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La Batterie (887 m) et la chapelle Santa Engracia depuis Arles-sur-Tech (270 m)
Diaporama sur la musique "2 Hearts, 1 Soul" du groupe Yinyues (free music)
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La « Batterie Santa Engracia », à l’altitude de 887 mètres, est une sortie pédestre bien connue des randonneurs catalans. L’ancienne batterie de Vauban n’est pas à proprement parlée une « incontournable » des Pyrénées-Orientales mais elle demeure une balade relativement bien prisée de nombreux clubs de marche. Indifféremment, on peut y grimper soit depuis Arles-sur-Tech soit depuis Amélie-les-Bains, différents itinéraires avec de multiples variantes pouvant être organisés autour de cet objectif principal ou secondaire. Personnellement, cette randonnée dort dans mes tablettes depuis les années 2008/2009. En avril 2008, et alors que depuis les thermes d’Amélie, j’avais réalisé un court aller retour vers la chapelle éponyme, j’avais découvert des panonceaux mentionnant cette fameuse « Grande Batterie ». Ce jour-là, le temps m’avait manqué pour m’y rendre. Je m’étais donc contenté de découvrir la belle Chapelle Santa Engracia magnifiquement restaurée par de courageux bénévoles ainsi que sa grande croix blanche dominant superbement Amélie et les Gorges du Montdony. Depuis, j’avais gardé de ce lieu, le souvenir de ses divins aspects : sérénité d’un havre de paix et stupéfiant mirador. J’ai décidé de l’inscrire à nouveau au programme de cette sortie. En effet, la batterie et la chapelle peuvent faire l’objet d’une sortie commune ou séparée. Un an plus tard, en août 2009, lors mon Tour du Vallespir en 6 jours, la « Batterie Santa Engracia » est revenue sur le devant de ma scène pédestre. A l’époque et lors de la dernière étape entre Saint-Laurent-de-Cerdans et Amélie-les-Bains, j’étais passé à 5 minutes d’elle sans y aller, faisant ainsi l’impasse mais avec le projet avéré d’y revenir. Avec ce récit, c’est donc chose faite mais pas sans peine car la déclivité sur un terrain pas toujours facile est loin d’être évidente : 617 mètres de dénivelé jusqu’à la batterie depuis la ligne de départ à Arles-sur-Tech situé à 270 mètres d’altitude. Il est 10 h quand je laisse ma voiture sur la place Joseph Monin à proximité de la Salle des Fêtes. Je demande mon chemin à un passant et ce dernier m’indique que le célèbre G.R.10 que je dois emprunter passe derrière la salle. Je trouve aisément le panonceau et le fameux balisage blanc et rouge. Parmi diverses directions, je prends note de celle qui m’intéresse au premier chef : « Coll de Paracolls – 2 h – G.R.10 », même si je sais que pour atteindre la batterie, il me faudra tourner au préalable et juste avant ce col. Je me dirige vers une vieille usine amplement délabrée dont l’exploitation consistait à traiter le minerai de fer en provenance des mines de Batère. Je tourne à droite puis longe les murs de l’usine aux vestiges rouillés par le temps puis enjambe le pont sur le Tech. Oiseaux au bord de la rivière, fleurs printanières mais surtout quelques vieilles cartes postales contant la vie passée d’Arles-sur-Tech freinent mes premières ardeurs. Cette vie passée, c’est celle de l’exploitation du fer dont j’ai toujours essayé d’approfondir mes connaissances de l’Histoire à travers des bouquins mais en les complétant au mieux par des balades pédestres : Mines de Batère et de la Pinouse, Rapalum, les Manerots, Formentera, Escaro autant de sites « vallespiriens » et « conflentistes » que j’ai pris plaisir à découvrir. Au bout du pont, un deuxième panonceau accroché à un transformateur électrique se présente et sa comparaison avec le premier me laisse assez songeur : « Coll de Paracolls – 3,6 km ». Deux heures pour effectuer moins de 4 kilomètres, je me dis que ça promets ! Décidément, le Vallespir ne changera jamais et restera toujours « la vallée âpre » si chère aux Romains auxquels elle doit son nom : « Vallis asperi ». Ce rapide calcul est assez contradictoire avec l’analyse du parcours jusqu’à la batterie que j’ai trouvé sur un site Internet dont le jeune webmestre annonce la boucle que je dois effectuer comme étant « une randonnée facile ». Excusable parce que jeune, l’insoucieux ignore que ce qui est facile à 30 ans ne l’est pas nécessairement à 67, d’où mon refus quasi systématique de décrire mes randonnées avec ce genre