• Ce diaporama est enjolivé par des musiques jouées par le guitariste de jazz Biréli Lagrène extraites de son album "Gipsy Project". Elles ont pour titre : "Blues Clair", "Coquette", "Daphné", "Embraceable You" et "Swing 42".

    Il y a quelques années, je vous avais présenté dans ce blog, une balade assez insolite au départ du joli hameau de Glorianes intitulée « la Chapelle Sainte Anne ». Cette balade vers la chapelle ruinée de Sainte Anne située au sommet du Serrat des Genièvres, à 1.347 mètres d’altitude présente la particularité d’être une des toutes premières qu’il m’ait été donnée de faire quand je me suis lancé dans la randonnée pédestre, il y a maintenant plus de vingt ans. C’est un copain qui me l’avait fait découvrir pour la première fois, non pas au départ du hameau de Glorianes mais du village de Baillestavy et selon la même boucle assez singulière et difficile que je vous présente aujourd’hui. Depuis j’y suis retourné à de multiples reprises en y incluant fréquemment des variantes plus ou moins longues. J’’y ai même très souvent amené famille et amis car il faut bien l’avouer, par grand beau temps, cette Chapelle Sainte Anne constitue sans aucun doute un des plus merveilleux mirador sur le versant nord du Massif du Canigou. Au regard de la chapelle qui n’est plus qu’un tas de pierres difforme, on pourrait penser que les vues époustouflantes sur le Canigou en sont ses seuls attraits mais non, cette chapelle et la randonnée que je vous présente aujourd’hui ont beaucoup d’autres atouts.  Elles en avaient déjà dans le circuit confectionné à partir de Glorianes et bien que les vues soient aujourd’hui bien différentes, elles en ont tout autant dans cette boucle au départ de Baillestavy. Ce matin-là, c’est sous un ciel pur et céruléen que j’ai pris la direction de ce beau village du Conflent. Le temps était vraiment idéal pour monter vers la Chapelle Sainte Anne et bénéficier de ces incroyables vues sur le Massif du Canigou. Mais malgré une météo qui m’avait annoncé un grand beau temps pour toute la journée, la chance ne fut pas avec moi car au moment d’atteindre la chapelle, de gros nuages gris et blancs avaient décidé d’entrer dans la partie et recouvraient notre mythique sommet.  Pourtant, tout avait bien commencé et comme les fois précédentes, j’avais laissé ma voiture un kilomètre après Baillestavy ou du moins de son quartier de La Fargue, sur la D.13, direction Valmanya. Là, au lieu-dit le Pont de Fer, j’ai enjambé la Lentilla, torrent très apprécié des pêcheurs de truites fario mais fort impétueux en ce début de mai car descendant directement des contreforts abrupts et encore bien enneigés du Barbet.  D’ailleurs, depuis la D.13, il suffit de suivre un panonceau « parcours de pêche » et d’emprunter le petit sentier qui descend très raide vers la rivière. Là, on traverse le torrent grâce à un pont en béton mais aux garde-fous encore en fer d’où le pont tire sûrement son nom. Peu après, on ignore les autres panonceaux « parcours de pêche » descendant vers le lit du torrent et l’on emprunte l’unique sentier qui s’élève dans des sous-bois bordé parfois de « feixes » sur sa gauche. Au temps de l’exploitation du fer, ce sentier servait à rejoindre les mines de Rabollèdes. Il longe longuement la Lentilla puis s’en écarte peu à peu jusqu’ au moment où coupant un autre ruisseau celui du Ravin de Rabollèdes, il s’en éloigne vraiment. D’ailleurs après les grosses pluies des derniers jours, de l’eau, il en coule un peu partout sur cette « solana » et c’est bien la première fois que j’en vois dégouliner autant. Toutes les sources semblent régurgiter un trop plein et après les frimas de l’hiver, la végétation renaissante en profite à outrance et explose de verdeur. Le chemin embaume l’humus, le terreau humide et les mousses gorgées de rosée. L’itinéraire côtoie quelques vestiges du temps du pastoralisme et de l’extraction du minerai de fer.  