été confié à la garde d’un jeune maquisard, aurait tenté de s’enfuir et abattu au cours de cette tentative… Aucune guerre n’est propre !!!
A la fin de la guerre, ce fut la Société des mines de Carmaux, qui continua quelques temps l’exploitation de la carrière mais, en Ariège, à Luzenac une autre carrière de talc signait l’arrêt de mort du Caillau et ce fut la fin du talc de la Castellane, un bail emphytéotique de 99 ans ayant été signé, ceci bien sûr pour éviter toute concurrence.
En 1956, La famille de Chefdebien décide alors de vendre le domaine. Celui-ci fut proposé à la Mairie de Mosset. Le conseil municipal se réunit  et c’est par une seule voix de différence à la suite du vote que cet achat fut refusé ! Ce fut alors la Caisse Centrale des Assurances Mutuelles Agricoles qui s’en porta acheteur (tout organisme d’assurance se doit d’avoir dans son patrimoine de quoi pouvoir répondre aux éventuels sinistres). Ce fut le Directeur Général, Monsieur Jacques de ROQUELAURE qui mena toute l’affaire et fit attribuer 3 parts  aux caisses locales de Prades, d’Ille et de Vinca et ipso facto, ce fut la caisse départementale qui en devint le gérant. Ce fut d’abord l’exploitation des forêts par l’ONF, qui fut ensuite confiée à la COFOPYR pour revenir à l’ONF, celle-ci particulièrement efficace pour la gestion de la chasse. Il convient de signaler que grâce, entre autres, à Jean Maurice MESTRES, il y a une excellente collaboration entre les chasseurs et le propriétaire des lieux.
Par contre, un autre bail emphytéotique avait été signé entre Groupama et la Mairie de Mosset  pour les bâtiments du Caillau et une petite bande de terre y attenant, ceci pour la somme de 1euros par an. Ceci étant une côte mal taillée, l’Assemblée Générale du 30 octobre 1998, sous la Présidence de Roger PAILLES, décidait de vendre le refuge du Caillau à la commune de Mosset.
Voici rapidement brossé l’historique du domaine de COBAZET, cette perle de notre pays, très chère aussi bien aux habitants de Mosset, qu’à tous les catalans ainsi qu’aux amoureux de nature et de randonnées et j’espère que nous ne verrons jamais des capitaux étrangers venir s’en emparer !!!
Merci à Etienne MARGAILL, Jean PARES, Jean-Maurice MESTRES, Pierre CAILLIS dont je n’ai fait que retracer les paroles ou les écrits.
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Le Tour du lac de Puyvalador depuis Réal

Publié le par gibirando


Ce diaporama est agrémenté de musiques interprétées par le duo "Secret Garden". Elles ont pour titre : "Ode To Simplicity", "Heartstrings", "Windancer" et "Passacaglia".