de références. La facilité ou la difficulté et le temps de marche d’une randonnée sont des critères bien trop personnels. En tous cas, ils le sont pour moi et j’avoue n’avoir jamais été trop attentif au « fameux » indice IBP mis en place par la fédération. Le mieux est de bien se connaître et de connaître son état de forme du moment. Est-ce mon désir de tenir le temps imparti par ce panonceau mais voilà que j’ai déjà perdu le balisage du G.R.10 ? Un demi-tour presque immédiat et un retour vers la dernière empreinte blanche et rouge me remettent dans le droit chemin, qui n’est pas droit du tout. En effet, il est surtout peu logique car il tourne à gauche en franchissant la clôture que j’avais suivie par erreur, puis très curieusement, il traverse un muret en pierres sèches, désormais effondré. Derrière le mur, l’itinéraire est bien là. Il continue et coupe très vite une large piste allant vers Can Valent. La suite bien balisée devient plus évidente à suivre même si le terrain, lui, ne l’est pas vraiment. Une sente très ravinée, parfois caillouteuse, parfois gréseuse, parfois carrément rocheuse s’élève rudement et souvent en zigzaguant au milieu des bruyères arborescentes et des genêts fleuris. La végétation plus haute se résume à quelques rares chênes. Ces derniers sont verts, rouvres ou plus rarement lièges mais au fur et à mesure de l’élévation, ils se mélangent à d’autres essences et notamment aux grands hêtres puis aux châtaigniers qui finalement vont prendre le quasi monopole au plus haut de la forêt. Dallé par endroits, je foule de mes gros godillots le sentier muletier du temps jadis. C'était la route la plus courte entre la France et l’Espagne. C’était le temps où le mulet et l’âne étaient les meilleurs amis du paysan, du contrebandier, du soldat et du vagabond. Dans cet entrelacs minéral et végétal peu aisé, les mains viennent quelquefois en aide aux pieds pour franchir un palier. Un palier, c’est l’occasion pour moi de souffler un peu et de profiter pleinement des jolies vues s’ouvrant sur Arles et son ample vallée du Tech. Au dessus de la cité et sur l’autre versant, le Massif du Canigou est encore bien enneigé, mais comme il est bien trop chapeauté d’un capuchon de nuages blancs, il a à l’apparence d’une montagne plutôt modeste qu’un géant aurait dégauchie. Aujourd’hui, et malgré un saupoudrage de neige, les plus hauts pics perdent leur aspect glorieux et somptueux. Parfois, ces paliers sont enrichis d’un poteau couronné d’une pancarte faisant référence au « kilomètre vertical », course pédestre bien connue consistant à démarrer d’Arles-sur-Tech située à 284 m d’altitude puis à atteindre au plus vite le Pilo de Belmaig ou Pilon de Belmatx perché 1.000 mètres plus haut. Je ne cours pas, bien au contraire, et pourtant, après mes récents problèmes de santé, les paliers 484 et 684 mètres sont pour moi autant de petites satisfactions à les avoir déjà atteints dans un délai plus que correct. Je ne retiens vraiment de cette difficile ascension qu’un nom inscrit sur mon bout de carte I.G.N : la Font de les Amors. Inutile de traduire mais où est-elle au juste cette source prodigieuse ? Un filet d’eau de quelques centimètres me fait imaginer que « les Amors » sont là. Il faut dire que tout en montant, les panoramas se raréfient, et dans ces sous-bois de châtaigniers, or mis de bien trop rares fenêtres qui s’entrouvrent sur des bouts de Vallespir, rien n’incite à une flânerie exagérée. Les plantes fleuries se raréfient et je n'ai photographié qu’un seul rouge-gorge depuis les oiseaux aperçus au pont sur le Tech. Sans trop d’illusions et à chaque pin rencontré ou presque, je ralentis un peu mon allure, car j’ai toujours espoir de découvrir l’Isabelle, ce fameux papillon protégé si rarissime à voir mais paraît-il présent dans le Haut-Vallespir. Ici, les pins sont rares et l’Isabelle encore plus. Je n’en vois point bien évidemment. Quand j’atteins l’intersection filant vers la Batterie Santa Engracia, c’est avec une satisfaction certaine que j’observe ma montre indiquant 12h15. Je sais que l’objectif est désormais à moins de 2 kilomètres et la déclivité bien moindre que celle déjà accomplie. Je décide d’aller manger à la batterie. Le sentier plus doux et enfin bien plus praticable devient plus agréable à cheminer. Seuls un ruisseau rafraîchissant, deux couples d’anglais un peu paumés et les ruines du Mas