La randonnée est presque un jeu d’enfant car si sur les vieilles cartes IGN, l’itinéraire est décrit comme étant non balisé voire hors sentier, le sentier balisé en jaune, lui, existe bel et bien et comme il est unique sur presque 4 kilomètres jusqu’au pylône de la Creu d’en Touron, il en devient d’une grande simplicité. Une fois encore, je précise que simplicité ne signifie pas facilité car le dénivelé est déjà de 460 mètres entre le départ que constitue le Pont de fer (620 m) et cette Creu d’en Touron (1.084 m) où le regard bascule magnifiquement vers les Aspres. Certes, il y a entre ces deux points, une évidente déclivité mais cette dénivellation va nous permettre d’avoir de merveilleuses vues aériennes sur la Vallée de la Lentilla mais surtout d’incroyables panoramas sur la Massif du Canigou sans avoir à attendre d’être au sommet du Serrat des Genièvres. De temps à autre, il ne faut pas craindre de quitter le chemin pour profiter pleinement de ces vues somptueuses : vers le Canigou bien sûr, mais aussi vers d’autres lieux bien reconnaissables comme Valmanya, Baillestavy, les Mines de la Pinouse, les Puigs d’Estelle et de Saint Pierre et bien d’autres merveilles encore. Voilà pourquoi, nonobstant un temps devenant maussade au fil du parcours, je n’ai pas vraiment été déçu de ma balade, d’autant que malgré de gros nuages, la pluie est restée absente et c’était déjà un point très positif. Avec la Creu d’en Touron, on atteint un premier étage mais les autres paliers à rejoindre sont d’autres « nougats » bien plus difficiles à croquer. Il suffit pourtant de suivre des clôtures, le plus souvent faites de fils barbelés, très indigestes, il est vrai. Il y a d’abord en hors d’oeuvre, le Col de Montportell (1.184 m), 1.400 mètres plus loin mais déjà 100 mètres plus haut, puis, vient le plat de résistance avec un très court mais terrible raidillon qui, avec ses 164 mètres de dénivelé pour ses 825 mètres de longueur, nous emmène à au pic Sainte Anne à 1.347 mètres d’altitude où se trouve l’ancienne chapelle. Une chapelle Sainte Anne certes ruinée mais qui est un extraordinaire belvédère à 360 degrés ou presque.  L’excellent site Internet consacré à l’histoire du Roussillon nous en conte très bien la chronologie détaillée que je résume ici : Située sur le territoire de la commune de La Bastide, la petite chapelle (6,20 m de long sur 3,50 m de large) a été construite sur les fondements d’un ancien oratoire du nom de La Solada de Sancta Anna. La première mention écrite date de 1568. La nouvelle chapelle Sainte Anne fut élevée en 1699 grâce à la volonté de quatre personnages des villages alentours dont un certain Jean Ange Toron de la Bastide (a-t-il un rapport avec la Croix d’en Touron ? Je l’ignore ! ) En 1722, un document présente la chapelle comme un ermitage sous le nom de Sancta Anna dels Quatra Termas.  A l’époque, l’ermite, en général un moine, tenait un rôle social important auprès des populations des villages alentours alors beaucoup plus isolées qu’ils ne le sont de nos jours. Après la Révolution, les biens de l’église deviennent des biens d’Etat et la chapelle Sainte Anne ne fait pas abstraction à cette règle.  Comme bon nombre d’autres biens de l’église jugé inutile par les révolutionnaires, l’ermitage fut vendu. Il perdit son rôle social, tomba en désuétude puis fut abandonné et oublié des hommes et il ne résista pas à l’usure du temps. Il faut dire que le Pic Sainte Anne est exposé et battu par tous les vents. Chaque fois que j’y monte, j’y élève sur les murs restants trois ou quatre pierres que je retrouve le plus souvent à terre sans doute balayées par les vents puissants qui soufflent ici voire bousculées par les moutons qui broutent à longueur d’années sur cette montagne plutôt aride. Elever les murs de la chapelle, c’est ma manière à moi, d’ajouter quelques pierres à cet édifice oublié de tous. Après cette découverte assez désagréable quand il ne fait pas beau ou bien quand souffle bien trop fort notre « chère » tramontane, le dessert arrive à point nommé. Ce dessert, c’est la suite du parcours qui n’est constituée que de descentes voire de chemins plats et herbeux plutôt agréables à arpenter. Là encore, il suffit de suivre comme un fil d’Ariane des clôtures. Cette longue crête en surplomb de la Vallée de la Lentilla et face au Canigou c’est le Serrat des Genièvres ou Serrat del Ginèbre en catalan. Ne vous amusez pas à chercher les plants de genièvres, il y a très longtemps qu’ils ont disparus des paysages environnants, emportés par des défrichages à répétition et des écobuages pas toujours bien maîtrisés. Ici, les genêts sont désormais les rois mais des rois sans doute éphémères eux aussi et qui, finalement subiront le même sort que les genièvres d’antan. Des landes de genêts que les éleveurs de bovins, d’ovins et de caprins s’évertuent de défricher ou d’écobuer sans relâche pour agrandir sans cesse leurs pacages. Comme le dit si bien le proverbe «  à