Si vous aimez les petites randonnées pédestres pas trop difficiles et que vous n’avez jamais fait le tour du lac de Puyvalador à pied, je vous conseille vivement cette courte et agréable balade dont le départ s’effectue depuis le joli village de Réal. Contrairement à nous, choisissez de préférence un jour ensoleillé où le lac est plutôt plein car c’est bien plus joli et filez vers cette magnifique région qu’est le Capcir. Dès le départ, une grenouille rousse nous raconte l’histoire de cette prairie humide sur quelques panonceaux très ludiques qui ont été judicieusement placés sur le sentier qui file parallèle à l’Aude, qui n’est ici qu’un étroit cours d’eau. Ces panneaux, très intelligemment présentés en « braille » pour les malvoyants, mais également en catalan et en français, permettent d’en savoir un peu plus sur la faune et la flore que l’on est à même de découvrir ici au bord du lac. Guère plus loin, un observatoire est là pour nous faire découvrir les éventuels oiseaux limicoles et échassiers qui sont amenés à passer et à séjourner dans ce biotope remarquable. Plus loin, le saisissant barrage est là pour nous donner une autre idée de cette retenue d’eau où s’ébrouent les colverts, où planent les hirondelles, où plongent les cincles, le tout sous le regard placide de nombreux bovins mais sous celui plus inquisiteur de nombreux rapaces. A l’entrée du barrage, c’est un autre regard qui accueille les visiteurs, celui figé pour l’éternité de Joachim Estrade, dont l’effigie trône au milieu d’une monumentale stèle élevée ici en souvenir de cet immense ingénieur des Ponts et Chaussées. Il faut avouer que son nom n’est pas resté dans les annales de l’Histoire et ses prouesses hydroélectriques sont bien trop souvent méconnues, Et pourtant, c’est grâce à ce grand précurseur dans le domaine de l’électricité et de l’hydroélectricité que l’on doit, entre autres nombreuses créations, l’arrivée du premier éclairage public dans l’Aude et les Pyrénées-Orientales. On quitte le visage impassiblement métallique et verdâtre du grand entrepreneur pour franchir le barrage sous les voltiges incessantes des innombrables hirondelles qui ont élues domicile dans les murs de l’édifice. Le sentier, désormais commun avec le G.R.P du Tour du Capcir, grimpe vers le tranquille village de Puyvalador que l’on traverse en quelques minutes seulement. On laisse l’église du village sur la droite et l’on poursuit l’itinéraire sur l’asphalte en empruntant la petite route départementale D32g qui file vers le hameau de Rieutort. Au bout de 600 mètres environ, un panonceau indique de partir en gauche et dans les prés en direction de deux nouvelles découvertes que sont les ponts dits « romains » de la Polideta et de celui de les Molines. En réalité, si ces deux ponts n’ont de romains que le nom et ils n’en demeurent pas moins qu’ils enjambent depuis des lustres deux torrents de montagne que sont respectivement le Rec de Cirerol et le Galbe. Bien plus réputé que le premier, le Galbe est surtout connu pour sa merveilleuse vallée qu’empruntent les randonneurs du Tour du Capcir, vallée au bout de laquelle se trouve les « fameuses pierres écrites », insolites prétextes à une excursion pédestre printanière ou estivale. Peu après le pont de les Molines, on quitte le G.R.P du Tour du Capcir en direction d’un autre pont, celui où passe la D.118 qui relie Puyvalador à Formiguères. On traverse la route pour reprendre la direction du lac en longeant le delta du Galbe qui s’élargit amplement en atteignant le réservoir. Il faut dire que le lac a été presque asséché ces jours derniers et ce vide laisse apparaître de grandes plages de sables, de graviers et de galets emportés là par le fougueux torrent. Ici, on regrettera que le sentier s’écarte puis s’éloigne du bord du lac mais en contrepartie, on va successivement traverser un petit bois de résineux puis de feuillus où virevoltent de nombreux passereaux, des prés où paissent des vaches bigarrées, des petites zones marécageuses que l’on traverse à l’aide de pontons opportunément placés. Pour refermer cette jolie boucle donnée pour 2 heures, nous en avons mis exactement le double, arrêts inclus. Et quand Réal est en vue, on regrette déjà que la balade tire à sa fin. On ne quittera pas le village sans visiter ses maisons, ses ruelles et surtout sa belle église romane dont la première mention écrite date de 893. Elle est dédiée à Saint Romain d’Antioche. Un petit saut en voiture est nous voilà déjà à Odeillo de Réal, hameau dont l’histoire est d’une incroyable richesse tout comme les Angles où nous terminerons notre voyage en Capcir par une visite de sa partie la plus ancienne et la plus pittoresque.   Carte IGN 2249 ET Font-Romeu - Capcir Top 25.

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Le Pic de la Pelade (2.370 m) et la Coume de Ponteils depuis le Col de Sansa (1.775 m)

Publié le par gibirando


Pour agrémenter ce diaporama, j'ai choisi 4 très belles chansons de Johnny Hallyday. Elles ont pour titre et par ordre d'apparition : "L'hymne à l'amour", "Requiem pour un fou""Je Te Promets" et "Quelque chose de Tennessee" chantée avec Florent Pagny. La qualité du son parfois médiocre vient du fait que certaines chansons ont été enregistrées lors du "Live Bercy" en 1995.

 


Pour agrandir les photos, cliquez dessus. 2 fois pour un plein écran.