Nou d’Eixena ralentissent mes pas soudain redevenus plus alertes. Il est 13 heures tapantes quand je retrouve le panonceau déjà vu lors de Mon Tour du Vallespir : « Grande Batterie – 0h05 – P.R.1 ». Cette fois, pas question d’éviter cette « Grande Batterie » même si je sais qu’elle n’est ni de cuisine ni celle d’un orchestre et seulement militaire. En tous cas, une chose est sûre, cette batterie rechargera mes accus. Effectivement, la Batterie de Santa Engracia est déjà là avec sa muraille colossale et ce n’est ni un orchestre que j’entends, ni des prières dédiées à Sainte-Engrâce mais bien les fous rires joyeux mais très sonores d’un groupe de randonneurs. Ils occupent par petits groupes la totalité de la plate-forme militaire mais ils ont tous l’air de bien se marrer chacun dans leur coin. Une dame vient vers moi et me demande si je suis seul puis elle passe son chemin quand je lui réponds. « Oui, je suis seul ! » Finalement je comprends que ma présence aussi soudaine qu’imprévue a failli contrarier chez elle une envie très pressante. Je laisse la dame à son besoin naturel et le reste du groupe sur la vaste et vieille esplanade stratégique et monte au sommet d’un rocher faisant office de pinacle. Je ne regrette pas ces quelques mètres supplémentaires d’élévation, car d’ici, le cul assis sur une borne géodésique et la girouette franco-catalane tournoyant au dessus de ma tête, il n’y a pas de meilleur poste d’observation sur une immense partie du Vallespir et bien plus loin encore vers la Plaine du Roussillon et la Méditerranée. Vers le nord, le ciel s’est quelque peu éclairci et le sieur Canigou, bien qu’encore coiffé d’un gros bonnet cotonneux, décide enfin de dévoiler ses plus beaux atours. Vers le sud et sous un firmament bleu et limpide, les rocs Saint-Sauveur et de France (Frausa) me rappellent à leurs agréables souvenirs d’une récente balade. Vers les autres points cardinaux, dont une rose des vents me donne l’orientation, se sont là aussi des paysages magiques de tous côtés. C’est avec un émerveillement et un étonnement sans cesse renouvelés, que ces paysages défilent à nouveau devant mes yeux, comme au temps de mon périple tout autour du Vallespir. Le récit de ce périple au sein de cette magnifique région et au dessus de cette belle vallée du Tech, je l’avais intitulé « Sur les hauteurs d’une vallée âpre ». Âpre le périple l’avait été en 2009, âpre, la balade l’est encore aujourd’hui, car si j’ai attendu la fin du pique-nique et que le groupe de randonneurs ait quitté les lieux pour partir visiter tous les recoins de la batterie, j’en suis à peine au tout début de ma découverte qu’une mauvaise chute m’envoie choir dans les branches d’un ciste desséché. Le ciste est déjà mort depuis longtemps mais ses branches sont encore suffisamment dures et ligneuses pour me déchirer l’avant-bras gauche sur 5 ou 6 cm. Après ma « gamelle » du Tour de la Pelade dont j’étais sorti avec une égratignure superficielle de la main droite, cette fois-ci, il s’agit d'une coupure bien plus profonde qu’il me faut soigner. Rien n’y fait et malgré une trousse à pharmacie bien achalandée en pansements de toutes sortes, mon sang s’écoule de la plaie comme d’un robinet grand ouvert. Le saignement se poursuivra pendant presque 4 heures sans que rien ne l’arrête ou presque. Le plus efficace restera le mouchoir en papier directement collé sur la plaie sanguinolente mais quand le papier est gorgé de sang, il refuse de coller et tombe lui aussi. Je vais renouveler l’opération pratiquement jusqu’à l’arrivée où enfin, le sang coagulé fera finalement office de cautérisation naturelle. Dans l’immédiat, et malgré cet incident qui me fait perdre pas mal de temps, je décide de poursuivre mes découvertes, d’abord celle de la « Grande Batterie » puis la boucle initialement prévue. Pour le néophyte que je suis, la batterie se résume à de hautes et larges fortifications composées d’impressionnantes murailles mais bien évidemment un tacticien militaire y trouvera bien d’autres intérêts architecturaux et surtout stratégiques. Elles sont construites en pierres sèches et sans aucun mortier. Les seuls mortiers que la batterie ait connus ont été ceux que les artilleurs ont été contraints de monter jusqu’ici. On imagine bien évidemment, l’immense besogne que cette construction a du nécessiter et les efforts entrepris par les soldats pour y amener des