toutes choses malheur est bon » et si les paysages sont parfois un peu noircis,  ici, le randonneur marche le plus souvent à découvert et sur un tapis herbeux plutôt agréable à cheminer, enfin au moins jusqu’à la redescente finale vers Baillestavy. Car là, il faut bien que je l’avoue, le retour que j’ai choisi en souvenir du bon vieux temps et de ma première venue ici, est loin d’être le chemin le plus facile même s’il est le plus court en terme de distance à parcourir pour rejoindre le point de départ. Peu après les ruines du Cortal del Pou, il faut suivre la clôture qui file perpendiculaire au chemin principal. Cette clôture assez rectiligne atterrit sur une large piste près du Mas Miquelet mais le parcours est semé d’embûches car assez abrupt, parfois caillouteux à l’extrême, pas toujours bien débroussaillée et en sus avec quelques clôtures et barrières pas toujours évidentes à enjamber. Un véritable parcours du combattant que vous pourrez éviter en empruntant la piste beaucoup plus facile mais plus longue qui descend par le Mas de Dalt (voir variante sur ma carte IGN). Les suites des deux itinéraires sont simples mais peuvent paraître fastidieuses car les pistes ne sont qu’une succession sans fin de sinuosités et de virages avant d’atteindre la D.13. Elles sont d’autant plus laborieuses que Baillestavy et la Fargue sont encore à quelques encablures et que si vous êtes venus avec un seul véhicule, le Pont de Fer, lui, est encore un peu plus loin, à 1.200 mètres environ de la Fargue. Au total, vous aurez parcouru dans le premier cas une quinzaine de kilomètres et dans le deuxième environ deux kilomètres de mieux. Depuis le Pont de Fer et jusqu’à la chapelle, le dénivelé est de 727 mètres et les montées cumulées sont de l’ordre de 1.190 mètres environ. La Chapelle Sainte Anne est donc une randonnée qui est loin d’être facile mais elle présente l’avantage d’être une des plus plaisantes que je connaisse par grand beau temps. Carte IGN 2349 ET Massif du Canigou Top 25.

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    Ce diaporama est agrémenté de la musique "Romance pour violon No.2 In F Major Op.50" composée par Ludwig Van Beethoven interprétée par la violoniste japonaise Takako Nishizaki
     
    L'ERMITAGE-DE-FORCA-REAL
    FORCAREALIGN
     

    En Roussillon, tout le monde connaît Força Réal, ce piton rocheux à 507 mètres d’altitude, isolé   et planté-là au beau milieu de la plaine, par on ne sait quel mystère géologique. Tout le monde sait reconnaître le lieu, souvent visible et facilement identifiable de très loin, constituant d’ailleurs pendant très longtemps un amer pour les navires croisant près de nos côtes méditerranéennes,  à peu près tout le monde connaît le nom et sait le traduire en « Force Royale », moins nombreuses sont les personnes qui en connaissent l’origine et son Histoire et peut-être plus rares encore sont celles qui s’y sont rendues, même en voiture. Quand aux gens qui l’ont gravi à pied, elles ne doivent pas être légion. Pourtant cette balade est loin d’être inintéressante. Elle est de surcroît plutôt facile car très bien balisée à partir de Montner.  Bien sûr, à moins de connaître l’identité du détenteur de la clé de l’ermitage, on y monte essentiellement pour les panoramas à 360 degrés. C’est déjà très bien tant les vues de toutes parts sont extraordinaires. Pourtant, en se donnant un peu de peine et en cherchant tout autour, d’autres découvertes sont possibles et je ne parle pas seulement du ludique sentier botanique de  Força Réal qui vient enjoliver ce circuit. Non, il y a d’autres trouvailles, et ces trouvailles, je les ai découvertes en poussant jusqu’au col de la Bataille et même un peu plus loin en direction de Caladroy. Voilà ce qu’écrivait Victor Aragon en 1859 en préambule à sa « Notice historique, religieuse et topographique sur Força Réal » : « La montagne qui emprunte son nom à l’ancienne forteresse dont les débris font deviner l’enceinte sur son plus haut mamelon, domine la plaine féconde du Ribéral que le touriste, parvenu au sommet rocheux de Força Réal, peut admirer dans sa vaste étendue. De ce point culminant le Roussillon se montre à lui presque tout entier ; le regard l’embrasse dans le double horizon de la mer et des Pyrénées, cadre immense, rempli par les tableaux variés des vallées de l’Agly, de la Têt et du Tech, qui se déroulent parallèlement des montagnes vers la Salanca. Les détails infinis