Peu connu et donc bien moins prisé que son frère jumeau le Madrès, le Pic Pelade (2.370 m), entre Capcir et Haut-Conflent, n’en est pas moins un extraordinaire belvédère à 360 degrés sur une immense partie des Pyrénées-Orientales et bien plus loin encore. Ce manque de reconnaissance, il le doit sans doute au fait qu’aucun sentier balisé n’y mène et contrairement au Madres, situé lui sur le Tour du Capcir, il ne bénéficie pas de cet avantage d’être positionné sur un itinéraire reconnu d’un grand nombre de randonneurs. Pourtant croyez-moi, son accession se mérite car son ascension est autant sportive, sinon plus, que son acolyte tout proche. Quant aux merveilleux panoramas qu’il offre depuis son pinacle, peu de sommets en Roussillon peuvent rivaliser en ampleur et en splendeur. Comme pour le Madres, que j’ai déjà décrit dans ce blog, le départ s’effectue depuis le Col de Sansa (1.775 m) que l’on rejoint par une longue piste forestière qui démarre entre les jolis hameaux de Vilanova et du Réal juste après Formiguères quand on arrive de Mont-Louis. On laisse la voiture au col et on démarre cette longue boucle que je vous propose en empruntant la piste forestière qui entre de plein pied dans la forêt domaniale de la Coume de Ponteils. Car outre le Pic Pelade, c’est bien la découverte de ce vallon tout entier, à la flore et la faune remarquable et exceptionnelle, que je vous propose avec cette jolie balade. Au départ, cette piste est une variante du Tour du Capcir, balisée en jaune et rouge. Elle monte au Madres, direction le Refuge des Estagnols. D’abord en sous-bois, très rapidement, le chemin s’entrouvre sur la droite sur cette splendide contrée du Haut-Conflent que l’on appelle les Garrotxes. En y  prêtant attention, on remarque au fond du vallon verdoyant, le clocher d’une église et quelques toitures.  Ce hameau, c’est Sansa que j’ai eu l’occasion de vous présenter dans mon blog dans deux belles randonnées intitulées « A la rencontre des cervidés de Railleu à Sansa » et « Le Circuit des Hautes Garrotxes ». Très vite, le Pic Pelade apparaît lui aussi dans le paysage. Sommet très arrondi, il paraît débonnaire mais ce n’est qu’un leurre. Il porte bien son nom de « Pelade » car à part quelques résineux qui colonisent ses versants les plus bas et un peu son flanc nord, le sommet, lui, ressemble à une calotte d’une extrême aridité. Au bout de 1.500 mètres, on laisse sur la gauche le sentier jaune et rouge du Tour du Capcir et l’on poursuit la piste qui se faufile au sein de la superbe forêt domaniale. Cette piste forestière, on ne va plus la quitter jusqu’à son extrémité en prenant soin  de rester à gauche et d’éviter les pistes secondaires qui descendent soit vers les Estagnols soit vers d’autres culs-de-sac. La piste se hisse légèrement puis finit par déboucher dans une très belle et verdoyante clairière (1.891 m). On est au pied même du Pic Pelade qui apparaît tout en haut complètement dénudé au dessus d’une longue frange boisée. On l’a bien compris, le vrai dénivelé comme ici. On prend le large chemin herbeux qui part à gauche et l’on poursuit jusqu’à rencontrer le Rec de Pinouseil, étroit torrent qui descend directement de la montagne. On grimpe d’abord dans un bois par une sente qui suit la rive gauche orographique de ce petit ruisseau. Ce dernier va nous servir de fil d’Ariane dans notre ascension vers le Pic Pelade. Quand le ru se termine, nous, on continue tout droit dans la pelouse. Après une courte montée de 1.500 mètres environ pour un très raide dénivelé d’à peu près 400 mètres, on atteint la crête et le collet de Passeduc (2.284 m) où des vues époustouflantes s’étalent à perte de vue. Mais notre objectif n’est pas encore atteint et sur notre droite, à environ 350 mètres de distance, le Pic Pelade reste plus que jamais à conquérir. Encore, 90 mètres d’un dénivelé à parcourir au milieu d’un véritable paysage lunaire, c’est dans cette montée qu’on comprend mieux la dénomination donnée à ce pic essentiellement caillouteux. Mais quel spectacle une fois le sommet atteint ! On ne regrette pas et on oublie même cette difficile grimpette que l’on vient d’accomplir car de tous côtés des panoramas à couper le souffle se dévoilent : de la Méditerranée, en passant par la plaine du Roussillon, le sombre Mont Coronat  (toujours agréable à mes pensées quand je l’aperçois : http://gilbert.jullien.pagesperso-orange.fr/DES_MERVEILLES0.htm ), le boisé Puig d’Escoutou, l’incontournable Canigou et les autres hauts sommets du Conflent, de Cerdagne et du Capcir jusqu’aux lointains pics ariégeois, c’est un ronde étourdissante de paysages. D’ici, le Madres, à quelques encablures et culminant pourtant à 2.469 mètres, ressemble à une simple barre rocheuse insignifiante et écrasée où s’accrochent encore quelques névés. A nos pieds et au bout d’une descente vertigineuse, un petit village paisible et qui semble