pièces d’artillerie permettant de tirer plus de 2 km en contrebas. Paradoxe de l’Histoire, ici aucun coup de canon n’aurait jamais résonné. Avant de venir ici et comme je le fais la plupart du temps, j’ai tenté de m’initier à l’Histoire de cette batterie en cherchant un maximum d’informations sur Internet. Autant l’avouer, je suis resté quelque peu sur ma faim et ce malgré de nombreuses informations sporadiques recueillies de-ci de-là. J’ai néanmoins appris qu’elle aurait été construite en 1670 selon les directives de Vauban qui était venu visité le Roussillon l’année précédente. A-t-elle été construite en même temps que la citadelle de Fort-les-Bains (Fort d’Amélie) ou du moins dans sa continuité, on peut le supposer. Cette dernière a été construite en 1670 sur le site de vieux édifices médiévaux et sur les conseils de Noël Bouton, comte de Chamilly et intendant du Languedoc qui voulait réprimer la contrebande du sel et mettre fin à la révolte des Angelets (1661-1675). Les Angelets étaient ces vallespiriens initiés par le célèbre Josep de la Trinxeria qui étaient entrés en révolte contre Louis XIV suite à l’instauration de la gabelle après le Traité des Pyrénées de 1659, traité qui avait vu le Vallespir espagnol et catalan annexé par la France. Cette annexion s’est faite dans la douleur et quand on sait que les travaux de construction du fort étaient financés avec les impôts payés par les vallespiriens et qu’en plus certains « gabelous » y résidaient, on comprend mieux les animosités qu’il y avait dans les deux camps et l’envie d’en découdre. Dès l’automne 1670, Jacques de Borelly de Saint Hilaire, ingénieur militaire de Vauban, dessine de nouveaux plans et poursuit le chantier déjà entrepris. Le fort terminé, Saint Hilaire et les différents commandants du fort se plaignent d’un manque criant d’infrastructures et demandent des moyens financiers supplémentaires à Louvois. Des modestes aménagements sont apportés mais Louis XIV, Louvois et Vauban sont réticents à trop investir car ils jugent que le lieu est bien trop petit et de ce fait, n’est pas réellement stratégique. En 1674, les Espagnols assiègent Fort-les-Bains alors que de nombreux travaux sont en cours. Le siège est rapidement levé mais malgré cette première alerte, la configuration du fort et ses moyens de défense évoluent assez peu. Il faut attendre 1679 et la deuxième visite de Vauban dans le Roussillon pour qu’il soit jugé utile à la sécurité du Roussillon et des Pyrénées sans qu’il soit reconnu pour autant comme une pièce maîtresse de la « ceinture de fer ». De grosses améliorations sont néanmoins apportées. Comme vous le voyez, autour de l’Histoire de Fort-les-Bains, cette « Grande Batterie » est peu ou jamais évoquée et l’on sait seulement qu’elle était un moyen supplémentaire de le défendre d’abord contre les Angelets puis contre les Espagnols. La frontière étant très proche et le relief géographique très alambiqué, les premiers ingénieurs avaient sans doute compris que le fort serait vulnérable à partir des versants montagneux qui l’entourent et le dominent. Ils ne s’étaient pas trompés puisqu’en 1793, et après un long siège de plusieurs semaines, le fort commandé par le gouverneur Michel Jean Paul Daudiès tombe aux mains des soldats espagnols du général Antonio Ricardos. Le fort et ses alentours dont les « batteries », petite et grande, continueront à être occupés par des militaires pendant encore un siècle. Voilà ce que l’on peut dire de l’Histoire de cette « Grande Batterie ». Il existe également une « Petite Batterie » mais j’ignore où elle se trouve et la carte I.G.N ne la mentionne pas. Après cette découverte non accidentelle mais accidentée de la « Grande Batterie », je continue l’itinéraire vers la Chapelle Santa Engracia. Cet itinéraire, on l'appelle plus communément le chemin du 25eme léger, en référence à un vaillant régiment d'artillerie créé en 1796 dont les faits d'armes glorieux un peu partout sont nombreux, y compris ici en Roussillon. Je connais déjà cette « route stratégique » pour aller à la chapelle et je sais que les vues plongeantes sur Arles y sont exceptionnelles. Depuis ce chemin, un rapproché photographique me permet même d’y voir ma voiture distante de plus de 2 km. Le désir de refaire ce chemin et l’envie de retourner à la chapelle sont donc intacts tant j’avais trouvé ses extérieurs et ses alentours bien