de ce riche paysage ne peuvent échapper à l’observateur curieux, et l’on comprend que les divers dénominateurs de la contrée aient établi sur la cîme de la montagne un poste d’observation, dont la consigne devait être de prémunir les habitants de la plaine contre les dangers d’une invasion subite. Força Réal était, sans doute alors, comme il est aujourd’hui, le point de mire des Roussillonnais du Ribéral ; mais de nos jours ce n’est plus vers la forteresse que les regards se tournent ; c’est vers la Chapelle protectrice, sortie, tout porte à le croire, des ruines du Castell depuis longtemps disparu ». Ici, en quelques lignes, c’est quasiment Força Réal qui est résumé. Le fondement même de son nom « forçia » provenant du latin « fortia » signifiant « fort » ou « forteresse » qui, bien sûr, accolé au mot « réal » laisse imaginer l’origine royale du château fort en question. La beauté et l’amplitude des panoramas et sa géographie que l’on découvre depuis son pinacle. Les raisons de l’édification d’un château fort sur ce sommet. L’évolution au fil du temps de ce lieu emblématique du Roussillon où une chapelle est venue remplacer les vestiges du château et d’une tour à signaux qui avait également été érigée au XIIe siècle semble-t-il. Enfin, vous noterez que dans ce préambule, rien n’est dit qu’en à la date la plus lointaine de l’édification de ce Castell. Je vous laisserais le soin de lire intégralement l’ouvrage de Victor Aragon accessible sur Google mais si certains historiens ont pu y voir l’œuvre des Romains, lui penche plutôt pour une origine aragonaise et voilà ce qu’il écrit avec sagesse et circonspection : « Tenons donc pour certain, autant qu’il peut y avoir de certitude en cette matière, que Força Réal est d’origine Aragonaise et remonte à la fin du XIIe ou au commencement du XIIIe siècle ». Il explique avec force détails, les raisons de l’attribution de ces constructions aux Rois d’Aragon de la Maison de Barcelone.  La suite du récit retrace l’histoire de Força Réal au fil des siècles, une histoire, il faut bien le dire, essentiellement militaire, où la montagne eut à subir sans cesse les assauts répétés des différents conquérants et envahisseurs du Roussillon. Même si du château fort et de la tour à signaux ne subsistaient que quelques ruines depuis déjà presque un siècle, il semble que les derniers assaillants de Força Réal furent les troupes du Général espagnol Ricardos qui, en 1793, fortes de 25.000 hommes furent tenu en échec pendant deux mois par une armée française pourtant très réduite de 4.000 hommes seulement. Sans doute, ces soldats avaient-ils puisé leur foi, leur vaillance et leur force sur ce sommet où avait été érigée une chapelle construite sur l’emplacement de la tour à signaux quelques années auparavant (1693/1708). Malheureusement, la chapelle souffrit de ces guerres successives et elle fut elle aussi en partie ruinée par les militaires.  Un peu plus tard, la chapelle devint un ermitage dédié à la Vierge, puis un lieu de pèlerinages et de cérémonies qu’elle est encore de nos jours.  

    A Montner, j’ai laissé ma voiture devant la coopérative vinicole puis me dirigeant vers le centre du village, j’ai emprunté la bien nommée rue de Força Réal. J’y ai remarqué un autre panneau indiquant la piste DFCI N° F140. De l’autre côté de la rue, un petit panonceau jaune au dessus d’une fontaine indiquait la direction à suivre «  Circuit Montner – Força Réal ». Une autre balade intitulée le « Chemin de Véronique », déjà expliquée dans ce blog, était également mentionnée. Un peu plus haut, je me suis engagé dans la rue de la Marinade sous l’œil incrédule de deux jolis matous puis j’ai poursuivi la piste DFCI F140 où d’ailleurs un balisage jaune était déjà bien présent. J’ai suivi ce balisage sans difficulté d’abord au milieu de quelques belles villas puis très rapidement sur un itinéraire traversant des vignobles. Plus j’ai avancé et plus le chemin devenait campagnard car verdoyant et bordé d’une magnifique flore en cette belle journée de printemps. La végétation explosait. Après les derniers jours gris et pluvieux, les oiseaux avaient retrouvé le goût de chanter.  