perdu dans cette immensité, c’est celui de Railleu. En raison de ce grandiose tourbillon d’ouvertures et de vues, un arrêt collation ou même un pique-nique plus consistant au sommet du Pic Pelade s’impose. En effet, cet arrêt permet d’apprécier à leurs justes valeurs tous ces splendides panoramas même si, vous l’avez bien compris, ma randonnée ne s’arrête pas là pour autant. Quand on redescend du Pic Pelade, on reprend la direction du collet de Passeduc puis celle des Mouillères et du Pla des Gourgs. Sur ce vaste plateau herbeux et mouillé car ici, les tourbières et les sources  sont légions, il n’y a pas de véritables chemins mais simplement des caminoles, ces petits sentiers étroits creusés par les sabots des nombreux bestiaux qui sont à l’estive. Il faut néanmoins les emprunter au départ en prenant soin de suivre quand on les voit,  quelques piquets sans clôture plantés de-ci de-là au milieu des cailloux, des tourbières et d’une rase végétation. En arrivant au Roc des Gourgs, mot qui se traduit par gouffres, trous d’eau, mares, étangs ou bien encore lacs (on l’écrit aussi gour et en occitan et en catalan on l’écrit gorg), on est au bord d’un incroyable ressaut d’un cirque sans doute glaciaire aux temps anciens car très érodé et formé d’impressionnants éboulis et pierriers. Au fond de ce cirque, un magnifique petit lac bleuté émerge dans cet environnement minéral et forestier. Il s’agit du Gorg Nègre ou Lac d’Evol qu’on ne va pas se lasser d’admirer en longeant la crête est de ce vaste Pla des Gourgs. Chemin faisant, on arrive au Refuge CAF  près de la Font de la Perdrix. Cet abri, que l’on l’appelle le refuge de Nohèdes ou de la Perdrix, est très utile pour les randonneurs qui arpentent le Tour du Capcir ou d’autres circuits locaux. Il est construit en dur avec une magnifique vue sur le lac et permet d’accueillir une douzaine de personnes environ. Sur le chemin qui est désormais balisé en jaune et rouge et qui se poursuit toujours sur la crête et derrière le refuge, une autre surprise nous attend sous la forme de deux autres lacs qui apparaissent au fond d’un deuxième cirque. Ce sont les Gorg Estelat ou Lac de Nohèdes et le Gorg Blau. Le Gorg Estelat est plutôt bleuâtre et le Gorg Blau est plutôt verdâtre. Ils doivent sans doute leur couleur particulière à un rythme différent de l’eutrophisation de leurs milieux aquatiques. L’eutrophisation est une dégradation  liée en général à un apport trop important de nutriments qui accroît la production d’algues et par là même, modifie la couleur des eaux d’un lac. Après cette splendide et nouvelle  découverte, il est temps de quitter ce plateau  et de retourner vers le Col de Sansa. On traverse le Pla des Gourgs en suivant le balisage jaune et rouge et en évitant d’emprunter l’autre chemin lui aussi peint en jaune et rouge qui va vers le Clot Rodon et le Madres. La sente descend dans le vallon où coule la Coume de Ponteils, agréable petit torrent qui chante et enfle au fil de la déclivité. On redouble de vigilance car si le balisage jaune et rouge est bien présent, il n’est pas toujours évident à suivre en raison de la topographie du terrain, d’autant que d’autres sentiers se présentent. On laisse le Madres et le Roc Nègre derrière soi et on descend dans la rocaille jusqu’à couper une première clairière à la Jasse de Guissotte puis une deuxième au Pla de Gril où l’on enjambe le torrent qui s’est bien élargi. Notre principal objectif le Pic Pelade que l’on avait perdu de vue depuis longtemps fait sa réapparition dans le paysage encore plus chauve que jamais. Après cette longue descente, on atterrit sur la piste  forestière prise ce matin. Au milieu des pins à crochets et d’une flore exceptionnelle où virevolte une multitude de papillons, on aboutit au Col de Sansa où l’on retrouve la voiture. On consacrera une journée à cette boucle d’environ 17 kilomètres car le but n’est pas de speeder mais d’apprécier à leurs justes mesures toutes ces découvertes que je viens de décrire. Ce circuit est à faire de préférence au printemps ou en été par grand beau temps ou avec une tramontane qui va chasser tous les nuages. Il faut bien s’équiper avec de bonnes et vraies  chaussures de randonnées sans oublier un vêtement chaud. Un GPS n’est pas indispensable pour ceux qui savent lire une carte IGN et savent parfaitement s’orienter avec. Pour les autres et ceux qui en possède un, je conseille de le prendre avec de préférence un tracé préalablement enregistré. En effet le Massif du Madres, qui subit à la fois les influences méditerranéennes, atlantiques et montagnardes, est très capricieux sur le plan météorologique et est très connu pour ses sautes d’humeur aussi soudaines que violentes qui peuvent engendrer des brouillards à couper au couteau. Alors en cas de changement de temps, la prudence doit être de mise ! Carte  IGN 2249 ET Font-Romeu-Capcir Top 25.