agréables et reposants. La chapelle est encore paisible et par bonheur, quand je pousse sa jolie porte, celle-ci s’ouvre assez « divinement » je l’avoue. Je ne m’y attendais pas, tant de nombreuses chapelles du département demeurent hermétiquement closes aux randonneurs. L’intérieur est sobre mais beau, bien à l’image de tout ce que l’on peut voir ici : table d’orientation, paysages, décors, jardins, fontaine, lieux de repos aménagés avec des bancs, nombreuses pancartes explicatives de son histoire, croix panoramique, j’y passe plus d’une heure, en grande partie avec l’agréable compagnie d’un gentil couple de touristes. Ils profitent de mon culot à avoir pousser la porte de la chapelle et tout comme moi, eux aussi vont laisser un petit laïus sur le livre d’or. Nous sortons ensemble de l’église et dès lors qu’ils aperçoivent qu’un saignement s’écoule de mon bras, ils veulent coûte que coûte l’arrêter. Malgré leur trousse à pharmacie encore bien plus garnie que la mienne, ils n’y parviennent qu’à moitié et je quitte Santa Engracia direction l’arrivée avec un gros paquet de mouchoirs en papier imbibés d’une coagulation rougeâtre bien plus impressionnante que douloureuse. Les mouchoirs ne tombent plus enrobés qu’ils sont d’un gros morceau de sparadrap mais un petit filet de sang continue de se manifester. Est-ce la perte de sang alliée à la longueur de la balade, mais la fatigue commence à se faire sentir. Je languis l’arrivée et seules deux chèvres perdues sur des rochers abrupts au dessus d’un profond ravin me stoppent dans cette longue descente vers Arles-sur-Tech. Je les observe longuement. Perchées sur un étroit piton rocheux, elles semblent chercher une issue mais sans trop de succès. Elles montent puis redescendent, partent à gauche puis à droite comme un peu perdues dans ce décor minéral et végétal apparemment fermé, mais vraisemblablement ouvert car comment auraient-elles pu arriver sur ce parapet rocheux ? Je ne peux malheureusement rien faire pour elles et je repars avec dans la tête, l’histoire de la chèvre de Monsieur Seguin qui voulait courir la montagne et qui finalement avait été dévorée par un loup. Ici, elles courent la montagne mais peu de chance qu’un loup les dévore. Peut être un vautour fauve et encore ? Je me raisonne. Elles s’en sortiront en trouvant l'exutoire qui leur a permis de prendre pied sur cette falaise escarpée. Une demi-heure plus tard, je retrouve l’asphalte quitté depuis ce matin 10h. Il est 16h30. « Mas Draguines » m’indique un panneau signalétique devant un petit groupe d’habitations. Je ne quitte plus cette route de la Batllie qui descend vers des rangées d’immeubles et un centre sportif, si j’en crois mon bout de carte I.G.N. Le Tech s’écoule devant moi et j’y file direct en coupant au milieu des immeubles et des pelouses. Ce raccourci m’amène très vite sur un large chemin herbeux ressemblant à la fois à un parcours sportif et à un arboretum. En tous cas, trois ou quatre personnes courent au milieu de ludiques panneaux donnant les noms des arbres que l’on rencontre ici. Je remonte la rive droite du Tech et si les arbres m’intéressent, les oiseaux fréquentant le bord de la rivière ont de loin ma préférence. Je prends encore le temps d’en photographier quelques-uns. Après cet intermède, la boucle est bientôt terminée. J’aperçois l’usine désaffectée sur l’autre berge, le pont et le transformateur électrique devant moi. Je finis les restes de mon casse-croûte au bord du fleuve, dans la quiétude d’une petite grève et sous le regard un peu inquiet d’un couple de colverts. Ils sommeillent côte à côte et je fais en sorte ne pas les déranger. Pour eux, comme pour moi, le printemps est là et c’est la saison des passions et des sentiments. Il leur faut un peu de tranquillité pour s’aimer. Ma passion de la randonnée, je l’ai bien assouvie aujourd’hui et la tranquillité, j’en ai eu ma dose pareillement, mais n’empêche qu’il faut que je rentre à la maison. Je vis en couple moi aussi. Je traverse le pont, la balade tire à sa fin. Elle a été longue de 12,9 km incluant la visite de toutes les curiosités. Le dénivelé est de 623 m entre le point le plus bas à 264 m sur la rive du Tech et le plus haut à 887 m à la batterie. Les montées cumulées s’élèvent à 1.205 m. Carte IGN 2449OT Céret – Amélie-les-Bains-Palalda – Vallée du Tech Top 25.
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