Habituellement, si difficiles à photographier, aujourd’hui, ils avaient décidé d’être sympas avec moi et de « prendre la pose » sur les nombreux piquets soutenant les vignes. J’ai même vu deux perdrix rouges courir au milieu des ceps de vignes. Une bifurcation s’est présentée : «Circuit Montner – Força Réal – 3 h ». Flânerie et errements obliges, j’ai mis plus du double mais peu importe, j’adore ça surtout quand je marche seul car j’estime que cette solitude recherchée et non endurée est un privilège. A plusieurs, j’agace tout le monde avec mes arrêts et mes photos à répétition, ce que je peux comprendre.   Droit devant, une colline aux douces formes arrondies et très boisée se détachait dans le ciel bleu. Le randonneur novice aurait pu penser qu’il s’agissait de Força Réal mais au regard de la carte IGN, il n’en était rien et c’était simplement un petit « serrat » du nom de Bach de la Beille. Après, quelques zigzags au milieu des vignes et quelques rampes à la « bonne » déclivité, alternant terre mais également bitume, l’itinéraire est passé à droite de cette colline. Ici, dans la montée, la végétation verdoyante a été peu à peu remplacée par un maquis plus méditerranéen. Sur la droite, le Massif du Canigou et plus loin, la chaîne pyrénéenne ont pointé leurs superbes cimes enneigées. Derrière, l’horizon était barré d’une longue chaîne calcaire qui s’étirait à l’infini : les Corbières. A mes pieds, un patchwork de parcelles agricoles aux formes géométriques disparates partageait l’espace avec quelques bosquets verdâtres. Le tout était ponctué de petits villages blancs aux toitures rouges : Montner bien sûr, mais aussi Latour-de-France et Estagel. A la côte 398, j’ai enfin atteint un premier collet. En réalité, il s’agissait d’une simple plateforme dominant le vallon de la Jasse del Roc servant de marchepied avant la dernière montée vers Força Réal dont j’apercevais déjà l’extrémité du haut pylône de l’antenne TV.  Tout en montant, des panoramas sur une succession des collines bleuâtres se sont entrouverts vers l’est. Finalement, j’ai croisé une première pancarte explicative « Séneçon de Harvey » et quelques secondes plus tard, j’ai coupé la route D.38 montant à Força Réal.  Je venais de découvrir par hasard ce « Sentier botanique et de découverte de Força Réal ». Ici, pour mon plus grand plaisir, l’itinéraire s’est poursuivi tout naturellement sur ce sentier. C’était d’autant plus agréable, que ce sentier était commun avec ma balade et celui montant vers la chapelle que j’ai finalement atteint quelques minutes plus tard. Tout ce que j’avais lu de la magnificence des panoramas était vrai. Seuls, quelques gros nuages venant de la mer empêchaient une vision plus lointaine vers la Méditerranée et les Albères. Vers tous les autres points cardinaux, un grand ciel clair, pur et bleu permettait d’extraordinaires regards de tous côtés. Après avoir fait le tour du superbe ermitage, je suis parti vers le pylône TV, histoire de ne rien manquer de Força Réal. Un Canadair passa à la hauteur du pylône puis disparut, sans doute en provenance de la haute montagne car je n’apercevais aucun feu aux proches alentours. Mon appareil numérique bien rempli de nombreux clichés, je me suis remis en route en direction d’abord du Col del Bou (322 m) puis de celui de la Bataille (265 m). Là, dans la descente, la promenade était presque obligatoire car j’étais toujours sur le Sentier Botanique et tous les  dix mètres, il y avait une pancarte décrivant une nouvelle plante locale. Finalement, il me fallut une heure et quart pour parcourir les 4 kilomètres séparant le sommet de Força Réal du col de la Bataille, c’est dire si je m’étais arrêté plus que de raison. Là, une jolie esplanade avait été aménagée pour arrêter les touristes. Un grand panneau vantait les mérites du Haut-Roussillon, un autre expliquait très brièvement la toponymie de Força Réal puis un autre encore, celui de ce col où l’on pouvait lire « le nom de ce col apparaît dans les archives dès 1293. Il fait référence aux duels judiciaires des temps féodaux ».  Malgré l’intérêt que je portais à ce lieu, je n’étais pas venu jusqu’ici pour cela mais pour deux petites tombes qui se trouvaient quelques mètres plus loin en bordure de la D.38. La vision de ces deux pierres tombales crayeuses et identiques plantées-là, à quelques mètres d’une vigne aurait eu quelque chose d’insolite pour ne pas dire d’irrationnel si je n’avais pas connu la sordide histoire de ce père et de sa fille horriblement assassinés ici même le 10 juillet 1893. Un fait divers qui avait défrayé la chronique dans l’Indépendant de l’époque. Je pouvais lire sur les deux tombes « Ci-gît Trousseu Jacques DCD le 10 juillet 1893 âgé de 66 ans » puis sur l’autre « Ci-gît Trousseu Hortance DCD le 10 juillet 1893 âgée de 23 ans ». Bien sûr, ma curiosité aurait pu sembler macabre mais j’avoue que je n’avais pas cette vision des choses car connaissant un peu l’histoire je vivais plutôt cet instant comme un recueillement. D’ailleurs les mentions sur les tombes ne se terminaient-elles pas par « P.P.L » ou « P.P.E » signifiant « Priez pour lui » ou « Priez pour elle » ? C’était d’autant moins funèbre que ma balade ne s’arrêtait pas là mais continuait en direction de Caladroy où j’étais bien décidé à aller découvrir la « Peyre Drète » et les ruines de son imposante bergerie.  