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Le Balcon d'Urbanya (1.535 m) depuis Nohèdes (942 m)

Publié le par gibirando

Dans un précédent article, j’avais déjà évoqué ces deux magnifiques villages perdus du Roussillon que sont Nohèdes et Urbanya. J’avais longuement expliqué les nombreuses possibilités de randonnées qui y avait dans ce secteur avec des petites balades de quelques heures jusqu’à des sorties de 2 jours pour ceux qui gagnés par la montagne auraient été tentés de se rendre à Callau. Cette fois, bien que partant toujours du même endroit, parking et hangar situés 500 mètres avant Nohèdes sur la D.26, il va être surtout question de l’autre village, c'est-à-dire celui d’Urbanya ou Orbanya en catalan. Comme souvent, ce village du Conflent s’est peu à peu construit autour de son église, dédiée ici à Saint-Etienne, elle est de style roman et date du 12eme siècle. Lors de cette longue boucle, cette église, vous aurez l’occasion de la côtoyer mais ce ne sera que très tard quand vous serez sur le chemin du retour. Pour l’instant, il va vous falloir atteindre le col de Marsac (1.056 m) et emprunter le chemin du Tour du Coronat, magnifique et pauvre tour qui va vous mener dans un premier temps jusqu’au col de Tour (1.535 m). Je dis magnifique tour car j’ai eu l’occasion et le plaisir de l’arpenter dans son intégralité en 2007 et j’évoque ce récit dans mon site perso :

http://pagesperso-orange.fr/gilbert.jullien/DES_MERVEILLES0.htm

et pauvre, parce que ce Tour du Coronat, délaissé depuis quelques années par la FFRP,  mériterait bien une réhabilitation, tant il est agréable à cheminer.  Mais revenons à nos moutons que vous aurez peut-être l’occasion de rencontrer ici car le pastoralisme y est encore présent grâce à quelques éleveurs qui occupent la Réserve Naturelle.  Ce chemin, je l’ai appelé le « Balcon d’Urbanya » car comment l’appeler autrement tant il reflète cette réalité. En effet, toute la journée et en permanence, vous surplomberez soit le vallon où coule la rivière d’Urbanya soit le village lui-même que vous aurez très souvent dans votre champ de vision. Après le col de Marsac, le chemin n’est que larges pistes, il est donc très roulant comme disent les cyclistes, assez simple à cheminer mais les pistes sont si nombreuses à cet endroit qu’elles méritent tout de même un peu d’attention au risque de s’égarer. Une carte IGN est donc recommandée et un GPS n’est pas superflu, notamment si le brouillard vient à se lever. Je vous conseille également de faire très attention aux clôtures électrifiées présentes ici car je me souviens avoir pris  « une castagne mémorable » qui m’a électrocuté du bras jusqu’au cou et au bas ventre en passant par la poitrine. Sinon, le chemin est contrasté et donc très plaisant à sillonner, car il alterne les vues sur de magnifiques et grandioses panoramas, vers la plaine du Roussillon et le Canigou notamment au travers de petits sous-bois de feuillus variés, de grandes hêtraies et de forêts de grands conifères. Au col de Tour, vous commencerez à avoir de magnifiques panoramas avec des horizons sur les massifs du Coronat et du Madres. Il faut prendre à droite la piste qui descend simplement vers le col de les Bigues (1.359 m). A ce col, vous aurez deux possibilités pour descendre sur Urbanya selon l’embroussaillement du chemin. La dernière fois, au col de Bigues, le chemin direct était trop embroussaillé et nous avons du poursuivre jusqu’à celui du Clot de Baro (voir sur ma carte). Dès que vous aurez quitté le large chemin, il  faut descendre en longeant le petit ravin du Correc du Serrat de les Bigues, en faisant bien attention de rester toujours sur son côté gauche. Ce sentier est parfois balisé en bleu mais ne suivez pas ce balisage qui quelquefois vous entraîne par erreur au fond du Correc. Suivez le balisage jaune qui, sans souci, va vous amener à Urbanya, village que vous devriez avoir largement le temps de visiter. Après Urbanya, empruntez la piste terreuse qui passe devant l’église et le minuscule cimetière et ne la quittez plus jusqu’au col de Marsac en évitant à nouveau de vous égarer sur les mauvaises pistes qui vous ferez tourner en rond ou vous perdre. Evitez aussi, la petite sente décrite sur les cartes qui part directe du lieu-dit La Devesa vers le col de Marsac car elle est depuis quelques années quasiment impraticable hormis peut-être pour quelques chasseurs du coin qui la connaissent par cœur. Au col de Marsac, vous n’aurez plus qu’à reprendre la direction de Nohèdes. Cette longue randonnée d’environ 25 à 26 kilomètres peut-être faite au printemps, en été et même en hiver, par les plus sportifs et si la neige est absente il va de soi, mais personnellement c’est en automne que je la préfère. A cette époque, on a droit à une palette de bruns, de  jaunes, d’oranges, de rouges et de verts qui, croyez-moi, ne laisse personne indifférent ! Carte IGN 2348 ET Prades-St-Paul-de-Fenouillet Top 25.