Je poursuivis donc la D.38 jusqu’à un faux menhir entouré d’un « faux » tumulus et là, je pris la piste de droite qui, au travers des vignes, m’entraîna vers ces vestiges. Toujours dans le livre de Victor Aragon, j’avais lu d’étranges choses sur cette « Peyre Drète » désormais brisée et couchée sur le sol : « On le voit, ce n’est pas sans raison que ces hauteurs où se sont livrés tant de combats, gardent, comme témoin mémorable de ces luttes, maintenant oubliées, la pierre druidique, symbole de victoire, élevé depuis des siècles non loin du Coll de la Batalla. » puis il rajoute en annotation :«les hommes de guerre qui, depuis les temps les plus reculés, ont sillonné ce pays et bivouaqué  peut-être autour du men-hir de Caladroer, respectèrent tous ce monument celtique, idôle des Druides et Trophée de Victoire, qui jaillissait du sol à une hauteur de seize pieds et s’y enfonce à une profondeur présumée égale. Pourquoi faut-il que ce curieux monolythe ait été cassé en deux par le fait d’un moderne vandale ou d’une déplorable incurie ? J’ai eu le chagrin de le voir gisant à terre et insoucieusement abandonné. Il serait digne du nouveau propriétaire de Caladroër de faire restaurer la pierre druidique la plus remarquable, à coup sûr, qui existe dans nos contrées ». Bien sûr, Victor Aragon fait allusion à cette « pierre droite » dont certains historiens prétendent qu’elle a longtemps servi de borne ou de limite entre certains territoires comme les diocèses d’Alet et d’Elne et ce, depuis le XIIe siècle. C’était au temps des premiers Rois d’Aragon puis un peu plus tard ceux de Majorque régnant sur le Roussillon. Ce menhir, désormais couché et brisé, est situé en bordure des vignes, sur un petit promontoire, juste après la bergerie qu’on laisse sur la droite. Après la découverte de cette grande pierre pleine d’histoires dont de nombreuses avec un grand « H », il ne me restait plus qu’à partir visiter l’ancienne bergerie mais un vigneron que je venais de croiser m’en dissuadât affirmant que déambuler dans ces ruines était bien trop risqué. Un panonceau « Danger - Défense d’entrer » me convainc définitivement d’y renoncer. Je me suis donc contenté de la regarder et de la photographier de loin. Il ne me restait plus qu’à retourner au col de la Bataille où après avoir emprunté une petite route vicinale asphaltée, j’ai retrouvé le « Circuit Montner - Força Réal ». Là, dans un champ, je pris le temps de m’arrêter sous des amandiers pour déjeuner. Quand je suis reparti, mon sac à dos s’était allégé de mon casse-croûte mais en contrepartie, il s’était bien plus alourdi de quelques kilos d’excellentes amandes séchées à point. Malgré l’asphalte, l’itinéraire du retour vers Montner fut très agréable. Le vignoble et les terres labourées permettaient de jolies visions lointaines de tous côtés et notamment vers Força Réal où la quasi totalité des nuages avait disparu. A l’approche du village, l’asphalte laissa la place à un chemin creux,  herbeux rafraîchissant et souple à souhaits et encore plus plaisant à cheminer. A l’entrée de Montner, de vieux puits, un coup à gauche et un coup à droite du Ruisseau de la Foun aiguisèrent une dernière fois ma curiosité. Mais il était temps d’en finir car avec mon sac à dos chargé d’amandes et sous un chaud soleil d’avril, la dernière montée vers le haut du village fut plutôt laborieuse. J’avais erré et flâné un peu plus de 6 heures pour parcourir 18 kilomètres sur un dénivelé plutôt modeste de 390 mètres environ mais des montées cumulées de 815 mètres. Bien sûr, rien ne vous obligera à parcourir le même circuit que le mien et en vous en tenant à celui intitulé « Circuit de Montner – Força Réal » vous pourrez raccourcir la distance d’un peu plus de 4 kilomètres. Carte IGN 2448 OT Thuir – Ille-sur-Têt Top 25.

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  • Il faut bien le reconnaître nos « grands » élus sont une caste d’Intouchables trop souvent irrespectueux de leurs propres électeurs. Bien sûr, on pourrait croire qu’au sein de nos différentes assemblées nationales, parlementaire ou sénatoriale, il y a des majorités bien établies mais quand il s’agit de se serrer les coudes, nos élus qu’ils soient de gauche ou de droite ne font qu’un ou presque. Presque, car il y a quelques exceptions mais elles sont si rares qu’on se demande parfois si elles sont sincères et ne sont pas là uniquement pour se faire un peu de pub en vue de prochaines élections. En tous cas, ces exceptions rentrent dans le rang (de leur parti) dès qu’elles veulent montrer trop bruyamment leur différence ou simplement faire entendre leurs voix. Quand au centre et aux extrêmes, le système électoral français est si parfaitement verrouillé par la gauche et la droite qu’ils n’ont aucun pouvoir de décision ni d’inflexion sur les lois à voter. Après le tintamarre monstre autour du mariage pour tous où des milliers de français sont descendus dans la rue, inutilement il faut bien le dire ; car le vote de la loi était couru d’avance ; j’ai le sentiment que ces « mafias parlementaires » ; il faut bien appeler un chat, un chat ; laissent une immense partie des français complètement indifférente. J’ai la vague impression qu’être pris pour un « con d’électeur » comme le disait feu Georges Frêche, ça n’intéresse pas la plupart des votants que nous sommes. En effet, concernant nos élus, alors qu’une majorité de français sont pour l’inéligibilité « à titre définitif » en cas d’actes délictueux, pour le non-cumul de leurs mandats et pour la publication de leur patrimoine, nos parlementaires ont récemment rejetés en bloc ces trois projets de loi. Ils y ont mis la manière, histoire de duper un peu plus les français. C’était il y a quelques jours. Trois projets de loi qui auraient pu pourtant constituer les premiers fondements d’une nouvelle démocratie indispensable et surtout souhaitable et souhaitée par une majorité de français. Et bien non, nos députés n’ont rien à foutre de l’avis de leurs électeurs, ils n’ont rien à cirer de la volonté des français et ils ont voté à une confortable majorité contre le projet de loi soutenu par le gouvernement Ayrault qui visait à rendre inéligible à vie les élus condamnés à des délits ou à des infractions contraires à la morale publique. Parmi ces faits délictueux, citons la corruption, le détournement d’argent public, le blanchiment, le trafic d’influence, les conflits d’intérêts, la fraude fiscale, sociale ou électorale, le favoritisme, etc.…enfin tous ces actes qui sont légion et font l’actualité de nombre de nos élus et la une de nos médias à longueur d’années. La peine d’inéligibilité a été ramenée à 10 ans au maximum, c'est-à-dire à « peanuts » quant on sait les délais incroyablement longs que notre Justice peut mettre parfois pour condamner un élu. Souvenons-nous de quelques affaires comme celle des emplois fictifs de la Mairie de Paris qui a mis plus de 12 ans avant d’être définitivement jugée en 2011 mais dont les premiers faits remontent à 1993 c'est-à-dire à presque 20 ans auparavant. Chirac a eu pendant ce laps de temps, tout loisir, de rester maire de Paris, président de son parti, ministre et député plusieurs fois et même bénéficiant d’une immunité pénale, d’être élu par deux fois président de la République, avant d’être reconnu coupable en 2011. Rappelons-nous d’autres affaires déjà très anciennes qui ont encore cours de nos jours ; Karachi, Bettencourt, Tapie pour ne parler que des plus médiatiques mais il y en a bien d’autres ; ce qui n’empêche pas certains de nos élus, mis en examen, de siéger dans ces « honorables » assemblées et d’autres hommes ou femmes d’avoir de hautes fonctions de gestion avec l’aval de nos gouvernants français voire parfois mondiaux. Oui, nos élus français sont irrespectueux de leurs électeurs car le non-cumul des mandats a été voté le 4 juillet mais avec une date d’entrée en vigueur en 2017 pour les parlementaires ou en 2019 pour ceux siégeant à l’Europe, le tout avec cette fois-ci, l’aval de l’Etat et du gouvernement, histoire de ne pas froisser d’innombrables amis qui étaient contre ce projet voulu par François Hollande. 