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Le Madres (2.469 m) en boucle depuis le col de Sansa (1.775 m)

Publié le par gibirando

 

Ce diaporama est agrémenté de la musique "Il Mio Nome è Nessuno" de Ennio Morricone, bande originale du film de Tonino Valerii sur un scénario de Sergio Leone dont le titre en français est "Mon Nom Est Personne"


Avant que l'hiver ne s'installe définitivement, j'avais envie de faire une belle randonnée et si possible en altitude. Par chance, en ce dernier samedi d'octobre, la météo annonce une splendide journée et mon choix se porte sur le Madres (2.469 m) depuis le col de Sansa (1.775 m). Depuis longtemps, plusieurs amis randonneurs me parlent de ce beau parcours et si je connais très bien le Madres depuis le col de Jau  et le vallon de la Balmette pour l'avoir réalisé à plusieurs reprises, cette boucle et ce secteur en général me sont totalement inconnus. Seul inconvénient, je me retrouve tout seul mais l'occasion est trop belle ! Direction le Capcir, et plus particulièrement Formiguères puis les hameaux de Vilanova et du Réal où une bonne piste monte jusqu'au point de départ. Tout en montant, un soleil de plomb illumine déjà le splendide lac de Puyvalador. 10 heures, voilà le col de Sansa, je laisse la voiture, harnache mon sac à dos, fourre mon petit appareil photo numérique dans une poche et analyse encore une fois ma carte IGN et mon GPS. La piste est là qui file droit direction nord-nord-est. Au bout d'un moment je délaisse la large piste et emprunte désormais une sente plus étroite mais toujours balisée en jaune et rouge. C'est un tronçon du Tour du Capcir. Tout en grimpant, elle zigzague dans la forêt et suit le torrent de la Coume de Ponteils. Le balisage est correctement visible mais je garde mon GPS allumé qui pour l'instant suit parfaitement le tracé que j'ai enregistré. Je quitte la forêt pour un plat herbeux. Le Madres est désormais en permanence dans mon champ de vision. De là, il apparaît écrasé (photo), mais si vous devez faire cette randonnée, ne vous y fiez pas, le dénivelé continue sans cesse, s'accentue après le refuge ONF de la Coume de Ponteils et le point culminant est encore très loin. Dans un dédale de sentes laissées par les animaux, je finis par perdre le balisage qui se dirige au refuge de la Font de la Perdrix et je prends l'option d'aller tout droit vers le Clot Rodon. Passée cette tracasserie, je reste, au bord de cette large crête, subjugué par la beauté des panoramas à 360° (plaine du Roussillon jusqu'à la mer, Canigou et tout cet enchaînement de sommets des Pyrénées- Orientales jusqu'à l'Ariège) et des paysages plus proches (gorgs, Coronat, pic Pelade, Garrotxes, tourbières du Madres). Il est midi, voilà deux heures que je marche et il est l'heure de manger. La magnificence des gorgs Estelat et Blau me laisse tellement pantois qu'aucun autre site ne me paraît plus approprié à la pause d'un copieux casse-croûte. C'est donc les pieds ballants au bord de ce sublime précipice que je déjeune d'un bel appétit. Une heure plus tard, c'est le sac plus léger mais le ventre plus lourd que j'attaque la rude montée vers le Roc Nègre. La végétation a définitivement laissé place aux rochers. Seules quelques rases graminées réussissent à pousser dans ce milieu minéral. Après un passage très difficile voire périlleux, j'atteins le sommet du Madres et son identifiable orri. Le temps de quelques photos sur des paysages splendides de tous côtés et me voilà déjà au col des Gavaches pour une longue descente vers le col de Sansa par la Serrat de l'Ours et le chemin Ramader. Simple car il suffit de longer la crête, ce chemin est peu et mal balisé (quelques rares cairns) et je conseille vivement l'utilisation d'un tracé GPS qui peut s'avérer très utile par temps de brouillard. Dans une brume vaporeuse, les eaux du lac de Puyvalador scintillent de plus en plus, preuve que le lac se rapproche et signe que le col de Sansa n'est plus très loin ! 16h30, j'arrive dans un pré et vision enchanteresse, je surprends un petit groupe de mouflons occupés à brouter. A ma vue, ils détalent et je n'ai pas le temps de les figer sur mon numérique ! 17 heures, je retrouve ma voiture après une quinzaine de kilomètres parcourus pour un dénivelé de 700 mètres environ. Ce circuit est destiné aux bons marcheurs sachant s'orienter en toutes circonstances. Carte IGN 2249 ET Font-Romeu-Capcir Top 25.

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Les Villages perdus du Conflent -de Nohèdes à Urbanya

Publié le par gibirando


Ce diaporama est agrémenté de la chanson "Nous Nous Reverrons Un Jour Ou l'Autre", paroles de Jacques Plante et musique de Charles Aznavour interprétée ici par Thierry Le Luron (version incomplète)

Les Villages perdus du Conflent -de Nohèdes à Urbanya

Les Villages perdus du Conflent -de Nohèdes à Urbanya

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Cette balade, je l'intitule la randonnée des villages perdus du Conflent (*). En effet, les deux hameaux de Nohèdes et d'Urbanya sont des culs de sac. Des culs de sac oui car la route s'arrête là ! Des impasses non ! Car une fois franchie la dernière trace de bitume, la montagne sera à vous !  Et quelle montagne ! Etrange car pleine de découvertes où l'histoire et les légendes se confondent.  Etonnante car parfois luxuriante et boisée parfois aride et déserte. Intéressante avec ses empreintes permanentes d'un pastoralisme passé et présent mais aussi d'autres traces encore plus anciennes car néolithiques comme des dolmens, des roches cupules ou à gravures cruciformes. Mais surtout splendide et sauvage avec des lacs (estany dels ClotsGorg Negre et Estelat), de belles vallées  et des gorges encaissées (Urbanya), des torrents qui y dévalent, des multiples cols,  des hautes falaises (Coronat), des hauts sommets plus ou moins loins et plus ou moins hauts (Madres, Pelade, Coronat, Tour, Gran, roc de Torrelles, Lloset, Moscatosa, Portepas,Jornac) de magnifiques forêts domaniales et des réserves naturelles (Conat, Nohèdes) où vous aurez tout loisir de découvrir une flore somptueuse et peut-être la chance d'aller à la rencontre d'une faune qu'il faut impérativement préserver !  Et enfin pour couronner le tout, cette randonnée s'adaptera à tous ! Vous pourrez aller de Nohèdes à Urbanya en deux heures comme en huit ! Surprenant non ? Si le coeur vous en dit, vous pourrez même y passer 2 jours dans cette fabuleuse montagne ! Suivez-moi !  La randonnée démarre sur la D.26, 500 mètres avant d'entrer dans Nohèdes. Laissez votre véhicule près d'un hangar et suivez la sente mentionnant Urbanya sur un petit panneau de bois. Vous êtes sur le Tour du Coronat. A découvrir dans son intégralité sur mon site perso en cliquant sur ce lienNohèdes s'éloigne (photo), la rampe caillouteuse faite de lauzes s'élève en douceur jusqu'au Col de Marsac que vous atteignez en moins d'une heure. Un large panorama s'entrouvre sur  la plaine du Roussillon jusqu'au Pic du Canigou. A vos pieds, la jonction du profond canyon d'Urbanya et de la verte et sombre vallée de Nohèdes engendre le tranquille vallon du Caillan. Là, au Col de Marsac, comme je vous l'ai dit plus haut, deux solutions s'offriront à vous : soit vous descendrez par la piste forestière indiquant parfaitement Urbanya, dont vous apercevez au loin les premières maisons, soit vous poursuivrez le Tour du Coronat jusqu'au col de Tour. Là vous gambaderez quelques heures dans la merveilleuse et contrastée forêt domaniale de Nohèdes/Urbanya. Au col de Tour, si vous avez choisi de découvrir la montagne sur 2 jours, vous partirez vers le refuge de Callau distant de 5 kilomètres dont vous aurez au préalable réservé le gîte et le couvert. Dans le cas contraire, vous prendrez la direction du Col des Vigues pour ensuite redescendre de manière évidente sur Urbanya. Prenez le temps d'un peu de repos pour visiter ce beau hameau perdu !  Du village, vous repartirez jusqu'au col de Marsac par la piste forestière qui passe devant la jolie église pour un retour vers Nohèdes qui lui aussi mérite le détour ! Très longue, longue ou courte, comment la désirez-vous cette randonnée ? Il ne vous reste plus qu'à faire votre choix ! Oubliés ces deux villages ? Pas si sûr ! Cartes IGN 2348 ET Prades-St-Paul-de-Fenouillet Top 25 (et 2249 ET Font-Romeu-Capcir Top 25 si vous allez au refuge de Callau).