2017, ça laisse pas mal de temps pour le modifier voire le supprimer. Quand à l’idée d’interdire l’exercice de plus de trois mandats d’affilée, elle a été carrément jetée aux oubliettes. Enfin la publication systématique et certifiée sincère du patrimoine de nos élus a été avortée avant même que d’avoir existé. En effet, les sénateurs ont changé d'avis. Ils avaient, dans un premier temps, voté pour l'amendement prévoyant la publication du patrimoine des élus puis vendredi 12 juillet, ils ont décidé de rejeter l’article 1 du projet de loi sur la transparence de la vie publique, dans lequel avait pris place l’amendement en question, faisant ainsi tomber la disposition. Pourtant, la plupart de ces lois ou principes égalitaires ont cours dans certaines grandes démocraties européennes, alors pourquoi sont-elles impossibles quand il s’agit de la France ? Pourtant, outre ces lois qui auraient du être votées sans coup férir pour satisfaire les français, la France a tant à faire pour devenir autre chose qu’une caste d’Intouchables, qu’une assemblée de mafieux voire autre chose qu’une république bananière. Au moment où l’on nous bassine sans arrêt avec la crise, avec les déficits abyssaux qu’on nous demande de combler au plus vite, nos élus ne devraient-ils pas être les premiers à montrer l’exemple. Des exemples et des idées, ils n’en manquent pourtant pas pour réduire le déficit d’une France qui deviendrait publiquement irréprochable: d’abord, lever l’irresponsabilité pénale du chef de l’Etat pour tous les faits répréhensibles et non pas pour le seul fait de « Haute Trahison » comme c’est le cas aujourd’hui. Puis on pourrait juger les élus soupçonnés de délits en comparution immédiate comme on est capable de le faire avec d’autres voyous. Puis ces mêmes élus pourraient diminuer leurs rémunérations ou bien ne pas les additionner dans le cas de mandats multiples, ils pourraient les plafonner quand ils disposent d’appointements personnels et privés. Puis, ils pourraient changer leurs retraites exorbitantes et très avantageuses et les aligner avec celle du citoyen lambda pour montrer leur solidarité. Puis, ils pourraient supprimer quelques couches administratives qui s’amoncellent au lieu de se réduire au fil des années (communes, cantons, communautés de communes, départements, préfectures, sous-préfectures, conseils régionaux, conseils généraux, Assemblée Nationale, Sénat, Conseil constitutionnel, Cour des comptes, commissions diverses et variées du style SIVU, SIVOM et j’en oublie sûrement encore beaucoup, payées néanmoins avec nos impôts qui sont déjà les plus lourds du monde parmi les pays dits développés. Sans oublier, dans cet énorme millefeuille national, quelques couches supplémentaires également françaises au niveau de l’Europe. Ces strates politiques sont de plus en plus nombreuses mais ce n’est pas pour autant que la France va mieux, bien au contraire. La France va de plus en plus mal et s’enfonce dans la crise avec un pourcentage de chômeurs jamais égalé. Le Français ne voit pas bien les intérêts qu’il y a à ce gros millefeuille et à toutes ces couches superposées de soi-disant décideurs politiques, pour ne pas dire à tous ces clans hors mis celui d’engraisser des gens, pour la plupart, déjà très bien payés et qui le plus souvent ont un job personnel et privé en sus de leur(s) mandat(s) d’élu(s). Enfin, on pourrait mettre fin à cette hégémonie du politique indéboulonnable en alignant toutes les élections au scrutin majoritaire à un tour ce qui supprimerait définitivement toutes ces magouilles électorales entre les tours. Un élu qui ne respecte pas ses électeurs serait jugé sur ses résultats ce qui est loin d’être le cas de nos jours, parfois élus par ses propres pairs comme c’est le cas des sénateurs et de bien d’autres aréopages.

    Si l’on écoute nos principaux gouvernants et élus, la France va très mal. Il en va de même de l’Europe. A gauche comme à droite, tous nos hommes politiques éprouvent les pires difficultés à trouver des solutions pour inverser cette tendance mais ils sont tous solidaires et d’accord sur un point : que surtout rien ne change jamais pour eux !

    Alors que faire pour changer ça ?

    En tous cas, voilà pour moi, une bonne raison que me ferait descendre dans la rue !

     

    (*) A ce propos, je vous renvoie vers une étude très intéressante du Cri du Contribuable qui s’intitule « la France croule sous ses 601.132 élus ». Elle date un peu car elle est d’ août 2011 mais comme depuis rien n’a vraiment changé, elle reste d’une actualité criante de vérité.  


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