(*) Un peu de ma propre histoire : En lisant le présent récit, en regardant la présente vidéo et en visionnant la carte IGN, vous serez un peu perdu ; comme ces deux villages que j'évoque ! Il faut savoir que ce petit reportage est un des tout premiers à avoir paru sur mon blog qui venait tout juste de naître. Alors, il faut savoir aussi qu'en 2007, j'avais accompli le Tour du Coronat en 6 jours, m'arrêtant à Nohèdes mais pas à Urbanya, que je ne vis que de très loin. La météo n'était pas très bonne ce jour-là, j'étais atatendu au refuge de Callau (désormais fermé depuis quelques années !) et je ne voulais pas être pris sous l'orage ! C'est beaucoup lors de ce tour que j'ai découvert une belle partie de ce secteur du Haut-Conflent. Je suis tombé sous son charme au point d'avoir envie d'y retourner en diverses occasions. Ce fut le cas, lors de cette petit balade en mars 2008 qui consista à partir du Nohèdes pour aller piqueniquer au col de Marsac (la présente vidéo). Toutefois, et pour avoir accompli le Tour du Coronat quelques mois auparavant (été 2007), je connaissais mais je soupçonnais aussi toutes les possibilités de balades et de randonnées qu'il y avait à y faire. Même si je ne les avais pas encore toutes accomplies, j'ai voulu en parler en les évoquant ici (présent récit et carte IGN). Le charme fut tel qu'en 2010, je fis l'acquisition d'une petite maison à Urbanya et là, je découvris, mais sur le terrain cette fois, toutes ces possibilités que j'avais évoquées et imaginées, la magnificence des lieux mais aussi la beauté et la richesse de sa flore et sa faune. J'avais vu juste. J'étais tombé amoureux de ces vallées et de leurs villages parmi lesquels il ne faut pas oublier Conat. Bien sûr, vous retrouverez toutes ces randonnées dans mon blog soit en tapant "Nohèdes" ou "Urbanya" ou encore "Conat" dans la rubrique "recherche" soit dans la liste des randonnées des Pyrénées-Orientales. Belles balades ! - mai 2022.

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Le Pic Dourmidou (1.843m) en raquettes depuis le Col de Jau (1.506m).

Publié le par gibirando

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Ce diaporama est agrémenté d'une musique du groupe The Tornados qui s'intitule "Globetrotter".

Le Pic Dourmidou (1.843m) en raquettes depuis le Col de Jau (1.506m).

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Avec ce "Pic Dourmidou en raquettes", une fois n'est pas coutume, je vous emmène jouer dans la neige sur la frontière entre Aude et Pyrénées-Orientales. C'est la saison ! Direction Prades, puis par l'agréable D.14, vous traversez successivement la belle station thermale de  Molitg-les-Bains, le superbe village de Mosset et son agréable Tour des Parfums pour arriver après maints virages au Col de Jau à 1.506 mètres où vous laissez votre véhicule sur le vaste parking.  Le Dourmidou (1.843m) est ce dôme rondelet qui se trouve sur votre droite quand vous arrivez de Mosset. Chaussez vos raquettes et  s'il fait beau, vous êtes partis pour une splendide journée dans un cadre prodigieux. Au col, la D.14 devient D.84. Suivez-la quelques instants puis sur la droite de la route, enjambez une clôture et dirigez-vous vers une large piste qui s'élève, parallèle à la départementale, au mileu des sapins. Au bout d'une dizaine de  minutes, vous arrivez à l'extrémité de cette piste, quittez-la en progressant vers le haut vers une zone intitulée Lapazeuil sur la carte IGN. Lapazeuil est un replat désertique, comme l'ensemble du Dourmidou d'ailleurs !  La suite vous l'accomplirez avec logique car le  sommet est là devant vous, à quelques traces de raquettes, du moins le croirez-vous au début !  A partir du replat, vous repartirez sur votre droite et dans le sens inverse du chemin initialement pris. Vous aurez le parking du Col de Jau dans votre champ de vision. La suite est une simple formalité malgré un dénivelé qui s'accentue progressivement. A plusieurs reprises, vous aurez l'impression d'avoir atteint le sommet, mais ce n'est qu'une illusion et il vous faudra poursuivre « tout schuss » en suivant une longue clôture. Alternant de rudes montées et des zones plus planes,  ce fil d'Ariane « barbelé » vous guidera jusqu'au pinacle.  Dans la montée, les paysages sont déjà grandioses car pas un arbre, pas un rocher, rien ne vient altérer le spectacle. Mais que dire du sommet avec son panorama à 360° ! Géant !!!  Tous les principaux sommets régionaux objectifs de superbes randos sont visibles : Canigou (photo), Madres, hauts pics ariégeois, etc... Pour le retour, il suffit, à nouveau, de suivre la clôture, cette fois jusqu'au parking. Attention, soyez prudents, la fin, très pentue, est peu évidente en raquettes, raison pour laquelle, je l'évite à la montée ! Si les raquettes ne vous tentent guère, n'oubliez-pas que le pic Dourmidou peut également se faire sans et en d'autres saisons. Alors qu'attendez-vous pour y aller ! Carte IGN 2249 ET Font-Romeu et 2248 ET Axat-Quérigut Top 25.
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